Illustrations

Retour à l'article
 
. 30. Maladie caractéristique du travail

Maladies reconnues comme caractéristiques ou reliées aux risques particuliers du travail

Classeur de métaux 

Larochelle et J M Bastille inc., C.L.P. 225541-01A-0401, 20 septembre 2004, J.-F. Clément.

Intoxication au plomb. Pendant près de 25 ans, le travailleur a manipulé des batteries et des radiateurs et a fait le pressage d’aluminium contaminé au plomb pour en faire des ballots. Le 17 juin 2002, son médecin diagnostique une intoxication au plomb. Ce diagnostic n’a jamais été contesté par la CSST ni par l’employeur. En conséquence, ce diagnostic lie non seulement la CSST, mais également la CLP. La présomption prévue à l’article 29 s’appliquera si le travailleur a exercé un travail correspondant à cette maladie d’après l’annexe I. La preuve démontre que son travail impliquait la manipulation et l’exposition au plomb. De plus, le travailleur n’avait pas à être exposé à un seuil minimal pour pouvoir bénéficier de l’application de la présomption. Pour renverser cette présomption, l’employeur devait démontrer que le travail n’était pas à l’origine de la lésion diagnostiquée, ce qu’il n’a pas fait. Depuis 1998, le travailleur est aux prises avec un taux de plomb qui dépasse la norme. Ces normes ont comme but la prévention de complications lésionnelles. Toutefois, cela n’enlève rien au fait que son sang contient un taux fortement anormal de plomb en raison de l’exposition subie chez l’employeur. Il s’agit donc des risques particuliers de son travail et on peut même parler de lésion caractéristique du travail puisque plusieurs collègues sont aux prises avec les mêmes problèmes.

 

Commis à la facturation  

Grégoire et Société canadienne des postes, C.L.P. 101552-62-9806, 8 mars 1999, L. Couture.

Dérangement intervertébral mineur et syndrome myofascial. Dans le cadre de son travail, la travailleuse doit faire des entrées de données à l’ordinateur de 4 à 5 heures par jour. Elle utilise une chaise non munie d’appuie-bras. Son clavier d’ordinateur n’est pas muni d’appuie-poignets et elle n’utilise pas non plus d’appuie-pieds. La travailleuse a effectué de nombreuses heures supplémentaires. Son médecin mentionne que les diagnostics sont en relation avec la posture utilisée par la travailleuse à son travail. La travailleuse a subi une maladie caractéristique de son travail ou reliée aux risques particuliers de celui-ci. La preuve de l'employeur ne commente pas les contraintes et les efforts nécessaires pour conserver la position statique. L'absence de spasme noté par le médecin de l’employeur s'explique par la prise de relaxants musculaires par la travailleuse et le fait qu’elle était en arrêt de travail depuis dix jours. La position statique adoptée pendant plusieurs heures, même si elle ne constitue pas une position extrême, exige des efforts qui constituent des facteurs de risques responsables des lésions musculo-squelettiques de la travailleuse. Le manque d'appui empêche une récupération adéquate et est de nature à causer le diagnostic posé.

 

Cuisinière

Quintana et Garderie éducative Mimi Pinson inc., C.L.P. 294278-62-0607, 7 décembre 2006, L. Couture.

Déchirure de l’extenseur commun du coude gauche. La travailleuse a produit une réclamation dans laquelle elle a allégué avoir subi une lésion professionnelle, soit une épicondylite du coude gauche. Dans le cadre de son travail, elle lave des chaudrons lourds et transporte des bacs également lourds. Elle invoque également qu'elle doit faire des mouvements répétitifs, notamment lorsqu'elle prépare les repas et ouvre les boîtes de conserve. L'instance de révision de la CSST a conclu que compte tenu de la nature des gestes effectués par la travailleuse, lesquels impliquent des flexions, extensions du poignet gauche et des mouvements de supination et de pronation de l'avant-bras gauche, cette dernière avait démontré que l'épicondylite gauche était caractéristique de son travail ou reliée aux risques particuliers de ce travail. Plus tard, la CSST a nié la relation entre un diagnostic de déchirure de l'extenseur commun du coude gauche, découverte lors d'un examen par résonance magnétique, et l'événement initial. Les gestes décrits par la travailleuse sont de nature à occasionner une épicondylite puisqu'ils impliquent une sollicitation des tendons extenseurs de l'avant-bras gauche. Les gestes de flexion et d'extension du poignet ainsi que ceux de supination et de pronation du coude et de la main, exécutés souvent avec force, que devait faire la travailleuse dans le cadre de son travail de cuisinière, sont des gestes de nature à avoir causé la déchirure en question ou à tout le moins, sont de nature à rendre symptomatique cette déchirure. Cette déchirure doit, au même titre que l'épicondylite, être reconnue à titre de maladie caractéristique ou reliée aux risques particuliers du travail de cuisinière.

 

Débosseleur

Société de transport de Montréal et Riendeau, C.L.P. 217450-62-0310, 18 mai 2007, L. Couture.

Syndrome du canal carpien et épicondylite gauches. Le travailleur est débosseleur depuis 1981 et, depuis 1986, son travail chez l'employeur consiste à changer des pièces d'autobus en utilisant divers outils (« Zip Gun », perceuse pneumatique, clés à chocs et à rochets pneumatiques, sableuse orbitale et pneumatique, meule à disque abrasif ou pneumatique). En janvier 2003, il éprouve des crampes dans les doigts et n'est plus capable de tenir ses outils. Un médecin diagnostique une épicondylite et un syndrome du canal carpien gauches, d’où la réclamation à la CSST. L’employeur ne remet pas en question les diagnostics, mais leur relation avec le travail. Les gestes à risque de causer une épicondylite sont des mouvements de pronation et de supination du poignet avec préhension des doigts, d'extension ou de dorsiflexion du poignet, le tout effectué avec effort. Ceux susceptibles de causer un syndrome du canal carpien impliquent des flexions et des extensions du poignet, des déviations radiales ou cubitales, des mouvements de préhension des doigts, en pince ou à pleine main. À ces gestes peut s'ajouter le fait d'utiliser des outils vibrants. Le travailleur travaille principalement de la main gauche. Pour l'utilisation des différents outils, il doit effectuer diverses flexions ou extensions du poignet gauche afin d'être bien positionné pour le travail à accomplir. Le travailleur tient ses outils à pleine main, dans un mouvement de préhension des doigts, ce qui sollicite les fléchisseurs. Il doit serrer ses outils afin d'éviter de les échapper et exercer une pression importante de tout le membre supérieur gauche. Il utilise aussi un outil pneumatique, qui donne des contrecoups tant à la main gauche qu'au coude gauche. Il a effectué ces gestes sur une période de temps prolongée puisqu'il travaille depuis de nombreuses années. Même si le diabète d’apparition récente chez le travailleur pouvait être la cause de ses symptômes, le fait qu'ils soient plus importants à gauche, et que le travailleur soit gaucher, empêche de nier la relation entre le travail et le syndrome du canal carpien. Les deux maladies diagnostiquées sont caractéristiques ou reliées aux risques particuliers du travail exercé par le travailleur.

 

Embouteilleur, préparateur de sirop, démêleur de bouteilles

Gamache et Liqueurs douces Hauterive,[1990] C.A.L.P. 667.

