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. 4. Loi d'ordre public

Éléments contraires à l'ordre public

Allard et Jules Henri couvreurs ltée, [2004] C.L.P. 357.

L'emploi retenu ne constitue pas un emploi convenable puisque le contexte d’exercice de cet emploi est teinté d’illégalité. En effet, les tâches retirées au travailleur doivent nécessairement être exécutées par d’autres travailleurs qui sont des journaliers sans carte de compétence, dans le domaine de la construction qui est très réglementé quant aux compétences des différents corps de métier. Ainsi, un journalier ne peut faire équipe avec les couvreurs et effectuer des tâches réservées exclusivement aux couvreurs. L’illégalité du contexte est contraire à l’ordre public et empêche la CLP de retenir qu’un emploi puisse être déclaré convenable au sens de la loi, car il contrevient aux dispositions de l’article 4.

Favreau et Sécurité Kolossal inc.,C.L.P. 251833-63-0412, 2 mars 2005, J.-P. Arsenault.

L’employeur ne pouvait se soustraire à l'application de l'article 60 en ne versant le paiement des 14 premiers jours qu'au moment où le médecin traitant atteste de l'incapacité du travailleur d'exercer son emploi. En agissant de la sorte, l'employeur cherche à imposer au travailleur une obligation que la loi ne prévoit pas, soit celle de faire attester son incapacité avant ou la journée même où elle se concrétise eu égard à ses activités professionnelles. Comme la loi est d'ordre public et que l'employeur doit s'y conformer, la plainte du travailleur est accueillie et l'employeur devra lui verser 90 % du salaire net pour les deux jours où il aurait normalement travaillé, n'eût été sa lésion professionnelle.

Entente entre les parties

La CLP est liée par une entente entre les parties

Rodier et Canadien Pacifique, [1996] C.A.L.P. 1601.

L'entente intervenue entre le travailleur et l'employeur n'est pas contraire aux dispositions de l'article 4 puisqu'il est plus avantageux pour le travailleur d'accepter l'indemnité de cessation d'emploi offerte par l'employeur que de continuer à recevoir le versement de l'IRR.

Suivi :

Révision rejetée, [1998] C.L.P. 541. 

La CLP n'est pas liée par une entente entre les parties

Sûreté du Québec et Huot, [1998] C.L.P. 368.

L’employeur ne pouvait convenir, par entente, d’accorder à ses travailleurs un droit relevant de la LATMP même si les conditions d’application de la loi ne sont pas satisfaites. En effet, malgré l’article 4 qui indique qu’une entente peut prévoir pour un travailleur des dispositions plus avantageuses que celles contenues à la loi, il reste que cette entente ne saurait intervenir dans le processus d’application de la loi, ni être mise en application par le biais de la loi. C’est uniquement suivant le processus prévu à la convention collective que l’entente peut être mise en application. La CLP n’a pas juridiction pour appliquer, interpréter ou apprécier les termes de la convention collective liant l’employeur et le travailleur, pouvoir que ne détenait pas non plus la CSST. La CSST aurait dû suspendre l'IRR du travailleur qui a refusé l'assignation temporaire proposée par son employeur en s'appuyant sur une disposition de la convention collective. 

CSST et Poulin, [1998] C.L.P. 719.

L’employeur prétend que la travailleuse s’est engagée à ne pas produire de réclamation selon l’entente relative à sa mise à la retraite. L’obligation contractuelle de la travailleuse, même si elle lui est peut-être opposable dans le cadre d’un recours civil, ne peut l’empêcher d’exercer son droit de produire une réclamation en vertu de la LATMP, car celle-ci est d’ordre public comme l’énonce son article 4. Cet article prévoit une exception dans les cas où les ententes privées sont plus avantageuses que la loi, ce qui n’est manifestement pas le cas en l’espèce. Ainsi, le droit de la travailleuse de déposer une réclamation à la CSST n’est pas annulé par la clause contractuelle invoquée par l’employeur.

Gestion immobilière Solitec & associés et Cloutier, C.L.P. 141451-62-0006, 6 septembre 2000, S. Mathieu.

Le type de contrat qu'a pu passer le réclamant avec un sociétaire de la société à laquelle il est partie, dans un but avoué de satisfaire certaines exigences prévues dans la Loi sur les relations de travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, ne lie pas la CLP. Il faut analyser les faits mis en preuve afin d'établir si, en regard des définitions contenues dans la loi, qui est par ailleurs d'ordre public, le réclamant est un travailleur et si oui, si la société est son employeur. En l'espèce, la preuve démontre que le réclamant était un travailleur au sens de la loi lorsqu'il a subi un accident du travail et la seule employeure qu'il ait eue à cette date est la requérante. 

Minolta Montréal inc. et Gizas, C.L.P. 222850-61-0312, 30 mars 2004, F. Poupart.

