Illustrations

Retour à l'article
 
. 9 par. 4. Rendre la décision qui aurait dû être rendue

Pouvoir de novo 

Emballage Performant inc. et Forand, 2016 QCTAT 2578.

Après avoir fait son analyse, on conclut que l’intéressé est un travailleur autonome à l’emploi de l’employeur. Encore ici, on constate que c’est le statut du travailleur qui est en litige. Il faut rappeler que c’est l’objet de la décision rendue à la suite d’une révision administrative qui donne le pouvoir à CLP1 et non les motifs traités dans la décision. Or, la conclusion sur le statut d’un intéressé peut être de trois ordres : un travailleur, un travailleur autonome ou un travailleur autonome considéré à l’emploi d’un employeur. Selon la preuve présentée, n’importe laquelle de ces trois notions peut être retenue. Dans l’exercice de ses pouvoirs, CLP1 doit rendre la décision qui aurait dû être rendue en premier lieu. En vertu de son pouvoir de procéder de novo, la CLP peut rendre la décision qui aurait dû être rendue en premier lieu sans même se limiter au contenu du dossier transmis par la CSST ou à l'appréciation de la preuve faite par l’organisme. CLP1 n’a commis aucune erreur en ne limitant pas son analyse aux motifs de la décision rendue à la suite de la révision administrative, soit le statut de travailleur autonome à l’emploi de l’employeur, mais en analysant plutôt tous les aspects légaux reliés à l’objet, ici le statut de l’intéressé.

 

Manning et Ferlac inc., 2018 QCTAT 1409.

Le Tribunal rappelle que TAT-1 procède de novo et qu’il doit rendre une décision suivant sa propre appréciation de la preuve. Son rôle n’est pas limité à disposer du litige en regard uniquement des arguments qui lui sont plaidés. Il peut rejeter les arguments d’une partie, tout en accueillant néanmoins sa contestation sur la base d’autres motifs, pourvu que ceux-ci soient soutenus par la preuve qu’il a eu à apprécier. Ainsi, même si TAT-1 indique clairement qu’il rejette les motifs basés sur l’absence d’intérêt financier et médical invoqués par la travailleuse, il pouvait néanmoins conclure à l’existence d’un motif raisonnable sur la base d’autres éléments de preuve et c’est ce qu’il a fait. Suivant son appréciation de la preuve au dossier et du témoignage de la travailleuse, TAT-1 en arrive à la conclusion que les circonstances particulières qui existaient au moment où la décision du 10 juillet 2015 a été rendue expliquaient raisonnablement le retard de la travailleuse à contester cette décision dans le délai légal.

 

Habitations Nabco inc. et Choinière, 2018 QCTAT 4866.

Le Tribunal a donc le pouvoir d’agir de novo. Il s’agit d’un large pouvoir en vertu duquel il peut remédier aux irrégularités pouvant affecter le processus décisionnel suivi jusque-là et aux erreurs commises par les instances inférieures, actualiser le dossier et régler toutes les questions accessoires à la question principale qu'il doit trancher. Toutefois, ce pouvoir d’agir de novo ne lui permet pas de trancher un litige ou une demande étrangère à la décision contestée devant lui. Ce pouvoir est limité à la contestation sur le litige initial.  En l’espèce, le Tribunal considère qu’il ne dispose pas des pouvoirs nécessaires pour se prononcer sur la question de la fin des soins et des traitements ainsi que celle de la fin du droit à l’assistance médicale puisque la décision de la Commission ne portait pas sur ces sujets. En effet, la décision contestée ne porte que sur la date de capacité du travailleur à exercer son emploi. Aller au-delà de cette question reviendrait à disposer d’une demande étrangère à la décision contestée en l’espèce et ainsi, à outrepasser les pouvoirs dont le Tribunal dispose. En conséquence, le Tribunal n’émettra aucune conclusion à l’égard de la fin des soins et des traitements et à l’égard de la fin du droit à l’assistance médicale.

 

Transport Louis Pouliot inc., 2019 QCTAT 1889.

Le Tribunal rappelle qu’il procède de novo et qu’à ce titre, il n’est pas lié par l’analyse et les conclusions de la Commission quant à l’une ou l’autre des composantes indissociables de la notion de travailleur déjà handicapé. Lorsque l’employeur conteste une décision refusant un partage en vertu de l’article 329 de la Loi, c’est la notion même de handicap préexistant qui est l’objet du litige et qui doit être analysée et prouvée dans sa totalité. Le Tribunal « ne doit pas se limiter à bonifier ou non ce qu’une partie a déjà obtenu dans un dossier, mais a pleine latitude pour se prononcer pleinement sur le ou les sujets en cause et rendre la décision qu’elle juge appropriée ». Le Tribunal n’est donc pas lié par le fait que la Commission ait retenu que la condition dégénérative de la colonne lombaire chez ce travailleur dévie de la norme biomédicale. Le fardeau de l’employeur sur cet aspect reste entier.

 

La règle de l’ultra-petita 

Automobiles Chicoutimi (1986) inc., 2014 QCCLP 2547.

L'employeur ne remet pas en question la conclusion portant sur l'existence d'un handicap et sur la relation causale entre ce handicap et la lésion professionnelle, mais il conteste le pourcentage accordé par la CSST. Cela n'a pas pour effet de lier le Tribunal, qui doit exercer le pouvoir que lui accorde la Loi eu égard à la décision dont il est saisi, soit celui de rendre la décision qui aurait dû être rendue. Or, lorsqu'il est question de la contestation d'une décision sur le partage des coûts en vertu de l'article 329, le Tribunal peut se saisir de tous les aspects de cette question, et non seulement de celui du pourcentage de l'imputation. En effet, comme l'enseigne la jurisprudence, la contestation par l'employeur d'une décision rendue en vertu de l'article 329 remet en question tous les sujets relatifs à cette question, et non pas seulement ceux invoqués par l'employeur.

 

Bruni et Pavages Tallarita Canada inc., 2016 QCTAT 47.

Bien que la CSST reconnaisse le caractère professionnel de la surdité à l'oreille gauche, le travailleur est insatisfait de cette décision puisque le caractère professionnel de la surdité à droite n'est pas reconnu. L'objet de la décision rendue par la CSST consiste à statuer sur l'existence d'une lésion professionnelle dont le diagnostic est celui de progression de la surdité bilatérale (subjective). En raison du pouvoir qui lui était conféré à l'article 377 de la Loi, TAT-1 n'était pas limité par les arguments du travailleur et avait toute latitude pour se prononcer sur la lésion dont le diagnostic est celui de progression de la surdité bilatérale (subjective), et ce, afin de rendre la décision jugée appropriée à la lumière de la preuve offerte. L'argument du travailleur selon lequel la décision rendue par la CLP est ultra petita est donc rejeté.

 

Chocolats Favoris Production inc., 2017 QCTAT 5631.