Déformation des doigts en col de cygne. Pendant trente-huit années, le travailleur a manipulé des bouteilles dans le cadre de son travail. De l'âge de 13 ans à 18 ans, le travailleur a occupé des postes de mireur et de laveur. Ces fonctions impliquaient la manipulation constante de bouteilles de 7, 10 ou 26 onces avec les doigts. Le nombre de bouteilles alors manipulées par le travailleur était d'environ 6 000 bouteilles par heure. De 18 à 20 ans, le travailleur a cumulé les fonctions d'embouteilleur et de préparateur de sirop. Le travail d'embouteilleur demandait 2 heures par jour de manipulation de bouteilles. De 20 à 22 ans, le travailleur a été démêleur de bouteilles. Ce travail consistait à prendre les bouteilles vides arrivées à l'entrepôt, les démêler et les mettre dans les bonnes caisses. La manipulation des bouteilles s'effectuait avec les doigts et environ 400 ou 500 caisses de 24 bouteilles étaient traitées par jour. Le travailleur a été également livreur entre l'âge de 22 ans à 48 ans. Il devait manipuler les bouteilles avec ses doigts lorsqu'il devait les ranger dans des réfrigérateurs et les déposer dans des « racks ». Dès l'âge de 18 ans, il a commencé à présenter une déformation des doigts. Plus tard, on diagnostique une déformation digitale en col de cygne. Cette déformation épouse la forme du goulot d'une bouteille. Les travailleurs ayant effectué le même type d'emploi que le travailleur ont la même déformation. Toutes les personnes ayant effectué ce travail souffrent de cette même maladie. Elle est bien caractéristique de ce travail et elle doit être considérée comme une maladie professionnelle.

 

Hygiéniste dentaire

Bélanger et Centre dentaire Gaston Bourret, 2011 QCCLP 2900.

Cervicobrachialgie. La travailleuse a exercé le travail d’hygiéniste dentaire de 1996 à 2009. Elle a commencé à ressentir des douleurs cervicales en 2004. Elle a bénéficié d’arrêts de travail qui ont permis une rémission de la cervicobrachialgie. À compter de 2006, elle cumule deux emplois, augmentant son nombre d’heures de travail de 20 heures à 36 à 38 heures par semaine, dont une journée de 12 heures. Pour établir qu'une maladie est caractéristique d'un travail, il doit être démontré qu'un nombre significatif de personnes travaillant dans des conditions semblables en sont atteintes ou que la maladie est plus présente chez ce type de travailleurs que dans la population en général ou encore dans un groupe témoin. Cette preuve a été faite en l'espèce. Le Guide de prévention des troubles musculo-squelettiques (TMS) en clinique dentaire, rédigé par l’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail du secteur des affaires sociales (ASSTSAS) et déposé en preuve révèle que plus de 80 % des gens qui travaillent dans le domaine des soins dentaires ont souffert d'inconforts musculo-squelettiques et que 20 % des hygiénistes dentaires ont déposé des réclamations à la CSST. Le travail d'hygiéniste dentaire comporte 10 facteurs de risque sur 11 de présenter des troubles musculo-squelettiques. À l'instar de l'ASSTSAS, le tribunal est d'avis que, « lorsque plusieurs travailleuses ou travailleurs dans un groupe ressentent des problèmes musculo-squelettiques similaires, il y a une bonne probabilité que ceux-ci soient occasionnés par les conditions de travail qui sont partagées ». Cela correspond à la définition d'une maladie caractéristique du travail. La travailleuse a aussi fait la preuve que sa maladie est reliée aux risques particuliers du travail.

 

Bénard et Centre dentaire Martin Dutil, 2013 QCCLP 3641.

Entorse cervicale et tendinite à l’épaule droite. La travailleuse a produit une réclamation à la CSST pour un syndrome du tunnel carpien droit, une entorse cervicale et une tendinite à l'épaule droite qu'elle attribuait à ses tâches. La CSST a accepté sa réclamation pour le diagnostic de syndrome du tunnel carpien, mais a conclu que celui d'entorse cervicale et de tendinite à l'épaule droite n'était pas relié à la lésion professionnelle. Afin de démontrer que l'entorse cervicale et la tendinite à l'épaule droite étaient caractéristiques de son travail, la travailleuse a déposé le Guide de prévention des troubles musculo-squelettiques (TMS) en clinique dentaire, préparé par l'Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail du secteur des affaires sociales (ASSTSAS) et portant sur les risques de développement de lésions musculo-squelettiques dans le travail des hygiénistes et des assistantes dentaires. Cette étude est éloquente quant aux risques associés à l’exécution de ces tâches. Le tribunal est d'avis que la travailleuse était susceptible de présenter une tendinite à l'épaule et une entorse cervicale, compte tenu de la nature de son travail. À cette étude s’ajoute le témoignage de l’expert de la travailleuse qui est au même effet quant à la relation à faire entre le travail et les problèmes cervicaux et la tendinite à l’épaule droite de la travailleuse.

 

Voir également :

Petrilli et Centre dentaire Mario Bessette, 2020 QCTAT 2956.

Meuleur polisseur

C…D… et Compagnie A,C.L.P. 261091-71-0504, 18 juillet 2007, C. Racine.

Épicondylite bilatérale et syndrome du tunnel carpien bilatéral. La travailleuse a exercé les fonctions de meuleur polisseur ébavureur pendant une vingtaine d'années chez de nombreux employeurs. Le 1er mars 2004, elle a été embauchée par l'employeur, une agence de placement de personnel. Ce dernier l'a assignée chez l'un de ses clients où les tâches consistaient à meuler et sabler des cadres de fenêtres de train. Elle a fait ce travail du début mars au 16 juillet 2004. L'employeur l'a ensuite assignée chez un autre client opérant un terrain de golf et, par la suite chez un client fabriquant de pièces d'avions. Devant l'accroissement des douleurs, elle a dû quitter le travail le 13 septembre 2004 et elle a consulté un médecin qui a diagnostiqué une épicondylite droite. Elle a ensuite produit une réclamation refusée par la CSST en novembre 2004. Elle a également déposé une autre réclamation, le 16 mai 2006, dans laquelle elle a allégué avoir été victime d'une nouvelle lésion professionnelle, à savoir un syndrome du canal carpien bilatéral, le 25 avril 2005. La travailleuse demande que soient reconnues comme lésions professionnelles, toutes deux survenues le 13 septembre 2004, l'épicondylite bilatérale de même que le syndrome du canal carpien bilatéral; elle demande aussi que la chirurgie subie le 25 avril 2006 pour le syndrome du canal carpien droit soit considérée en relation avec la lésion professionnelle du 13 septembre 2004. Aucune preuve n’a été présentée permettant de conclure que l’épicondylite bilatérale est caractéristique du travail de meuleur polisseur ébavureur occupé par la travailleuse. Cependant, elle découle des risques particuliers de son travail. Par ailleurs, le syndrome du canal carpien bilatéral est caractéristique et relié aux risques particuliers du travail de meuleur polisseur ébavureur. Selon la littérature médicale, les meuleurs souffrent davantage du syndrome du canal carpien que leurs collègues qui n'utilisent pas d'outils vibrants. Ces statistiques orientent le tribunal vers une maladie caractéristique de ce travail en raison de la manipulation des outils vibrants. Les vibrations qui affectent la main n'y restent pas localisées. Elles s'étendent et se propagent aux structures anatomiques environnantes, dont le poignet et l'avant-bras. De plus, la littérature médicale reconnaît un lien entre les vibrations et le syndrome du canal carpien sans exiger que ces vibrations se produisent directement sur le canal carpien pour entraîner des effets néfastes pour le nerf médian. Ce syndrome du canal carpien bilatéral découle par conséquent du travail exercé par la travailleuse.

 

Peintre de longerons

Laurin et Kenworth du Canada ltée, C.A.L.P. 62999-63-9409, 18 mars 1996, M. Denis.

Syndrome du tunnel carpien droit. Le travailleur effectue son travail de façon régulière pendant près de dix mois. Ce travail consiste à peindre des longerons sur une base de six heures par jour à l’aide d’un fusil à air ou à pot. La vidéo présentée à l’audience confirme le témoignage du travailleur et s’avère très révélatrice en ce qui a trait à l’exécution des gestes nécessaires à l’accomplissement de son travail. Les mouvements effectués révèlent une utilisation brusque et constante du poignet droit dans la manipulation du fusil à air, à savoir : une rotation, une préhension et une flexion-extension du poignet droit entraînant une contraction musculaire accompagnée d’une pression constante des doigts sur la gâchette du fusil à air, ainsi que d’un support de poids et de vibration, le tout, de façon continue et respectant une certaine cadence. La littérature médicale déposée à l’audience est éloquente quant à la relation entre la pathologie du tunnel carpien et le travail de peintre. L’ensemble de la preuve médicale et testimoniale ne réfère qu’à un tunnel carpien droit et la pathologie survenue au niveau de la main gauche et du membre supérieur gauche n’est aucunement en relation avec la nature du travail. La preuve démontre que la fonction de la main gauche et du membre supérieur gauche ne consiste qu’à tenir le boyau du fusil à air et n’entraîne aucunement l’exécution des gestes précités. La pathologie affectant la main droite du travailleur est caractéristique ou reliée directement aux risques particuliers du travail de peintre de longerons.