L'entente conclue avec le travailleur suivant laquelle ce dernier acceptait d'être indemnisé par sa « banque de journées de maladie » et renonçait à recevoir les prestations prévues à la LATMP, ne peut pas être opposée aux dispositions d'ordre public de la LATMP. L'objet de cette loi est décrit à son article 1. Le deuxième alinéa de l'article 4 ne permet pas à l'employeur de prétendre que l'entente a pour effet de priver le travailleur de l'exercice des droits que lui confèrent les dispositions d'ordre public de la LATMP. Au surplus, il est inexact de dire que l'entente est « plus avantageuse » que les bénéfices prévus à la LATMP, car cette entente priverait le travailleur des « journées de maladie » auxquelles il aurait droit en vertu de son contrat de travail dans l'éventualité d'une absence en raison d'une pathologie personnelle.

Centre hospitalier de l'Université de Montréal - Pavillon Mailloux et Chartrand, 2013 QCCLP 3713.

Le fait que l'employeur exige de la travailleuse qu'elle lui transmette tous les rapports médicaux reliés au suivi de la lésion professionnelle, et ce, dans un délai raisonnable, alors que la loi n'exige nullement une telle transmission, fait en sorte que cette exigence contenue à l'entente est désavantageuse pour la travailleuse. En effet, elle crée une obligation qui est inexistante dans la loi, par rapport à des droits qui n'étaient ni nés ni actuels lors de sa conclusion. L'employeur fait valoir que la loi ne mentionne pas que la travailleuse doit lui remettre tous ses rapports médicaux, pas plus qu'elle ne lui interdit de le faire. Selon lui, puisque aucune disposition ne porte sur cette question, l'entente ne dérogerait pas à la loi. Or, l'article 4 protège à la fois les droits et les obligations des parties. L'absence d'obligation de faire comporte le droit de ne pas faire. Quand la loi n'impose pas à la travailleuse de remettre les rapports médicaux à son employeur, cette dernière a le droit de ne pas les remettre pendant le suivi de sa lésion professionnelle sans risquer une sanction.  Ainsi, même si les parties ont signé une entente de dernière chance qui est valide, les dispositions de celle-ci concernant la remise des certificats médicaux à l'employeur ne s'appliquent pas à la lésion professionnelle survenue postérieurement à sa conclusion.

NCV Maintenance inc. et Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, 2016 QCTAT 3179.

Le régime d'indemnisation des lésions professionnelles au Québec n'est pas optionnel. La LATMP et la LSST sont d'ordre public et s'appliquent aux personnes et aux entreprises qui répondent aux définitions de « travailleur » et d'« employeur ». Le statut de travailleur et celui d'employeur ne dépendent pas de la seule volonté des parties. Ils résultent de la réelle relation contractuelle existant entre les parties. Selon les définitions prévues par la LATMP, cette relation se caractérise par l'exécution d'une prestation de travail moyennant une rémunération en vertu d'un contrat de travail. Bien que les parties ne se considèrent pas dans une relation de travailleur-employeur, le Tribunal n’est pas en accord avec eux et le travailleur est couvert par la LATMP.

Convention collective

La CLP est liée par les dispositions d'une convention collective

Lefebvre et Plasti-Drain ltée, [1998] C.L.P. 1013.

Alors qu'il est en assignation temporaire, le travailleur s'absente du travail durant trois jours consécutifs. L'employeur congédie le travailleur en appliquant une disposition de la convention collective prévoyant qu'il peut congédier un travailleur après une absence de trois jours consécutifs non motivée. Or, aucun certificat médical qui pouvait justifier l'absence de trois jours n'a été délivré par le médecin que le travailleur a consulté en avril et en mai 1998. D'ailleurs, le travailleur n'a pas réussi à expliquer pourquoi son médecin a refusé de délivrer un tel certificat. Le travailleur aurait pu contester son assignation temporaire, mais il ne l'a pas fait et s'est absenté de son travail sans justification. Étant donné son inaction, l'employeur pouvait alors appliquer la convention collective qui permet la mesure prise contre le travailleur. D'ailleurs, la clause en question n'est pas moins avantageuse que la loi ni, par conséquent, contraire à l'ordre public. Comme la preuve ne démontre pas d'autres motifs au congédiement, la plainte en vertu de l'article 32 est rejetée. 

Larivière et Terre des Jeunes de Ste-Julienne, 2014 QCCLP 3654.

Le droit de recevoir un avis écrit l’informant de son congédiement est, comme le permet l’article 4, une disposition plus avantageuse pour le travailleur que ce que prévoit la loi. L’avis écrit dissipe tout doute quant à la nature de la mesure imposée, et au moment où il en prend connaissance, et si la convention collective oblige l’employeur à communiquer ses motifs de congédiement, ceux-ci permettent de circonscrire le débat devant le décideur sur les motifs de la mesure. Ainsi, dans un tel contexte, le tribunal n’a pas d’autre choix que d’en tenir compte et d’appliquer ce qui constitue la loi des parties.

La CLP n'est pas liée par les dispositions d'une convention collective

Dumoulin et Hôpital de l'Annonciation, [1989] C.A.L.P. 387.

