Interprétation

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. 60. Salaire pendant 14 jours

Paiement partiel ou complet par la CSST

Bien que ce soit en principe l'employeur chez qui le travailleur occupe un emploi lorsqu'il subit une lésion professionnelle qui soit tenu à l'obligation du paiement de 90 % du salaire net du travailleur pendant la période des 14 premiers jours suivant le début de son incapacité, il existe des situations où la CNESST assumera complètement ou partiellement le versement de ce salaire au travailleur.

Ainsi, la CNESST assumera complètement cette obligation dans le cas du travailleur à qui aucun employeur n'est tenu de verser un salaire en vertu de l'article 60, et ce, en vertu de l'article 124.

Par ailleurs, la jurisprudence considère que lorsqu'un travailleur exerce deux emplois au moment où il subit une lésion professionnelle, c'est la CNESST qui devra combler le manque à gagner chez l'un des deux employeurs.

En effet, l'article 60 crée une obligation pour l'employeur au service duquel se trouve un travailleur lorsqu'il est victime d'une lésion professionnelle. Pour la jurisprudence, cet employeur n'a pas à rembourser un travailleur engagé chez un autre employeur pour les jours où il aurait normalement travaillé pour cet autre employeur, et ce, même si la perte de capacité de travail attribuable à la lésion subie l'empêche de remplir sa prestation de travail régulière chez cet autre employeur. C'est la CSST qui a l'obligation de combler le manque à gagner eu égard à l'autre emploi en ce qui concerne le paiement des 14 premiers jours.

Travailleur sans emploi lors de la lésion professionnelle

Abdel-Meguid et General Motors du Canada ltée,[2002] C.L.P. 154.

Comme le travailleur était retraité lorsqu'il a présenté sa réclamation à la CSST, aucun employeur n'était tenu de lui verser un salaire en vertu de l'article 60. La CSST devait dès lors se conformer aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 124 si elle estimait que le travailleur était devenu incapable d'exercer son emploi en raison d'une lésion professionnelle.

 

Ganotec inc. et Hector,2011 QCCLP 6862.

L’événement accidentel a lieu le 23 mai 2009. Néanmoins, le travailleur termine sa journée de travail. Le même jour, le travailleur est mis à pied à la fin de son quart de travail, et ce, conformément à l’avis qu’il avait reçu la veille. Il s’agit d’une mise à pied définitive, car le chantier sur lequel le travailleur œuvrait prenait fin. Le travailleur consulte pour la première fois le 28 mai 2009 et il est mis en arrêt de travail le même jour pour une contusion au tiers moyen de la face latérale de la jambe droite. Or, le travailleur n’aurait jamais travaillé le 28 mai et les jours suivants, puisque son lien d’emploi était rompu. Par conséquent, l’employeur n’a pas à verser les 14 premiers jours d’indemnité prévus à l’article 60. Toute prétention contraire aurait pour effet de contraindre un employeur à verser l'indemnité prévue à l'article 60 pendant la période obligatoire à un travailleur qui subit une RRA et qui n’est plus à l’emploi de l’employeur chez qui il a subi la lésion initiale : cette interprétation, beaucoup trop large, est un non-sens. Selon le premier alinéa de l’article 60, il est essentiel que le travailleur soit à l’emploi de l’employeur au moment où il devient incapable d’exercer son emploi.

 

Laramée, 2015 QCCLP 519.

Au moment où survient une RRA, soit le 8 mai 2013, le travailleur n’occupe aucun emploi. Dans de telles circonstances, où aucun employeur n'est tenu de verser au travailleur l’indemnité des 14 premiers jours, puisqu'il n'exerce aucun emploi au moment du début de son incapacité, la responsabilité de verser cette IRR revient à la CSST, le tout conformément au deuxième alinéa de l'article 124. Le travailleur a donc le droit de recevoir une IRR pour la période du 8 au 22 mai 2013 inclusivement.