 

Suivi :

Révision rejetée, 17 décembre 1996, B. Lemay.

Peintre – sableur de wagons

AMF Technotransport inc. et Meunier, C.L.P. 87461-62-9704, 8 juin 1999, G. Godin.

Syndrome du canal carpien bilatéral. La principale occupation du travailleur consiste à sabler des wagons, ce qui représente environ 80 % à 85 % de son temps de travail. Le sablage doit s’effectuer manuellement sur toutes les surfaces extérieures. Le travailleur est en position accroupie, fléchie, contorsionnée, et il doit tenir la sableuse dans des postures contraignantes demandant pour le sablage du plancher une amplitude maximale de l’articulation du poignet. Le travail à l’atelier de peinture, correspondant à 20 % du temps de travail, n’exige pas une cadence ou un rythme accéléré de la part du travailleur. Par contre, le poste en soi, au sablage et à la peinture, nécessite obligatoirement des postures inadéquates avec des outils à vibrations. Ce n’est pas uniquement la répétition de mouvements qui constitue un facteur de risque dans la survenance d’un syndrome du tunnel carpien. Le médecin de la CSST ne qualifie pas de répétitifs les mouvements exécutés par le travailleur, mais tient compte du fait qu’il s’agit de mouvements d’extension et de flexion forcés et soutenus des poignets, de travail avec outils vibratoires et de positions contraignantes. La description du travail paraît impliquer tous ces facteurs à des degrés divers, mais dans une proportion suffisante pour conclure que ces facteurs sont la cause de la maladie du travailleur. De plus, près de 10 % des travailleurs exerçant un travail similaire à celui du travailleur ont développé un syndrome du tunnel carpien, ce qui permet de dire que la maladie du travailleur est caractéristique du travail exercé et qu’elle est reliée aux risques particuliers de ce travail.

 

Peintre industriel et opérateur de machine fixe

Bouchard et Industries Falmec inc.,[2003] C.L.P. 1611.

Cancer de la vessie. Le travailleur occupe un emploi de peintre industriel de 1989 à 1995 et d’opérateur de machine fixe de 1996 à 1998. Le médecin urologue du travailleur pose un diagnostic de tumeur vésicale probablement d’origine industrielle, en mars 2001. Par la suite, le travailleur produit une réclamation à la CSST. La CLP n'a pas à procéder à l'appréciation d'un débat d'experts, l'employeur ayant choisi de ne présenter aucune preuve ou expertise médicale et scientifique. Suivant la jurisprudence, la façon optimale de démontrer qu’une maladie est caractéristique du travail est le dépôt d’études épidémiologiques établissant la probabilité d’une relation de cause à effet entre le type de travail et la maladie. En l’espèce, l'imposante littérature scientifique déposée établit, d'une part, une relation entre le cancer de la vessie et le travail de peintre et, d'autre part, que l'incidence de cette pathologie est plus élevée chez les travailleurs exerçant ce travail que dans la population en général, particulièrement dans une étude récente de l'année 2002. La CLP retient plus particulièrement les résultats des analyses d'études effectuées par le Centre International de Recherche du Cancer (CIRC), entre autres, le classement du travail de peintre dans le groupe I, à savoir que la cancérogénicité du travail de peintre est définitivement reconnue. De plus, l'étude réalisée par le National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH) confirme les conclusions de cet organisme international. Les deux années d'exposition aux huiles de coupe ont également, selon toute probabilité, contribué au développement du cancer de la vessie. Par ailleurs, ce cancer est, selon toute probabilité, relié directement aux risques particuliers suivants : la durée d'exposition de près de six ans, alors que, selon la littérature scientifique, la durée minimale d'exposition significative est d'un an; à plus de 50 % du temps travaillé, dans un travail dont la cancérogénicité est démontrée par plusieurs études, alors que le système de ventilation ainsi que les équipements de protection individuels, notamment le masque et les gants, étaient inadéquats et favorisaient l'absorption respiratoire et cutanée des produits de peinture.

 

Préposé à l’entretien (concierge)

Proulx et Commission scolaire Lester B. Pearson, C.L.P. 172602-72-0111, 30 avril 2002, J.-D. Kushner.

Syndrome du tunnel carpien bilatéral. Le travail effectué par le travailleur pour le compte d’une commission scolaire comporte des activités importantes qui impliquent les poignets. Il y a des mouvements d'extension forcée quand le travailleur lave les planchers et frotte à la main. Lorsqu'il doit passer la polisseuse sur les planchers, il y a une préhension forte des mains pour la tenir ainsi que des vibrations. En pelletant la neige, il y a aussi une préhension forte avec effort, contre-résistance et appui sur la paume de la main en tenant la pelle. Le fait de passer la vadrouille et la serpillière entraîne des mouvements de flexion et déviation avec forte préhension des poignets. Il y a aussi une préhension avec contre-résistance quand le travailleur dispose des sacs à ordures. La littérature médicale déposée en preuve permet de reconnaître des facteurs de risque dans le travail effectué par le travailleur qui sont compatibles avec l'étiologie du syndrome du canal carpien. Le dossier médical du travailleur ne met pas en évidence une pathologie cervicale ou du diabète pouvant suggérer une étiologie personnelle du syndrome du canal carpien. La preuve prépondérante établit que le syndrome du tunnel carpien bilatéral qui affecte le travailleur est caractéristique de son travail de concierge et directement relié aux risques particuliers de celui-ci.

 

Tisseuse de joint de toile 

Astenjohnson inc. (Div. Toiles Montréal) et Lajeunesse, C.L.P. 250543-71-0412, 31 mai 2007, L. Couture.

Épicondylite et tendinite bicipitale. La travailleuse a produit une réclamation dans laquelle elle a déclaré avoir subi une lésion professionnelle, laquelle a été acceptée par la CSST, ce que l’employeur conteste. Par la suite, la CSST a entériné un avis du BEM concluant notamment que les diagnostics étaient ceux d’épicondylite et de tendinite bicipitale distale du coude droit, et elle a déclaré que ces diagnostics étaient reliés à l’événement survenu au travail, ce que l’employeur conteste également. L’épicondylite n’étant pas énumérée à l’annexe à laquelle renvoie l’article 29, la travailleuse ne peut bénéficier de la présomption de maladie professionnelle. Par ailleurs, les gestes accomplis durant les différentes étapes du tissage de joint, à savoir les gestes de préhension effectués lors du « ripe out », qui consiste à préparer les bords de la toile, et lors du « clipping », qui consiste à couper et à retirer les fils excédentaires qui demeurent une fois les deux extrémités de la toile rassemblées, sont de nature à solliciter les tendons épicondyliens. Dans le « ripe out », la travailleuse tient sa pince de la main droite et doit exercer une pression assez forte sur les manchons de la pince afin de pouvoir tirer les fils. La force qu'elle doit déployer est importante. Lorsque la travailleuse effectue le « clipping », elle utilise son index pour séparer les fils qu'elle doit couper. Ce faisant, elle doit maintenir une pression constante sur sa pince afin de la retenir. Cette pression des doigts met ainsi à contribution les muscles épicondyliens. Les structures concernées sont constamment sollicitées, la méthode de travail utilisée n'amenant aucun temps de repos dans la musculature de l'avant-bras et du bras. La travailleuse a effectué une combinaison de mouvements répétitifs sur une longue période de temps, d'autant plus qu'elle faisait des heures supplémentaires. Les gestes de préhension alors effectués sont de nature à avoir causé l'épicondylite droite. Cette lésion est donc caractéristique ou reliée aux risques particuliers du travail exercé par la travailleuse, conformément à l'article 30. Par ailleurs, la présomption prévue à l’article 29 s’applique au diagnostic de tendinite bicipitale distale du coude droit et l’employeur ne l’a pas repoussée.

