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. 272. Réclamation à la Commission

Produit sa réclamation sur le formulaire prescrit

Le formulaire prescrit n'est pas obligatoire

Dionne et Simard & Beaudry inc., C.A.L.P. 33779-60-9111, 25 avril 1995, M. Cuddihy.

Le fait que le travailleur ait transmis dans le délai une lettre à la CSST détaillant sa réclamation plutôt que le formulaire prévu à cette fin qu'il lui fait parvenir plus tard, ne doit pas lui faire perdre ses droits.

Metal Laurentide inc. et Rodrigue, C.L.P. 101407-03-9806, 23 novembre 1998, M.-A. Jobidon.

La lettre adressée par le médecin du travailleur demandant l'ouverture d'un dossier au nom de celui-ci et indiquant qu'une expertise serait produite advenant une aggravation de la surdité du travailleur peut être assimilée à une réclamation produite en vertu de l'article 272.

Wal-Mart Canada inc. et Lamontagne, C.L.P. 149724-03B-0011, 8 mars 2001, M. Cusson. 

En l'espèce, il est en preuve que la travailleuse a produit à l'employeur, dès le mois d'avril 1998, les rapports médicaux concernant son syndrome du canal carpien bilatéral et que celui-ci les a acheminés à la CSST, et ce, dans les 24 heures de la réception de ces rapports. Le tribunal est d'avis que le dépôt par la travailleuse des rapports médicaux CSST auprès de son employeur alors qu'elle n'était pas en arrêt de travail, s'apparente à son obligation de produire une réclamation dans les six mois de l'existence d'une maladie professionnelle. La travailleuse a complété une réclamation dès qu'il a été question d'intervention chirurgicale. Enfin, le tribunal s'interroge sur le fait que la CSST n'ait pas donné suite au dépôt des différents rapports médicaux acheminés par l'employeur.

Fréchette et127798 Canada inc., 2011 QCCLP 8096.

Le formulaire de Réclamation du travailleur a effectivement été reçu à la CSST, en avril 2010, il faut cependant noter que dès le mois de mars 2010, la CSST avait reçu un rapport d’évaluation médicale concernant le travailleur et faisant état d’une atteinte permanente. Les tribunaux supérieurs ont rappelé à plusieurs reprises qu’un formalisme outrancier ne devait pas faire perdre des droits à un requérant. Dès le mois de mars 2010, la CSST était informée que le travailleur était porteur d’une surdité professionnelle laquelle entraînait une atteinte permanente. La CSST ayant reçu le rapport d’évaluation médicale du travailleur dès le mois de mars 2010, elle aurait pu communiquer avec le travailleur afin de lui demander de produire ladite réclamation.

Simon et Affinerie canadienne Cuivre (Fermée), 2012 QCCLP 6337.

Le fait, pour le travailleur, de transmettre ses rapports médicaux à la CSST correspondait, pour lui, à une demande d’ouverture de dossier. Dans un contexte de justice administrative, le tribunal s’explique mal que la CSST, recevant des documents médicaux sur lesquels il est fait état d’une lésion professionnelle, ne communique pas avec le travailleur pour obtenir les précisions dont elle a besoin ou pour lui indiquer qu’un formulaire de réclamation doit accompagner ces documents médicaux. Il appert que la CSST évite de rendre une décision en ne donnant pas suite à l’envoi de documents qu’elle ne juge pas conformes à la procédure puisque n’étant pas accompagnés du formulaire de réclamation. Cela revient à rendre une décision défavorable au travailleur puisque ce dernier se fera éventuellement opposer son défaut d’avoir produit un formulaire de réclamation en temps opportun et verra son éventuelle réclamation rejetée pour ce motif. Cette façon de faire est contraire à l’esprit de la justice administrative et à la Loi sur la justice administrative.

Grands Travaux Soter inc. et Poulin, 2013 QCCLP 969.

Malgré que le travailleur ne complète pas à l’époque une réclamation sur le formulaire prescrit, il remet à son employeur une copie d’une attestation médicale sur un formulaire CSST, de même qu’un formulaire d’assignation temporaire dûment complété. On ne peut prétendre que le travailleur n’a fait aucune démarche afin de faire reconnaître qu’il était incapable de faire son travail régulier en raison d’une lésion d’origine professionnelle. De plus, le témoignage crédible du travailleur démontre que ce dernier croyait sincèrement que de transmettre l’attestation médicale à son employeur était la chose à faire, étant donné l’absence d’arrêt de travail, et qu’il revenait dès lors à son employeur de faire les démarches appropriées à la CSST. Le défaut pour le travailleur de ne pas utiliser le formulaire prescrit par la CSST n’emporte pas la déchéance du droit. En effet, le formalisme entourant l’exercice d’un droit ne doit pas primer au point de faire perdre un droit au travailleur.

