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. 63. Calcul de l'indemnité - règles générales

Revenu net retenu

La jurisprudence distingue clairement la notion de revenu net retenu mentionnée à l’article 63 ainsi qu’aux articles 45, 49, 52 à 54, de celle de revenu net.

Barrientos-Santizo et Service Entretien Distinction inc., 2012 QCCLP 2228.

La travailleuse étant capable d'exercer l'emploi convenable à compter de novembre 2009, il y a lieu, en vertu de l'alinéa 1 de l'article 49, de procéder au calcul de l'IRR réduite. Contrairement aux prétentions de la travailleuse, cette disposition ne prévoit pas déduire de l'IRR qu'elle reçoit le revenu net qu'elle pourrait tirer de son emploi convenable, mais plutôt le revenu net retenu qu'elle pourrait en tirer. Pour établir le revenu net retenu pour un revenu brut annuel de 18 500 $, il faut se référer notamment aux articles 45 et 63. En application de l'article 45, l'IRR est égale à 90 % du revenu net retenu que le travailleur tire annuellement de son emploi. Ce 90 % du revenu net retenu figure à la table des IRR. Or, étant donné qu’il faut déduire 100 % du revenu net retenu tiré de l’emploi convenable, il faut donc majorer en multipliant le montant correspondant dans la table par 100 puis diviser le résultat par 90, ce qui donne le revenu net retenu.

 

Serri et Synca Marketing inc., 2012 QCCLP 4783.

La table figurant à l’Annexe A du Règlement sur la table des indemnités de remplacement du revenu payables en vertu de laLoi sur les accidents du travail et les maladies professionnelleset des indemnités payables en vertu de la Loi sur les accidents du travail est une table des revenus nets retenus et non une table des revenus nets. Le revenu net retenu diffère du revenu net en ce que la CSST, pour le calculer, tient compte non seulement des retenues prévues par les lois sur les impôts fédéral et provincial, des cotisations payables à la RRQ, à l’assurance-emploi et à l’assurance parentale, mais également du fait que les revenus bruts sont présentés par tranche de 100 $, et lorsque le revenu brut d’un travailleur se situe entre deux tranches de revenus, l’IRR est déterminée en fonction de la tranche supérieure.

 

Déductions

Déductions pondérées prévues à la table des IRR

La jurisprudence du Tribunal retient que le revenu net retenu ne peut être assimilé au salaire net pris dans son sens usuel. Il s’agit de deux notions distinctes. L’IRR réduite du travailleur doit être calculée en fonction de la table des IRR prévue par l’article 63 qui tient compte des retenues à la source des impôts fédéral et provincial, des cotisations à la RRQ, à l'assurance-emploi et à l’assurance parentale. Il s’agit de déductions pondérées par tranches de revenus et déterminées en fonction de la situation familiale du travailleur. Ces déductions diffèrent des déductions effectuées sur le salaire, lesquelles sont établies en fonction des tables des différents organismes visés. La jurisprudence est également unanime pour dire qu’aucune autre déduction que celles spécifiquement énumérées à l’article 63 ne peut être considérée lors du calcul.

Vachon et Commission d'appel en matière de lésions professionnelles, [1996] C.A.L.P. 531 (C.S.).

Les notions d'« impôt sur le revenu payable » et de « contribution payable », mentionnées à l’article 63, ne réfèrent pas aux déductions à la source qui sont prélevées sur le salaire d’un travailleur. L'IRR est déterminée selon un calcul différent du paiement que le travailleur reçoit de son employeur dans les 14 premiers jours de son incapacité. En effet, il faut distinguer l’article 62 de l’article 63 de la loi. À l’article 62, le législateur exprime clairement que le travailleur reçoit son salaire net après déduction des retenues à la source habituellement faites, tandis qu'aux termes de l'article 63, le calcul de l'IRR se fait en établissant le revenu net retenu moins le montant des déductions pondérées par tranche de revenus que la CSST détermine en fonction de la situation familiale. Par conséquent, la notion de « revenu net retenu » ne peut être assimilée au « salaire net » pris dans son sens usuel.

 

Suivi :

Appel rejeté,  [2000] C.L.P. 76 (C.A.).

Requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée, 3 mai 2001, (28098).

Pilon et WWF Canada inc., C.L.P. 263642-61-0506, 3 octobre 2005, B. Lemay.

L’IRR réduite de la travailleuse doit être calculée en fonction de la table des IRR prévue par l’article 63 qui tient compte des retenues à la source d'impôts fédéral et provincial et des cotisations à la RRQ et à l'assurance-emploi. La CLP ne peut pas faire droit à la demande de la travailleuse visant à utiliser, lors de la révision de l'IRR, le revenu brut de l'emploi occupé lors de la révision et à faire les retenues exigées par la LATMP, mais en se référant aux tables des différents organismes visés et non pas à la table des IRR prévue par l'article 63.

 

Suivi :

Révision rejetée, 16 janvier 2006, M. Denis.

Latocca et Abattoir les Cèdres ltée (fermé), C.L.P. 249464-71-0411, 11 novembre 2005, M. Denis (décision accueillant la requête en révision).

Pour établir un revenu net à partir d’un revenu brut annuel tiré d’un emploi, le tribunal ne peut pas soustraire les impôts payés par le travailleur, les montants réels retenus pour le régime des rentes du Québec et pour l'assurance-emploi, puisque cette approche n’est pas conforme à la loi. En effet, l'article 54 fait référence à la notion de revenu net retenu et l'article 63 définit cette notion. Or, afin de déterminer le revenu net retenu, il faut plutôt tenir compte du revenu brut d'emploi, moins le montant des déductions pondérées par tranche de revenu que la CSST détermine en fonction de la situation familiale du travailleur, le tout selon la table des IRR pour l'année au cours de laquelle a lieu la révision de l’IRR. De plus, étant donné que cette IRR est égale à 90 % du revenu net retenu que le travailleur tire annuellement de son emploi, il faut multiplier ce chiffre inscrit à la table des IRR par 100 et diviser ce résultat par 90.

