Ordonner à la CNESST de rendre une décision
- Villeneuve et Métro Kelly, 2015 QCCLP 6056.
Conformément à l’article 221 de la Loi, le membre du BEM donne son avis selon lequel le diagnostic est une entorse lombaire sur discopathie L5-S1 consolidée le 8 mai 2014 sans nécessité de soins ou de traitements. Il estime aussi que la lésion n’entraîne pas d’atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique ni de limitations fonctionnelles. Les parties ont informé le Tribunal qu’elles avaient l’intention de contester ces conclusions devant la CLP, mais que la CSST refuse de rendre une décision à ce sujet car la réclamation de la travailleuse est refusée. Il est souhaitable que la CLP statue en même temps sur l’avis du membre du BEM et sur la survenance de la lésion professionnelle puisque cette façon de faire évitera des décisions qui pourraient apparaître contradictoires ainsi qu’un va-et-vient stérile entre les divers paliers de décision. Il est donc plus approprié que la CLP entende l’ensemble de la preuve et dispose entièrement du litige, et pour ce faire, elle doit être valablement saisie d’une contestation de la décision faisant suite à l’avis du membre du BEM. Il est souhaitable que cette décision soit rendue le plus rapidement possible afin que l’instance ne soit pas suspendue trop longtemps. Il y a donc lieu d’accorder à la CSST un délai de trente jours pour qu’elle rende sa décision et que le dossier suive son cours.
- Fortier et Aliments BCI inc., 2020 QCTAT 1800.
Malgré plusieurs demandes verbales de la travailleuse, la Commission n’a jamais statué sur son droit de bénéficier ou non d’une aide personnelle à domicile et n’a même jamais procédé à son évaluation, en dépit des dispositions de la Loi. À l'audience, la travailleuse reconnaît qu'elle n'est pas lésée par la conclusion de la décision contestée et ne remet pas en cause son bien-fondé. Toutefois, elle soutient que sa contestation est le seul moyen pour elle d’obtenir une ordonnance du Tribunal afin que la Commission procède à l’analyse de ses besoins relativement à une aide personnelle à domicile. L’omission de la Commission de se prononcer sur ce sujet l’empêche de faire valoir ses droits. Dans les circonstances particulières du présent dossier, le Tribunal croit qu’il y a lieu de retourner le dossier à la Commission pour qu’elle rende une décision relative au droit de la travailleuse de recevoir ou non une aide personnelle à domicile. L’état de santé de la travailleuse justifie que cette évaluation ait lieu en vertu de la Loi. Selon la décision qui sera rendue par la Commission et si elle le juge nécessaire, la travailleuse pourra exercer ses droits de contestation à l’encontre de celle-ci, ce qu’elle est actuellement privée de faire
Retour du dossier à la CNESST afin que celle-ci rende une décision conjointe avec la SAAQ
Dossier retourné à la CNESST
- Lalonde et Société de l'assurance automobile du Québec, C.L.P. 261271-64-0504, 26 avril 2006, J.-F. Martel.
Les articles pertinents de la loi sur l’assurance et de l’entente réfèrent tous au concept central de l’IRR. C’est dans le but clair d’éviter la double indemnisation que le législateur a prévu l’ensemble des dispositions applicables en l’espèce. Ce qui importe donc ici, c’est l’époque à laquelle la double indemnisation est susceptible de survenir, advenant que la réclamation du travailleur pour lésion professionnelle en vertu de la présente loi soit acceptée. En l’occurrence, cette époque correspond au moment où le droit du travailleur à l’IRR s’est ouvert « en raison du nouvel événement » (l’accident survenu le 23 décembre 1999) alors qu’il était encore indemnisé par la SAAQ pour son accident d’automobile de juillet 1997. Force est de constater que la décision rendue le 17 février 2005 par la CSST refuse bel et bien une « réclamation pour un événement du 23 décembre 1999 ». Les décisions rendues les 17 février et 19 avril 2005 sont donc irrégulières et doivent être annulées parce qu’elles contreviennent aux dispositions pertinentes de la Loi sur l’assurance automobile.
- Lapensée et Canadian Tire Châteauguay, C.L.P. 276597-62C-0511, 14 juillet 2006, N. Tremblay.
Le caractère impératif de l’article 450 de la Loi ne fait aucun doute, le législateur ayant pris la peine de stipuler que la CSST et la SAAQ « doivent rendre conjointement une décision… ». Le moment à compter duquel cette décision conjointe doit être rendue y est également précisé, soit dès l’instant où une personne produit une réclamation à la SAAQ. En l’espèce, cette réclamation a été produite le 19 août 2004. À compter de cette date, toutes les décisions touchant les questions visées aux articles 448 à 450 de la Loi et à l’entente devaient être rendues de façon conjointe, les organismes n’ayant aucune compétence pour agir autrement. Ainsi, dans le présent cas, le Tribunal est saisi d’une contestation logée hors délai d’une décision qui semble, à sa face même, irrégulière. Peu importe la conclusion à laquelle le présent Tribunal arrive face à cette contestation, une décision conjointe devra être rendue par la CSST et la SAAQ, laquelle aura possiblement pour effet de ramener les parties à la case départ si elle est contestée. Ainsi, dans le but d’une saine administration de la justice, le Tribunal retourne le dossier à la CSST afin qu’elle rende une décision conjointe avec la SAAQ. Dans l'intervalle, le Tribunal suspend l’instruction de la présente affaire et se saisira de l’ensemble du dossier une fois la contestation liée dans l’éventualité où il y a contestation de la décision à venir ou lorsque cette décision deviendra finale faute de contestation.