Perron-Dionne et Marché Clément des Forges inc., 2014 QCCLP 2695.

La travailleuse n'a pas produit de réclamation sur le formulaire prescrit par la loi. Celle-ci a plutôt été déposée par l'employeur qui a produit un Avis de l'employeur et demande de remboursement. Dans le but d'éviter un excès de formalisme, le tribunal considère que la réclamation de la travailleuse a été produite par l'employeur.

Le formulaire prescrit est obligatoire

Siano et Alimentation Somerled inc., C.A.L.P. 61977-60-9408, 12 janvier 1996, M. Zigby.

Le premier certificat médical transmis à la CSST l'a été plus de six mois après la connaissance d'une relation possible entre la maladie et le travail. Par ailleurs il n'est pas certain que ce certificat médical puisse tenir lieu de réclamation, puisqu'il s'agit d'une première réclamation pour maladie professionnelle, qu'aucun dossier n'est ouvert à la CSST concernant la travailleuse et que ce rapport ne faisait pas mention de la possibilité d'une maladie professionnelle.

Beaudoin (Succession) et 2858-0702 Québec inc., 2014 QCCLP 2859.

Dans certains cas, lorsqu'un dossier est déjà ouvert et reconnu, le simple dépôt d'une lettre ou d'un autre document, qu'il soit de nature médicale ou autre, peut constituer une réclamation valable. Par contre, dans le présent dossier, il s'agit d'une réclamation initiale et il n'y avait aucun dossier ouvert. Le simple dépôt d'un rapport médical n'est pas suffisant pour ouvrir un dossier. Comme il s'agit d'un nouveau dossier, la CSST ne possède aucune information ni aucune coordonnée pour contacter le travailleur. Le tribunal conclut que la réclamation était nécessaire pour l'ouverture du dossier et qu'elle a été soumise en dehors des délais prévus par la loi.

Pelletier et Cap-Chat Hydraulique inc., 2016 QCTAT 6369.

En l'espèce, le travailleur a rencontré l'otorhinolaryngologiste le 20 janvier 2015 et ce dernier lui a confirmé qu'il était atteint d'une surdité professionnelle. Le tout a été à nouveau confirmé par la production d'une attestation médicale du médecin qui a charge, le 3 février 2015, qui retient le diagnostic de surdité professionnelle. Ainsi, c'est à compter du 20 janvier 2015 que le délai prévu à l'article 272 a commencé à courir. La réclamation du travailleur, signée le 27 octobre 2015 et reçue à la CSST le 5 novembre 2015, a donc été déposée à l'extérieur du délai prévu par la loi. À cet égard, le travailleur prétend que puisque la CSST a reçu une copie du rapport médical le 10 février 2015, cela serait suffisant pour constituer la réclamation. Or, il ressort d'une revue de la jurisprudence que le simple dépôt d'un rapport médical n'est pas suffisant pour ouvrir un dossier lorsqu'il s'agit d'une nouvelle réclamation. En l'espèce, il y a lieu de se questionner quant au délai dans lequel la CSST a agi. En effet, depuis le 10 février 2015, elle avait en main une attestation médicale faisant état d'une surdité professionnelle et malgré cela, elle a attendu jusqu'au 15 octobre suivant pour faire parvenir une demande de renseignements au travailleur, jugeant alors nécessaire la production d'une réclamation pour le traitement de son dossier. Un tel comportement ne doit pas être préjudiciable pour le travailleur.

La notion de connaissance

Cheminement intellectuel constitué de plusieurs éléments

Institut Armand Frappier et Pontbriand (Succession), [1998] C.L.P. 318.