En présence d’une période d’indemnisation de 6 mois ou 26 semaines, et en faisant le calcul approprié, on arrive à un ratio de 15 % au dossier de l'employeur et 85 % aux employeurs de toutes les unités. Il est vrai que l'employeur demandait un partage de l’ordre de 80 % à tous les employeurs et 20 % à son dossier et que le Tribunal lui accorde plus. Il est bien reconnu que la règle de l’ultra petita ne s’applique pas au Tribunal et lorsqu’une question lui est soumise, il n’est pas limité à déterminer le droit additionnel ni inférieur d’un appelant au-delà de la décision de la Commission sur la question et il peut remettre celle-ci en cause. Le Tribunal n’est aucunement limité par la demande ou les arguments des parties sur une question donnée.

 

 

Chose jugée

Absence de chose jugée

Pigeon et Sears Canada inc., 2014 QCCLP 1983.

Le principe de l’autorité de la chose jugée s’applique donc lorsqu’il y a identité de parties, d’objet et de cause et peut être soulevé en matière de droit administratif. Le Tribunal est toutefois d’avis qu’il n’y a pas lieu de conclure qu’il y a chose jugée en l’espèce. En effet, l’identité des parties ne fait ici pas de doute. La cause du recours concerne aussi les mêmes faits. Leur qualification juridique ne sera pas la même : dans un cas on décidera de l’existence ou non de harcèlement psychologique, dans l’autre cas on décidera de l’existence ou non d’une lésion professionnelle. L’objet de la demande de la travailleuse auprès de la CSST est par conséquent différent de celui recherché auprès de la CRT. Les remèdes prévus sont également différents. Il n’y a donc pas de chose jugée quant à l’existence d’une lésion professionnelle psychologique.

 

Kearney et Groupe Compass (Eurest/Chartwell), 2016 QCTAT 6393.

Le Tribunal rappelle que le travailleur a soumis une réclamation en lien avec un événement allégué du 5 mars 2014, laquelle a été refusée. Il serait donc hors de question pour le Tribunal de revenir sur cette dernière question, soit la reconnaissance d’une lésion professionnelle qui serait survenue le 5 mars 2014. Est-il cependant possible, comme le soumet la représentante de l’employeur, de conclure que ce refus de la Commission a également l’autorité de la chose jugée à l’égard de la réclamation que le travailleur a produite le 27 octobre 2015? Le présent Tribunal est d’avis qu’il faut répondre par la négative à cette question. L’autorité de la chose jugée vise à empêcher les parties de remettre en cause une question qui a antérieurement fait l’objet d’une décision finale. Pour conclure à l’autorité de la chose jugée, il faut donc qu’il y ait identité de parties, de cause et d’objet. Dans la présente affaire, il y a manifestement identité de parties puisqu’il s’agit toujours du même travailleur et du même employeur. Cependant, le Tribunal conclut qu’il n’y a pas identité de cause et d’objet puisque la décision finale qui a été rendue le 7 juillet 2014 concerne la reconnaissance d’une lésion professionnelle qui serait survenue le 5 mars 2014 alors que dans le cadre du présent litige, il est plutôt question d’une lésion professionnelle du 26 octobre 2015.

 

Recours irrecevable pour cause de chose jugée

Nguyen et Bombardier aéronautique inc., 2016 QCTAT 1301.

Pour qu’il y ait autorité de la « chose jugée », il faut la preuve prépondérante d’une identité de cause, des parties et d’objet. En l’espèce, l’identité des parties ne fait aucun doute. Il s’agit toujours du même travailleur et du même employeur. Qu’en est-il de l’identité de cause? La pathologie concernée par les réclamations de janvier 2013 et de janvier 2014 est la même. Par ailleurs, le travailleur admet que le travail et les tâches qui seraient à l’origine de sa pathologie en janvier 2014 sont les mêmes qu’en janvier 2013. Il n’y a donc aucune distinction à faire entre la réclamation de janvier 2014 et celle de 2013 : il s’agit du même poste de travail, des mêmes outils et des mêmes modes opératoires. Il y a également identité d’objet. En effet, tant en 2014 que 2013, le travailleur recherche la reconnaissance d’une lésion professionnelle, à savoir une maladie professionnelle reliée à l’exercice de son travail d’ajusteur-monteur. Le Tribunal n’a donc pas d’autre choix que de conclure que le travailleur lui demande de se prononcer à nouveau sur une réclamation qui a déjà fait l’objet par la CSST d’une décision rendue finale et irrévocable du 21 février 2013. La réclamation du 28 janvier 2014 est donc irrecevable.

 

Peintures Première inc. et Beaumier, 2016 QCTAT 4841.

À la lumière de cette jurisprudence, le Tribunal est un tribunal quasi judiciaire et la notion d’autorité de chose jugée devrait trouver application, tel qu’enseigné par la Cour suprême du Canada et confirmée ultérieurement par la Cour supérieure dans l’affaire Durocher. Quoiqu’il en soit, les critères demeurent les mêmes pour que cette notion puisse s’appliquer, soit l’identité des parties, de l’objet et de la cause.  En l’espèce, la cause alléguée par le travailleur pour son syndrome du canal carpien bilatéral demeure toujours son travail de peintre au fusil dans sa réclamation pour une maladie professionnelle survenue le 14 novembre 2013; or, la relation entre cette pathologie et le travail effectué a déjà été refusée par une décision finale de la CLP rendue le 13 mai 2013. Le principe de la stabilité des décisions doit être maintenu et le débat n’est pas à refaire sur la lésion alléguée du 14 novembre 2013 car il y a autorité de la chose jugée dans le présent dossier, soit l’identité des parties, de l’objet et de la cause.

 

Murwanashyaka et Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal, 2021 QCTAT 4579.

Le travailleur tente de nouveau de faire reconnaître un accident du travail, sous forme de lésion psychologique, qui serait survenue le 19 ou le 20 mai 2011, alors qu’il travaillait pour l’employeur. Or, le Tribunal a, à deux reprises, rejeté la contestation du travailleur sur cette même question. Pour le Tribunal, « la demande est fondée sur la même cause et mue entre les mêmes parties, agissant dans les mêmes qualités, et que la chose demandée est la même ». Il y a donc chose jugée, la requête préliminaire de l’employeur est accueillie.

 

Décision finale et irrévocable 

Canadelle, s.e.c. et Commission de la santé et de la sécurité du travail, 2014 QCCLP 6290.

La décision finale et irrévocable rendue par la CSST établissant une relation entre un nouveau diagnostic et la lésion professionnelle produit des effets juridiques et s’impose au tribunal dans l’exercice de sa compétence. L’employeur qui veut démontrer que le nouveau diagnostic en cause découle plutôt d’une des situations visées à l’article 31 se doit de contester cette décision de la CSST avant qu’elle ne devienne finale et irrévocable.

 

Suivi :

Pourvois en contrôle judiciaire rejetés, 2016 QCCS 2806.

RE/MAX du Cartier inc., 2018 QCTAT 2504.