- Boisvert et Gicleurs Éclair inc. (Les), C.L.P. 281268-31-0601, 3 août 2006, J.-F. Clément.
À compter de la réclamation déposée à la SAAQ, la CSST devait respecter les articles 448 et suivants puisqu’elle versait une IRR au travailleur à la suite de sa lésion professionnelle. L’article 450 est clair à cet effet. Les deux organismes doivent rendre conjointement une décision départageant les préjudices et les conséquences sur le droit aux prestations, ce qui n’a pas été fait. La CSST ne pouvait donc rendre la décision du 7 décembre 2004 sans posséder un tableau complet du litige et sans avoir rendu les décisions antérieures requises par la Loi et ce, dans les formes voulues. La Loi exige qu’elle rende une telle décision, la SAAQ lui a écrit pour qu’une telle décision soit rendue et une missive interne de la CSST est au même effet. Pourquoi une telle décision n’est pas encore rendue? Il faut non seulement en parler mais aussi agir. La décision du 7 décembre 2004 est donc annulée parce que rendue prématurément et sans la participation de la SAAQ. Au surplus, cette décision n’a pas été précédée de quelque décision conjointe que ce soit respectant les exigences de la Loi. La CSST devra respecter les prescriptions de la Loi et rendre une décision en bonne et due forme sur la réclamation du travailleur de même qu’une décision conjointe avec la SAAQ tel que prévu aux articles 448 et suivants de la Loi.
Dossier non-retourné à la CNESST
- Bérubé et Régie des installations olympiques, C.L.P. 293809-71-0607, 5 février 2008, C. Racine.
Il ressort de ces dispositions législatives que ce ne sont pas des réclamations antérieures pour accident du travail ou accident de la route, ou encore des réclamations ou des recours parallèles pour des RRA devant l’un et l’autre de ces organismes qui font naître l’obligation de rendre des décisions conjointes. C’est plutôt le versement de l’IRR par l’un des organismes et la réclamation déposée devant l’autre qui rendent obligatoires une telle démarche. Or, dans ce dossier, la SAAQ met fin au versement de l’IRR en août 2000 à la suite de l’accident de la route de 1997. Il n’y a donc aucune indemnité versée lors de la réclamation pour accident du travail du 14 août 2003 et, donc, aucune obligation de rendre une décision conjointe à cette époque. La CSST met fin au versement de l’IRR, à la suite de cet accident, le 1er juin 2004. La CSST ne verse donc aucune indemnité lorsque le travailleur fait une réclamation pour une rechute de son accident de la route en juillet 2005 et, en conséquence, les décisions conjointes ne sont pas requises. Il n’existe donc aucune obligation légale de rendre une décision conjointe les 1er mai ou 29 juin 2006 et, dès lors, l’interprétation retenue par la CLP constitue une erreur de droit manifeste et déterminante puisqu’elle conduit à l’émission d’une ordonnance qui ne trouve aucun appui dans la législation pertinente. La CLP est donc d’avis que la décision rendue par le tribunal le 29 mars 2007 est entachée d’un vice de fond de nature à l’invalider et, en conséquence, elle la révoque.
- F.S. et Compagnie A, C.L.P. 328473-62B-0709, 4 septembre 2008, N. Blanchard.
Le Tribunal considère que c’est le versement de l’IRR par l’un des organismes et la réclamation déposée devant l’autre qui rendent obligatoires une démarche conjointe de la CSST et de la S.A.A.Q. Toutefois, à partir du moment où l’un des deux organismes met fin au versement des indemnités, il n’y a plus lieu d’avoir des décisions conjointes, sauf certaines exceptions. En l’espèce, la S.A.A.Q. a mis fin au versement de l’IRR en juillet 2005. Ainsi, à compter au moins du 13 juillet 2005, il n’y a plus aucune obligation pour la CSST de rendre une décision conjointe avec la SAAQ puisqu’aucune période d’IRR ne risque de se chevaucher entre les deux organismes.
- CLSC Mercier-Est / Anjou et Robert, 2017 QCTAT 3439.