En mai 1991, le travailleur, un technicien de laboratoire, est informé lors d'une analyse de son sang faite à l'occasion d'un don de sang qu'il est séropositif. Il est alors soumis à une batterie de tests, à la suite desquels, en octobre 1992, on identifie le virus de l'immunodéficience acquise (VIH). En janvier 1993, les premiers symptômes apparaissent et en mars 1993, il dépose une réclamation à la CSST. Dès le mois de juillet 1991, le travailleur savait qu’il était séropositif et déjà, dans ses explications aux médecins, il plaçait l’origine de sa maladie à l’emploi occupé chez l’employeur. C’est donc à cette époque qu’il a eu connaissance de sa maladie et de la possibilité d’un lien avec son travail.

Lapointe et Bétonnière Crête inc., C.L.P. 94247-04-9802, 2 juin 1998, M. Carignan.

En mai 1997, le travailleur soumet à la CSST une réclamation alléguant qu'il souffre de surdité professionnelle. En juin, il produit un document portant sa signature dans lequel il admet que sa surdité remonte à 1992 et qu'il savait à ce moment-là qu'elle était d'origine industrielle. Le délai de six mois prévu à l'article 272 commence à courir à compter de la connaissance du travailleur qu'il peut être atteint d'une maladie professionnelle. La connaissance a lieu lorsque le travailleur fait une relation possible entre sa maladie et son travail. En l'espèce, il est clair que le travailleur savait depuis 1992 que sa surdité pouvait être causée par son travail dans la construction.

Forget et Salon de coiffure Forest, C.L.P. 105900-71-9807, 30 mars 2001, L. Crochetière.

La travailleuse, technicienne en coloration, a cessé de travailler en 1996 et a fait une réclamation en assurance-invalidité auprès de sa compagnie d'assurance. Plusieurs diagnostics ont été posés, notamment celui de céphalée de tension et d'allergies multiples. En décembre 1996, un diagnostic de cervicalgie occipitale est posé et la travailleuse produit une réclamation à la CSST en mars 1997. La réclamation de la travailleuse est recevable, car elle n'a acquis la connaissance de la possibilité d'une relation causale entre sa maladie et son travail qu'au moment où sa compagnie d'assurance lui a écrit en mars 1997 pour l'informer que sa réclamation devrait être adressée à la CSST.

Mongeon et Clinique dentaire Roy & Tremblay, C.L.P. 342552-08-0803, 13 février 2009, C. Bérubé.

La travailleuse, une assistante dentaire, avait connaissance de la relation entre sa symptomatologie au cou, soit une cervicobrachialgie ou une cervicalgie et son travail puisqu’elle établissait elle-même cette relation. Elle en avait d'ailleurs discuté avec ses employeurs et les professionnels de la santé consultés, dont un qui l'incitait à déposer une réclamation à la CSST, et ce, dès 2003. La réclamation déposée en octobre 2007 ne respecte pas le délai de six mois.

Harvey (succession) et Groupe Alcan Métal primaire, C.L.P. 334443-02-0711, 23 février 2009, R. Bernard.

La présence d’une opinion médicale établissant un lien entre un diagnostic et le travail est certes souhaitable. Elle n’est cependant pas une condition sine qua non pour établir qu’il a été porté à la connaissance d’un travailleur ou de son bénéficiaire que la maladie en question peut avoir un lien avec le travail. Dans certains cas, comme en l’espèce, une telle exigence vicierait l’intention du législateur. La judiciarisation des réclamations d’autres collègues du travailleur et la médiatisation du contentieux appréciées dans leur ensemble, dans le contexte particulier du Saguenay-Lac-Saint-Jean, étant donné l’importance de l’entreprise Alcan dans cette région, permettent d’inférer une connaissance de la part de la succession, d’un lien possible entre le cancer du poumon et le travail effectué chez cet employeur, et ce, depuis le décès du travailleur.

Garrett et Sonaca Canada inc., C.L.P. 387358-64-0908, 10 mars 2010, R. Daniel.

En 2009, le travailleur présente une réclamation pour un syndrome du canal carpien. Il a alors avoué qu'il savait que ses problèmes d'engourdissements aux mains étaient reliés au travail effectué en 2002. Il a, en outre, reconnu que les attelles qu'il a portées avaient diminué les engourdissements, lesquels avaient totalement disparu lorsqu'il a changé d'emploi. La prétention selon laquelle il n'y a pas eu de confirmation médicale d'une relation entre sa lésion et le travail accompli est insuffisante pour conclure qu'il n'avait pas la connaissance d'une relation plus que probable entre son travail et sa lésion. En outre, selon le registre des accidents de 2002, il est clair qu'un lien était reconnu puisqu'il est fait mention de mouvements répétitifs. Or, selon la jurisprudence, le point de départ du délai prévu à l'article 272 est le moment où un travailleur a connaissance d'être atteint d'une maladie professionnelle. Le travailleur avait, en 2002, une connaissance suffisante pour établir une relation entre son travail et la lésion diagnostiquée. 