 

Lalonde et Collins & Aikman Canada inc., C.L.P. 323363-62A-0707, 16 septembre 2008, M. Auclair.

Le législateur a prévu une méthode précise pour calculer le revenu net retenu d’un emploi convenable ou occupé par le travailleur. Ce revenu net obtenu par ce calcul ne correspond pas au montant du salaire net perçu par le travailleur. En effet, l’IRR réduite du travailleur doit être calculée en fonction de la table des IRR prévue par l’article 63, laquelle tient compte des retenues des impôts fédéral et provincial, des cotisations payables à la RRQ, à l'assurance-emploi et à l’assurance parentale, et non pas être calculée en fonction des tables de ces différents organismes. En l'espèce, les déductions effectuées par la CSST dans le calcul du revenu net de l'emploi convenable ont été faites en conformité avec la méthode de calcul prescrite par la loi. Le rôle de la CLP se limite à vérifier si la CSST a appliqué les dispositions législatives de façon conforme et non à mettre en doute les choix faits par le législateur au moment de l'adoption de ces articles de loi.

 

Blais et Sûreté du Québec (SST), C.L.P. 392773-31-0910, 26 avril 2010, S. Sénéchal.

Il est possible que la travailleuse puisse avoir d’autres déductions à son revenu brut que celles spécifiquement énumérées par le législateur à l’article 63, notamment des sommes pour le syndicat, l’assurance maladie et le régime de retraite. Cependant, dans une optique d’identifier un revenu net retenu à soustraire d’un montant d’une IRR, à laquelle aurait droit la travailleuse si elle n’était pas devenue capable d’exercer à plein temps un emploi, et ce, en vertu des articles 54 et 55, il est logique que ce revenu net retenu soit déterminé en regard des mêmes règles que l’IRR. Cette logique permet une certaine uniformité. Ce faisant, il faut tenir compte de ce que le législateur prévoit spécifiquement à l’article 63, soit les déductions ayant trait aux impôts provincial et fédéral, l’assurance-emploi, la RRQ et l’assurance parentale, en fonction de la situation familiale de la travailleuse.

 

Deshaies et Centre de Santé Ste-Famille, 2011 QCCLP 6405.

La travailleuse soutient que la méthode de calcul de l’IRR réduite ne peut pas être retenue, car les déductions effectuées sur son salaire sont beaucoup plus élevées que celles évaluées par la CSST, lesquelles ne correspondent pas à la réalité. Or, les dispositions de la loi prévoient de façon spécifique comment le calcul doit être fait lors de la révision de l’IRR en vertu des articles 54 et 55 de la loi. À l’article 63, le législateur prévoit comment la CSST détermine le revenu net retenu d’un travailleur en y effectuant les déductions prévues aux paragraphes 1, 2, 3 et 4. De plus, il est prévu que la CSST publie annuellement une table des IRR qui tient compte de la situation familiale et des déductions faites selon ces mêmes paragraphes. Le tribunal ne possède aucun pouvoir discrétionnaire lui permettant de modifier ces dispositions. Son rôle est plutôt de s’assurer que la CSST les applique correctement. Ainsi, même si la méthode retenue par les dispositions législatives ne semble pas conforme à la réalité de la travailleuse, le tribunal ne peut modifier ce qui a été prévu par le législateur.

 

Chartier et Accessoires d'auto Lucien Poulin, 2014 QCCLP 5529.

L’article 63 prévoit les déductions à retenir pour calculer le revenu net retenu. Il ne faut pas utiliser les déductions réelles effectuées à partir du revenu gagné par un travailleur, mais plutôt celles pondérées par tranches de revenus prévues à cet article. Aux fins du calcul de l'IRR réduite, lorsque le revenu brut annuel de l'emploi exercé par le travailleur se situe entre deux tranches de la table des IRR payables pour l’année 2013, par exemple 22 614 $, il faut utiliser le revenu de la tranche supérieure, soit 22 700 $. De plus, il faut tenir compte de la situation familiale du travailleur déclarée au moment de la survenance de la lésion.

 

Beaudoin et Sept-Îles Kia, 2014 QCCLP 4902. (décision accueillant la requête en révision)

Dans le cas d'une révision effectuée en vertu de l'article 55, il convient d'utiliser la méthode de calcul prescrite par les articles 63 et 64. Ainsi, pour déterminer le revenu net retenu que le travailleur tire de son emploi, il ne faut pas retenir les déductions inscrites à la déclaration de revenus du travailleur aux fins d’impôts. Pour déterminer le revenu net retenu, il faut se référer à la table des IRR, selon laquelle le revenu net retenu que le travailleur tire annuellement de son emploi est égal à son revenu brut annuel d'emploi, moins le montant des déductions pondérées par tranches de revenus que la CSST détermine en fonction de sa situation familiale, et ce, pour tenir compte des déductions à la source applicable.

 

Aucune exception pour les personnes exemptées d’impôt

La jurisprudence retient que les calculs prévus à l’article 63 s’appliqueront même si le travailleur est exempté de payer des impôts ou même s’il paye des impôts ailleurs qu'au Québec. En d’autres termes, un congé fiscal n’a aucun impact sur le calcul de l’IRR. Ce mode de calcul du revenu net retenu est d'application générale et il ne souffre d’aucune exception.

Vachon et Société d'aménagement et de développement forestier de Betsiamites, [1993] C.A.L.P. 1521.

Le travailleur a le statut d’indien en vertu de la Loi sur les Indiens . Par ce statut, il bénéficie de congés fiscaux. Il demande que la CSST tienne compte de ce congé fiscal lors du calcul de l’IRR. Or, le calcul du revenu net effectué à l'article 63 ne tient pas compte de l'exemption de taxation prévue à la Loi sur les Indiens. L'article 63 constitue une méthode de calcul uniforme permettant d'établir l'IRR. La notion de revenu net retenu ne peut être assimilée au salaire net pris dans son sens usuel. L'une des caractéristiques du régime d'indemnisation est que l'IRR ne correspond pas à une réparation intégrale du préjudice et n'équivaut pas nécessairement à la perte réelle découlant d'une lésion professionnelle. L'objet de l'indemnité est plutôt de compenser la perte de la capacité de gagner un revenu.