Dans la présente affaire, le Tribunal doit déterminer si le principe de la décision finale et irrévocable s’applique à la décision rendue par la Commission le 18 avril 1989 et dans l’affirmative, si la Commission pouvait rendre des décisions concernant le statut des courtiers en 2015. Pour y arriver, le Tribunal doit donc examiner la nature et la portée de cette décision. Le statut des travailleurs est un des éléments permettant d’établir la masse salariale assurable de l’employeur. La cotisation est déterminée en fonction de cette masse salariale assurable.  Le Tribunal conclut que la décision qui porte sur un élément servant à déterminer la cotisation doit nécessairement avoir la même portée que la décision de cotisation, les deux étant intimement liées. Ces décisions sont rendues annuellement et produisent des effets pour l’année en cours uniquement.  Le principe de la stabilité de la décision n’est pas remis en question étant donné la nature de la décision de cotisation qui a une portée limitée dans le temps.  D’ailleurs la Commission ne demande pas la reconsidération ou la remise en question de la décision de 1989. Les décisions contestées visent le statut des courtiers aux fins de la détermination de la masse salariale assurable pour l’année 2015. Or, une décision à caractère annuel cesse de produire des effets lorsqu’elle est remplacée par une nouvelle décision.  Bien que cela puisse paraître étonnant, la conséquence est que la Commission peut rendre une décision différente pour les années subséquentes même s’il n’y a eu aucun changement.  Conclure autrement signifierait que ni la Commission ni le Tribunal ne pourrait analyser à nouveau la question du statut des courtiers RE/MAX lors de la détermination de la cotisation. Pourtant, la Loi prévoit que la Commission établit la cotisation de l’employeur annuellement et qu’elle calcule le montant de la cotisation à partir des salaires assurables.

 

Suivi :

Demande pour suspendre l'exécution rejetée, pourvoi en contrôle judiciaire rejeté, 2018 QCCS 3976.

Révision rejetées, 2019 QCTAT 3704.

M.P. et Compagnie A, 2019 QCTAT 3777.

Pour la Commission, le fait qu’elle ait rendu une décision refusant de reconnaître le lien entre le syndrome compartimental et la lésion professionnelle fait obstacle à la reconnaissance d’une RRA fondée sur le même diagnostic. Le Tribunal convient qu’en raison du principe de la stabilité des décisions, s’il s’agit toujours de la même lésion ou de ses conséquences propres, sous réserve des dispositions applicables en matière de reconsidération, on ne saurait reconnaître une RRA pour le même diagnostic qui a fait l’objet du refus. Il s’agit là du principe de la décision finale et irrévocable. Par ailleurs, s’il s’agit d’une nouvelle lésion découlant d’une nouvelle cause, le Tribunal devra faire l’exercice d’apprécier le lien pouvant exister entre cette nouvelle lésion et la lésion professionnelle reconnue. Le docteur Hébert parle d’une chute survenue en 2010. Le Tribunal ne retrouve aucune trace d’une pareille chute au dossier. D’ailleurs, aux notes évolutives du 9 mars 2017, le travailleur précise faire une demande de RRA en raison des conséquences d’une tentative de suicide où il serait resté couché sur son bras endommageant ce dernier de façon permanente. Il s’agit là de l’épisode de 2008. La Commission a déjà déterminé que cet épisode et ses conséquences n’étaient pas en lien avec sa lésion professionnelle. Il n’y a pas de nouvelle lésion. Le travailleur demande de modifier une décision qui a acquis un caractère final et irrévocable, ce qu’il ne peut faire. 

 

L'actualisation du dossier 

Morin et R. J. Dutil et Frères, 2012 QCCLP 1075.

Pour l'employeur, ces pouvoirs ne peuvent être interprétés de façon à permettre d'introduire le diagnostic d'épicondylite au débat. Si la CSST ne s'est pas prononcée sur la relation entre le diagnostic et l'événement accidentel, la CLP ne pourrait le faire. Accepter la prétention de l'employeur à cet égard équivaudrait à dire que la CLP est liée par la façon dont la CSST traite une réclamation, alors que la mission confiée au tribunal l'oblige plutôt à contrôler la façon dont la CSST le fait. Or, il est inacceptable de penser que si la CSST devait se prononcer sur un aspect de la réclamation qui lui a été soumise et qu'elle ne l'a pas fait, la CLP ne puisse venir corriger la situation en vertu des vastes pouvoirs qu'elle possède en vertu de l'article 377. En l'espèce, le diagnostic d'épicondylite n'a pas été découvert au moment de l'audience devant la CLP. Dès les jours qui ont suivi la lésion professionnelle, le médecin qui a charge a demandé que le travailleur reçoive des traitements à l'épicondyle. De plus, la référence à ce diagnostic se retrouve au dossier à plusieurs endroits sans que la CSST ne se soit prononcée sur sa relation avec la lésion professionnelle. Conformément à l'article 377, la CLP doit remédier à cette situation, car la réponse à la question de savoir si le diagnostic d'épicondylite est relié à la lésion professionnelle conditionnera l'exercice de détermination des conséquences susceptibles d'en découler, que ce soit en regard des soins nécessaires, des limitations fonctionnelles ou de l'atteinte permanente.

 

Côté et Toitures Hogue inc.2013 QCCLP 392.

Dans certains cas, la CLP actualise le dossier et rend la décision qui aurait dû être rendue en premier lieu, et ce, en vertu des pouvoirs qui lui sont accordés à l'article 377. Dans Couture et Pmp Repro Média inc., la CLP a souligné que les tribunaux supérieurs l'ont maintes fois invitée à procéder ainsi, car ils estiment que le fait de retourner le dossier à la CSST pour obtenir une autre décision constituerait un abus de procédure et allongerait indûment les délais, ce qui cause un préjudice additionnel aux parties. En l'espèce, le tribunal entend suivre cette directive des tribunaux supérieurs puisqu'il considère qu'il n'est pas dans l'intérêt des parties ni opportun pour une saine administration de la justice de reprendre le processus d'évaluation médicale plus de quatre ans et demi après l'accident du travail, et ce, alors que le travailleur ne fait plus l'objet d'un suivi médical pour une lésion active et incapacitante à l'épaule droite et qu'il est retourné sur le marché du travail. Cette conclusion paraît d'autant plus justifiée que les parties ont eu le loisir de parfaire leur preuve de nature médicale depuis que la CSST a entériné l'avis du BEM. Enfin, elles ont pu faire valoir leurs prétentions quant aux diagnostics et aux autres questions d'ordre médical lors de l'audience.

 

Sirois et Nordex enr., 2013 QCCLP 683.