Succession Smith et Couverture West Island 1985 inc., 2011 QCCLP 4440.

La succession prétend que le travailleur est décédé d'une maladie professionnelle pulmonaire. Le jour du décès, un médecin a informé la famille que le travailleur était porteur d'un mésothéliome. Alors que la veuve du travailleur affirme qu'elle n'est pas en état d'entendre quoi que ce soit à ce moment-là, elle précise que le médecin a mentionné qu'un pourcentage important de cas de mésothéliome sont causés par l'amiante. Ainsi, connaissant la nature du travail qu'effectuait son époux, la veuve du travailleur était dès lors en mesure d'établir une relation entre ce travail et le diagnostic posé le jour du décès. Or, près de 10 mois se sont écoulés entre cette date et le jour de la réception de la réclamation de la succession par la CSST. Dans ce contexte, le délai prévu à l'article 272 n'a pas été respecté et la succession a déposé sa réclamation à l'extérieur de ce délai.

Trépanier (Succession) et Commission de la santé et de la sécurité du travail,2012 QCCLP 6988.

Le délai pour produire une réclamation à la CSST a débuté lorsque la succession a reçu le rapport d’autopsie en janvier 2009, puisqu’elle avait à ce moment assez d’éléments pour lui permettre d’avoir la conviction que le travailleur était porteur d’une maladie professionnelle ou qu’il en est décédé. En effet, la succession savait que le travailleur avait œuvré dans l’industrie de l’amiante pendant de nombreuses années. Dans son rapport d’autopsie faisant suite à l’examen des poumons du travailleur en novembre 2008, le médecin conclut à une bronchopneumonie aiguë sévère et multifocale contribuant au décès. Il ajoute un point important lorsqu’il suspecte une maladie vécue sous forme d’amiantose. En ne soumettant la réclamation au nom de la succession qu'au mois de juin 2011, la veuve du travailleur se trouve à s’exécuter en dehors du délai de six mois prévu à l’article 272.

Suivi :

Révision rejetée, 2013 QCCLP 3762.

Requête en révision judiciaire rejetée, 2014 QCCS 356.

M.R. inc. (Supermarché Mont-Joli) et Fournier,2013 QCCLP 6810.

Bien que les diagnostics aient été posés à l'automne 2011 et que la travailleuse ait cessé de travailler en octobre 2011, rien dans la preuve ne permet de conclure qu'il avait été porté à la connaissance de cette dernière que sa maladie relevait de son travail. En effet, de simples soupçons de sa part ne suffisent pas pour conclure en ce sens. Par ailleurs, il y a lieu de privilégier une interprétation qui favorise l'exercice des droits plutôt que l'inverse. Aussi, au moment où la travailleuse a été informée par l'agente d'assurances, en mars 2012, d'un lien possible avec le travail, elle a effectué les démarches dans le délai de six mois.

Comm. scolaire Région-de-Sherbrooke et Laliberté,2013 QCCLP 7299.

Dans les notes de consultation des 23 février 2009, 11 novembre 2009 et 27 octobre 2010, le médecin souligne que la travailleuse exerce l’emploi d’enseignante au niveau primaire. Par contre, l’otorhinolaryngologiste n’incrimine pas le travail et ne fait jamais référence à la CSST. Tout au plus, dans sa note du 27 octobre 2010, elle écrit que l’histoire de dystonie est « associée à des nodules des cordes vocales » sans cependant dire ce qui peut avoir causé cette affection. Du reste, lors des consultations médicales, la travailleuse a raconté que le médecin lui a donné des conseils applicables en toutes circonstances, comme humidifier son appartement, boire de l’eau, éviter de parler fort, etc. Elle ne pouvait donc en déduire que ses activités professionnelles étaient la cause de la maladie. Quant à l’évaluation en orthophonie, nulle part il n’est avancé que la lésion est attribuable au travail ou que la CSST devrait être saisie du cas. La CLP retient que c’est après avoir discuté avec une collègue, en janvier 2011, que la travailleuse a réalisé qu’elle était potentiellement atteinte d’une lésion professionnelle. Ayant alors acquis une connaissance suffisante, elle devait déposer sa réclamation dans les six mois. 