 

Suivi :

Requête en révision judiciaire rejetée, [1996] C.A.L.P. 531 (C.S.).

Appel rejeté, [2000] C.L.P. 76 (C.A.).

Requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée, 3 mai 2001, (28098).

Bréard et Service Barbara-Rourke, C.L.P. 104913-32-9809, 23 mars 1999, M.-A. Jobidon.

Bien que la travailleuse soit exemptée de payer l'impôt sur le revenu en raison de son statut de famille d'accueil, elle ne peut bénéficier d'une telle exemption dans le calcul de son IRR. La loi ne permet pas de tenir compte de situation aussi particulière que celle de la travailleuse. L'IRR ne correspond pas nécessairement à une réparation intégrale d'une perte économique réelle résultant d'une lésion professionnelle, mais vise plutôt à compenser une perte de capacité de gagner un revenu.

 

Gervais et Labopharm inc., [2000] C.L.P. 731.

La travailleuse est une immigrante reçue occupant un poste de chercheuse en technologie pharmaceutique. En raison de son statut de chercheuse étrangère, elle bénéficie d'une exemption fiscale provinciale accordée par le gouvernement du Québec. Bien que la Loi sur les impôtsaccorde un congé fiscal, le calcul de l’IRR se fait en appliquant intégralement l’article 63. Cet article n’impose pas de charge fiscale; il détermine comment calculer le revenu net d’un travailleur pour établir l’IRR à laquelle ce dernier a droit lorsqu’il subit une lésion professionnelle.

 

Fiset et Équipement d'aiguille CRV ltée, C.L.P. 158189-62C-0104, 17 octobre 2001, M. Sauvé.

Le travailleur paye des impôts sur son revenu gagné au Québec en vertu des lois fédérales et ontariennes. Bien qu’il puisse paraître plus équitable que l'IRR tienne compte des retenues d'impôt en vertu de ces lois, le texte même de la LATMP ne prête à aucune interprétation. L’IRR doit être calculée selon la méthode établie à l'article 63, soit en tenant compte des déductions prévues à loi fédérale et à laLoi sur les impôts.

 

Robertson et Claude Robertson Ent. Électricien, C.L.P. 22325-02-9009, 5 novembre 2002, R. Deraîche.

L’article 63 s’applique à tout travailleur accidenté, y compris les personnes possédant le statut d’Indien nonobstant le fait qu’elles bénéficient d’une exemption de payer des impôts sur leurs revenus d’emploi en vertu de  l’article 87 de la Loi sur les Indiens.

 

Corbeil et Boart Longyear (Div. N. Morisette), C.L.P. 346874-05-0804, 21 juin 2010, L. Boudreault.

Le travailleur occupe un emploi à l'étranger dans l'exploitation minière. Il bénéficie d'un congé fiscal provincial et fédéral puisque son employeur fait partie d'un groupe d'employeurs désignés à cette fin par le gouvernement du Québec. Le travailleur subit une lésion professionnelle. Le calcul du revenu net retenu à partir duquel l’IRR est calculée est prévu à l’article 63. La CSST ne peut pas omettre de déduire l'impôt fédéral et l'impôt provincial dans le calcul de l’IRR du travailleur puisque la méthode de calcul prévue à cet article ne contient aucune exclusion, distinction ou préférence et s'applique indifféremment et de la même manière à tout travailleur victime d'une lésion professionnelle. La Loi sur les impôts et la Loi de l'impôt sur le revenu confèrent un statut particulier à l’employeur et non à un travailleur victime d'une lésion professionnelle.

 

Dandy et Eagle Village First Nation Kipawa, 2013 QCCLP 1769.

Le travailleur jouit d'un statut fiscal particulier en vertu de la Loi sur les Indiens. Il est exempté de payer l'impôt sur le revenu fédéral et provincial. Le travailleur conteste la méthode de calcul utilisée pour déterminer son IRR. C'est à tort que le travailleur fait valoir qu'en raison de son statut d'Indien, la CSST ne peut déduire de son IRR les sommes payables à titre d'impôts fédéral et provincial. L’expression « revenu net retenu » est un concept propre au régime d'indemnisation de la CSST et dont la signification est donnée à l'article 63. Il n’y a pas lieu d’adopter ou d’appliquer une table des IRR particulière pour les personnes qui bénéficient d'une exemption de taxes. Ce faisant, il n’y a pas violation de la Loi sur les Indiens. En effet, la détermination de l'IRR n'est pas un exercice fiscal. Il s'agit plutôt d'une opération qui relève de la réparation des conséquences d'une lésion professionnelle.

 

Nepton et Société en commandite Nero Onikam, 2015 QCCLP 5550.

Il ne faut pas tenir compte, dans le calcul de l’IRR versée au travailleur, du congé fiscal provincial et fédéral dont le travailleur bénéficie en application de laLoi sur les Indienset en regard de la Loi sur les impôtset de la Loi de l’impôt sur le revenu.

 

Voir également :

Goulet et Services parajudiciaires autochtones, C.L.P. 161127-31-0104, 8 février 2002, P. Simard.

Déductions des cotisations au RRQ

La jurisprudence considère qu'un travailleur bénéficiant d’une IRR ne continue pas à contribuer au régime des rentes du Québec (RRQ).

Gillam et Centre Molson inc., [1999] C.L.P. 940.