 

Voir :

Article 124.

Travailleur occupant deux emplois

Centre hospitalier Jacques-Viger et Normandeau, [2001] C.L.P. 742.

La travailleuse exerce un emploi à temps partiel au Centre hospitalier Jacques-Viger à raison de 7 nuits par 15 jours. Elle travaille également à temps partiel, soit 4 soirs par 15 jours pour le CHLD-CLSC Bordeaux-Cartierville. Le 18 août 2000, elle subit une lésion professionnelle au Centre Hospitalier Jacques-Viger. En vertu de l’article 60, ce dernier n'a pas à verser à la travailleuse le salaire qu’elle aurait gagné pour les jours où elle aurait normalement travaillé au service du CHLD-CLSC Bordeaux-Cartierville pendant la période des 14 premiers jours. Néanmoins, sachant que la travailleuse aurait, pendant cette période, normalement continué à exécuter sa prestation de travail auprès de cet autre employeur, le calcul de l'indemnité des 14 premiers jours doit se faire sur la base du salaire qu’elle aurait reçu, n'eût été son incapacité. Il ne serait conforme ni à la lettre ni à l'esprit de la loi d'imposer à un travailleur une indemnisation basée sur un revenu moindre que ce qu'il aurait réellement gagné. De même, il serait contraire à l'esprit de la loi d'indemniser un travailleur de façon différente selon qu'il travaille pour un seul ou plusieurs employeurs. Ainsi, en appliquant de manière complémentaire les articles 124 et 60, la CSST versera le salaire correspondant aux jours où la travailleuse aurait normalement travaillé chez l’autre employeur, à savoir, chez l’employeur où l’accident de travail n’est pas survenu. Cette compensation permet à un travailleur d'être indemnisé pour le manque à gagner pour les jours non travaillés chez cet autre employeur.

 

Centre hospitalier Jacques-Viger, C.L.P. 161991-62C-0105, 15 janvier 2002, J. Landry.

L’employeur conteste l’imputation à son dossier du coût des indemnités payées à la travailleuse par la CSST pour les jours où elle était incapable de travailler chez un autre employeur. Il invoque l’argument que la CSST n’avait pas l’obligation de verser ces indemnités. Effectivement, conformément à l’article 60, l’employeur chez qui le travailleur a subi la lésion professionnelle n’a pas l’obligation de rembourser le travailleur pour les journées où il aurait normalement travaillé pour un autre employeur. Par conséquent, dans de telles circonstances, l’article 124 complète l’article 60. En effet, c’est à la CSST d’indemniser le travailleur pour le manque à gagner eu égard à l’autre emploi. L’expression utilisée par le législateur à l’article 124 qui se lit comme suit : « à qui aucun employeur n’est tenu de verser un salaire en vertu de l’article 60 » ne vise pas uniquement le cas où aucun employeur n’existe. Ces termes visent également le cas où le travailleur devient incapable d’exercer l’autre emploi qu’il occupe à cause de sa lésion professionnelle.

 

Brulé Murray & Associés inc. et Cloutier, 2014 QCCLP 5982.

L’horaire de travail du travailleur est établi sur 28 jours, à raison d’un roulement de 14 jours travaillés et rémunérés suivi de 14 jours de congé non rémunérés. Le 1er décembre, le travailleur subit une lésion professionnelle. Pour la période des 14 jours suivant le début de l’incapacité du travailleur à exercer son emploi, l'employeur a payé le travailleur jusqu'au 4 décembre 2013 inclusivement, date à laquelle il a procédé à la mise à pied de ce dernier, laquelle avait déjà été annoncée aux travailleurs depuis quelque temps. Cette date concordait avec la fin d'une période de travail de 14 jours travaillés, le travailleur étant en congé à compter du 5 décembre suivant. Le paiement a été effectué conformément à l’article 60, car ce n'est pas en raison de l'incapacité attribuable à la lésion que le travailleur ne travaillait pas chez l'employeur pendant la période de 11 jours suivant le 4 décembre 2013, mais plutôt parce que c'était sa période de congé de 14 jours qui commençait. Cependant, le travailleur a dû refuser du travail chez un autre employeur en raison de la lésion du 1er décembre 2013. Dans ces circonstances, en application du second alinéa de l'article 124, il revenait à la CSST de verser au travailleur l'indemnité de remplacement du revenu prévue à l'article 60 puisque, au cours des 11 jours suivant le 4 décembre 2013, il n'a pu travailler en raison de sa lésion.