Jean et Constructions Louisbourg ltée, 2014 QCCLP 1712.

La preuve démontre que le travailleur se savait porteur de problèmes aux épaules depuis l'année 2009. Lors de son témoignage, il affirme que déjà à cette époque, il savait que ceux-ci étaient en lien avec son travail. Il ne pouvait voir autre chose. D'ailleurs, les douleurs fluctuaient en fonction de ses activités professionnelles. Lorsqu’il était en congé, celles-ci étaient peu présentes et elles s'activaient lors d'un retour au travail. Dès 2009, il en parle à son employeur. La preuve médicale au dossier révèle que le travailleur est déjà porteur d’un syndrome d’accrochage à l’épaule droite en 2010. En 2011, un médecin, en lien avec les douleurs aux épaules du travailleur, note que ces dernières sont souvent utilisées au travail. Ainsi, le tribunal estime que le travailleur a eu connaissance d’un lien entre son travail et ses douleurs aux épaules depuis plus d’un an avant sa réclamation.

Perron-Dionne et Marché Clément des Forges inc.,2014 QCCLP 2695.

Le point de départ de la computation du délai se situe lorsque la travailleuse sait, de façon probable, que sa maladie peut être reliée à son travail. Dans le présent dossier, le délai de l’article 272 a commencé à courir, au moins, à partir du 28 décembre 2011, date où une Attestation médicaleCSST a été dûment remplie par le médecin et remise à la travailleuse. Un formulaire d’Assignation temporaire d’un travail conçu par la CSST a également été rempli à cette même date. De plus, la travailleuse a confirmé à l’audience qu’elle savait dès les premières consultations avec son médecin que l’épicondylite dont elle souffrait pouvait être reliée à son travail. La réclamation de la travailleuse produite en septembre 2012 est donc tardive.

Émond et Carle Ford inc., 2015 QCCLP 1634.

Le tribunal considère que le délai de l'article 272 commence à courir au moment où il est porté à la connaissance du travailleur qu'il est atteint d'une maladie professionnelle. En l'espèce, il est vrai que les notes médicales de 2006 font état que le travailleur utilise un marteau et des outils pneumatiques et qu'il est exposé a des vibrations. Toutefois, le médecin retient l'impression de Raynaud et de problèmes à l'épaule droite, soit une bursite sous-deltoïdienne. La note du médecin est une appréciation au sujet des informations concernant le travailleur et ne fait pas la preuve de la connaissance par ce dernier du lien entre ses maladies et son travail. Il n'est pas mentionné par le médecin qu'il discute de cela avec le travailleur ou qu'il l'informe de l'étiologie possible de ses pathologies. Le travailleur, après en avoir parlé à un ami qui connaissait un ami qui avait le même problème et après avoir consulté Internet, a compris que ses problèmes ne venaient pas de la conduite de sa moto, puisque ses symptômes étaient déjà présents à ce moment-là. Ce n'est que le 6 août 2013 qu'il a été porté à la connaissance du travailleur qu'il existait un lien entre sa maladie, soit le phénomène de Raynaud, et son travail. En effet, la note médicale de son médecin indique que c'est à ce moment que ce dernier a une longue discussion avec le travailleur, qui lui demande alors de lui fournir un document CSST.

Tardif et St-Hyacinthe Chrysler Jeep Dodge inc., 2016 QCTAT 7011.

En l'espèce, les douleurs à l'épaule droite du travailleur n'ont pas commencé en 2015, mais bien avant, et il serait irréaliste de penser que le travailleur n'avait pas associé à son travail l'apparition de ses douleurs aux épaules avant que son médecin de famille ne lui remette un certificat médical en ce sens en avril 2015. En effet, on ne peut accorder de valeur prépondérante à l'information médicale fournie par le médecin de famille du travailleur le 30 avril 2015 quant à la relation qui aurait alors été établie entre la maladie du travailleur à son épaule droite, diagnostiquée comme une bursite, et son travail, puisque cette maladie avait été diagnostiquée par ce même médecin bien avant cette date. Même si, à sa note de consultation du 29 octobre 2013, ce médecin n'a pas posé expressément le diagnostic de bursite à l'épaule droite, elle en a décrit les symptômes et son examen clinique en a révélé des signes, soit des pertes d'amplitude. Ainsi, elle était manifestement en présence d'une «maladie» à l'épaule droite du travailleur pour laquelle elle a procédé à un traitement par infiltration. Le fait que ce  médecin de famille n'ait pas expliqué au travailleur à cette date ni le 3 avril 2015, en quoi sa pathologie à l'épaule droite pouvait être en relation avec son travail n'est pas déterminant. Il est indéniable que le travailleur savait depuis au moins octobre 2013 que ses problèmes à l'épaule droite découlaient de son travail. Dans cette mesure, le travailleur n'avait pas besoin de se faire confirmer par son médecin, en avril 2015, que sa maladie à l'épaule droite découlait de son travail. Le Tribunal retient donc que le 29 octobre 2013, le travailleur a pris connaissance du fait que sa maladie à l'épaule droite était attribuable à son travail et le délai de six mois prévu à l'article 272 commençait à cette date.  

