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. 29. ANNEXE A, SECTION IV - Maladies causées par des agents physiques

Depuis l'entrée en vigueur du Règlement sur les maladies professionnelles le 6 octobre 2021, les lésions musculo-squelettiques se retrouvent à la section VI de l'annexe A  : les troubles musculo-squelettiques.

Surdité

Application de la présomption

Afin de bénéficier de l'application de la présomption, le travailleur doit démontrer une atteinte auditive causée par le bruit et un travail impliquant une exposition à un bruit excessif.

Atteinte auditive causée par le bruit

Démonstration d’une atteinte auditive compatible avec une exposition au bruit

Au stade de l’application de la présomption, le travailleur n’a qu’à démontrer que sa surdité est compatible avec une atteinte auditive causée par une exposition au bruit.

Gratton et Asbestos Erectors du Canada (Fermé), C.L.P. 194107-61-0211, 31 mars 2003, G. Morin.

L’examen audiologique révèle une configuration compatible avec une hypoacousie causée par le bruit selon les critères reconnus par la jurisprudence, soit une surdité de type neurosensoriel, bilatérale, symétrique et plus sévère dans les hautes fréquences.

 

Lemieux et René G. Paré inc., [2007] C.L.P. 717.

Les caractéristiques d’une surdité potentiellement causée par le bruit sont bien établies au sein de la jurisprudence du tribunal. En l’espèce, l’atteinte du travailleur est effectivement neurosensorielle, bilatérale et symétrique. La courbe audiologique ne correspond pas entièrement aux caractéristiques reconnues pour une surdité causée par le bruit, mais suffisamment pour que l’on puisse conclure qu’elle est à tout le moins compatible avec une telle surdité.

 

Pratt & Whitney Canada et Émond, 2011 QCCLP 4313.

Au stade de l’application de la présomption, le travailleur doit faire la preuve qu’il est porteur d’une atteinte auditive causée par le bruit selon les seules caractéristiques reprises par la jurisprudence. À ce stade, il faut se garder d’imposer un fardeau trop lourd qui rende quasi inapplicable cette présomption. Exiger que le travailleur démontre que sa propre atteinte auditive est causée par le bruit viderait de son sens l’application de cette présomption. Il est plus conforme à la mécanique intrinsèque de la présomption de n’exiger que la preuve d’une surdité compatible avec une exposition au bruit.

 

Ville de Québec et Duhamel,2011 QCCLP 5127.

Une application trop restrictive de la première condition (atteinte auditive causée par le bruit) équivaut à exiger du travailleur la démonstration d’un lien de causalité entre cette atteinte auditive et l’exposition au bruit, ce que veut éviter le législateur par l’instauration d’une présomption.

 

Suivi :

Révision rejetée, 2011 QCCLP 8024.

Lévesque et Auberge La Clé des Champs, 2011 QCCLP 7334.

Personne ne conteste le fait que la travailleuse soit atteinte de surdité, l’examen audiologique le confirme. Le tribunal doit cependant se demander si cette atteinte auditive est causée par le bruit. Suivant la preuve, le tribunal conclut que les courbes audiométriques rencontrées sont compatibles avec une surdité causée par le bruit.

 

Air Canada (Ser. des Réclamations) et Pard, 2012 QCCLP 7859.

Afin de bénéficier de l’application de la présomption de l’article 29, il suffit pour le travailleur de démontrer que le type de surdité dont il est atteint est compatible avec un type de surdité causée par le bruit par opposition à d’autres types de surdité. Obliger le travailleur, à ce stade, à faire une démonstration complète, par preuve médicale prépondérante, de l’existence d’une relation causale entre sa surdité et le bruit aurait pour effet d’annuler le but recherché par le législateur par l’application d’une présomption réfragable, ce but étant d’alléger le fardeau de preuve de celui qui en réclame l’application tout en permettant le renversement de cette présomption par celui qui s’y oppose.

 

Voir également :

Burelle et Ville de Beloeil, 2012 QCCLP 1485.

Lemay et A. & D. Prévost inc., 2012 QCCLP 2007.

St-Pierre, 2012 QCCLP 4819.

Leblanc, 2013 QCCLP 5060.

Roy et Brasserie Labatt du Canada, 2013 QCCLP 7402.

Détermination du diagnostic

La simple affirmation d’une atteinte auditive causée par le bruit, fut-elle du médecin traitant, est insuffisante à sa reconnaissance.

Kolostat inc. et Thérien, [2009] C.L.P. 537.

Les courbes apparaissant aux audiogrammes ne sont pas très caractéristiques d’une atteinte causée par le bruit. À défaut d’explications de la part des médecins du travailleur quant à ces divergences par rapport à la courbe typique, le tribunal n’est pas lié par leurs affirmations voulant qu’il s’agisse, d’une part, d’une surdité causée par le bruit et, d’autre part, d’une surdité industrielle ou occupationnelle. Le tribunal estime que la preuve soumise ne permet pas de conclure de manière probable que la surdité présente chez le travailleur est reliée au bruit.