L'article 63 n'est qu'une méthode de calcul. L'objet de l'IRR est de compenser la perte de la capacité de gain et non la réparation intégrale du salaire perdu. Il n'existe aucune disposition dans la LATMP obligeant la CSST à prélever des cotisations pour le régime des rentes du Québec à même les IRR payées à un travailleur et à les verser à la RRQ. D’ailleurs, cette interprétation de l’article 63 et les conclusions voulant qu'il n'existe aucune disposition de la loi obligeant la CSST à effectuer des déductions à la source afin de verser la cotisation obligatoire d'un salarié au régime des rentes du Québec sont conformes à toute l'économie de laLoi sur le régime des rentes du Québec.

 

Lajoie et CSST, 2011 QCCLP 5563.

Le travailleur demande à la CSST de cesser de déduire la cotisation payable en vertu de la Loi sur le régime de rentes du Québec, puisqu’il est un rentier de ce régime. Or, l’article 63 de la loi est seulement une méthode de calcul uniforme qui permet d’établir l’IRR à laquelle a droit un travailleur. C’est un calcul mathématique et il n’existe pas de déductions faites par la CSST, à même les IRR, en vue de les remettre à différentes autorités, dont la RRQ

 

Situation familiale du travailleur

Au moment de la lésion professionnelle

Pour la jurisprudence du tribunal, la situation familiale du travailleur, dont le nombre de personnes à charge qui est pris en compte pour le calcul du revenu net retenu, est celle qui existe au moment de la lésion professionnelle initiale ou, le cas échéant, la RRA. Le Tribunal réfère à l'article 64. Les changements à la situation familiale du travailleur qui surviennent postérieurement à la lésion professionnelle initiale ou à la RRA ne peuvent être pris en considération.

Voir :

Article 64.

Lafleur et Transport Shulman ltée (entreprise fermée), [1998] C.L.P. 837.

Le travailleur subit une lésion professionnelle initiale en 1979. En 1986, il subit une aggravation faisant en sorte qu’il n’a jamais occupé d’emploi par la suite. D’autres épisodes de RRA survenus en 1991 et en juillet 1993 contribuent de manière significative à augmenter l’incapacité du travailleur. Lorsque le travailleur subit une RRA, il s’agit d’une nouvelle lésion professionnelle qui confère de nouveaux droits, tel le droit à l’IRR. Il faut tenir compte de la situation familiale du travailleur qui prévaut au moment où se manifeste la RRA. En l’espèce, en 1979, le travailleur a trois personnes à charge incluant sa conjointe. En juillet 1993, le travailleur n’a qu’une seule personne à charge, à savoir sa conjointe. C’est cette situation familiale qui est prise en compte lors de la révision de l’IRR.

 

Suivi :

Révision rejetée, C.L.P. 93131-72-9711, 23 juin 1999, D. Lévesque.

Guénette et Transport Kepa inc.,C.L.P. 311391-08-0703, 2 octobre 2007, F. Daigneault.

Le calcul de l'IRR doit être basé sur la situation familiale du travailleur au moment de la survenance de la lésion professionnelle. Ainsi, même si le travailleur n'avait plus de conjointe lorsqu'il a rempli sa réclamation le 6 janvier 2005, le calcul de l'IRR doit tenir compte de sa situation familiale au 1er juin 2002, date de la RRA pour laquelle il dépose une réclamation.

 

Auger et Entreprise W. Collin Ltée, C.L.P. 325250-62C-0708, 30 mai 2008, C. Burdett.

Le travailleur subit un accident du travail en 1997. En 2007, la CSST procède à la révision de l'IRR réduite en vertu des articles 54 et 55. Pour déterminer le revenu net retenu que le travailleur tire de son emploi, il faut tenir compte du revenu brut gagné par le travailleur en 2007 et effectuer les déductions prévues à l’article 63 en se référant au Règlement sur la table des indemnités de remplacement du revenu pour l'année 2007, lequel considère les déductions pondérées par tranches déterminées par la CSST en fonction de la situation familiale du travailleur. Par contre, comme le stipule l'article 64, il faut, au moment de la révision de l'IRR, considérer la situation familiale du travailleur telle qu'elle existait au moment où s'est manifestée sa lésion professionnelle. Il ne faut pas tenir compte des changements postérieurs à la lésion professionnelle eu égard à la situation familiale du travailleur.

 

Deshaies et Centre de Santé Ste-Famille, 2011 QCCLP 6405.

L’article 64 prévoit que la révision doit être faite en appliquant la table prévue à l’article 63 et en tenant compte de la situation familiale qui existait lorsque s’est manifestée la lésion professionnelle du travailleur. En 2010, au moment de la révision de l’IRR en vertu des articles 54 et 55, la situation familiale de la travailleuse, en ce qui concerne ses différentes déductions fiscales, peut être très différente de celle qui prévalait lorsqu’elle a subi sa lésion professionnelle. Cependant, c’est le choix qu’a fait le législateur de retenir la situation familiale qui a donné lieu à l’établissement de l’IRR lors de la survenance de la lésion professionnelle.

 

Gauthier et Grpm Forest. Québec-Montmorency,2011 QCCLP 3077.

Une fois le revenu brut annuel déterminé, il faut, pour établir le montant auquel le travailleur aura droit, procéder au calcul de l'IRR selon la méthode prévue à l'article 63. Cette étape, qui est distincte de la détermination du revenu brut, permet d'établir le revenu net à partir duquel se calcule l'IRR. C'est à cette étape que la situation familiale du travailleur doit être considérée. La situation familiale d'un travailleur qui doit être considérée est celle à l'occasion d'une RRA, contrairement à la situation qui prévaut lors de la revalorisation de l'IRR.

 

Gosselin et CSST,2012 QCCLP 869.