 

Voir cependant :

Hôpital Laval et Girard, C.L.P. 114278-32-9904, 25 août 1999, M.-A. Jobidon.

La CSST ne pouvait verser des indemnités pour compenser la perte de salaire chez l'autre employeur pour qui la travailleuse exerce un emploi à temps partiel en se basant sur l'article 124. La travailleuse a reçu de l'employeur chez qui elle a subi sa lésion professionnelle 90 % de son salaire pour chaque jour où elle aurait normalement travaillé. L'article 124 ne peut servir de complément à l'article 60.

 

Voir également : 

Hôpital Laval et Cantin, C.L.P. 157698-03B-0103, 21 septembre 2001, R. Jolicoeur.

14 premiers jours d'incapacité et assignation temporaire

Selon la jurisprudence, lorsque le travailleur est en assignation temporaire pendant les 14 premiers jours suivant le début de son incapacité à effectuer son travail habituel, l'employeur doit payer au travailleur l'indemnité prévue à l'article 60 à compter de l'arrêt de travail complet.

Ville de Montréal-Nord et Weir,[1996] C.A.L.P. 1686.

L'employeur a droit au remboursement des IRR versées au travailleur pour les 14 premiers jours de son absence au travail. La période d'assignation temporaire ne peut être assimilée à un arrêt de travail ou à un abandon d'emploi. Les dispositions de l'article 60 s'appliquent même si l'arrêt de travail survient après une assignation temporaire. L'employeur a droit au remboursement des prestations qu'il a versées pour les 14 premiers jours à compter de l'arrêt de travail complet.

 

 

Cormier et Provigo Distribution inc.,C.L.P. 94511-63-9802, 17 septembre 1999, J.-G. Roy.

L'article 179 vise essentiellement à permettre qu'un travailleur puisse être affecté à un autre travail que son emploi régulier et ce, de façon temporaire, si son médecin est d'avis que les conditions énoncées à l'article sont rencontrées. Si telle affectation a lieu, l'article 180 prévoit alors que l'employeur doit continuer de verser au travailleur son salaire régulier et les avantages liés à l'emploi qu'il occupait au moment de sa lésion professionnelle. L'article 60 vise essentiellement à faire en sorte que le travailleur qui doit quitter son emploi ne se retrouve pas sans revenu et il oblige en conséquence l'employeur à lui verser, durant les 14 premiers jours qui suivent un tel arrêt de travail, l'indemnité prévue, soit 90 % de son salaire net. Dans le contexte de l'incapacité du travailleur à exercer son emploi visée par l'article 60, il revient à l'employeur de lui verser, à compter de son arrêt de travail, l'indemnité prévue à cet article.

 

Obligation de l'employeur non reliée au bien-fondé de la réclamation

L’obligation de l'employeur prévue à l’article 60 n'est pas reliée au bien-fondé de la réclamation du travailleur ni à l'acceptation ou au refus de celle-ci par la CNESST, car le but de ces dispositions est que le travailleur qui prétend avoir subi une lésion professionnelle ne demeure pas sans revenu jusqu'à ce que la CNESST intervienne.

Roseberry entretien ménager et Lemire,C.L.P. 276891-64-0511, 23 janvier 2006, C.-A. Ducharme.