 

Maladies non reconnues comme caractéristiques du travail

Assistante dentaire

Larouche et Clinique dentaire Bérubé Richard & associés, [2009] C.L.P. 126.

Tunnel carpien bilatéral, ténosynovite bilatérale aux poignets, épicondylite bilatérale, cervicalgie, brachialgie et hernies discales. La travailleuse est assistante dentaire pour l'employeur depuis 1999. À compter de 2002, elle travaille quatre jours par semaine, et ce, à raison de huit à neuf heures par jour. Le 16 juillet 2008, elle cesse de travailler et produit une réclamation à la CSST en alléguant une augmentation des douleurs qu'elle ressent depuis un certain temps et la difficulté qu'elle éprouve à tenir ses instruments à cause de tremblements. La travailleuse allègue que deux assistantes dentaires de l’employeur auraient suivi des traitements physiothérapiques et chiropratiques en raison de leur travail et qu’une troisième aurait choisi une nouvelle orientation professionnelle. La preuve est muette quant à savoir si des diagnostics ont été émis dans le cas de ses collègues et quels seraient leurs liens avec le travail. La preuve ne permet pas non plus de déterminer si l’exécution des tâches et l’environnement de travail de ces personnes sont semblables à ceux de la travailleuse. La simple allusion ou référence à d’autres travailleuses qui auraient contracté une maladie est insuffisante. L’approximation n’a pas sa place en pareil cas. Aucune étude statistique ou scientifique n’a été déposée pour soutenir les allégations de la travailleuse. Les pathologies de la travailleuse ne peuvent être reconnues comme étant caractéristiques de son travail. De plus, la preuve n’a pas été présentée de façon satisfaisante pour permettre d’établir de façon prépondérante que les pathologies de la travailleuse sont dues aux risques particuliers de son travail.

 

Calorifugeur

Succession Maurice Lemieux et Acmé Asbestos (fermé), [2000] C.L.P. 1087.

Cancer du rein. Le travailleur exerce le métier de calorifugeur de 1966 à 1993. Le travailleur décède le 30 octobre 1994. La CLP doit décider si le cancer du rein ayant entraîné le décès du travailleur a été causé par son exposition à l'amiante et s'il s'agit d'une maladie professionnelle. L'expert de la CSST fait le point sur l'opinion scientifique internationale selon laquelle il n'existe pas de relation entre l'exposition à l'amiante et le cancer du rein. Celui de la succession se réfère principalement à trois études pour affirmer le contraire. L'expert de la CSST prétend que la première étude manque de rigueur dans sa classification, ce qui fausse les résultats. Il estime également qu'une seule étude ne suffit pas en épidémiologie pour établir une relation, vu l'influence possible du hasard sur les résultats. Selon lui, les autres études n'affirment pas la relation, mais se contentent de la suggérer et de recommander d'autres recherches. Il signale qu'on ne peut en tirer des conclusions fiables puisque l'une ne sépare pas les cas de cancer du rein des cas des autres cancers du système urinaire, tandis que l'autre repose sur des diagnostics posés à partir des certificats de décès, ce qui peut fausser les résultats. De plus, ces études ne satisfont pas les critères pour établir la relation; même si le cancer du rein et l'exposition à l'amiante sont parfois associés, la relation de cause à effet entre les deux n'est pas démontrée. La preuve épidémiologique ne permet pas de retenir que le cancer du rein dont le travailleur est décédé est caractéristique de son travail de calorifugeur. Quant à savoir si la maladie est directement reliée aux risques particuliers du travail, même en admettant que le cancer du rein dont est mort le travailleur puisse avoir été causé par son exposition à l’amiante, la succession n’aurait pour autant pas rempli son fardeau de preuve, car cette hypothèse n’en exclut pas d’autres, tout aussi probables, d’autant plus que la cause du cancer du rein dans la population en général est inconnue. Le décès du travailleur n'a pas été causé par une maladie professionnelle.

 

Camionneur

Fortin et Laidlaw Carrier inc. (F), 2012 QCCLP 2889.

Syndrome du canal carpien droit. Le travailleur, un camionneur, a déposé une réclamation à la CSST qu'elle a refusée. Relativement à la notion de maladie caractéristique, le représentant du travailleur a soumis un article paru dans Prévention au travail faisant état d'une étude qui révèle que la profession de chauffeur de camion et d'autobus faisait partie des sept professions les plus à risque de développer un syndrome du canal carpien. Selon cet article, la part des cas de syndrome du canal carpien attribuable au travail de chauffeur de camion et d'autobus serait de 63 %. Or, on ne peut accorder de force probante à cette preuve, car elle manque de spécificité. En effet, elle vise tant les chauffeurs de camion que les conducteurs d'autobus, sans préciser si l'une des deux professions est plus à risque. En outre, elle ne précise pas si le travail de chauffeur de camion implique uniquement la conduite du véhicule ou si celui-ci implique des tâches physiques reliées au déchargement et au chargement, comme c'est le cas en l'espèce. D'autre part, seul un autre collègue du travailleur présenterait un syndrome du canal carpien. Il ne s'agit donc pas d'une maladie fréquente chez les conducteurs de camion au service de l'employeur. Par ailleurs, le travailleur n'a pas démontré que sa maladie était reliée aux risques particuliers de son travail.

 

Charpentier-menuiser

Guérin et Boiseries Signées (1993) inc., 2014 QCCLP 3733.

Épicondylite gauche. Le travailleur, un charpentier-menuisier, a produit une réclamation pour des diagnostics d’épicondylite gauche et d’épicondylite droite par compensation qu’il attribue à l’exécution de son travail. Il travaille 40 heures par semaine et bénéficie de deux pauses de 15 minutes chaque jour en plus d’une pause de 30 minutes pour le dîner. Il occupe le même poste chez l’employeur depuis 17 ans. Il doit utiliser divers outils comme des scies circulaires, des marteaux, des marteaux-piqueurs (plus rarement), des scies à béton, des perceuses, etc. Même s’il est contremaître, il travaille physiquement autant que les autres. Il peut donc couper du bois, du béton, clouer des planches, etc. Le tribunal ne croit pas avoir en sa possession la preuve que l’épicondylite soit caractéristique du travail de charpentier-menuisier. Seul le cas d’un autre travailleur est évoqué, sans autres précisions. Même si la littérature médicale déposée en preuve indique que des épicondylites se retrouvent chez les travailleurs de la construction, cette preuve n'est pas suffisante pour pouvoir conclure qu’il s’agit d’une lésion caractéristique de ce travail. Toutefois, le travailleur a démontré que son épicondylite gauche est reliée aux risques particuliers de son travail. En ce qui a trait à l’épicondylite droite par compensation, la preuve ne démontre pas une sollicitation suffisamment importante des structures du site anatomique lésé pour expliquer cette nouvelle pathologie qui s’y est développée.

 

Chauffeur d’autobus

Mainguy et R.T.C. Chauffeurs, C.L.P. 237481-32-0406, 21 avril 2006, C. Lessard.

Syndrome du canal carpien bilatéral. Depuis septembre 1996, le travailleur est chauffeur d'autobus à temps plein et consacre environ 80 % de son temps de travail à un parcours de ville. Le travailleur souffre d'un syndrome du canal carpien bilatéral et d’une hypothyroïdie importante. L’étude de l’Institut en santé et en sécurité du travail déposée par l’ergonome du travailleur ne permet pas de soutenir que le syndrome du canal carpien du travailleur est caractéristique de son travail de chauffeur d’autobus. Cette étude a été effectuée uniquement avec les données obtenues par un sondage téléphonique effectué auprès de 238 personnes de l’île de Montréal qui ont subi une décompression du canal carpien, et seulement 6 d’entre elles sont identifiées comme appartenant au secteur des opérateurs d’équipement de transport, sans qu’il soit précisé lesquelles parmi ces personnes conduisaient un autobus en milieu urbain. Cette étude reconnaît que l’origine du syndrome du canal carpien est multifactorielle et que ses conclusions s’inspirent de données purement subjectives. Par ailleurs, le travailleur est porteur d’une des maladies reconnues contributoires d’un syndrome du canal carpien, soit l’hypothyroïdie. Cet élément ne peut, à lui seul, empêcher l'admissibilité d'une réclamation, mais il faut être en mesure de démontrer que le travail exercé comporte des facteurs de risques qui peuvent tout autant avoir contribué au développement du syndrome du canal carpien, preuve qui n’a pas été faite en l’espèce.