En actualisant le dossier, étant donné qu'il décide de novo, le tribunal constate que l'annulation de l'avis du BEM fait en sorte que le 19 mars, la CSST aurait dû se prononcer sur la relation entre les nouveaux diagnostics posés et la lésion professionnelle du travailleur. Le tribunal peut cependant y remédier en vertu des pouvoirs qui lui sont dévolus, notamment à l'article 377. Décider autrement ferait en sorte que le travailleur devrait s'adresser de nouveau à la CSST pour obtenir une décision sur cette question, puis demander la révision de la première décision, et, le cas échéant, déposer une requête à la CLP. Or, cela irait à l'encontre des impératifs d'accessibilité et de célérité de la justice administrative et des principes qui sous-tendent l'existence des tribunaux administratifs. Par conséquent, la demande de révision est recevable. Quant au fond, les diagnostics ne peuvent être reliés à la lésion professionnelle.

 

Dansereau et Park Avenue Toyota, 2013 QCCLP 3051.

En effet, en vertu de l'article 377 LATMP, le tribunal est doté d'un pouvoir de novo, lequel s'exerce en actualisant le dossier et non en se plaçant dans la même situation de fait où se trouvait la CSST au moment où elle a rendu la décision. En l'espèce, au moment où la CSST a rendu sa décision, la lésion de lombalgie mécanique n'était pas encore consolidée. Par contre, devant le présent tribunal, elle est consolidée, ce qui place le tribunal dans la position de choisir entre rendre une décision sur l'ensemble des limitations fonctionnelles ou se limiter à celles découlant de la lésion au genou et de retourner le dossier à la CSST. Cette dernière option engendrerait des coûts et des délais additionnels ainsi que le risque que le dossier ne se retrouve de nouveau devant la CLP dans quelques années.

 

Suivi :

Requête pour suspendre l'exécution de la décision rejetée, 2013 QCCS 3835.

Révision judiciaire rejetée, 2014 QCCS 1361.

Permission d'appeler rejetée, 2014 QCCA 1151.

Produits American Biltrite (Can.) ltée et Chénard, 2013 QCCLP 4034.

Ainsi, le diagnostic de microfractures au poignet n'est pas en lien avec l'événement initial. Toutefois, en vertu d'une interprétation large et libérale et étant donné les pouvoirs du Tribunal, il y a lieu de préciser et d'actualiser ce diagnostic. Aux fins du présent litige, un diagnostic de contusion ayant aggravé une fracture ancienne du scaphoïde avec non-union, dégénérescences ligamentaires chroniques et arthrose modérée à sévère au poignet est donc retenu.

 

Université McGill et CIUSSS de l'Est-de-l'Île-de-Montréal (Hôpital Maisonneuve-Rosemont), 2020 QCTAT 1968.

Cet article accorde au Tribunal un pouvoir large et étendu qui lui permet d’intervenir dans plusieurs situations, notamment pour actualiser le dossier. En l’espèce, la Commission n’a pas encore considéré l’employeur mis en cause dans son calcul de l’imputation des coûts des prestations. Pour l’instant, cette omission semble à première vue contrevenir au deuxième alinéa de l’article 328 de la Loi. Cependant, le remède proposé, soit de retourner le dossier à la Commission, ne constitue pas un exercice approprié des pouvoirs conférés au Tribunal. En effet, toutes les informations nécessaires relativement aux emplois occupés par la travailleuse se retrouvent au dossier ou pourront être obtenues lors de l’enquête en lien avec la présente contestation. Le Tribunal sera en mesure de trancher le litige porté devant lui par l’employeur demandeur. Dans le cadre d’une saine administration de la justice, où le Tribunal doit s’assurer d’agir avec célérité, retourner le dossier à la Commission correspondrait à une prolongation des délais sans véritable justification.

 

Bérubé et EBC inc., 2021 QCTAT 2718.

TAT-2 estime que TAT-1 commet une erreur manifeste de droit en ayant recours au pouvoir d’actualisation dans le cadre qui était le sien puisque ce faisant, il n’a fait ni plus ni moins qu’introduire un tout nouveau litige et s’en saisir, soit la question du diagnostic de la lésion professionnelle. Or, le litige dont TAT-1 était saisi est la date ou la période prévisible de consolidation de la lésion professionnelle et son corollaire, la nature, la nécessité, la suffisance ou la durée des soins ou des traitements administrés ou prescrits. TAT-1 n’était ni saisi de l’admissibilité de la réclamation ni de la relation causale entre un diagnostic donné et l’événement. Et il n’était surtout pas saisi de la question du diagnostic de la lésion professionnelle. Si TAT-1 a sans contredit favorisé une approche souple et flexible à l’égard de la nouvelle preuve médicale, il a cependant, sous le couvert de son pouvoir d’actualisation ajouté au litige en y introduisant celui du diagnostic de la lésion professionnelle. Or, il n’y avait pas de recours valablement formé qui lui permette de se saisir de ce litige et de se prononcer à son égard.

 

Qualification de la lésion professionnelle 

Rimouski (Ville de) et Proulx, C.L.P. 171223-01A-0110, 21 mai 2004, J.-F. Clément.

Même si la CSST a traité la réclamation du travailleur sous l’angle de la maladie professionnelle, le Tribunal peut, en vertu de ses pouvoirs de novo, qualifier la lésion selon la preuve faite devant lui. La CLP peut donc alternativement conclure à l’existence d’un accident du travail, d’une maladie professionnelle ou d’une RRA et, à ce titre, elle n’est pas liée par l’appellation particulière de la lésion faite par les parties ou par la CSST. Les parties ont d’ailleurs fait valoir leurs représentations autant sur la notion de maladie professionnelle que d’accident du travail.

 

Corp technologies étanchéité Jyco et Cameron, 2014 QCCLP 291.

La CSST refuse une réclamation pour un accident du travail. Le travailleur conteste à la CLP. La CLP analyse la réclamation sous l’angle de la RRA, ce que la CSST aurait dû faire.

 

Pulice et Commission scolaire Lester B. Pearson, 2015 QCCLP 5454.

Le travailleur indique s’être infligé une lésion professionnelle en vidant une chaudière. Dans sa demande de révision administrative, il indique plutôt que l’événement n’a pas entraîné une nouvelle blessure, mais qu’il s’agit plutôt de la poursuite de son problème ayant commencé quelques mois plus tôt. À l’audience, le travailleur demande d’accepter sa réclamation, que ce soit sous l’angle d’un accident du travail ou sous l’angle de la RRA. La CLP n’est pas liée par les termes utilisés par la CSST ou par une partie. Elle peut qualifier la lésion d’accident du travail, de maladie professionnelle ou de RRA.

 

Nadon et Centre de santé et de services sociaux d'Antoine-Labelle, 2017 QCTAT 916.