L'article 60 établit clairement un droit en faveur de la travailleuse. Le but de cette disposition est de faire en sorte que le travailleur qui prétend avoir subi une lésion professionnelle ne demeure pas sans revenu le temps que la CSST intervienne. L'obligation qui est imposée à l'employeur par l'article 60 n'est aucunement reliée au bien-fondé de la prétention du travailleur. Si la CSST décide, par la suite, que le travailleur n'a pas subi de lésion professionnelle, elle doit lui réclamer la somme d'argent qu'il a reçue de son employeur, et ce dernier est, dans tous les cas, remboursé par la CSST de la somme d'argent qu'il a versée au travailleur. En l'espèce, par le dépôt d'une attestation médicale et d'une réclamation, la travailleuse a effectué des démarches auprès de l'employeur et de la CSST pour faire reconnaître qu'elle avait subi une lésion professionnelle et l'employeur devait donc lui verser l'indemnité prévue à l'article 60.

 

Suivi :

Révision rejetée, 27 avril 2006, A. Suicco.

Plouffe-Michaud et Provigo Distribution (Division Maxi),C.L.P. 321081-62C-0706, 13 mars 2009, C. Burdett.

L’article 60 édicte les obligations de l'employeur sans égard à l'admissibilité ou au refus de la réclamation. La loi est d'ordre public et les obligations découlant de l'article 60 le sont tout autant. D’une part, l'employeur doit payer directement au travailleur 90 % de son salaire net pour les 14 premiers jours d'incapacité résultant d'une lésion professionnelle. D'autre part, l'employeur a le droit d'obtenir le remboursement de ce montant par la CSST. Finalement, dans le cas où la réclamation est refusée, la CSST doit réclamer au travailleur le trop-perçu conformément aux articles 430 et suivants. L'obligation du travailleur de rembourser la CSST est prévue au dernier alinéa de l'article 60. Le rejet de la réclamation crée un lien de droit entre la CSST et le travailleur. Ce lien de droit est indépendant de toute autre obligation que peut avoir la CSST de procéder au remboursement des sommes payées par l'employeur pendant les 14 premiers jours suivant le début de l'incapacité du travailleur.

 

Métivier et Fondations Conrad Bafaro inc.,2011 QCCLP 2576.

Il n’appartient pas à l’employeur de déterminer si le travailleur a droit ou non à l'indemnité prévue à l'article 60, puisque le cas échéant, la somme versée sera réclamée au travailleur par la CSST si la lésion n’est pas reconnue à titre de lésion professionnelle.

 

Événements extérieurs à la lésion professionnelle

Les termes de l’article 60 : « aurait normalement travaillé, n’eût été de son incapacité » font référence à la fréquence de la prestation de travail (nombre de jours normalement travaillés par semaine ou nombre d’heures normalement effectuées par semaine) fournie par le travailleur avant que ne survienne la lésion professionnelle. Le droit à l’indemnité des 14 premiers jours dépend seulement de l’incapacité d’exercer son emploi en raison d’une lésion professionnelle.

En effet, depuis l’affaire Lapointe et Papier Journal Domtar inc., laquelle a fait l’objet d’un pourvoi devant la Cour suprême, la jurisprudence a de manière constante conclu qu’un événement extérieur à la lésion professionnelle, comme la suspension ou la rupture d'un contrat de travail, la fermeture d'un chantier ou d'une usine, la survenance d'une grève, d'un lock-out ou d'une mise à pied, les vacances, les congés fériés ou la mauvaise température, ne saurait affecter l’obligation de l’employeur quant au paiement des 14 premiers jours.

Tousignant et Hawker Siddeley Canada,[1986] C.A.L.P. 48.

L'expression « aurait normalement travaillé, n'eût été de son incapacité » réfère à la fréquence des prestations de travail fournies par le travailleur antérieurement à sa lésion. Il faut donc déterminer le nombre de jours normalement travaillé, soit 2, 3, 4 ou 5 jours par semaine et le nombre d’heures normalement effectuées par le travailleur, par exemple 20, 40 ou 50 heures par semaine. Tel est le sens à donner à cette expression.

