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. 60. Salaire pendant 14 jours

Paiement par l'employeur

Favreau et Sécurité Kolossal inc., C.L.P. 251833-63-0412, 2 mars 2005, J.-P. Arsenault.

N'ayant pas été payé pour les journées du 5 et du 6 juin 2004, le travailleur transmet à la CSST une plainte en vertu de l'article 32 en invoquant que l'employeur ne s'est pas conformé à l'article 60, qui prévoit le versement de 90 % de son salaire net pour chaque jour ou partie de jour où il a été empêché de travailler pendant les 14 jours qui suivent le début de son incapacité. La loi est une loi d'ordre public. Non seulement l'employeur ne peut se soustraire à son application, il doit tout simplement l'observer. Invoquant l'obligation pour le travailleur de faire attester son incapacité avant ou la journée même où elle se concrétise eu égard à ses activités professionnelles, l'employeur cherche à imposer au travailleur une obligation que la loi ne prévoit pas. Lorsque le médecin traitant précise le diagnostic d'une lésion professionnelle, quelques jours seulement après sa survenance, et qu'il estime que le travailleur sera en mesure de reprendre son travail régulier le lendemain de la consultation, il faut présumer que, entre la date de survenance de cette lésion et la date de cette consultation, le travailleur est en incapacité de travailler. En se soustrayant à l'application d'une loi d'ordre public, l'employeur exerce une mesure qui va à l'encontre de la loi, ce qui constitue une mesure discriminatoire donnant ouverture à l'application des articles 32 et 255.

Plouffe-Michaud et Provigo Distribution (Division Maxi), C.L.P. 321081-62C-0706, 13 mars 2009, C. Burdett.

La travailleuse dépose une plainte en vertu de l'article 32 au motif que l'employeur ne lui a pas remboursé la totalité des 14 premiers jours suivant le début de son incapacité. IL ne peut être passé outre à l'article 60 en cas de refus de la lésion professionnelle. La loi est d'ordre public et les obligations découlant de l'article 60 le sont tout autant. Cet article édicte les obligations de l'employeur sans égard à l'admissibilité ou au refus de la réclamation. Ainsi, l'employeur doit payer directement au travailleur 90 % de son salaire net pour les 14 premiers jours d'incapacité résultant d'une lésion professionnelle. Ce montant constitue l'IRR à laquelle le travailleur a droit.

Événement extérieur à la lésion professionnelle

Fin du contrat à durée déterminée

Métivier et Fondations Conrad Bafaro inc., 2011 QCCLP 2576.

La lésion professionnelle du travailleur survient le 12 mai 2010 et entraîne un arrêt de travail jusqu’au 24 mai 2010 inclusivement. Pour la période des 14 premiers jours, l’employeur verse au travailleur 90 % de son salaire net pour la journée du 12 mai uniquement, puisqu’il allègue que le travailleur n’aurait pas travaillé pour lui au-delà du 13 mai 2010. Le travailleur réclame le salaire pour les 14 jours complets suivant le début de son incapacité, car n’eût été sa lésion survenue le 12 mai 2010, il aurait travaillé pour un autre employeur. À cet égard, il dépose une lettre produite par un autre employeur du secteur de la construction confirmant la disponibilité d’emploi pour toute la saison 2010. Or, la preuve produite par le travailleur d’une disponibilité d’emploi n’est pas essentielle à la reconnaissance du droit au versement de l’indemnité pour les 14 premiers jours. En effet, les termes « aurait normalement travaillé » mentionnés à l’article 60 doivent être interprétés dans le sens de fréquence habituelle de la prestation de travail du travailleur et visent à protéger la capacité de gains de ce dernier. Le travailleur a donc droit au paiement des 14 premiers jours suivant sa lésion professionnelle, en raison de son incapacité à exercer son emploi jusqu’au 24 mai.

Fermeture d’usine

Lapointe et Papier Journal Domtar inc.,[1986] C.A.L.P. 116.

Le travailleur est victime d’un accident du travail le 17 décembre 1985, soit trois jours avant la fermeture temporaire de l’usine. Concernant le paiement des 14 premiers jours, l’employeur invoque que l’usine étant fermée du 21 décembre 1985 au 2 janvier 1986, le travailleur n’aurait travaillé que les 18, 19 et 20 décembre. Seules ces trois journées doivent donc être payées au travailleur. Or, selon la CALP, les termes « aurait normalement travaillé », utilisés à l'article 60, ne doivent pas être dissociés des termes « n'eût été de son incapacité ». Ainsi, il ne faut pas tenir compte de facteurs ni de circonstances extrinsèques à l'incapacité du travailleur victime d’une lésion professionnelle pour déterminer à quelle période il aurait travaillé, de façon habituelle et n’eût été de son incapacité, durant les 14 premiers jours suivant le début de son incapacité. Par conséquent, le travailleur a droit au versement de 90 % de son salaire net pour chaque jour ou partie de jour où il aurait normalement travaillé selon son horaire habituel de travail, et ce, sans égard à la fermeture de l’usine pendant la période des 14 premiers jours suivant le début de son incapacité. En l’espèce, c’est en raison de sa lésion professionnelle que le travailleur a été incapable d’exercer son emploi entre le 17 décembre 1985 jusqu’au 2 janvier 1986.