La travailleuse soutient que l'entorse cervicale est en relation avec l'événement du 24 août 2015.  Elle estime qu'il ne s'agit pas ici d'une RRA, mais de la continuité de la lésion initiale. Le Tribunal ne retient pas cet argument. Le Tribunal constate que la décision dont il est saisi statue sur le refus de reconnaître que la travailleuse a subi une RRA de la lésion initiale du 24 août 2015. Il a maintes fois été reconnu que le Tribunal procède de novo et qu’il doit rendre la décision qui aurait dû être rendue. Lorsqu'il est saisi de l'admissibilité d'une lésion professionnelle, il a le pouvoir de la qualifier sous une forme ou sous une autre, à savoir un accident du travail, une maladie professionnelle ou une RRA. Dans le présent cas, le Tribunal estime que la réclamation doit être analysée sous l'angle RRA et non à titre de continuité de la lésion professionnelle initiale.

 

CUSM — Pavillon Hôpital Royal-Victoria et Mensah, 2018 QCTAT 1615.

Le Tribunal conclut qu’il a le pouvoir d’examiner et de qualifier l’arrêt de travail du 10 juin 2016 afin de déterminer s’il s’agit d’une RRA ou d’une continuité de la lésion professionnelle du 30 mars 2016. Il est vrai que la LITAT prévoit que le Tribunal peut, si la date de l’audience n’est pas fixée, suspendre l’instance afin que la Commission prenne position sur la question qu’elle a omis de traiter alors que la loi l’obligeait à le faire. Cependant, la demande de l’employeur de retourner le dossier à la Commission n’a été présentée qu’en début d’audience, donc bien après la fixation d’une audience par le Tribunal. La LITAT prévoit que le Tribunal a le pouvoir de décider de toute question de droit ou de faits nécessaire à l’exercice de sa compétence. Le Tribunal exerce donc sa compétence sans se limiter aux conclusions de la décision contestée ou à l’appréciation de la preuve faite par la Commission. Par conséquent, l’omission de la Commission, en révision administrative, de traiter de l’arrêt de travail du 10 juin 2016, n’empêche pas le Tribunal de le faire. Le Tribunal rejette la demande de l’employeur de retourner le dossier à la Commission. Il doit décider de l’admissibilité de la lésion professionnelle du 30 mars 2016 et déterminer si l’arrêt de travail du 10 juin 2016 est consécutif à une RRA ou s’il s’inscrit plutôt dans la continuité de la lésion initiale.

 

Boudreault et Équipements G.N. Johnston ltée, 2018 QCTAT 3465.

Le Tribunal doit rendre la décision qui aurait dû être rendue en premier lieu. Il peut, en vertu de ses pouvoirs de novo, qualifier la lésion selon la preuve faite devant lui. Il n’est pas lié par l’appellation particulière de la lésion faite par la Commission ou par les parties. Il n’est pas question ici d’une RRA. Il a été question, en révision administrative, de la possibilité d’une maladie professionnelle. Toutefois, le Tribunal estime que c’est en vertu de l’article 28 de la Loi que le présent dossier doit être étudié.

 

STM (réseau des autobus) et Paul, 2018 QCTAT 3624.

L’employeur demande au Tribunal de déclarer que l’événement constitue une RRA. À cet effet, le Tribunal a pris en considération les arguments des parties concernant le pouvoir du Tribunal de modifier la qualification de la lésion professionnelle, soit en vertu du pouvoir qui découle de la contestation de la décision faisant suite au BEM, ou en vertu du pouvoir conféré au Tribunal par l’article 9 de la LITAT de rendre la décision qui aurait dû être rendue. Néanmoins, même si l'on tenait pour acquis que le Tribunal a le pouvoir de qualifier l’événement comme étant une RRA, le Tribunal considère que la preuve est prépondérante que l’événement est plutôt un nouvel événement.

 

Détermination de la date de la lésion professionnelle 

Montacier international inc. et Brochu, 2016 QCTAT 5147.

L’employeur plaide, avec raison, que la maladie professionnelle est apparue en 2002 et non pas le 2 avril 2014 comme l’a décidé la CSST. La question se pose de savoir si le Tribunal peut rendre une décision reconnaissant que la maladie professionnelle est apparue dès le 6 mai 2002, même si la CSST ne s’est pas prononcée à cet égard.  À ce titre, le Tribunal procède de novo et il peut rendre la décision qui aurait dû être rendue en premier lieu sans se limiter au contenu du dossier transmis par la CSST ou à l’appréciation de la preuve faite par cet organisme. Le Tribunal a donc le pouvoir de déclarer que la maladie professionnelle du travailleur est apparue à une date antérieure même si la CSST ne s’est pas prononcée spécifiquement sur cette question. L’autre option consiste à retourner le dossier à la Commission pour qu’elle se prononce sur l’existence d’une maladie professionnelle à compter du 2 mai 2002. Or, les intérêts des parties et de la justice ne seraient pas servis en retournant le dossier à la Commission. Le Tribunal a en sa possession tous les éléments factuels et médicaux permettant de rendre la décision qui aurait dû être rendue en premier lieu par la CSST. Ces éléments démontrent que le travailleur a subi une maladie professionnelle le 6 mai 2002, dont le diagnostic est un syndrome du canal carpien bilatéral.

 

Orthoconcept (2008) inc. et Barbeau, 2017 QCTAT 509.

Il a maintes fois été reconnu que le Tribunal a le pouvoir de déterminer la date d’une lésion professionnelle dont on lui demande la reconnaissance. À partir du moment où le Tribunal est saisi d'une contestation, il « peut confirmer, modifier ou infirmer la décision, l'ordre ou l'ordonnance contesté et, s'il y a lieu, rendre la décision, l'ordre ou l'ordonnance qui, à son avis, aurait dû être rendu en premier lieu ».  Comme il procède de novo, il n'a pas à se limiter aux arguments des parties et doit rendre la décision qui aurait dû être rendue par la CSST en premier lieu.  Il a toute latitude pour se prononcer sur l'existence d'une RRA et la date à laquelle celle-ci survient est l'un des éléments sur lesquels il est appelé à statuer. Or, après avoir analysé la preuve, le premier juge administratif en arrive à la conclusion que la date de la RRA est le 26 mars 2014 puisque « c’est à cette date qu’il y avait un travail plus intense de classement à la comptabilité ».  Ce faisant, le premier juge administratif se livre à un exercice d'appréciation de la preuve, agissant au cœur même de sa compétence.  Il n'y a aucune erreur ici.

 

Gratton et Cirque du Soleil inc., 2018 QCTAT 3613.