 

Commis de bureau

Harnois et Atelier de mécanique Bouffard inc., C.L.P. 286082-62B-0604, 17 avril 2007, N. Blanchard.

Dermite de contact allergique. La preuve ne permet pas de conclure que la dermite de contact allergique est caractéristique du travail de commis de bureau. Il serait présomptueux d’affirmer, du seul fait qu’un autre travailleur chez l’employeur ait éprouvé des problèmes cutanés, sans en connaître le diagnostic précis, que la maladie de la travailleuse est caractéristique de son travail. Le travailleur en question n’occupait pas le même genre de travail que la travailleuse. Il semble qu’il s’agissait d’un cas où le travailleur avait été en contact direct avec des substances telles que des solvants ou des lubrifiants, ce qui laisse supposer qu’il s’agissait d’une dermite de contact irritative plutôt qu’allergique, ce qui est différent puisque cette dermite se manifeste aussitôt que la peau du sujet entre en contact avec un agent irritant. Ce n’est pas le cas de la travailleuse. Par ailleurs, la travailleuse n’a pas réussi à démontrer que sa maladie était reliée aux risques particuliers du travail.

 

Concierge

Vézina et Commission scolaire de la Rivière-du-Nord,C.L.P. 229170-64-0403, 8 février 2007, J.-F. Martel.

Syndrome du canal carpien. Dans le cadre de son travail dans une école polyvalente, le travailleur vide les poubelles, nettoie les planchers avec une vadrouille, lave des tables ainsi que d'autres surfaces, et trois fois par semaine, il lave les planchers des corridors du complexe sportif, avec une machine « auto-récurreuse ». La simple référence à l’étude de l’Institut de recherche en santé et sécurité du travail concernant le syndrome du canal carpien ne suffit pas à démontrer que ce syndrome est une maladie caractéristique du travail d'entretien ménager. C’est au travailleur, et non à l'employeur, qu'incombe le fardeau de faire la démonstration requise par l'article 30. Il lui appartenait donc d'établir que les études épidémiologiques invoquées sont réellement applicables à son cas, en ce qu'elles s'appuieraient sur des données comparables à ses conditions de travail. Or, la preuve statistique et/ou épidémiologique ne permet pas de conclure que la maladie du travailleur est caractéristique de son travail. Au surplus, une preuve contraire a été administrée. En effet, le médecin expert de l'employeur témoigne qu'en sa qualité de médecin-conseil auprès de quatre commissions scolaires depuis quelques années, il n'a jamais rencontré un seul cas de syndrome du canal carpien chez un concierge. La preuve ne permet pas davantage de conclure que la maladie du travailleur est directement reliée aux risques particuliers de son travail.

 

Billingsley et Commission scolaire Lester B. Pearson, 2014 QCCLP 1310.

Syndrome du canal carpien bilatéral. Le travailleur doit entretenir les salles de cours, les bureaux, les aires communes et les salles de bain d’une école primaire. Il passe l’aspirateur quelques fois par semaine et il époussette. Il passe le balai dans les couloirs avant d’utiliser une machine qui ressemble à une surfaceuse de patinoire, laquelle sert à nettoyer les planchers. Il doit également faire de menus travaux de nettoyage ou de réparation, lesquels impliquent l’utilisation occasionnelle d’une perceuse. Il doit aussi transporter le papier servant à la reprographie. Les tâches de son poste sont variées et en plus de devoir faire de l’entretien ménager normal, il peut être appelé à faire des tâches supplémentaires, telles que de la menuiserie, en se servant d’un tournevis ou d’un marteau. L’étude de l’Institut de recherche en santé et sécurité du travail déposée par le travailleur n'est pas assez détaillée pour démontrer que les tâches du travailleur, dans le poste qu'il occupe, font qu'il est caractéristique pour un concierge d'école primaire de développer un syndrome du canal carpien. Cette même logique doit être retenue concernant le second document produit par le travailleur qui résume les risques inhérents au syndrome du canal carpien. En effet, bien que ce document indique qu'un travail de concierge est lié au syndrome du tunnel carpien, particulièrement pour les tâches de frottage, en l'espèce, le travailleur effectue une variété de mouvements et il n'a jamais indiqué qu'il devait frotter de façon continue sur une période de temps considérable. Ainsi, le travailleur n'a pas démontré, par une preuve prépondérante, que le syndrome du canal carpien bilatéral est caractéristique de son travail ni que sa pathologie est reliée aux risques particuliers de son travail.

 

Désosseuse de poulets

Olymel Sainte-Rosalie et Danis, C.L.P. 209952-04B-0306, 8 avril 2005, D. Lajoie.

Syndrome du canal carpien bilatéral. La travailleuse, qui occupe un poste de désosseur sur cônes, produit une réclamation dans laquelle elle allègue avoir subi une lésion professionnelle en raison de mouvements exécutés alors qu’elle était en formation et apprenait à désosser des poulets. Sous l'angle de l'article 30, la travailleuse soumet un passage d’un document concernant les lésions attribuables au travail répétitif dans lequel on indique que l'incidence du syndrome du canal carpien est plus élevée dans certains milieux industriels, dont les abattoirs. Cette seule indication est cependant nettement insuffisante pour conclure que le syndrome du canal carpien est caractéristique du travail. Au surplus, aucune preuve de nature épidémiologique ou statistique n'a été présentée permettant d'en venir à cette conclusion. La preuve prépondérante ne démontre pas que ce travail comporte des risques particuliers susceptibles d’avoir causé cette lésion.

 

Emballeuse de sacs de croustilles

Aliments Small Fry inc. et Lester, [2000] C.L.P. 960.

Syndrome du tunnel carpien bilatéral. Le travail d'emballeuse de la travailleuse consiste à placer des sacs de croustilles dans des boîtes. Elle doit d'abord déplier et ouvrir la boîte qu'elle place devant elle, en appui sur ses cuisses, pour ensuite la remplir avec 30 ou 50 sacs de croustilles qui arrivent sur un convoyeur ou un carrousel. Elle ferme la boîte et la dépose à sa gauche avant de recommencer l'opération. Des médecins diagnostiquent un syndrome du tunnel carpien plus important à droite qu'à gauche. En juin 1999, la travailleuse reprend un travail léger en utilisant sa main gauche et en portant une attelle et, en août, un bracelet épicondylien lui permet de reprendre son travail régulier. Le 10 décembre, la travailleuse subit une décompression du tunnel carpien droit et produit une réclamation à la CSST pour une RRA. Elle reprend son travail le 20 mai 1998, mais doit s'absenter dès le 22 mai pour un problème de saignement au site opératoire. La CSST accepte ses réclamations pour une maladie professionnelle le 31 mars 1997, soit un syndrome du tunnel carpien bilatéral, ainsi que pour des RRA les 9 décembre 1997 et 22 mai 1998. L'instance de révision maintient ces décisions, d'où les contestations de l'employeur. La CLP ne peut reconnaître que le syndrome du tunnel carpien est caractéristique du travail d'emballeuse exercé chez l'employeur. Le fait que 4 travailleuses sur 62 aient déclaré un tel syndrome est insuffisant pour conclure que cette maladie est caractéristique du travail en l'absence de toute autre donnée objective. Les études épidémiologiques invoquées au soutien de cette thèse révèlent une problématique dans le secteur de l’emballage ou des aliments et boissons, mais elles ne sont pas suffisamment précises pour permettre de conclure que les tâches évaluées dans ces études correspondent à celles effectuées par la travailleuse. Par ailleurs, la preuve prépondérante permet de conclure que le syndrome du tunnel carpien apparu le 31 mars 1997 est relié directement aux risques particuliers du travail d’emballeuse accompli par la travailleuse. L’intervention chirurgicale nécessitée le 10 décembre 1997 par cette maladie ainsi que la complication au site opératoire survenue le 22 mai 1998 constituent des RRA de la lésion initiale.