En 1988, la travailleuse subit une lésion professionnelle, laquelle a entraîné la détermination d’un emploi convenable. En 2008, la travailleuse est victime d’un nouvel accident du travail. Cette nouvelle lésion professionnelle entraîne une nouvelle atteinte permanente et de nouvelles limitations fonctionnelles à la travailleuse. Néanmoins, la CSST la déclare capable d’exercer le même emploi convenable qui avait été déterminé à la suite de l’accident survenu en 1988. En septembre 2011, aux fins de déterminer l’IRR réduite de la travailleuse, la CSST a eu raison de tenir compte de sa nouvelle situation familiale, soit celle existante en 2008. À chaque reconnaissance d’une lésion professionnelle pour un travailleur, que ce soit dans le cadre d’un accident du travail, d’une RRA ou d’une maladie professionnelle, la CSST doit déterminer l’IRR à laquelle le travailleur a droit pour cette lésion professionnelle et tenir compte de la situation familiale du travailleur lors de cette nouvelle lésion, car les concepts de « capacité à exercer un emploi » et de « détermination d'une IRR » sont différents et ne doivent pas être confondus.

 

Réévaluer ou non la situation familiale lors d’une RRA

Dans certaines circonstances, bien que l'on reconnaisse au travailleur une RRA, son incapacité d'exercer un emploi n'est pas en relation avec celle-ci, mais relève de la lésion professionnelle antérieure. Dans cette situation, le Tribunal considère qu'il n'y a pas lieu de revoir le droit à l'IRR puisqu'il est déjà acquis par la lésion antérieure. De ce fait, il ne peut y avoir application de l'article 63 et par le fait même, aucune réévaluation de la situation familiale du travailleur.

Guillemette et La Cie Bon Sable,C.L.P. 228760-64-0403, 19 janvier 2005, J.-F. Martel.

L’incapacité du travailleur à exercer un emploi découle uniquement et directement de la lésion professionnelle initiale subie en août 1985, car la dernière journée travaillée remonte à 1988. Ainsi, la rechute ayant eu lieu en juillet 1996 et celle survenue en mars 2002 n’ont absolument rien changé à la capacité du travailleur d’exercer son emploi. De plus, le travailleur touche une pleine IRR au moment où les rechutes sont survenues. En de telles circonstances, puisque le travailleur a droit à l’IRR en raison de la lésion dont il a été victime en 1985, le calcul de son indemnité doit tenir compte de sa situation familiale telle qu’elle existait à cette époque.

 

Lapointe et Cheminées Sécurité international,[2010] QCCLP 573.

Comme l'incapacité du travailleur résulte de sa lésion professionnelle initiale et non de ses RRA, la CSST est justifiée de ne pas réviser la base salariale servant au calcul de son IRR pour tenir compte de sa nouvelle situation familiale. Selon l'article 44 de la LATMP, et bien qu'ayant subi de nouvelles lésions professionnelles, le travailleur n'a pas droit à une évaluation d'une « nouvelle » IRR découlant d'une nouvelle incapacité, mais dispose toujours du droit à l'IRR découlant uniquement de son incapacité d'occuper son emploi à la suite de sa lésion initiale. Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu de réévaluer la situation familiale du travailleur.

 

Grenier et Bombardier Aéronautique inc., 2011 QCCLP 4682.

Le travailleur a subi une lésion professionnelle initiale en mai 2006. Sa base salariale pour le calcul de l'IRR a été établie en tenant compte de la présence d'une conjointe à charge. Par ailleurs, une décision du tribunal est devenue définitive et sans appel sur cette question. En octobre 2009, alors que le travailleur est en réadaptation, il subit une RRA. Aux fins de calculer sa base salariale, le travailleur demande de considérer sa nouvelle situation familiale telle qu'elle existe au moment de sa RRA, à savoir une conjointe et un enfant mineur à charge. Le tribunal conclut que la base salariale du travailleur ne peut pas être modifiée à la suite de sa RRA, car il avait déjà droit à l'IRR en vertu de sa lésion professionnelle initiale survenue en mai 2006. Puis, le travailleur n'est pas devenu incapable de travailler lors de la RRA survenue en octobre 2009, puisqu'il recevait déjà une IRR et qu'il continuait de suivre une formation dans le cadre du processus de réadaptation professionnelle, et ce, afin d'occuper l'emploi convenable qui lui a été déterminé à la suite de la lésion de 2006. 

 

Suivi :

Requête en révision rejetée, 2012 QCCLP 1124.

Beauchamp et Conceptra Mobilier Bureau inc.,2013 QCCLP 3092.

À la suite d’une lésion professionnelle initiale, le travailleur est incapable d’exercer son emploi, mais il est devenu capable d’exercer un emploi convenable à compter du 26 janvier 2009. En vertu de l’alinéa 2 de l’article 49, l’emploi convenable n’étant pas disponible, le travailleur a droit à l’IRR durant une année, soit jusqu’au 25 janvier 2010. Ainsi, le 26 janvier 2010, lorsque le travailleur subit une RRA, il s’agit d’une nouvelle incapacité de travail et le montant de l’indemnité à laquelle il a droit doit être déterminé en tenant compte de sa situation familiale telle qu’elle existe en 2010. Par contre, le 5 décembre 2011, la CLP infirme une décision de la CSST en concluant que le 3 décembre 2010, le travailleur n’est pas redevenu capable d’exercer l’emploi convenable qui lui avait été prédéterminé en raison de sa RRA de janvier 2010. Le travailleur retrouve donc rétroactivement son droit à l’IRR en lien avec la RRA survenue le 26 janvier 2010. Il s’ensuit que le 16 juin 2011, moment où le travailleur subit une nouvelle RRA, ce n’est pas cette dernière qui a rendu le travailleur incapable d'exercer son emploi. Par conséquent, le droit à l'IRR n'a pas à être déterminé de nouveau, puisque le travailleur n’a jamais cessé d'y avoir droit. Le travailleur continue donc d'être indemnisé sur la base retenue lors de la lésion professionnelle survenue le 26 janvier 2010, laquelle tient compte de la situation familiale du travailleur à ce moment. Même si cette situation a changé entre-temps, elle ne peut être prise en considération. 

 

Indissociable des termes « pour tenir compte de l’impôt »

On ne peut dissocier les mots « situation familiale du travailleur » des mots « pour tenir compte de l’impôt sur le revenu payable ». La situation familiale est donc nécessairement celle qui tient compte de l’impôt sur le revenu payable par le travailleur en vertu des lois sur l’impôt.