TAT-1 commet une erreur de droit en concluant qu’il n’y avait pas de lésion professionnelle le 13 septembre 2013. TAT-1 remet en question la décision d’admissibilité initiale alors que l’avis du BEM consacre son caractère final en retenant notamment le diagnostic d’entorse cervicale faisant l’objet de cette décision d’admissibilité non contestée. La décision rendue par TAT-1 doit donc être révoquée. De plus, TAT-1 commet une autre erreur de droit en concluant que la travailleuse a développé le 4 juin 2001, une maladie professionnelle ayant aggravé une condition préexistante de névrite cubitale bilatérale. Certes, la LITAT confère de larges pouvoirs au Tribunal, dont celui de rendre la décision qui aurait dû être rendue. Dans ce cadre, le Tribunal peut analyser la nature de la lésion professionnelle sous l’angle différent de celui adopté par la Commission et dans le cas d’une maladie professionnelle, identifier une autre date d’apparition de la lésion que celle soumise à la Commission. Toutefois, aussi larges, importants et nécessaires que soient les pouvoirs dévolus au Tribunal, ceux-ci ne peuvent lui servir de sauf-conduit pour dénaturer l’essence d’un litige, d’une réclamation et de la preuve qui les sous-tend, et ce, même dans l’exercice du processus essentiel et fondamental de la conciliation. Dans le présent dossier, TAT-1 commet une erreur de droit en entérinant un accord qui conclut que la travailleuse est victime d’une maladie professionnelle le 4 juin 2001. Le litige qui donne lieu à cet accord repose sur un avis du BEM demandé dans le cadre d’une réclamation pour un accident du travail survenu le 13 septembre 2013. Les conclusions du BEM portent sur les dimensions médicales de cette réclamation et non pas sur les dimensions médicales d’une quelconque lésion de 2001 pour laquelle il n’y a eu aucune réclamation présentée par madame Gratton.

 

 

Diagnostic n’ayant pas fait l’objet d’une décision de la Commission

Le Tribunal accepte de se prononcer sur le diagnostic

Ville de Québec et Fillion, 2019 QCTAT 3459.

Même si la Commission s’est prononcée sur l’admissibilité uniquement sur la base du diagnostic d’entorse de la cheville gauche, le Tribunal peut également reconnaître celui de ténosynovite du tendon fléchisseur de l’hallux de la cheville gauche en se fondant sur les pouvoirs d’actualisation dont il dispose en vertu de l’article 9 de la LITAT, qui prévoit la possibilité de « rendre la décision qui aurait dû être rendue en premier lieu ». En effet, la Commission est informée de ce diagnostic posé par le médecin qui a charge par les rapports médicaux qui lui sont transmis. Ce diagnostic a également été posé par le chirurgien orthopédiste mandaté par l’employeur, dans le cadre de son expertise médicale. De même, il ne s’agit pas d’un diagnostic n’ayant rien à voir avec celui d’entorse de la cheville gauche initialement posé, mais qui vise plutôt à préciser la condition réelle du travailleur eu égard à sa cheville gauche. De surcroît, la Commission ne s’est pas prononcée à l’égard de ce diagnostic, comme il appert du dossier.

 

Larivière et Séfaco Métal inc., 2019 QCTAT 3897.

En vue de l’analyse de l’admissibilité, la Commission écarte le diagnostic de lombalgie, puisque celui-ci réfère seulement à une symptomatologie, et ne retient que la hernie discale L4-L5 gauche. Au fil du dossier, le diagnostic évoluera vers une lombalgie sur une discopathie dégénérative L4-L5 sans compression. Le Tribunal constate que le diagnostic en cause est de nature évolutive et qu’il ne constitue pas un tout nouveau diagnostic sans rapport avec ceux posés précédemment. Au premier abord, le docteur Lessard retient de manière contemporaine au fait allégué un diagnostic de lombalgie pour ensuite ajouter celui de hernie discale, à la suite de l’obtention de l’IRM réalisée. Enfin, le docteur Couture, orthopédiste, précise que le diagnostic à retenir en relation avec la lésion professionnelle est plutôt celui d’une lombalgie sur une discopathie dégénérative L4-L5 sans compression

 

Le Tribunal refuse de se prononcer sur le diagnostic

Y.P. et Compagnie A, 2017 QCTAT 5904.

Le Tribunal conclut qu’il ne peut se prononcer relativement au diagnostic de trouble d’adaptation. D’une part, la Commission n’a pas omis ou refusé de se prononcer à l’égard de ce diagnostic posé pour la première fois 4 jours avant l’audience. De surcroît, ce diagnostic n’en est pas un visant à préciser les diagnostics « de hernie discale L5-S1 (surtout), diminution contrôle vessie- aggravation, absence d’érection » refusés par la Commission en regard de la réclamation pour une RRA alléguée. Il ne précise pas davantage le diagnostic d’aggravation d’une condition personnelle préexistante de hernie discale L5-S1 reconnue en regard de la lésion initiale. Ainsi, le Tribunal ne peut se saisir du diagnostic de trouble d’adaptation sans quoi il le ferait au détriment du droit de l’employeur et/ou de la Commission de le contester par la procédure d’évaluation médicale.

 

Ville de Sutton et Marois, 2020 QCTAT 1998.

Dans le cas qui nous occupe, le diagnostic que l’employeur souhaite voir reconnaître n’a pas été posé par le médecin ayant charge du travailleur et la Commission n’a donc pas omis ou refusé de s’en saisir. Par ailleurs, aucun médecin ni aucun expert n’a posé ce diagnostic. On sait que dans certaines situations, le Tribunal acceptera de se saisir d’un diagnostic posé, par exemple, par l’expert de l’employeur ou du travailleur malgré le fait que le médecin qui a charge ne l’a pas lui-même posé, lorsque ce diagnostic n’est pas étranger avec celui posé par le médecin qui a charge et qu’il reflète l’évolution de la condition du travailleur. Or, ce n’est pas le cas dans le présent dossier puisque d’une part, aucune opinion médicale ne soutient la demande de l’employeur et que d’autre part, la preuve médicale ne démontre pas de façon prépondérante une évolution de la hernie discale L5-S1 eu égard, notamment, au fait que l’imagerie de 2006 et celle de 2018 sont superposables comme l’a souligné l’employeur dans son argumentation. Ainsi, le Tribunal estime que le diagnostic de hernie discale L5-S1 ne peut pas faire l’objet d’une modification ou d’une actualisation.

 

 

Omission de la CNESST ou du BEM de statuer sur une question médicale 

Morin et Agence du revenu du Canada, 2011 QCCLP 6132.

La CSST court-circuite le processus d’évaluation médicale en écartant l’avis du médecin qui a charge. La procédure d’évaluation médicale s’avère donc irrégulière et illégale. Il s’ensuit que la décision rendue par la CSST quant à la capacité de la travailleuse d’exercer son emploi, s’appuie sur des limitations fonctionnelles qui ont été déterminées dans le cadre d’un processus vicié. Cette décision s’avère sans fondement. Le dossier est retourné à la CSST.

 

Formichelli et Concept Neufchâtel inc., 2012 QCCLP 5998.

Le Tribunal est d’avis que la procédure suivie par la CSST est irrégulière puisque le médecin traitant de la travailleuse n’est pas le docteur Boudreau. Le dossier doit donc être retourné à la CSST afin qu’elle détermine les questions médicales en conformité avec les dispositions prévues par la Loi.

 

Lemieux et Otis Canada inc., 2013 QCCLP 736.