 

Hygiéniste dentaire

Gravel et Centre dentaire Côté, 2011 QCCLP 4998.

Dorsalgie et scapulalgie. La travailleuse, une hygiéniste dentaire depuis 14 ans, produit une réclamation dans laquelle elle allègue avoir ressenti une douleur à la région dorsale qui est apparue progressivement au travail sur une période de 10 ans. Elle associe cette douleur au positionnement de son rachis cervical durant l’exécution de son travail. La travailleuse fonde ses prétentions sur une étude statistique, soit un guide de prévention réalisé par l'Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail du secteur des affaires sociales, pour établir que sa maladie est caractéristique de son travail d'hygiéniste dentaire. Cette étude mentionne notamment que 68 % des hygiénistes présentent des douleurs musculo-squelettiques qui peuvent se manifester après quelques années, avec accentuation après 10 ans. Pour ce qui est des facteurs de risque, les auteurs rapportent que les traitements de nettoyage, en particulier le détartrage, présentent plusieurs facteurs de risque. Cette étude ne vise cependant aucunement à établir scientifiquement un lien entre la dorsalgie et la scapulalgie dont souffre la travailleuse et son travail d'hygiéniste. Ainsi que son titre le suggère, il s'agit avant tout d'un guide de prévention. Toutefois, en l'espèce, la preuve démontre que la maladie de la travailleuse est reliée aux risques particuliers de son travail.

 

Vannini et Clinique orthodontique Venne,2012 QCCLP 4856.

Tendinite de De Quervain et syndrome de l’intersection gauche. La travailleuse est spécialisée en orthodontie depuis août 2008. Antérieurement, soit de 2003 à 2008, elle a travaillé à temps plein dans des cliniques dentaires généralistes à titre d’hygiéniste dentaire. Chez l’employeur, on retrouve deux types de travaux dentaires. Les travaux dentaires majeurs consistent généralement à retirer les broches de la bouche des patients pour les remplacer par de nouveaux appareils. Quant aux travaux mineurs, ils obligent la travailleuse à apposer un fil lingual au travers des dents du patient pour éviter que celles-ci ne se meuvent au cours du processus. De mardi au jeudi, la travailleuse traite une vingtaine de patients, dont deux pour des travaux majeurs. Chaque lundi matin, elle doit meuler et tailler des modèles correspondant à la dentition de chaque patient rencontré la semaine précédente. L’après-midi du lundi est ensuite consacré aux visites sans rendez-vous. Quant aux vendredis, la travailleuse consacre son temps à recevoir les appels et à la prise de photos, tout en recevant environ quatre patients sans rendez-vous. Ses premiers symptômes sont apparus en juin 2011, ce qui correspond à l’une des deux périodes les plus achalandées de l’année, selon la travailleuse. Quant aux diagnostics de tendinite De Quervain, la présomption de l'article 29 s'applique et elle n'a pas été renversée. Quant au diagnostic du syndrome de l'intersection, la travailleuse n’a pas tenté de démontrer, au moyen d’études statistiques notamment, qu’un nombre significatif de personnes travaillant dans des conditions semblables sont également affectées par cette maladie, ou que celle-ci est plus présente chez ce type de travailleurs. La travailleuse n’a pas démontré que le syndrome de l’intersection est caractéristique de son travail. Toutefois, la preuve démontre qu’il a été contracté par le fait ou à l’occasion de son travail d’hygiéniste dentaire en orthodontie et qu’il est relié directement aux risques particuliers de ce travail.

 

Grandbois et Centre dentaire Garon-Sauvé & Ass. (f), 2014 QCCLP 319.

Cervicalgie. La travailleuse produit une réclamation à la CSST pour un diagnostic de cervicalgie sur discopathie dégénérative qu'elle attribue à l'exercice de son travail. Le diagnostic de cervicalgie ne figurant pas à l'annexe I, la travailleuse ne peut bénéficier de la présomption de maladie professionnelle. Quant à savoir si la maladie est caractéristique du travail d'hygiéniste dentaire, une étude de l'Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail du secteur des affaires sociales a été produite. Bien que celle-ci fasse état de certaines statistiques, ces informations ne sont pas suffisamment complètes pour conclure que la lésion qui affecte la travailleuse est une maladie caractéristique du travail d'hygiéniste dentaire. Par ailleurs, cette étude fait état d'une problématique réelle dans les cliniques dentaires en ce qui concerne les troubles musculo-squelettiques, notamment au niveau du cou et des épaules, en raison des positions statiques avec la tête penchée vers l'avant ou de côté et les membres supérieurs en élévation. Toutefois, elle concerne différents corps d'emplois et différents sites de lésion, de sorte qu'on ne peut conclure que la lésion qui affecte la travailleuse est caractéristique du travail d'hygiéniste dentaire. Quant à savoir si la pathologie de cette dernière est reliée aux risques particuliers de son travail, on doit conclure par l'affirmative.

 

St-Hilaire et Docteure Manon Voyer orthodontiste inc., 2014 QCCLP 2170.

Bursite calcifiée à l’épaule droite. L’horaire de travail de la travailleuse, une hygiéniste dentaire en orthodontie, est réparti sur trois jours, a raison de huit heures par jour, l’employeur fermant sa clinique notamment durant les vacances ou les congrès. Elle exécute un ensemble de tâches variées. Maintes tâches sont entrecoupées de micro-pauses et de pauses au cours desquelles la travailleuse attend l’orthodontiste. Les tâches décrites comme celles qui génèrent le plus de douleur ne comportent pas de répétitions de mouvement ou de pressions sur des périodes de temps prolongées puisqu’elles s’accomplissent sur des périodes plutôt courtes. La présomption prévue à l’article 29 ne s’applique pas. La travailleuse n’a pas non plus prouvé que la bursite calcifiée est caractéristique de son travail. À ce sujet, elle a produit un document constitué d'extraits du Guide de prévention des troubles musculosquelettiques en clinique dentaire, réalisé par l'Association paritaire pour la santé et sécurité du travail du secteur des affaires sociales (ASSTSAS). Il comporte certaines statistiques liées aux troubles musculosquelettiques rencontrés par les hygiénistes dentaires travaillant en clinique dentaire. Or, ces statistiques permettent tout au plus d'établir que des lésions musculosquelettiques, dont la bursite fait partie, y surviennent et que certaines sont des maladies professionnelles. Elles ne démontrent pas de manière prépondérante que la lésion de la travailleuse est une maladie professionnelle. La travailleuse n'a pas davantage prouvé que sa lésion est reliée directement aux risques particuliers de son travail.

 

Peintre-débosseleur

Automobile Paquin ltée et Gauthier, C.L.P. 196796-08-0212, 29 juin 2007, Monique Lamarre.

Épicondylite bilatérale. Depuis 1972, le travailleur est peintre-débosseleur chez l'employeur. En septembre et en novembre 2001, il doit peindre deux gros véhicules et il commence à ressentir des symptômes aux coudes. Le 14 mars 2002, un médecin retient le diagnostic d'épicondylite bilatérale. En l’espèce, la preuve soumise par le travailleur est insuffisante pour conclure que l’épicondylite bilatérale est caractéristique du travail de débosseleur. Dans le cadre de son expertise et de son témoignage, le médecin du travailleur se réfère à deux articles. Le premier est non scientifique et il réfère à des données générales quant aux lésions musculosquelettiques des membres supérieurs dans le secteur des services automobiles . Le deuxième est un mémoire de maîtrise d’un étudiant en Sécurité et Hygiène industrielles . En ce qui concerne les éléments les plus pertinents, l’étude statistique ne fait pas la distinction entre les mécaniciens et les peintres-carrossiers. De plus, au chapitre de l’analyse des tâches, l'auteur limite ses observations seulement à certaines tâches d’un peintre-débosseleur qu’il n’observe que pendant 53 minutes, ce qui ne correspond pas entièrement aux tâches du travailleur qui sont beaucoup plus variées. Ainsi, la preuve ne démontre pas de façon prépondérante qu’il y a une prévalence chez les travailleurs exerçant le même métier dans les mêmes conditions de développer une épicondylite bilatérale. La preuve soumise ne démontre pas que cette pathologie est caractéristique du travail exercé par le travailleur.