Hôtel-Dieu de Rivière-du-Loup et Lafresnaye, [1987] C.A.L.P. 660.

L’expression « situation familiale du travailleur » est indissociable des mots « pour tenir compte de l’impôt sur le revenu payable en vertu de la Loi sur les impôtset de la Loi concernant les impôts sur le revenu ». Ainsi, les situations familiales énoncées au Règlement sur la table des indemnités de remplacement du revenu sont celles établies en fonction des personnes à charge du travailleur au sens des lois fiscales.

 

Voir également :

Céleste et Groupe Cabano transport, C.A.L.P. 41625-01-9207, 8 juillet 1994, J.-G. Roy.

Incidence des modifications aux lois fiscales

En août 2005, la CNESST avait modifié la table des IRR de manière à tenir compte de l'adoption par le législateur québécois d'une nouvelle mesure fiscale, le « soutien aux enfants », la réduction d'impôt à l'égard des familles et le crédit d'impôt pour enfant à charge. Par cette modification, la CNESST ne tenait plus compte des enfants mineurs à charge déclarés par un travailleur lors de la manifestation de sa lésion professionnelle aux fins du calcul du revenu net retenu. L'application de cette nouvelle table avait entraîné pour certains travailleurs une baisse de leur IRR.

Dans de telles circonstances, de façon presque unanime, la jurisprudence considère qu’une modification fiscale n'a pas pour effet de modifier rétroactivement la situation familiale d'un travailleur, mais de l'actualiser en fonction des modifications apportées aux lois mentionnées à l'article 63.

Richard et Fils spécialisés Cavalier inc., [2007] C.L.P. 121, (formation de trois commissaires).

Une nouvelle mesure fiscale de « soutien aux enfants » est adoptée par le gouvernement provincial, laquelle remplace l'allocation familiale, la réduction d'impôt à l'égard des familles et le crédit d'impôt pour enfant à charge à compter du 1er janvier 2005. C'est donc en tenant compte de ces modifications fiscales que le Règlement sur la table des indemnités de remplacement du revenu pour l'année 2005 a été adopté. La nouveauté de cette table est que l'on n'y parle plus de « personne à charge », mais de « personne majeure à charge ». Le revenu net obtenu pour établir le montant de l'IRR ne tient donc plus compte des enfants « mineurs » à charge. Étant donné que le tribunal reconnaît que l’expression « situation familiale du travailleur » ne peut être dissociée des mots « pour tenir compte de l’impôt sur le revenu payable en vertu de la Loi sur les impôts et de la Loi concernant les impôts sur le revenu », à partir du moment où une personne ne peut plus être considérée comme une personne à charge au sens de ces lois fiscales, elle ne fait plus partie des situations familiales à prendre en considération dans le calcul de l'IRR. Cependant, les nouvelles dispositions fiscales n’ont pas un effet rétroactif sur la situation familiale des travailleurs, situation qui est cristallisée à la date de leur lésion professionnelle, et ce, peu importe ce qui arrive ensuite. En effectuant la revalorisation annuelle de 2005, il ne s’agit pas de modifier la situation familiale des travailleurs, mais de l’actualiser en fonction des modifications apportées à d’autres lois comme celle adoptée en l’espèce en matière fiscale.

 

Gougeon et Cie Chemin de fer Canadien Pacifique, C.L.P. 269079-71-0508, 31 mai 2007, F. Juteau.

Comme le législateur a modifié dans la loi fiscale le crédit d’impôt se rattachant au nombre de personnes mineures à charge, il y a eu abolition des déductions fiscales pour enfant mineur. Comme la notion d’enfant mineur à charge n’existe plus en vertu de la Loi sur les impôts, par ricochet elle n’existe plus suivant la LATMP. Ces nouvelles mesures fiscales ont donc entraîné des changements au Règlement de la table des indemnités de remplacement du revenu pour l’année 2005 utilisée par la CSST où il n’est plus question d’enfant mineur, mais plutôt de personne majeure à charge. Au moment de sa lésion professionnelle, le travailleur avait une conjointe à charge et trois enfants mineurs. La situation familiale du travailleur demeure inchangée, mais le montant de l’IRR est déterminé selon la nouvelle table en vigueur. Ainsi, les trois enfants mineurs à charge du travailleur ne pouvant plus être pris en considération lors de l’utilisation de cette nouvelle table, la CSST a pris en considération que le travailleur avait seulement une conjointe à charge et aucune autre personne majeure à charge, ce qui est conforme aux règles.

 

Morissette et C.S.S.T. Gaspésie/Îles de la Madeleine, C.L.P. 286897-64-0604, 31 août 2007, T. Demers.

La CSST, dans le cadre de la revalorisation de l'IRR versée à un travailleur, doit effectivement tenir compte des règles prévues sur l'impôt sur le revenu payable en vertu de la Loi sur les impôts et de la Loi de l'impôt sur le revenu. Étant donné la réforme adoptée par les deux paliers de gouvernement en 2005, il apparaît normal que la CSST ait publié une table des IRR qui ne fait plus référence aux enfants mineurs à charge et qu'elle ait cessé de tenir compte de cet élément dans le calcul de l'aide accordée au travailleur. En agissant de la sorte, la CSST ne cesse pas pour autant de considérer la situation familiale du travailleur telle qu’elle a été reconnue au moment de sa lésion professionnelle en 1982, soit un enfant mineur à charge. Toutefois, en 2005, ce statut ne procure plus aucun avantage financier au travailleur dans le cadre de l'établissement de son indemnité, car les lois relatives à l'impôt sur le revenu qu'elle se doit d'appliquer ont été modifiées et ne prévoient plus aucun crédit à cet égard.

 

Auger et Entreprise W. Collin Ltée, C.L.P. 325250-62C-0708, 30 mai 2008, C. Burdett.