Le Tribunal conclut que l’employeur n’a pas respecté la procédure d’évaluation médicale, puisqu’il n’a pas obtenu un rapport de son médecin désigné qui, après examen, infirmait les conclusions du médecin qui a charge se trouvant dans le rapport qu’il désirait contester. Dans les circonstances, le Tribunal déclare irrégulière la procédure d’arbitrage ayant conduit à l’avis du BEM. Cette décision emporte l’annulation des décisions de la CSST entérinant l’avis du BEM et portant sur l’atteinte permanente et les limitations fonctionnelles. Le Tribunal en venant à la conclusion que le rapport final a été irrégulièrement produit, doit retourner le dossier à la CSST afin que la date de consolidation de la lésion soit déterminée selon les exigences de la Loi, soit par une demande au médecin qui a charge ou soit selon les autres formalités prévues par la Loi et au besoin, le processus d’évaluation médicale repris, selon ces mêmes règles.

 

Suivi :

Révision rejetée, 2014 QCCLP 1513.

Instech Télécommunication inc. et Fathi, 2017 QCTAT 1609.

Conformément à la demande de l’employeur, la CSST aurait dû demander au BEM de se prononcer sur le diagnostic. Puisque l’erreur émane de la CSST et que le dossier est complet, incluant même une dernière expertise par un médecin expert à la demande du travailleur, le Tribunal est d’avis qu’il a compétence et qu’il doit même, pour une saine administration de la justice, se prononcer en regard du diagnostic.

 

Remédier aux irrégularités 

Société canadienne des postes et Dubeau, 2018 QCTAT 1535.

Le Tribunal constate une irrégularité aux procédures menant à l’exercice de sa juridiction de telle sorte qu’il doit apprécier s’il est saisi de la contestation de l’employeur. Il y a deux évaluations pratiquées par le BEM, l’une en orthopédie, l’autre en neurologie. Dans la première décision, concernant le BEM neurologique, la Commission consolide le traumatisme crânien-cérébral léger (TCCL). Dans la deuxième décision, qui concerne le BEM orthopédique, la Commission se prononce étrangement sur le volet neurologique et déclare que le  TCCL n’est pas consolidé. Il y a là l’irrégularité qui se glisse dans le dossier. L’employeur demande la révision de la décision qui porte sur le volet orthopédique de la travailleuse, mais invoque des motifs relatifs à la date de consolidation du TCCL. Dans sa décision en révision administrative, la Commission reprend l’ensemble des conclusions à caractère orthopédique et se prononce à nouveau sur la question neurologique en déclarant que le TCCL de la travailleuse n’est pas consolidé. Le Tribunal est maintenant saisi de cette décision. L’irrégularité repose sur le fait que celle-ci se veut d’abord une décision portant sur le volet orthopédique des lésions, mais qui contient une conclusion orpheline portant sur le volet neurologique. Bien que celle-ci n’ait pas de lien avec la nature de la décision, elle s’avère tout de même contraire à l’avis du médecin du BEM. Le Tribunal ne peut ignorer cette irrégularité, surtout en raison du fait que l’employeur conteste la consolidation du TCCL depuis le début. Il y a ici un fil continu entre l’opposition faite par l’employeur sur la question de consolidation du TCCL de la travailleuse et les conclusions de la Commission portant sur celle-ci. Une saine administration de la justice commande que le Tribunal se saisisse de cette question, bien qu’elle n’apparaisse qu’accessoirement à une décision qui porte sur un objet différent.

 

Accueil du Rivage inc. et Simoneau, 2018 QCTAT 2117.

La Commission indique, sur le formulaire qui initie la demande au BEM, que le diagnostic de la lésion professionnelle retenu est une entorse lombaire. La Commission ajoute que le diagnostic d’entorse sacro-iliaque droite est en suspens. Or, cette information est inexacte, puisque le diagnostic a été accepté. La Commission ne corrigera jamais cette erreur auprès du BEM. Ainsi, lorsque le membre du BEM rend son avis, il ne le rend qu’en regard du diagnostic d’entorse lombaire. Or, n’eut été l’erreur de la Commission, le médecin aurait également rendu son avis en regard du diagnostic d’entorse sacro-iliaque droite. Le Tribunal a donc le pouvoir d’agir de novo. Il s’agit d’un pouvoir très large en vertu duquel le Tribunal peut remédier aux irrégularités pouvant affecter le processus décisionnel suivi jusque-là et aux erreurs commises par les instances inférieures, actualiser le dossier et régler toutes les questions accessoires à la question principale qu'il doit trancher. Le renvoi du dossier à la Commission, afin qu’elle se prononce sur l’existence et la nature des séquelles en lien avec l’entorse sacro-iliaque, ne ferait que prolonger inutilement le litige. Cela n’est pas souhaitable pour les parties d’autant plus que cela ne cadre pas avec l’objectif de célérité consacré à la LJA. De plus, le Tribunal a tous les éléments en main pour être en mesure de décider des conclusions à retenir relativement aux sujets traités par le BEM en regard des deux diagnostics reconnus. Conséquemment, bien qu’en raison de l’erreur de la Commission le médecin du BEM n’ait pas considéré le diagnostic d’entorse sacro-iliaque droite dans son avis, le Tribunal a le pouvoir de se saisir de cette question. Le Tribunal entend donc se pencher sur les conclusions du BEM en considérant non seulement le diagnostic d’entorse lombaire, mais aussi celui d’entorse sacro-iliaque droite.

 

Lavoie et Métro Richelieu inc. (Mérite 1), 2019 QCTAT 978.

Le Tribunal peut-il accorder une remise de dette au travailleur en l’absence d’une décision écrite de la Commission? Selon certaines décisions, le Tribunal ne pourrait se prononcer sur la possibilité d’octroyer ou non une remise de dette en l’absence d’une décision explicite sur cette question. Selon d’autres décisions, le Tribunal a le pouvoir de disposer de la demande puisqu’en rendant une décision réclamant le remboursement d’un trop-perçu, la Commission se trouve à décider implicitement qu’elle n’accorde pas au travailleur une remise de dette. Le Tribunal est d’avis qu’en vertu de son pouvoir de novo, il peut remédier aux irrégularités pouvant affecter le processus décisionnel et aux erreurs commises par les instances inférieures. Il peut aussi actualiser le dossier et régler toute question accessoire à la question principale qu'il doit trancher. Le Tribunal estime que ses pouvoirs incluent celui de rendre la décision qui aurait dû être rendue initialement quant à la possibilité d’octroyer ou non au travailleur une remise de dette. Certes, le Tribunal pourrait retourner le dossier à la Commission pour qu’elle se prononce sur la remise de dette. Toutefois, il estime que cette démarche entraînerait des délais inutiles et un stress important pour le travailleur, qui attend depuis maintenant plus d’un an que celle-ci dispose de sa demande. De plus, un tel retour n’atteint pas l’objectif de célérité consacré à la LJA. D’autant que le Tribunal dispose de tous les éléments nécessaires pour rendre la décision. Le Tribunal juge qu’il est équitable d’accorder une remise de dette au travailleur en raison de sa bonne foi. 