 

Pompier

Tremblay et Institut de protection contre les incendies du Québec, C.L.P. 301767-63-0610, 27 avril 2010, L. Morissette.

Lymphome non hodgkinien. Le travailleur a été pompier durant un peu plus de huit années. Après ce temps, il reçoit un diagnostic de cancer qui était alors au stade III A. Son exposition à la fumée d’incendie est celle d’un pompier « moyen ». Il est établi que cette fumée contenait différentes substances, dont certaines ont été classées comme étant cancérigènes. Le travailleur portait un appareil de protection respiratoire brièvement durant un incendie et il l’enlevait pour le déblai alors que les substances cancérigènes étaient encore dans l’air. Pour conclure qu'une maladie est caractéristique d'un travail, le travailleur doit démontrer que l'association entre le métier et la maladie reflète des conditions semblables à celles qu'il a exercées. La nature de la preuve présentée par le biais d'études épidémiologiques est générale et ne s’applique pas nécessairement aux faits d'une litige particulier. En l'espèce, la preuve n'est pas prépondérante que des travailleurs ayant exercé le travail de pompier dans des conditions semblables à celles du travailleur, soit pendant neuf années et moins, aient contracté un lymphome non hodgkinien. Les seuls résultats disponibles laissent croire le contraire. En effet, dans l'un des études, les auteurs concluent que le seul résultat significatif pour le lymphome non hodgkinien concerne les pompiers qui ont plus de 20 ans de service. Il en est de même pour les cancers du rein, le myélome multiple et les néoplasies bénignes. Le travailleur n'a pas réussi à démontrer, par le biais d'une preuve probante, que le lymphome non hodgkinien est caractéristique du travail de pompier. 

 

Suivi : 

Révision rejetée, 2011 QCCLP 3828.

Préparateur de commandes dans un entrepôt

Métro-Richelieu inc. et Boily, C.L.P. 303130-31-0611, 10 août 2009, M. Beaudoin.

Épicondylite et épitrochléite. De mai 2006 à janvier 2007, six travailleurs, tous préparateurs de commandes de soir ou de nuit, font une réclamation à la CSST pour un ou des diagnostics d'épicondylite et d'épitrochléite. L'employeur gère un entrepôt de denrées non périssables dans lequel le préposé aux commandes prépare manuellement les commandes qui sont expédiées dans plusieurs supermarchés. Le travail consiste à réunir sur des palettes les différents produits placés sur des étagères à deux niveaux. Les denrées sont dans des boîtes fermées de différentes dimensions, ou sont empaquetées sur un fond cartonné recouvert d'un plastique épais, et le poids des boîtes est variable. Au cours de la période pertinente, des modifications sont faites quant à la hauteur des étagères et des niveaux. Plusieurs changements opérationnels ont lieu au fil des ans. La gestion de l'entrepôt est informatisée et le rendement des préparateurs s'évalue en fonction des temps standards accordés pour chaque assignation. Depuis octobre 2005, les préparateurs de commandes reçoivent les ordres de travail par un casque d'écoute. À compter de janvier 2006, les temps standards ont été ajustés, un échéancier est adopté pour permettre aux préparateurs d'atteindre les nouveaux objectifs et une période de formation est prévue afin de leur permettre d'atteindre 100 % des temps standards requis en avril 2006. L'argument d'une maladie caractéristique du travail est avancé du fait qu’en l’espèce six travailleurs occupant les mêmes fonctions ont développé les mêmes pathologies. Cependant, il n'y a pas de preuve probante d’une maladie qui peut être considérée spécifique, distinctive et typique du travail exercé. Aucune preuve scientifique probante ne vient appuyer une conclusion selon laquelle on trouverait chez les préparateurs de commandes une incidence plus grande d’épicondylite ou d’épitrochléite. Par ailleurs, le contexte se rapproche davantage de la notion d’accident du travail. La CLP ne croit pas que les facteurs de risque identifiés constituent un risque particulier du travail au sens de l’article 30. Les travailleurs n’ont pas développé leurs lésions dans des conditions habituelles d’exercice de leur travail, mais c’est plutôt en raison de circonstances inhabituelles que les pathologies sont apparues. Le contexte de travail à la source des lésions est le même pour tous les travailleurs concernés et un lien de causalité probable a été établi pour chacune des réclamations.

 

Préposée aux chambres

Létourneau et Hôtel Le Président,2013 QCCLP 4872.

Syndrome du canal carpien. Au cours d’une journée type, la travailleuse voit à l’entretien de quinze chambres. De ce nombre, de neuf à dix sont libérées par leurs occupants alors que les autres continuent à être utilisées par les mêmes personnes. Dans cette dernière situation, elle n’a pas à changer les draps et taies des lits. L’employeur lui accorde 30 minutes pour faire le ménage d’une chambre qui se libère et 15 pour une dont l’occupation se poursuit. Jusqu’à l'automne 2011, elle était chargée du nettoyage d’espaces communs à raison d’une journée par semaine. En décembre 2010, alors qu’elle pense que les symptômes sont présents depuis environ un an, la travailleuse consulte un médecin rattaché à une clinique d’urgence. Le 8 juin 2012, pour traiter un syndrome du canal carpien droit, la travailleuse est opérée et étant incapable d’exercer son emploi en raison de sa chirurgie, elle dépose une réclamation, laquelle sera rejetée. Après avoir déclaré que la réclamation était recevable, le tribunal conclut qu’il n'y a pas de preuve qu'un nombre important de personnes travaillant dans des conditions similaires soient atteintes d'un syndrome du canal carpien droit. De même, rien ne laisse présager que cette pathologie soit plus présente dans l'emploi de préposée aux chambres que dans la population en général. L'article d'un chercheur (étude de Rossignol, 1996) déposé par la travailleuse désigne particulièrement l'emploi de « préposé à l'entretien ménager », alors que le poste de la travailleuse est celui de « préposée aux chambres » d'un établissement hôtelier. Le texte ne permettant pas de connaître la nature des tâches d'un préposé à l'entretien ménager, il devient hasardeux de transposer les conclusions de l'auteur de l'article à l'emploi de la travailleuse. Au surplus, en ce qui concerne l'entretien des parties communes que la travailleuse a fait jusqu'à l'automne 2011, cette tâche était effectuée seulement une fois par semaine.

 

Préposée à l’entretien ménager  

Branco et Industries de maintenance Empire inc.,C.L.P. 217550-71-0310, 2 août 2005, B. Roy.

Syndrome du canal carpien. La travailleuse fait valoir que sa condition au poignet droit est une maladie caractéristique de son travail. Elle s'est appuyée sur une étude de l'Institut de recherche en santé et en sécurité du travail du Québec ainsi que sur un ouvrage se rapportant aux lésions attribuables au travail répétitif. Selon la première étude, sept groupes de professions ont montré des excès significatifs d'incidence du syndrome du canal carpien. Parmi ces groupes, on trouve les préposés à l'entretien ménager. Selon la deuxième étude, l'invariabilité d'une tâche est un facteur de risque. Une tâche appartient à cette catégorie lorsqu'elle est fortement répétitive, qu'elle varie très peu et lorsqu'une charge est subie par les mêmes tissus, toujours de pareille façon. Les conclusions de la première étude ne sont pas automatiquement transposables au cas de la travailleuse. En effet, bien que cette dernière soit préposée à l'entretien ménager, il faut savoir qu'il y a diverses sortes de préposées. La travailleuse est de classe B et son travail n'est manifestement pas aussi physiquement exigeant. Elle est essentiellement responsable de l'époussetage, dans un environnement qui est apparemment moins difficile qu'ailleurs. Le travail de nettoyage des salles de toilettes est superficiel et les occasions de frotter pour enlever des taches ne sont pas aussi fréquentes que dans d'autres bureaux. Passer l'aspirateur ne semble pas non plus exiger beaucoup sur le plan physique, même si la travailleuse estime que cela exige des gestes de déviation cubitale de la main droite. Cette dernière doit aussi nettoyer les appareils de téléphone et les plaques d'identification ou vider des poubelles, mais il s'agit encore là d'un travail relativement léger. Rien de cela n'est fait sous pression et la travailleuse n'a pas à respecter de cadence. Il n'y a pas vraiment de force ou de pressions à exercer. L'étude déposée ne peut fonder la conclusion que le syndrome du canal carpien est caractéristique du travail de la travailleuse. Par ailleurs, elle n'a pas réussi à démontrer que sa lésion était reliée directement aux risques particuliers de son travail.  