 

Suivi :

Requête en évocation rejetée, [1987] R.J.Q. 1531 (C.S.).

Lapointe et Papier Journal Domtar inc.,[1986] C.A.L.P. 116.

Selon la CALP, les termes « aurait normalement travaillé », utilisés à l'article 60, ne doivent pas être dissociés des termes « n'eût été son incapacité ». Ainsi, il ne faut pas tenir compte de facteurs ni de circonstances extrinsèques à l'incapacité du travailleur victime d’une lésion professionnelle pour déterminer à quelle période il aurait travaillé, de façon habituelle et n’eût été son incapacité, durant les 14 premiers jours suivant le début de son incapacité.

 

Suivi :

Requête en évocation rejetée, [1987] C.A.L.P. 254 (C.S.)

Appel accueilli, [1991] R.J.Q. 2438 (C.A.)

Pourvoi à la Cour suprême accueilli, [1993] 2 R.C.S. 756.

Lambert et Vic Métal Corporation,[1986] C.A.L.P. 147.

L’employeur doit verser au travailleur victime d’une lésion professionnelle 90 % de son salaire net pendant les 14 premiers jours suivant le début de son incapacité à exercer son emploi, sans égard à la grève survenue pendant cette période.

 

Gagné & Roy inc. et Maltais,C.L.P. 167575-72-0108, 26 avril 2005, F. Juteau.

Le paiement de l'indemnité correspond au salaire que le travailleur aurait normalement gagné au cours des 14 premiers jours qui suivent la lésion professionnelle et doit être établi sans considération de facteurs extrinsèques. Ces facteurs extrinsèques furent déterminés par la jurisprudence, comme étant, notamment, une suspension, une rupture du contrat de travail (démission ou congédiement), une grève, un lock-out, une mise à pied ou une fermeture d'usine. Conséquemment, un employeur ne peut se soustraire à son obligation prévue à l'article 60 dans de telles circonstances.

 

Métivier et Fondations Conrad Bafaro inc.,2011 QCCLP 2576.

Selon l'article 60, l'employeur doit verser au travailleur une IRR correspondant à 90 % de son salaire pour chaque jour où il aurait normalement travaillé, « n'eût été son incapacité ». Or, la notion de « aurait normalement travaillé » est interprétée comme étant indissociable des termes « n’eut été son incapacité ». Ainsi, le paiement des 14 premiers jours doit être versé au travailleur sans tenir compte de ce qui est qualifié de facteurs extrinsèques tels que grève, lock-out, fermeture d'usine, fermeture de chantier, fin de contrat et mise à pied.

 

Calcul de l’indemnité versée pendant les 14 premiers jours

Travailleur à temps partiel ou sur appel

L'article 60 crée une obligation pour l'employeur au service duquel se trouve un travailleur victime d’une lésion professionnelle. Ainsi, lorsqu’un travailleur est à temps partiel ou sur appel, cet employeur doit lui verser l’indemnité prévue à l’article 60 pour les jours où il aurait normalement travaillé.

Charbonneau et Corporation d'Urgences Santé,[1994] C.A.L.P. 760.

L'article 60 crée une obligation pour l'employeur au service duquel se trouve un travailleur lors de la survenance d'une lésion professionnelle. Cet employeur n'a pas à rembourser un travailleur engagé à temps partiel chez lui pour les jours où il aurait normalement travaillé pour un autre employeur même si l'accident qu'il a subi l'a empêché de remplir sa prestation de travail régulière chez cet autre employeur. 

 

Poirier et Entreprises Michaudville inc.,C.L.P. 134026-64-0003, 22 août 2000, J.-F. Martel.