Suivi :

Requête en évocation rejetée, [1987] C.A.L.P. 254 (C.S.)

Appel accueilli, [1991] R.J.Q. 2438 (C.A.)

Pourvoi à la Cour suprême accueilli, [1993] 2 R.C.S. 756.

Grève ou lock-out 

Dominion Bridge-Québec et Villeneuve,C.A.L.P. 25908-01-9101, 13 mai 1994, J.-G. Roy.

L’article 60 doit être interprété comme ne dissociant pas les termes « aurait normalement travaillé » et « n'eût été de son incapacité ». De plus, pour décider du droit du travailleur de recevoir de son employeur l'indemnité durant les 14 premiers jours, il ne faut pas tenir compte des circonstances ou des facteurs étrangers à l'incapacité du travailleur d’exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle. Ainsi, la grève des 5 et 6 avril constitue un élément étranger à la capacité du travailleur d'exercer son emploi. L'employeur se doit donc de lui verser l'indemnité pour ces jours où il aurait normalement travaillé, n'eût été de son incapacité. 

Mise à pied

Tousignant et Hawker Siddeley Canada inc.,[1986] C.A.L.P. 48.

Le 1er octobre, le travailleur est victime d’un accident du travail, mais il continue néanmoins à exécuter son travail. Le 8 octobre, le travailleur consulte à nouveau son médecin qui lui prescrit un arrêt de travail jusqu’au 11 octobre. La date de consolidation est prévue le 21 octobre. Entre temps, le travailleur reçoit un avis l’informant d’une mise à pied effective le 12 octobre, soit pendant la période des 14 premiers jours. L’employeur verse au travailleur 90% de son salaire net pour les 9, 10 et 11 octobre seulement. L’employeur devra aussi verser au travailleur le même salaire pour les journées du 14 au 18 octobre inclusivement. L’indemnité pour un travailleur victime d'une lésion professionnelle est seulement conditionnelle à son incapacité d'exercer son emploi en raison de cette lésion et la mise à pied du travailleur ne saurait toucher son droit à l'IRR prévu à l'article 44. La rupture ou la suspension du contrat de travail pendant la période des 14 premiers jours suivant le début de son incapacité à exercer son emploi ne peut avoir pour effet d'interrompre le droit à l'IRR pour le travailleur qui devient incapable d'exercer son emploi en raison d'une lésion professionnelle.

Suivi :

Requête en évocation rejetée, [1987] R.J.Q. 1531 (C.S.).

Brais et Ascenseurs Idéal cie ltée,[1998] C.A.L.P. 62.

Pendant la période des 14 premiers jours, l’employeur refuse de payer cinq jours au motif que le travailleur à temps partiel n’aurait pas été appelé à travailler lors de ces journées. C’est le fait d’être privé de la possibilité de gain d’emploi à cause de la lésion professionnelle ou en d’autres termes, c’est l’incapacité de travailler que vise à compenser l’article 60 pour les 14 premiers jours. Le libellé de l’article 60 permet de conclure que le droit à l’IRR est seulement conditionnel à l’incapacité d’exercer son emploi en raison d’une lésion professionnelle et que la mise à pied du travailleur ne saurait affecter son droit à l’IRR prévu à l’article 44.

Isabelle et Arno Électrique ltée,C.L.P. 107646-04-9812, 21 mai 1999, H. Thériault.

Le travailleur a soumis sa plainte en vertu de l'article 32 en raison du refus de l'employeur de lui verser l'indemnité prévue à l'article 60 pour les 14 premiers jours suivant le début de son incapacité à exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle, au motif que le travailleur a été mis à pied le lendemain de la survenance de sa lésion professionnelle. La mise à pied du travailleur n'est d'aucune pertinence et l'employeur ne peut déroger à l'obligation que lui impose l'article 60. En pareil cas, on doit conclure que le travailleur a été victime de représailles prohibées par l'article 32 et que sa plainte est bien fondée.

Suivi :

Révision rejetée, 10 janvier 2002, G. Marquis.

Maison Marcoux inc. et Lehouillier,C.L.P. 166669-03B-0108, 20 novembre 2001, R. Jolicoeur.