 

Professeur d’éducation physique  

Chiasson et Cégep Lévis-Lauzon, C.L.P. 387341-31-0908, 21 octobre 2010, M.-A. Jobidon.

Coxarthrose à la hanche gauche. Le travailleur a été professeur d'éducation physique au niveau collégial de 1974 à 2008. Au cours d'une semaine de travail, il enseignait de 16 à 18 heures, le reste du temps étant consacré à la préparation des cours et à la correction des travaux. Il s'adonnait plusieurs heures par semaine à l'entraînement sportif. Durant cette période, il a enseigné de nombreuses disciplines. Par la suite, il a été entraîneur de l'équipe de ski alpin intercollégial et a continué son entraînement personnel. Ses symptômes sont apparus en 2005, plus à gauche qu'à droite. En 2007, un diagnostic de coxarthrose à la hanche gauche a été posé. En août 2008, il a subi une chirurgie, soit un resurfaçage de la hanche gauche. Le travailleur demande de tenir compte de l’entraînement physique auquel il s’est livré depuis son adolescence et hors de son travail, et ce, durant toute sa carrière. La preuve qu'une maladie est caractéristique d'un travail peut être faite notamment par des études statistiques et épidémiologiques et doit porter sur un grand nombre de personnes afin d'éliminer une association fortuite. La preuve est insuffisante pour établir cette relation. L'une des études déposée date de 1998 et visait à démontrer la relation possible entre les activités physiques et l'arthrose de la hanche chez les femmes de 50 à 70 ans. Elle n'est pas concluante, car il existe une distinction entre la simple pratique d'activités physiques et le niveau d'entraînement auquel s'adonnait le travailleur. De plus, l'âge de la cohorte ciblée rend l'étude non pertinente. Une autre étude ne traitait pas du sujet en cause et d'autres articles expliquent la nature de l'arthrose en général ou de la coxarthrose en particulier, faisant parfois état d'une possible relation avec une pratique élevée d'activités physiques à titre de facteurs de risque. À défaut d’avoir une preuve prépondérante lui permettant de conclure que la coxarthrose de la hanche est une maladie caractéristique du travail de professeur d’éducation physique dans des conditions exercées au niveau d’un cégep, la réclamation doit être analysée sous l'angle des risques particuliers du travail. La maladie pour laquelle le travailleur a fait une réclamation ne peut être davantage reconnue à ce titre en vertu de l’article 30.

 

Suivi :

Révision rejetée, 2011 QCCLP 5508.

Serveuse dans un restaurant

Bélisle et Restaurant Mikes, [2007] C.L.P. 1443. 

Syndrome du canal carpien bilatéral. En avril 2006, la travailleuse, une serveuse dans un restaurant, commence à ressentir des symptômes aux mains. Le 28 juillet, son médecin diagnostique un syndrome du canal carpien bilatéral. Le représentant de la travailleuse dépose un extrait de doctrine médicale pour démontrer que cette maladie est plus présente chez les personnes qui occupent certains emplois que dans la population en général. Cette étude, dont les résultats ont été publiés en 1996, indique que 45 % des causes de syndrome du canal carpien chez les travailleurs qui ont des tâches manuelles sur l'île de Montréal sont attribuables au travail et que sept groupes de professions ont montré des excès significatifs d'incidence du syndrome du canal carpien dont, en cinquième position, les préposés au service, secteur aliments et boissons. Cependant, le tribunal estime qu’il ne peut conclure, sur la base de cette étude, que le syndrome du canal carpien dont la travailleuse est atteinte est une maladie caractéristique du travail de serveuse qu’elle a exercé chez l’employeur. Cette étude n'est pas suffisamment précise pour permettre de conclure que les tâches qui y sont évaluées correspondent à celles effectuées par la travailleuse. Il n’y a aucune indication relativement à la période de temps durant laquelle l’emploi a été occupé par les participants. Il n’y a aucune donnée de comparaison pour établir si la catégorie nommée « préposés au service, secteur aliments et boissons » est composée d'un nombre significatif de personnes travaillant dans des conditions semblables à celles de la travailleuse. Il n'y a eu aucune réclamation pour un syndrome du canal carpien chez l'employeur depuis 1989. La CLP ne peut reconnaître que le syndrome du canal carpien bilatéral est une maladie caractéristique du travail de serveuse. La travailleuse n’a pas davantage démontré que sa maladie est reliée aux risques particuliers de l’emploi de serveuse.

 

Suivi :

Révision rejetée, [2008] C.L.P. 780.

Technologue en échographie cardiaque

Ferguson et Clinique de physiothérapie Beauport, C.L.P. 293116-31-0607, 13 février 2008, C. Lessard.

Épicondylite. En septembre 2005, la travailleuse, une technologue en radiologie, entreprend une formation spécialisée en échographie cardiaque. En novembre, elle commence à ressentir un inconfort au niveau de l'avant-bras gauche, particulièrement lorsqu'elle exerce une pression avec la sonde. Le 13 janvier 2006, les douleurs s'avèrent insupportables et incapacitantes et on diagnostique une épicondylite gauche. La lésion est consolidée le 3 mars, sans atteinte permanente ni limitations fonctionnelles. La travailleuse reprend, à temps plein, le travail de technologue en échographie cardiaque, tout en ressentant de légères douleurs. Le 14 juin, elle connaît une reprise de la symptomatologie attribuable à son épicondylite externe gauche. À l'audience, le médecin de la travailleuse explique que le mouvement effectué pour manipuler la sonde et la maintenir ensuite pendant une période suffisamment longue tout en exerçant une pression met à contribution les muscles épicondyliens. Cette pression doit être exercée pendant environ 40 à 45 minutes pour chaque patient, 7 à 8 fois par jour, ce qui entraîne un temps de récupération nettement insuffisant. Il est d'avis que le maintien prolongé d'une posture statique combiné à l'exercice d'une pression implique une contraction exercée sur de longues périodes, et ce, sans que la travailleuse puisse prendre appui sur la table d'examen. Il réfère également à des extraits de littérature ayant trait à des études portant spécifiquement sur les facteurs de risques pouvant être associés au travail de technologue en échographie. Faute de soumettre une preuve de nature épidémiologique établissant la probabilité d'une relation entre le type de travail exercé et la maladie en cause, la travailleuse n'a pas démontré que cette maladie est caractéristique de son travail. L'ensemble des études auxquelles fait référence son médecin constitue plutôt des sondages auprès de ces travailleurs et permet tout au plus le constat d'une prévalence des lésions musculo-squelettiques au niveau du membre supérieur ainsi qu'aux niveaux de l'épaule et du cou, sans identifier de manière plus précise la lésion en cause, à savoir une épicondylite. Ces études ne permettent pas d'associer, en toute probabilité, le diagnostic d'épicondylite au travail de technologue en échographie cardiaque. Par ailleurs, la travailleuse s’est acquittée du fardeau de démontrer, par une preuve prépondérante, que la lésion diagnostiquée est reliée à des risques particuliers de son travail et qu’elle a subi une RRA, le 13 juin 2006, de la lésion initialement subie en janvier 2006.