 

Le Tribunal saisi d’un litige en imputation peut l’examiner en vertu d’une autre disposition prévue au chapitre du financement 

Emballages Festival inc., 2016 QCTAT 2286.

Le Tribunal constate que l’employeur n’a jamais soumis de demande de transfert à la CSST sur la base de ce motif. Toutefois, comme le reconnaît la jurisprudence, le Tribunal a le pouvoir de décider d’une demande formulée sous l’égide d’un article différent de la demande initiale pourvu que les critères de l’article invoqué soient respectés. En l’instance, ce n’est qu’au jour de l’audience, soit le 14 janvier 2016 que l’employeur demande le transfert de certaines prestations aux motifs que cela a pour effet de l’obérer injustement. La situation d’injustice découlerait de la survenance d’une dépression situationnelle assimilable à une maladie intercurrente. L’employeur invoque donc l’exception prévue au deuxième alinéa de l’article 326 de la Loi. Or, selon cet article, la demande de l’employeur devait être faite dans l’année suivant l’événement, ce qui n’est manifestement pas le cas. De plus, considérant que la dépression situationnelle a été diagnostiquée pour la première fois le 11 janvier 2012 et considérant que cette condition était connue de l’employeur, du moins depuis le mois d’août 2013 alors que la docteure Thériault en traite dans la première version de son expertise, le Tribunal estime que la demande de l’employeur faite à l’audience doit être considérée irrecevable, puisque produite hors délai et sans motif raisonnable.

 

Groupe Canam inc. (Canam), 2016 QCTAT 5869.

La CSST a considéré dans son analyse qu’aucune disposition législative ne permettait à l’employeur de modifier, après coup, une demande présentée initialement sous le couvert du second alinéa de l’article 326, en une demande sous le couvert de l’article 329. Il s’agit en l’occurrence d’un autre exemple où la Commission fait abstraction des enseignements du Tribunal, de surcroît sans venir expliquer, présenter et défendre sa position en audience. Considérant ce qui précède il n’y a pas lieu de reprendre toute l’analyse faite dans l’affaire Pâtisserie Chevalier inc., laquelle fait depuis longtemps consensus au sein du Tribunal, mais plutôt d’en appliquer les principes à la présente l’affaire.

 

CISSS de Lanaudière (CSSS du Nord de Lanaudière) et Solutions Extenway inc. (F), 2016 QCTAT 6273.

Un employeur peut modifier la nature d’une demande qu’il a adressée à la Commission pour qu’elle devienne une demande mixte de transfert et de partage de l’imputation du coût des prestations liées à une lésion professionnelle, dans la mesure où les conditions d’application des articles pertinents ont été respectées. Or, il ne s’agit aucunement du cas en litige. Le soussigné rappelle que l’article 326 de la Loi fixe un délai d’un an à partir de la date de l’événement, que l’article 327 ne fixe aucun délai et que l’article 329 fixe un délai jusqu’à l’échéance de la troisième année suivant la survenue de la lésion. Il ressort clairement que l’employeur n’a pas agi à l’intérieur du délai prévu à la Loi et que sa demande ne peut donc être analysée quant au fond.

 

Cascades Inopak inc., 2017 QCTAT 1380.

L’employeur a contesté la décision générale d’imputation dans le délai imparti, mais n’a formulé aucune demande particulière en vue de l’application de l’article 326(2) de la loi. Non seulement aucune demande écrite n’a été logée avec motifs à l’appui dans l’année suivant la date de l’accident, mais aucune précision n’a été apportée sur les intentions de ce dernier. La Tribunal considère qu’il ne peut accorder une demande de transfert d’imputation en vertu de l’article 326(2) sur la base d’une contestation d’une décision générale d’imputation alors que l’employeur n’a produit à la CSST aucune demande par laquelle il recherche une imputation particulière. Au surplus, le Tribunal tient à rappeler que la Loi, tel qu’il a déjà été établi, prévoit des dispositions spécifiques pour obtenir une imputation particulière dont le fait notamment d’adresser une demande en respectant une procédure et certains délais qui sont précisés. De l’avis du Tribunal, si de tels véhicules procéduraux ont été expressément prévus à la Loi, celui qui désire s’en prévaloir se doit de les respecter.

 

Hôtel-Dieu d'Arthabaska, 2018 QCTAT 331.

L’employeur a soumis une demande de partage d’imputation en vertu de l’article 329 de la Loi le 30 décembre 2015 et a ajouté devant le Tribunal une demande de transfert d’imputation en vertu de l’article 326 de la Loi. Le Tribunal constate que la demande de transfert d’imputation sous l’angle de l’article 326 de la Loi n’a pas été décidée antérieurement au dossier, que ce soit en fonction du premier ou du deuxième alinéa. Ainsi, s’appuyant sur les principes établis dans l’affaire Pâtisserie Chevalier inc. auxquels il adhère, le Tribunal est d’avis que le recours valablement formé en vertu de l’article 329 de même que la contestation également valablement formée en vertu de l’article 359 de la Loi l’autorisent à se saisir de la demande d’application de l’article 326 de la Loi déposée par l’employeur.

 

Suivi :

Révision pendante.

Arrondissement Mercier/Hochelaga-Maisonneuve, 2019 QCTAT 708.

L’employeur ne doit donc pas être imputé du coût de l’IRR versée du 22 juin au 4 août 2013. Reste à décider de la demande de transfert soumise par l’employeur lors de l’audience au sujet de la période d’indemnisation postérieure au 15 août 2013, date à laquelle le travailleur est devenu inapte au travail à la suite d’un problème de santé mentale jugé étranger à son accident du travail du 13 mars 2013. À cet égard, l’employeur prétend que le Tribunal est habilité à examiner sa nouvelle demande au motif qu’il agit de novo. Il fonde son argumentaire sur l’affaire Pâtisserie Chevalier inc.  Pour éviter de se voir opposer cette réalité, l’employeur a plaidé que la demande de transfert du 28 avril 2014 valait également pour la période postérieure au 15 août 2013. Le Tribunal n’est pas d’accord. D’autre part, la cause qui justifie de cesser l’assignation temporaire le 15 août 2013 est différente de celle ayant commandé l’interruption du 22 juin au 4 août 2013. L’employeur devait donc soumettre une demande distincte car l’article 326 prescrit qu’il doit « le faire au moyen d'un écrit contenant un exposé des motifs à son soutien ». Il semble déraisonnable de retenir qu’une demande de transfert déposée dans un but précis, à une date donnée et pour des faits particuliers puisse valoir pour toutes les situations pouvant survenir par la suite et qui sont susceptibles de donner ouverture à semblable avantage. Adopté cette façon de faire reviendrait à permettre à l’employeur à faire fi des conditions prescrites par l’article 326, à savoir d’agir « au moyen d'un écrit contenant un exposé des motifs » alors qu’il a de plus omis de réagir en temps utile pour ce qui est de la période du 15 août au 19 novembre 2013.