Vigneault et Rio Tinto Fer et Titane inc. (Div. Mines), 2018 QCTAT 1055.

En l’espèce, il est clair qu’en mai 2014 le travailleur fait le lien entre sa maladie de doigts en gâchette et le travail de boutefeu qu’il effectue chez l’employeur. Ce diagnostic a été posé dès le printemps 2013 et lors d’un suivi en orthopédie, il indique au médecin qu’il fait le lien entre sa lésion et son travail. De plus, le travailleur remplit un formulaire de réclamation avec l’infirmière chez l’employeur qui l’invite à obtenir un certificat médical pour appuyer sa demande. Cependant, le travailleur ne déposera sa réclamation qu’en octobre 2015 pour des considérations personnelles. Cette réclamation est donc hors délai.

Pathologie identifiée et/ou avis médical sur la relation

Gauvin et Ville de Montréal, [1992] C.A.L.P. 406.

Il faut qu'une maladie soit identifiée pour qu'on puisse en relier la cause au travail effectué. En l'instance, ce n'est que le 5 octobre 1987 qu'un médecin confirmait la vraisemblance d'une névrite cubitale et qu'il reliait cette maladie au travail effectué par le travailleur. Le travailleur avait donc jusqu'au 5 avril 1988 pour produire sa réclamation.

Les Entreprises G.N.P. inc. et Cegelec Entreprises, [1996] C.A.L.P. 1273.

Dès 1990, le médecin du travailleur soupçonnait une surdité professionnelle, mais ne disposait d'aucune évaluation audiologique. En 1993, le travailleur consulte un otorhinolaryngologiste qui lui fait passer un examen otologique et recommande un test d'audition. Bien que le travailleur ait soupçonné dès 1990 l'origine professionnelle de sa surdité, seule une investigation par un spécialiste pouvait permettre de déceler une courbe de surdité compatible avec une exposition au bruit. Ce n'est donc qu'en juin 1993 qu'il fut porté à la connaissance du travailleur qu'il souffrait d'une maladie professionnelle. La réclamation produite le 12 juin 1993 est donc dans le délai.

Dufour et Produits Forestiers J.V., C.L.P. 319518-31-0706, 18 avril 2008, C. Lessard.

La consultation effectuée par le travailleur le 3 mai 2006 l'a été en raison de douleurs ressenties à son épaule depuis environ deux mois et n'a consisté qu'à traiter des symptômes. Ce n'est que le 19 septembre 2006 que le diagnostic de tendinite de l'épaule a été émis pour la première fois. Ensuite, ce n'est que lors de la consultation du 29 novembre 2006 qu'il y a eu discussion quant à la nature des tâches accomplies à son travail et la problématique pouvant être à l'origine de la maladie diagnostiquée. Le diagnostic retenu a été celui de tendinopathie de l'épaule et une attestation médicale a été remplie. Le travailleur a produit sa réclamation le jour même. Bien qu'il ait reconnu avoir été convaincu de la relation depuis l'apparition de ses douleurs, au printemps 2006, il n'en demeure pas moins qu'il ne s'agit que de soupçons puisque la relation n'avait pas été confirmée par un avis médical. Que le délai soit computé à partir du 19 septembre ou du 29 novembre, la réclamation a été déposée à l'intérieur du délai.

Saputo, Groupe Boulangerie inc. (Usine Vachon) et Mathieu, C.L.P. 335398-03B-0712, 17 décembre 2008, M. Cusson.