Un employeur ne peut s'en remettre aux dispositions d'une convention collective pour expliquer un geste contraire à la loi qui est d'ordre public et qui prévaut sur toute convention collective. Lors du retour au travail de la travailleuse à la suite de sa lésion professionnelle, l'employeur n'a pas retiré le remplaçant de son affectation et redonné le poste à la travailleuse comme le voudrait la loi. Ces mécanismes heurtent les dispositions de la loi en matière de droit de retour au travail et ils ne sauraient avoir préséance sur cette loi. Agir autrement aurait pour effet de pénaliser la travailleuse d'avoir été victime d'un accident du travail.

Suivi : 

Requête en révision judiciaire rejetée, [1990] C.A.L.P. 566 (C.S.).

Prévost Car inc. et Isabel, C.L.P. 182957-03B-0204, 16 décembre 2002, G. Marquis.

L’article 4 permet de prévoir des dispositions dérogatoires dans une convention qui donnent effet à la loi et non le contraire. Qui plus est, les dispositions dérogatoires prévues à la convention collective doivent être plus avantageuses pour le travailleur. En l’espèce, ce dernier aurait plutôt été privé du droit à la poursuite du versement de l’IRR pendant plusieurs mois si les dispositions de la convention avaient prévalu sur celles édictées aux articles 240 et 48. Quant à l'avantage financier pour l’employeur dans le contexte de mises à pied massives, les clauses dérogatoires prévues à l’article 4 n’ont pas pour but d’avantager l'employeur, mais uniquement le travailleur. L’employeur ne peut invoquer l’application des dispositions de la convention collective ayant pour effet de le soustraire à son obligation d’assumer une indemnité dont l’octroi en faveur du travailleur est expressément prévu à la loi. 

Watts et Centre hospitalier régional de Baie-Comeau, C.L.P. 201865-09-0303, 3 mars 2005, J.-M. Laliberté.

L’employeur n’est pas fondé à ne pas créditer à la travailleuse, au moment de son retour au travail, la totalité de ses vacances en raison des termes de la convention collective, puisque celle-ci ne peut prévoir des avantages moindres que ceux prévus à la loi qui est d’ordre public.

Fraser et Onyx Industries inc., C.L.P. 268543-63-0507, 24 janvier 2007, D. Besse. 

En l'espèce, la convention collective prévoit que l'indemnité de vacances annuelles sera payée sur la base des gains bruts gagnés au cours de la période s'étendant du 1er janvier au 31 décembre de l'année précédant les vacances.  Or, le travailleur n'a pas accumulé de gains bruts au cours des mois de janvier à avril  2004 puisque la CSST lui versait une IRR en raison de sa lésion professionnelle. La convention collective prévoit que ses dispositions ne doivent pas être interprétées comme une renonciation à un droit ou une obligation légale de l'employeur, des salariés ou du syndicat, en vertu d'une loi ou d'un règlement d'ordre public. Par ailleurs, l'article 4 précise qu'il s'agit d'une loi d'ordre public, laquelle a donc préséance sur la convention collective qui lie les parties. De plus, il a déjà été précisé que l'objectif de l'article 242 est de donner effet au contrat de travail intervenu entre les parties en y ajoutant seulement la fiction voulant que le travailleur victime d'une lésion professionnelle soit considéré comme ayant travaillé pendant la durée de son absence afin qu'il ne soit pas pénalisé en raison de la lésion professionnelle au moment où il reprend le travail. Par conséquent, l'employeur devait tenir compte, aux fins du calcul de l'indemnité de vacances pour l'année de référence 2004, de la période au cours de laquelle le travailleur a reçu une IRR

Tremblay et Aliments Dare, 2014 QCCLP 1814.

Que les dispositions de la convention collective aient été acceptées telles quelles par l'employeur et le syndicat ne change en rien la conclusion du tribunal voulant qu'il y ait eu, dans leur application, contravention à une disposition d'ordre public touchant les droits du travailleur. En l'espèce, le travailleur a été privé d'un avantage au sens de l'article 242 puisque l'employeur n'a pas tenu compte des heures pendant lesquelles il était absent en raison de sa lésion professionnelle aux fins du calcul de son indemnité de vacances pour l'année 2011-2012.  Même si l'employeur a agi de bonne foi en appliquant au travailleur les dispositions de la convention collective, comme il le fait pour tous les autres travailleurs accidentés depuis 1998, cet argument ne peut constituer une cause juste et suffisante dans la mesure où cela enfreint l'article 242.

Suivi :

Pourvoi en contrôle judiciaire rejeté, 2016 QCCS 387.

De Castro Sargo et Hôpital Maisonneuve-Rosemont, 2017 QCTAT 2173.

La convention collective est moins avantageuse que la loi pour la travailleuse. Ainsi, l’application de la LATMP doit être faite prioritairement à la convention collective en vigueur chez l’employeur. La travailleuse n’a pas bénéficié de ses avancements d’échelon durant son absence pour une lésion professionnelle. L’employeur a donc exercé de la discrimination à son endroit ce que ne permet par l’article 4 de la loi et de plus, il a enfreint l’article 242 de la loi.

Voir également : 

Municipalité de Kazabazua et Chénier2015 QCCLP 3384.