Le 17 janvier 2001, le travailleur est victime d'une lésion professionnelle. L'employeur refuse de payer l’indemnité pour les 14 premiers jours suivant l'incapacité du travailleur hormis pour les journées des 18 et 19 janvier, car à cette dernière date, il y a eu une mise à pied massive des employés et une fermeture temporaire de l'usine s'en est suivie. L'employeur devait verser au travailleur, et ce, sans égard à la fermeture de l'usine, 90 % de son salaire net pour chaque jour ou partie de jour où il aurait normalement travaillé, selon son horaire habituel de travail, n'eût été son incapacité d'exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle. En effet, l'expression contenue à l'article 60 « aurait normalement travaillé » ne peut être dissociée des termes « n'eût été de son incapacité » qui la suivent immédiatement. Ainsi, aux fins d'interprétation de cette disposition, on ne peut tenir compte de facteurs ou circonstances extrinsèques à l'incapacité du travailleur d'exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle. La suspension ou la rupture du contrat de travail par une mise à pied n'a aucune incidence sur l'incapacité du travailleur d'exercer son emploi à la suite d'une lésion professionnelle.

Dessercom inc. et Gingras,C.L.P. 249652-31-0411, 29 novembre 2005, J.-M. Charrette.

Le 30 septembre 2003, la travailleuse subit une lésion professionnelle, laquelle sera consolidée le 8 octobre de la même année. Entre temps, le 1er octobre, l'employeur informe la travailleuse qu'elle est suspendue pour des motifs disciplinaires. La période de suspension est prolongée jusqu’au 16 octobre. Ce même jour, l’employeur congédie la travailleuse, et ce, rétroactivement au 8 octobre précédent. Une décision du tribunal d’arbitrage rejette les griefs de la travailleuse et confirme son congédiement. Ainsi, la seule question en litige est le versement à la travailleuse des sommes dues entre le 30 septembre et le 8 octobre 2003, soit pendant la période des 14 premiers jours suivant l’incapacité de la travailleuse. Selon l’article 60, l’employeur ne peut pas se dégager de cette obligation, car le paiement de l'indemnité correspond au salaire que la travailleuse aurait normalement gagné au cours des 14 premiers jours qui suivent la lésion professionnelle, et ce, sans considération de facteurs extrinsèques. Or, tout comme la mise à pied, la suspension de la travailleuse est un facteur extrinsèque n’ayant aucune incidence sur l'incapacité de la travailleuse d'exercer son emploi à la suite d'une lésion professionnelle.

Vacances

Britton Électrique limitée et De Fronzo,C.L.P. 106632-71-9810, 21 mai 1999, M. Zigby.

Le travailleur a subi une lésion professionnelle en juin 1997 et l'employeur, conformément à l'article 60, lui a versé l'IRR pour la période des 14 premiers jours suivant le début de son incapacité de travailler. L'employeur n'a toutefois pas versé l'indemnité pour deux jours fériés, soit pour les fêtes nationales du Québec et du Canada. Il invoque qu’il a déjà versé une indemnité de vacances pour ces journées et qu'il y aurait alors une double rémunération. Or, la jurisprudence veut que l'expression « aurait normalement travaillé » contenue à l'article 60 ne puisse être dissociée des termes « n'eût été son incapacité ». Il en découle que l'employeur ne peut invoquer des facteurs extrinsèques à l'incapacité, tels les vacances annuelles ou les jours fériés, pour se soustraire à son obligation de paiement. Le travailleur a donc droit à l'IRR pour les deux congés fériés.

Daniel Coulombe construction inc. et Cloutier,C.L.P. 160939-03B-0105, 16 novembre 2001, G. Marquis.

L'employeur est tenu de verser au travailleur l'indemnité prévue à l'article 60 pour la période des 14 premiers jours d'incapacité, et ce, malgré la circonstance extrinsèque que constitue le congé obligatoire en raison des vacances annuelles de la construction. Le versement d'une IRR pendant la même période où est versée une paie de vacances ne peut être interprété comme une double indemnité.

Congé ou jours fériés 

Construction DJL inc. et Allain,C.L.P. 120439-01C-9907, 28 août 2000, L. Desbois.

Un travailleur de la construction a subi une lésion professionnelle le 15 septembre 1998 et il s'est absenté du travail jusqu'au 13 octobre 1998. Pendant la période des 14 premiers jours, l'employeur a refusé de verser au travailleur 90 % de son salaire net pour la journée du 12 octobre, soit pour le congé de l'Action de grâce. Selon l’interprétation donnée à l’article 60, le travailleur a droit au paiement des 14 premiers jours sans tenir compte des facteurs extrinsèques, dont les vacances ou les jours fériés. Par conséquent, l’employeur devait verser au travailleur l’indemnité prévue à l’article 60 pour la journée de l’Action de grâce, congé férié et chômé selon la convention collective de l’industrie de la construction. Les indemnités de congé versées par la Commission de la construction du Québec (C.C.Q.) constituent des économies faites par le travailleur en prévision de congés et non une rémunération. Ainsi, il ne s'agit pas d'une double rémunération puisque le travailleur ne fait que recevoir des économies pour lesquelles la C.C.Q. a agi comme fiduciaire.