Pour qu’un travailleur ait connaissance d’être atteint d’une maladie professionnelle, il doit détenir un diagnostic de surdité et avoir été informé de la relation possible ou probable entre ce diagnostic et son exposition dans son milieu de travail. Il faut plus qu’une simple conviction personnelle. Depuis 1970, le travailleur consulte à plusieurs reprises des professionnels de la santé pour une baisse d’audition et subit des tests. Toutefois, ce n’est qu’en mars 2007 qu’il est porté à sa connaissance qu'il pouvait être atteint d’une surdité dont l’origine pouvait être son exposition au travail, lors d'une consultation médicale faisant suite à une investigation audiométrique ayant révélé la contribution probable de l'exposition professionnelle au bruit à sa surdité.

Laliberté & Associés inc. et St-Louis, C.L.P. 298396-64-0609, 17 avril 2009, M. Montplaisir.

Puisque l'article 272 fait référence au concept de maladie professionnelle, la connaissance dont il est question doit manifestement avoir trait au savoir médical, d’où l’introduction de la notion selon laquelle la connaissance qu’il est atteint d’une maladie professionnelle doit être portée au travailleur par le biais d’un avis en provenance d’un professionnel de la santé. En l’espèce, la réclamation a été déposée dans le délai de six mois prévu à la loi, puisqu’il a été porté à la connaissance du travailleur qu’il était atteint d’un syndrome du canal carpien le 24 novembre 2005. Le 15 juillet précédent, le médecin n’émet qu’une hypothèse diagnostique, qui a été confirmée par le résultat de l’étude électromyographique réalisée le 14 novembre. Il y a une nuance à faire entre la connaissance du fait que l’on ressent des engourdissements aux mains et celle que l’on est atteint d’une maladie diagnostiquée comme un syndrome du canal carpien bilatéral sévère.

Paré et Forestiers Paré Boily inc.,2013 QCCLP 1899.

La preuve révèle que dès le 14 janvier 2005, la docteure a posé, à la suite d’un test auditif, le diagnostic de surdité professionnelle bilatérale. Des attestations médicales pour la CSST ont dès lors été complétées par ce médecin. De plus, tant les notes de consultation de la docteure prises en 2005 que le témoignage du travailleur confirment clairement que dès cette époque, il a été porté à la connaissance de ce dernier que sa surdité pouvait être d’origine professionnelle. Selon les notes de consultation du 14 janvier 2005, une réclamation pour la CSST a même été remise au travailleur, et ce, avec explications. De ces éléments, force est de conclure que dès le 14 janvier 2005, une surdité a été diagnostiquée chez le travailleur et il a été porté à la connaissance de ce dernier que cette surdité pouvait être d’origine professionnelle. Le délai de six mois pour produire une réclamation à la CSST prévu à l’article 272 débutait donc le 14 janvier 2005. 

Lantin et Hydro-Québec, 2014 QCCLP 1819.

En l’espèce, la preuve démontre que dès le 8 juillet 2008, son médecin a posé, à la suite d’un test auditif, le diagnostic de surdité professionnelle. Il a également complété une attestation médicale pour la CSST. De plus, le témoignage du travailleur confirme que dès cette époque, il a été porté à sa connaissance que sa surdité pouvait être d’origine professionnelle. Ce fait est sans équivoque, car le travailleur admet avoir entamé des démarches pour se procurer des prothèses auditives, mais qu’il a abandonné ses recherches, car il n’était pas psychologiquement prêt à les porter. De ces éléments, force est de conclure que dès le 8 juillet 2008, une surdité a été diagnostiquée chez le travailleur et il a été porté à sa connaissance que cette surdité pouvait être d’origine professionnelle. Le délai de six mois prévu à l’article 272 pour produire une réclamation à la CSST débutait donc à cette date. 

Ouellet et Services de Transport Maxim inc., 2015 QCCLP 3103.

En l’espèce, le travailleur reconnaît qu’il a été porté à sa connaissance qu’il pouvait être atteint d’une maladie professionnelle, soit un syndrome du canal carpien bilatéral, lorsque son médecin de famille a signé une attestation médicale sur laquelle elle retenait ce diagnostic. La réclamation produite deux ans plus tard, soit au moment de l’arrêt de travail pour une intervention chirurgicale, est hors délai. Le travailleur a cependant démontré un motif raisonnable pour être relevé de son défaut.

Sauriol et Les emballages Carrousel inc., 2017 QCTAT 5013.