Le travailleur occupe un travail saisonnier sur appel d’opérateur de chenillette de déneigement. Le travailleur est appelé pour le travail seulement lorsqu'il y a de la neige à déblayer. Il est rémunéré pour les heures travaillées, sans aucune garantie d’heures de travail. Le 14 janvier 1999, le travailleur subit un accident du travail. En raison de sa lésion professionnelle, le travailleur est absent du travail du 20 janvier au 3 février. Or, durant la période de 14 jours suivant le début de son incapacité, le travailleur n'aurait travaillé que deux jours, soit les 20 et 21 janvier; puisque le reste du temps, il n'y a pas eu de neige à déblayer. Durant cette même période, aucune main d’œuvre n’a été appelée au travail. En vertu de l’article 60, l'employeur devait donc verser au travailleur 90 % de son salaire net correspondant à ces deux jours où il aurait effectivement travaillé s’il avait été apte. En effet, le libellé même de l'article 60 impose l’interprétation selon laquelle certains travailleurs, entre autres les travailleurs occasionnels, sur appel ou à temps partiel, en raison de leurs conditions d'emploi ou de leur statut, n'ont pas droit à une indemnité correspondant à tous et chacun des 14 jours compris dans la période suivant le début de leur incapacité. Ils ont plutôt droit à une indemnité correspondant aux jours où ils auraient « normalement travaillé ». Pour ces travailleurs, le montant de l'indemnité est forcément moindre qu'il ne l'aurait été pour un travailleur embauché à temps plein et sur une base régulière; en ce sens, on peut dire qu'ils ont droit à une indemnité proportionnelle à leur prestation de travail, une indemnité « partielle ».

 

Fleury et Fonds d’information foncière Québec,C.L.P. 269988-03B-0508, 9 décembre 2005, C. Lavigne.

Le travailleur exerce la fonction d’auxiliaire de bureau occasionnel sur appel pour le même employeur, soit le ministère des Ressources naturelles, et ce, depuis 2000. Les services du travailleur sont requis pour assumer un surplus d'ouvrage pour une période de temps donné dans l’un des neuf bureaux du ministère des Ressources naturelles. Son contrat de travail avec cet employeur est renouvelé d’année en année et il a l'habitude de faire des semaines complètes de travail. Le travailleur n'a que de brèves périodes d'inactivité professionnelle. Le travailleur bénéficie d'un acte de nomination émis par l'employeur pour la période du 1er avril 2004 au 31 mars 2005. Dans le cadre de son contrat de travail, le 25 mai 2004, le travailleur est affecté temporairement pour procéder à la classification de contrats. Le 28 mai 2004, il subit une lésion professionnelle. Au moment de l’accident du travail, le travailleur n’avait pas terminé sa tâche et il en aurait été de même dans les jours suivants. Par ailleurs, dès que sa condition physique lui a permis de reprendre son emploi, le travailleur a aussitôt été rappelé et il a été en mesure de livrer une prestation de travail complète dans les semaines du 13, 20 et 27 novembre 2004. Le travailleur a donc démontré qu'il aurait normalement travaillé pour l'employeur durant la période des 13 jours suivant son début d'incapacité, que ce soit sur le lieu de travail où est survenu l'événement ou ailleurs, soit dans l’un des neuf autres bureaux du ministère.

 

Boutih et Office Overload (Division de Drake Int.),C.L.P. 314011-71-0703, 14 juin 2007, S. Arcand.

Le travailleur avait recours aux services de l'employeur, une agence de placement, depuis environ un mois. Celui-ci place les travailleurs de façon temporaire dans diverses entreprises, sans qu'il y ait signature de contrat et pour des placements de courtes durées. Le travailleur a subi une lésion professionnelle, le 15 septembre 2006, le dernier jour d'un placement. L'employeur ne lui a pas versé 90 % de son salaire net pendant les 14 jours suivant le début de son incapacité. L'employeur a établi que les services du travailleur n'étaient plus requis chez le client après le 15 septembre 2006. Toutefois, en raison de la nature des activités de l'employeur, il est tout à fait justifié, dans l'esprit de l'article 1, de s'appuyer sur les semaines précédant l'accident du travail et le nombre de jours travaillés afin de déterminer le nombre de jours qu'aurait normalement travaillé le travailleur, n'eût été sa lésion professionnelle. Ainsi, ce dernier a travaillé trois jours. Dans de telles circonstances, il est plus que probable qu'il aurait travaillé au moins trois jours par semaine, n'eût été sa lésion. Il aurait donc travaillé six jours au cours des 14 jours suivant le début de son incapacité.