Compagnie Wilfrid Allen Ltée et Bard,C.L.P. 143641-01A-0007, 5 juillet 2001, R.-M. Pelletier.

Le tribunal rejette l'argument de l'employeur voulant qu’il n’a pas à verser au travailleur l’indemnité prévue à l’article 60 pour un congé férié, car le travailleur n'aurait normalement pas travaillé un jour férié et parce que cette journée est déjà payée selon les dispositions de la convention collective régissant l'industrie de la construction. En vertu des articles 44 et 60, l’indemnité versée comprend les jours fériés.

Rousseau et Transformation B.Y. Inc.,C.L.P. 196481-05-0212, 5 février 2003, F. Poupart.

Le 8 juillet 2002, le travailleur présente une demande de congé mobile pour le 19 juillet 2002, en se conformant aux modalités prévues à la convention collective. Toutefois, le 15 juillet 2002, le travailleur subit une lésion professionnelle et il devient incapable d’exercer son emploi jusqu’au 5 août 2002. En ce qui concerne la journée du 19 juillet, l’employeur refuse de verser au travailleur l’indemnité prévue à l’article 60 étant donné que ce dernier bénéficie déjà d’un « congé payé » en vertu de la convention collective. Le travailleur a droit d'être indemnisé dès le début de son incapacité à exercer son emploi ce qui inclut la journée du 19 juillet. L’employeur ne peut pas priver le travailleur de cette indemnité à laquelle il a droit à la suite de la survenance d’un accident du travail, sous prétexte qu'il bénéficie d'une journée de congé en vertu de la convention collective.

Congé mobile

Rousseau et Transformation B.Y. Inc., C.L.P. 196481-05-0212, 5 février 2003, F. Poupart.

L'employeur verse au travailleur 90 % de son salaire net, sauf pour une journée au motif que cette journée avait fait l'objet d'une demande de congé mobile de sa part en vertu de la convention collective. Pour éviter que le travailleur soit privé de revenu pendant la période qui s'écoule inévitablement entre le début de son incapacité et le moment où la CSST décide de lui verser une IRR, le législateur a prévu, à l'article 60, une modalité particulière d'indemnisation, par l'entremise de l'employeur, pendant les 14 premiers jours de cette période. En l'espèce, en vertu de la convention collective le travailleur avait droit à trois congés mobiles. S'il n'utilisait pas ces congés, l'employeur devait lui verser une compensation monétaire dans la troisième semaine du mois de janvier. Le travailleur a présenté une demande de congé mobile pour une journée en se conformant aux modalités prévues à la convention. Toutefois, il est devenu incapable d'exercer son emploi, en raison d'une lésion professionnelle avant de pouvoir prendre cette journée de congé. Il avait droit d'être indemnisé en vertu de la LATMP dès le début de son incapacité à exercer son emploi. L'employeur ne devait donc pas le priver de cette indemnité, sous prétexte qu'il devait bénéficier d'une journée de congé en vertu de la convention collective.

Mauvaise température

Walsh et Ernest Hotte inc.,[2004] C.L.P. 959.

Il faut interpréter l’article 60 de manière à donner à cet article un sens qui favorise le paiement d’une indemnité correspondant au salaire que le travailleur aurait normalement gagné au cours des 14 premiers jours qui suivent la lésion professionnelle, et ce, sans examiner les facteurs extrinsèques. En l'espèce, l'employeur devait verser au travailleur la somme représentant l'indemnité pour les 14 premiers jours, incluant une journée au cours de laquelle il pleuvait et n’eût été de sa lésion, le travailleur n’aurait pas travaillé en raison de la mauvaise température.

Gagné & Roy inc. et Maltais,C.L.P. 167575-72-0108, 26 avril 2005, F. Juteau.

En ne versant au travailleur qu'une partie de l'indemnité prévue à l'article 60 pour les 14 premiers jours, notamment en raison de la température qui ne lui aurait pas permis d'exercer son emploi de couvreur pendant une journée, l'employeur lui a imposé une sanction au sens de l'article 32. En effet, il n’y a pas lieu de retenir des facteurs extrinsèques aux fins de déterminer le salaire que le travailleur aurait normalement gagné au cours des 14 premiers jours.