Le travailleur subit un accident du travail en 1997. En 2007, la CSST procède à la révision de l'IRR réduite en vertu des articles 54 et 55. Pour déterminer le revenu net retenu que le travailleur tire de son emploi, il faut tenir compte du revenu brut gagné par le travailleur en 2007 et effectuer les déductions prévues à la loi en se référant au Règlement sur la table des indemnités de remplacement du revenu pour l'année 2007, lequel considère les déductions pondérées par tranches déterminées par la CSST en fonction de la situation familiale du travailleur. La table des IRR est modifiée annuellement en fonction des modifications législatives adoptées par les deux paliers de gouvernement aux lois fiscales, à celles traitant des régimes de rentes et de l'assurance parentale. De plus, au moment de la révision de l'IRR, il faut considérer la situation familiale du travailleur telle qu'elle existait au moment où s’est manifestée sa lésion professionnelle. En 1997, le travailleur n’avait pas de conjointe à charge, mais il avait trois personnes mineures à charge. Or, en raison de modifications législatives, la table de 2007 ne tient pas compte des enfants mineurs à charge. Elle ne prévoit que des personnes majeures à charge. Comme ce n'est pas la situation familiale du travailleur qui change aux fins de l'article 63, mais plutôt la table des IRR pour 2007 qui est modifiée suivant l'impact des lois fiscales et autres lois visées à l'article 63, le travailleur doit être considéré comme « célibataire sans personne majeure à charge » afin de déterminer l'IRR réduite à laquelle il a droit.

 

Voir également :

Blanchard et Goodyear Canada inc., C.L.P. M-290350-62C-0605, 6 mars 2008, M. Sauvé.

Voir cependant :

Houde et Lauréat Gagné inc., C.L.P. 279909-02-0601, 27 octobre 2006, M. Renaud.

Révision rejetée, C.L.P. 279909-02-0601, 31 mai 2007, G. Tardif.

Situation familiale réelle et non celle déclarée à l’employeur

 Selon la jurisprudence, il faut tenir compte de la véritable situation familiale du travailleur telle qu'elle existe au moment de la lésion professionnelle et non celle déclarée à l'employeur aux fins des déductions à la source retenues sur le salaire. 

Jalbert et Marché D. Rochefort, Richelieu,C.L.P. 113362-62C-9903, 22 décembre 1999, V. Bergeron.

En septembre 1996, le travailleur est victime d'un accident du travail. L'employeur déclare sur le formulaire intitulé « Avis de l'employeur et demande de remboursement » qu'il s'agit d'un travailleur « sans conjoint ou avec conjoint non à charge », et ce, conformément à l'entente intervenue entre lui et le travailleur aux fins des déductions à la source. Dès janvier 1997, lors d'une rencontre avec une agente de la CSST, le travailleur s'informe de l'impact d'être déclaré célibataire sur son rapport d'impôt. L'agente le rassure à ce sujet et elle ne l'informe pas que sa réclamation est incomplète du fait qu'il n'a pas rempli la section D du formulaire « Déclaration du travailleur » portant sur sa situation familiale. Toutefois, dès que le travailleur est informé de l'incidence d'une situation familiale de célibataire sur ses IRR, il demande à la CSST de reconsidérer son salaire net pour tenir compte de sa situation familiale réelle existant au moment de la survenance de sa lésion professionnelle, à savoir une personne mariée avec deux enfants à charge. Le tribunal conclut que le fait de ne pas avoir rempli la section portant sur la situation familiale sur le formulaire intitulé « Déclaration du travailleur » et d'avoir déclaré être célibataire aux fins des déductions à la source ne doivent pas faire obstacle à la reconnaissance d'une situation de personne mariée avec enfants à charge aux fins du calcul de l'IRR

 

Payette et Serviplast inc.,C.L.P. 148144-61-0010, 8 mars 2001, G. Morin.

La table des IRR doit être appliquée en fonction de la véritable situation familiale du travailleur, au moment de la survenance de la lésion professionnelle, pour tenir compte notamment des lois sur les impôts. En effet, le calcul de l'IRR ne doit pas tenir compte de la situation familiale que le travailleur déclare à l'employeur aux fins des retenues à la source habituellement faites.

 

Information erronée ou incomplète

Lorsque l’IRR a été déterminée à partir d’une information erronée ou incomplète en regard de la situation familiale du travailleur, la jurisprudence enseigne que la CNESST ne peut pas refuser de rectifier cette situation, et ce, rétroactivement à la date de la naissance du droit à l'IRR.

Jalbert et Marché D. Rochefort, Richelieu,C.L.P. 113362-62C-9903, 22 décembre 1999, V. Bergeron.

En septembre 1996, le travailleur est victime d'un accident du travail. L'employeur déclare sur le formulaire intitulé « Avis de l'employeur et demande de remboursement » qu'il s'agit d'un travailleur « sans conjoint ou avec conjoint non à charge », et ce, conformément à l'entente intervenue entre lui et le travailleur aux fins des déductions à la source. Dès janvier 1997, lors d'une rencontre avec une agente de la CSST, le travailleur s'informe de l'impact d'être déclaré célibataire sur son rapport d'impôt. L'agente le rassure à ce sujet et elle ne l'informe pas que sa réclamation est incomplète du fait qu'il n'a pas rempli la section D du formulaire « Déclaration du travailleur » portant sur sa situation familiale. Toutefois, dès que le travailleur est informé de l'incidence d'une situation familiale de célibataire sur ses IRR, il demande à la CSST de reconsidérer son salaire net pour tenir compte de sa situation familiale réelle existant au moment de la survenance de sa lésion professionnelle, à savoir une personne mariée avec deux enfants à charge. Le tribunal conclut que le fait de ne pas avoir rempli la section portant sur la situation familiale sur le formulaire intitulé « Déclaration du travailleur » et d'avoir déclaré être célibataire aux fins des déductions à la source ne doivent pas faire obstacle à la reconnaissance d'une situation de personne mariée avec enfants à charge aux fins du calcul de l'IRR.