 

Darcy et Soins santé Vallée des Forts inc.,2012 QCCLP 3653.

La travailleuse, une préposée aux bénéficiaires employée d'une agence de placement de personnel, a subi une lésion professionnelle. L'employeur déploie de façon temporaire des travailleurs dans divers établissements de santé. La travailleuse n'avait pas de poste ou d'assignation précis ni d'horaire prédéterminé. Il s'agit d'un travail sur appel, et elle pouvait accepter ou refuser les assignations proposées. Dans ce contexte, il peut être difficile de déterminer les jours où elle aurait normalement travaillé n'eût été son incapacité. L'employeur a calculé le montant versé pour la période des 14 premiers jours en se fondant sur les heures de travail qu'elle avait effectuées au cours des 2 semaines précédant l'accident du travail et sur les disponibilités données. Cette façon de faire était appropriée en raison de la nature des activités de l'employeur qui pouvait s'appuyer sur les semaines précédant l'accident du travail afin de déterminer le nombre de jours qui aurait normalement été travaillés n'eût été la lésion. En l'espèce, la travailleuse a effectué 36,25 heures de travail au cours des 2 semaines précédant son accident, ce qui représente 5,2 jours de travail. On peut donc conclure qu'il est probable que la travailleuse aurait travaillé cinq jours durant sa période de 14 jours suivant le début de son incapacité. Le calcul effectué par l'employeur sur cette base est donc conforme aux exigences de la loi.

 

Heures supplémentaires

 Les heures supplémentaires qu'un travailleur aurait normalement effectuées durant les 14 premiers jours suivant la survenance de la lésion professionnelle sont indemnisables. Le travailleur doit toutefois démontrer qu'il fait régulièrement des heures supplémentaires ou encore que l'autorisation de faire des heures supplémentaires avait été donnée par l'employeur avant la survenance de la lésion professionnelle. Chaque cas est toutefois un cas d'espèce et il doit être étudié selon les circonstances qu'il présente.

Komatsu International inc. et Girard,C.L.P. 112503-62A-9903, 26 mai 1999, H. Rivard.

Le travailleur effectuait régulièrement des heures supplémentaires en semaine à raison de 3,5 heures par jour et pendant son absence, il aurait été appelé à en faire, n’eût été sa lésion. Dans un tel contexte, le travailleur a le droit de recevoir une IRR qui tient compte des heures supplémentaires durant les 14 premiers jours de son incapacité.

 

Dazé et Agropur (Fromagerie Corneville),C.L.P. 102051-62-9806, 28 mai 1999, J.-G. Roy.