La décision rendue par la Commission devait être rendue conjointement par la Commission et la SAAQ et, à défaut, elle est irrégulière. Ceci étant dit, le Tribunal ne considère pas qu’il doive retourner le dossier à la Commission pour qu’une décision conjointe soit rendue à l’égard de la consolidation, ou non, de la lésion au genou gauche. En effet, dans les circonstances particulières de la présente affaire, le fait de rendre une décision conjointe ne constitue qu’une question de forme et un retour du dossier à la Commission ne respecterait pas les principes d’une saine administration de la justice administrative, soit les principes de qualité, célérité et accessibilité. En l’espèce, il appert de la décision conjointe rendue le 24 mai 2017 que la SAAQ ne retient aucun diagnostic concernant le genou droit de la travailleuse; le Tribunal conserve donc sa compétence pour déterminer si oui, ou non, cette lésion au genou droit est consolidée.
Suspension de l’instance
- Tremblay et Automobiles Chicoutimi (1986) inc., 2016 QCTAT 2349.
La Commission demande de suspendre l’instance, puisque les mêmes questions juridiques que celles à être débattues dans l’affaire Caron se posent. En l’espèce, la soussignée estime que la question soulevée est sérieuse, puisqu’il s’agit d’une question en lien avec l’application de la Charte. Il ne s’agit certes pas d’une question futile ou hypothétique, mais d’une véritable question de droit qui risque d’affecter le droit des parties. Le premier critère est rencontré. Par contre, aucune preuve n’établit de préjudice sérieux ou irréparable, pour l’une ou l’autre des parties, en cas de refus de sursis, et encore moins pour la Commission. En effet, la décision CLP1 confirme la décision que la CSST a elle-même rendue le 16 juin 2014. La Commission ne peut donc prétendre subir un préjudice irréparable de l’absence de sursis. Ainsi, en l’absence de preuve d’un préjudice irréparable, le Tribunal conclut que le second critère n’est pas rencontré. Le troisième critère n’est pas non plus rencontré en ce que rien ne démontre que la prépondérance des inconvénients favoriserait la Commission. Ce ne serait certes pas la Commission qui subirait le plus grand préjudice si la demande de sursis est accordée ou non en attendant la décision finale. Les deux autres parties, à savoir l’employeur et la travailleuse s’opposent au sursis des procédures, préférant que l’instance suive son cours.
- Labrecque et Québec (Ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation), 2016 QCTAT 4466.
Si le Tribunal devait suspendre tous les dossiers en cours lorsqu’une révision judiciaire concerne un autre dossier ou lorsque l’hypothèse d’une révision judiciaire est soulevée, ceci pourrait avoir comme conséquence d’affecter sérieusement l’administration de la justice administrative et la bonne marche des audiences alors que la partie qui exerce un recours judiciaire a toute latitude pour décider de ce qu’elle veut faire, ce qui inclut de produire un désistement en tout temps avant que le tribunal supérieur s’en saisisse.
- Morin et Rio Tinto Fer & titane inc., 2016 QCTAT 6230.
La CSST fait valoir que le pourvoi devant la Cour suprême entraîne un sursis de l’exécution du jugement de la Cour d’appel dans l’affaire Caron et donc a fortiori, le Tribunal devait également surseoir à l’exécution de l’arrêt Caron dans les mêmes circonstances. Elle y voit une question de déférence. Le procureur de la Commission soutient également que la suspension de la mise au rôle est en quelque sorte un outil qui permet d’éviter des décisions contradictoires sur la question de l’emploi convenable dans le contexte soulevé par le présent dossier. Cet argument laisse entendre que la cohérence décisionnelle doit primer sur l’indépendance décisionnelle. Cela justifierait d’interrompre le cours normal de la justice administrative. Cela laisse entendre aussi que la cohérence décisionnelle doit primer sur la célérité qui caractérise la saine administration de la justice administrative. Pour le Tribunal, le contrôle judiciaire ne constitue pas en soi un outil de cohérence décisionnelle. De même, il est prématuré de conclure que la décision à venir dans le présent dossier irait à l’encontre d’un éventuel arrêt de la Cour suprême. La suspension de la mise au rôle dans un cas particulier ne doit pas être basée sur des hypothèses qui peuvent fort bien ne pas se révéler en bout de piste, et ce, particulièrement en l’absence d’une preuve prépondérante de préjudice irréparable. Tout compte fait, le Tribunal considère que les conditions reconnues pour ordonner une suspension de la mise au rôle de la contestation actuelle du travailleur ne sont pas présentes ici. Il n’y a pas lieu de l’ordonner. Le traitement de ce dossier doit suivre le processus normal de mise au rôle.
- Centre de services scolaire Marie-Victorin, 2022 QCTAT 1304.
Le Tribunal rejette la demande de la Commission qui souhaitait suspendre l'audience dans l'attente que le Tribunal rende une décision en révision concernant d'autres dossiers impliquant les mêmes parties et portant sur la même question de fond, soit un transfert du coût des prestations. Même s'il existe un risque de décisions contradictoires, la suspension de l'audience n'est pas justifiée. En effet, puisque la règle du stare decisis ne s’applique pas au Tribunal et que celui-ci jouit d’une grande autonomie décisionnelle, la suspension des présents dossiers n’élimine pas ce risque. Par ailleurs, la révision des autres dossiers ne solutionnera pas le sort des présents. Le Tribunal conclut que l’intérêt de la justice ne requiert pas que les dossiers soient suspendus.