 

Varisco et Produits de viande Levinoff ltée,[2004] C.L.P. 1578.

Sur le formulaire de réclamation, lorsque l’information quant à la situation familiale du travailleur est absente, la CSST a le devoir de communiquer avec lui pour obtenir l’information. Dans ces circonstances, lorsque l'indemnité a été calculée sur une base erronée, la CSST ne peut pas refuser de la corriger. La loi est d'ordre public. En effet, selon l'article 365, la CSST doit reconsidérer sa décision, c’est-à-dire recalculer l’IRR du travailleur, lorsqu'elle prend connaissance d'un fait inconnu, soit la situation familiale du travailleur au moment de sa lésion professionnelle.

 

Jiwan et C & D Aérospatiale inc.,[2009] C.L.P. 474.

Lorsque l'indemnisation a été faite à partir d'une situation familiale erronée, la CSST ne peut refuser de rectifier cette situation lorsqu'elle est mise au courant de la situation familiale réelle du travailleur, rétroactivement à la date de l'accident, même si la demande de rectification est faite hors délai, car la loi est d’ordre public. En outre, lorsque le travailleur omet d'inscrire au formulaire de réclamation les renseignements sur sa situation familiale, la CSST doit communiquer avec lui pour connaître sa situation réelle.

 

Denis et Société de transport de Montréal,C.L.P. 369609-62B-0902, 15 juin 2010, M. Watkins.

Lorsque l’IRR a été calculée à partir d’une situation familiale erronée, la CSST ne peut refuser de rectifier cette situation lorsqu’elle est mise au courant de la situation familiale réelle d’un travailleur, et ce, rétroactivement à la date de l’accident du travail et du début du versement de l’IRR.

 

Gilbert et Sablières Champagne inc.,2013 QCCLP 7370.

Le travailleur a subi une lésion professionnelle en 2007. Dans les notes évolutives de la CSST qui sont contemporaines à l’accident, il est mentionné que le travailleur a une conjointe et deux jeunes enfants. Il est également précisé sur un formulaire à la section relative « situation familiale déclarée selon les lois sur l’impôt », laquelle ne fait mention que des personnes majeures à charge, que la conjointe du travailleur est non à charge. Au moment de l’accident du travail en raison des mesures fiscales applicables depuis 2005, la table des IRR en vigueur ne tient pas compte du fait que le travailleur ait des personnes mineures à charge. Ainsi, le travailleur n’avait pas à contester l’avis de paiement reçu le 10 mai 2007, car les enfants mineurs ne sont pas pris en considération. Par contre, à compter de 2008, les situations familiales relatives aux personnes mineures à charge sont introduites dans les règlements établissant les tables des IRR. La CSST a fait parvenir une lettre au travailleur en février 2008 lui demandant de lui faire connaître le nombre d’enfants mineurs qui étaient à sa charge à la date où est survenue la lésion professionnelle. Cette lettre n’a fait l’objet d’aucun suivi adéquat. À partir de 2008, les prestations d’indemnités du travailleur ont été calculées sans tenir compte de sa situation familiale réelle. Le travailleur allègue avoir dénoncé cette situation à quelques reprises. Bien que le tribunal note que le travailleur n’a pas fait preuve d’une grande diligence, l’allégation du travailleur acquiert une certaine force probante, car certaines mentions au dossier suggèrent que le travailleur s’est fait dire qu’il était trop tard pour obtenir « une reconsidération de la situation familiale qui date de 2007 », sa situation familiale s’étant cristallisée en raison des mécanismes prévus par la loi. Bien que le travailleur n’ait pas fait un suivi adéquat, le tribunal conclut que le refus de permettre au travailleur d’obtenir la révision de la situation familiale retenue par la CSST à compter de la revalorisation de 2008 est une source d’injustice d’autant plus que selon les notes au dossier, la CSST ne pouvait pas ignorer que le travailleur avait deux enfants mineurs à sa charge en 2007. Le tribunal mentionne qu’en vertu de l’article 351 de la loi, la CSST doit rendre des décisions « suivant l’équité, d’après le mérite réel et la justice du cas ». Le dossier est donc retourné à la CSST pour qu'elle revoie le montant de l'IRR auquel le travailleur a droit à la suite de sa lésion professionnelle de 2007, sur la base de la réglementation applicable depuis cette année et d'une situation familiale qui correspond à celle d'un travailleur avec deux personnes mineures à charge.

 

Singh et Via Courrier,2014 QCCLP 3534.

La situation familiale d'un travailleur demeure acquise tant que perdure la lésion professionnelle, et ce, malgré les changements postérieurs. Quand l'indemnisation a été faite à partir d'une situation erronée, la CSST ne peut pas refuser de rectifier celle-ci, rétroactivement à la date de l'accident, lorsqu'elle est mise au courant de la situation familiale réelle du travailleur, et ce, même si la demande de rectification a été faite hors délai. En l’espèce, au moment où le travailleur est victime d’un accident du travail, son épouse ne vit pas avec lui. Elle réside en Inde et demeure dans l’attente d’être admise comme résidante au Canada. Elle est à la charge du travailleur, car ce dernier lui verse mensuellement une somme d’argent. Selon les renseignements donnés par l'Agence du revenu du Canada, la définition d'époux à charge n'est nullement liée à l'exigence de la cohabitation. De même, l'Agence du revenu Québec retient que le conjoint, autre que le conjoint de fait, est une « personne avec qui vous étiez uni par les liens du mariage ou avec qui vous étiez uni civilement ». Par ailleurs, il est mentionné que le fait de vivre séparément ne change rien à ce statut, sauf si cette situation découle de la rupture du couple. Par conséquent, il y a lieu de modifier le calcul de l’IRR pour tenir compte de la situation familiale réelle du travailleur au moment de sa lésion professionnelle, soit celle d'une personne mariée avec un conjoint à charge.