 L'employeur paie au travailleur sa période des 14 premiers jours selon une semaine normale de travail sans tenir compte des heures supplémentaires qu'il aurait pu effectuer, n'eût été de son incapacité. Le travailleur soumet que l'employeur devait lui verser une indemnité correspondant à 90 % du salaire net qu'il aurait reçu pour les heures supplémentaires qu'il aurait effectuées à sept occasions durant la période où il s'est absenté. Les heures supplémentaires que le travailleur aurait normalement effectuées sont indemnisables si elles sont prouvées. Tel est le cas d'heures supplémentaires à effectuer déjà acceptées ou encore offertes au travailleur qui n'a jamais refusé d'en faire. Chaque cas doit être analysé en fonction des circonstances particulières qui lui sont propres. En l'espèce, l'administration des heures supplémentaires chez l'employeur revêt certaines particularités qui rendent impossible l'évaluation du nombre d'heures qu'aurait pu effectuer le travailleur. En outre, le nombre d'heures offertes varie, elles sont effectuées sur une base volontaire et elles sont offertes par ordre d'ancienneté. De plus, il eût fallu que le travailleur prouve qu'il aurait effectivement travaillé les heures supplémentaires qu'il réclame. La preuve ne permet pas de conclure que, en dehors des quatre situations exceptionnelles que le travailleur a invoquées, ce dernier aurait effectué des heures supplémentaires. Elle établit plutôt qu'il a refusé plus souvent qu'il n'a accepté de faire des heures supplémentaires. Dans les circonstances, il y a lieu de conclure que le travailleur n'a pas subi de la part de son employeur une mesure prohibée par l'article 32.

 

Corbec inc. et Laberge,C.L.P. 161239-31-0104, 15 février 2002, H. Thériault.

L'employeur verse au travailleur son salaire net pour les 14 premiers jours suivant son incapacité, sans tenir compte des heures supplémentaires qu'il aurait effectuées pendant la semaine qui a suivi la date de la lésion professionnelle. Le travailleur a droit de recevoir l'IRR pour les heures supplémentaires qu'il aurait pu effectuer au cours des 14 premiers jours suivant le début de son incapacité, si la preuve démontre qu'il les aurait effectuées, n'eût été la lésion professionnelle dont il a été victime. En l'espèce, la preuve révèle que les règles qui régissent la répartition des heures supplémentaires sont clairement établies dans la convention collective. Ainsi, c'est en fonction de la disponibilité donnée hebdomadairement par le travailleur que l'employeur offre le temps supplémentaire par ordre d'ancienneté. Le travailleur s'étant blessé un mercredi, il n'a pu compléter le formulaire pour inscrire sa disponibilité pour la semaine débutant le lundi suivant. La question s'apprécie non pas tant en regard de la certitude qu'il aurait effectué les heures supplémentaires au cours de la période visée, mais plutôt sur la base de la prépondérance des probabilités. Or, il s'avère qu'il se déclarait normalement disponible pour accomplir des heures supplémentaires. Le travailleur a le droit d'être indemnisé par son employeur pour les 14 premiers jours suivant son incapacité sur la base de son salaire annuel incluant les heures supplémentaires qu'il aurait pu effectuer, n'eût été sa lésion professionnelle.

 

Morin et Technologies Veyance Canada inc.,C.L.P. 344388-31-0803, 9 février 2010, M.-A. Jobidon.

Le travailleur ayant subi une lésion professionnelle s’absente du travail pendant deux jours. L'employeur verse à ce dernier, à titre d'indemnité des 14 premiers jours, l'équivalent de son salaire horaire. Or, le travailleur a régulièrement fait des heures supplémentaires et il a régulièrement reçu des primes, notamment pour avoir travaillé le soir ou les fins de semaine, durant les 12 mois précédant sa lésion. Il y a donc lieu de retenir cette base de salaire pour le calcul de l’indemnité versée en vertu de l’article 60, soit la même base de salaire retenue par l'employeur pour la période postérieure aux 14 premiers jours. En effet, aucune différence au niveau de la rémunération ne doit être faite entre celle reçue par le travailleur durant les 14 premiers jours de son incapacité et celle versée par la suite.

 

Attestation médicale visée par l’article 199

Voir :

Article 199, rubrique Interprétation.

Recours en vertu de l’article 32

Un travailleur peut soumettre une plainte en vertu de l'article 32 lorsqu'il considère que son employeur ne lui a pas versé le salaire auquel il a droit selon les modalités prévues à l'article 60.

Voir :

Article 32, rubrique Interprétation

Recouvrement par la CNESST du salaire versé à titre d’indemnité

Voir :

Article 430, rubrique Interprétation.