La travailleuse consulte son médecin traitant le 4 février 2014 pour un autre motif et en profite pour lui parler des douleurs qu’elle ressent au poignet droit depuis environ une semaine. Ce dernier lui propose de porter une attelle et de prendre un médicament anti-inflammatoire. La travailleuse témoigne qu’il n’y a eu aucune discussion sur l’origine de ces douleurs ni sur la suggestion de produire une réclamation à la Commission. D’ailleurs, la note de consultation est muette sur le sujet. La travailleuse indique que sa condition de février 2014 à avril 2015 allait relativement bien avec le port de l’attelle. Ce n’est qu’en avril 2015 qu’un autre médecin pose le diagnostic de tendinite au poignet droit et de bursite à l’épaule gauche et lui conseille de produire une réclamation auprès de la Commission puisqu’il croyait que ces lésions pouvaient être reliées à son travail. En produisant sa réclamation le 12 avril 2015, la travailleuse respecte le délai de l’article 272.

Boucher, 2018 QCTAT 591.

En produisant sa réclamation pour surdité professionnelle en mars 2017, le travailleur a déposé sa réclamation hors délai. En effet, il avait la connaissance requise à l’article 272 que sa surdité pouvait être d’origine professionnelle au moment de la consultation avec un otorhinolaryngologiste en mai 2016. À cette date, le médecin l'a questionné sur les emplois qu’il a occupés au cours de sa carrière, lui a remis une attestation médicale pour la Commission et a posé le diagnostic de surdité.

Rochon (Succession ) et Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail - Salaberry, 2018 QCTAT 4096.

En l’espèce, il faut vérifier si, avant son décès, le travailleur a eu connaissance que sa maladie pulmonaire avait une origine professionnelle. Il est vrai que certains documents médicaux indiquent un tel diagnostic, mais il faut cependant analyser dans quel contexte cette information a été inscrite. En 2000, une tomodensitométrie thoracique dénotait de très petites plaques pleurales calcifiées pouvant être en relation avec une amiantose. À la suite de cette investigation, le médecin qui a charge a dirigé le travailleur vers un pneumologue afin qu'il évalue « la possibilité d'une composante reliée à l'amiantose ». Ce dernier a indiqué que les petites plaques pleurales n'étaient pas responsables des symptômes du travailleur et de sa dyspnée et qu'il ne croyait pas qu'il pourrait avoir droit à une indemnité; il a retenu le diagnostic de maladie pulmonaire obstructive chronique. À ce moment, le travailleur ne pouvait considérer que ses problèmes pulmonaires étaient d'origine professionnelle. En 2005, le médecin qui a charge s'est de nouveau interrogé sur un possible lien entre ses emplois antérieurs et sa condition pulmonaire. De simples soupçons de la part du médecin qui a charge ne peuvent être suffisants pour être le point de départ de la computation du délai. Les mots alors employés, soit « il me semble qu'il pourrait exister un lien », ne peuvent suffire pour établir dans l'esprit du travailleur une possibilité de relation causale selon la règle des probabilités. Enfin, un autre médecin a indiqué dans une note faisant suite à une consultation de 2013, qu'il présentait une maladie pulmonaire «en partie secondaire à l'amiantose dans le passé». Toutefois, elle semblait se méprendre puisqu'en début de note, elle précisait uniquement que « le patient est connu pour une exposition à l'amiante ». Or, une exposition n'entraîne pas automatiquement la présence d'une amiantose et à aucun moment il n'y a eu d'examen confirmant ce diagnostic chez le travailleur.

La computation du délai peut débuter uniquement lorsqu'un diagnostic de maladie est posé. C'est d'ailleurs l'une des conditions nécessaires pour bénéficier des indemnités prévues à la Loi puisque la définition de « maladie professionnelle » prévue à son article 2 comprend tout d'abord la présence d'une maladie. En l'absence d'un diagnostic d'amiantose, ce n'est que lorsque le diagnostic de cancer pulmonaire a été confirmé que la computation du délai pouvait, au plus tôt, débuter. En l'espèce, le travailleur n'a pas pu avoir connaissance de l'existence même de son cancer du poumon avant mai 2015 et, sans son témoignage, le Tribunal ne peut supposer l'existence de sa connaissance d'une possible origine professionnelle de ce cancer, sans éléments objectifs sur lesquels s'appuyer. La computation du délai n'a pas pu débuter de son vivant.