 

Poirier et AM Électrique enr., C.L.P. 310833-64-0701, 12 janvier 2010, T. Demers.

Aux fins de l’application de la présomption de l’article 29, la preuve que l’atteinte auditive subie par un travailleur en soit une causée par le bruit ne peut pas être établie par la seule conclusion du médecin de ce dernier. Cette conclusion doit également reposer sur un audiogramme et lorsque cet examen ne révèle pas des courbes typiques, le médecin du travailleur doit expliquer pourquoi il est tout de même d’avis qu’il s’agit d’une surdité reliée à une exposition au bruit. À défaut d’une explication satisfaisante, la seule conclusion de ce médecin ne lie pas le tribunal.

 

Richard et General Motors du Canada ltée,C.L.P. 392930-64-0910, 21 mai 2010, M. Lalonde.

Lorsque l’audiogramme sur lequel se base le médecin pour conclure à une surdité causée par le bruit ne révèle pas une courbe typique d’une telle surdité, le médecin du travailleur doit expliquer suffisamment ses conclusions afin d’établir une relation entre la surdité et les bruits excessifs.

 

Deschamps et Carrières Témis (Faillite), 2012 QCCLP 4568.

La preuve d’une atteinte auditive causée par le bruit n’est pas établie par la seule conclusion du médecin traitant sur cette question; elle repose d’abord sur les courbes révélées par l’audiogramme. Lorsque l’audiogramme sur lequel se base le médecin pour conclure à une surdité causée par le bruit ne révèle pas une courbe typique d’une telle surdité, on doit comprendre qu’il fonde sa conclusion sur d’autres considérations. À défaut d’explications suffisantes quant à ces considérations, la seule conclusion du médecin ne lie pas le tribunal.

 

Voir également :

Pufahl et Xstrata Canada Corp-Division CCR, C.L.P. 408012-63-1004, 17 août 2010, I. Piché.

Bujold et Alcidas Bujold (Fermée), 2012 QCCLP 651.

Caractéristiques d’une atteinte auditive causée par le bruit

Une atteinte auditive est causée par le bruit lorsque cette atteinte est neurosensorielle, bilatérale, symétrique et plus sévère dans les hautes fréquences. Elle se caractérise généralement par une chute évidente du seuil d’audition dans les fréquences de 4 000 Hz avec une remontée caractéristique dans les fréquences de 6 000 à 8 000 Hz.

Philips Électronique ltée et Baron Caoutchouc ltée, C.A.L.P. 66210-64-9502, 13 juin 1996, B. Lemay.

La surdité causée par le bruit est une surdité de perception pure, c'est-à-dire neurosensorielle. La perte neurosensorielle est bilatérale et symétrique. Toute perte franchement asymétrique (plus de 10 à 15 dBA) doit être investiguée particulièrement. Une atteinte auditive causée par le bruit se caractérise généralement à l'audiogramme par une chute évidente du seuil d'audition dans les fréquences de 4 000 Hz avec une remontée caractéristique dans les fréquences de 8 000 Hz.

 

Léonard et CSSS Antoine-Labelle, 2011 QCCLP 1818.

Les caractéristiques d’une surdité potentiellement causée par le bruit sont bien établies au sein de la jurisprudence du tribunal. Il s’agit d’une surdité de perception pure, c’est-à-dire neurosensorielle et entraînant une perte auditive bilatérale et symétrique. À l’audiogramme, la surdité neurosensorielle causée par le bruit se caractérise généralement par une chute évidente du seuil d’audition dans les fréquences de 4 000 Hz avec une remontée caractéristique dans les fréquences de 6 000 à 8 000 Hz.

 

Tremblay et Ciment St-Laurent (fermé), 2011 QCCLP 4192.

La surdité causée par le bruit est une surdité de perception pure, c’est-à-dire neurosensorielle. La perte neurosensorielle est bilatérale et symétrique. Toute perte franchement asymétrique doit être investiguée particulièrement. Une atteinte auditive causée par le bruit se caractérise généralement à l’audiogramme par une chute évidente du seuil d’audition dans les fréquences de 4 000 Hz avec une remontée caractéristique dans les fréquences de 6 000 à 8 000 Hz, les fréquences les plus basses n’étant que peu ou pas touchées, sauf au stade de surdité très avancée.

 

Gauthier et Aciers Trans Rol, 2011 QCCLP 5664.

Les caractéristiques d’une surdité potentiellement causée par le bruit sont bien établies au sein de la jurisprudence du tribunal. Il s’agit d’une surdité de perception pure, c’est-à-dire neurosensorielle entraînant une perte auditive bilatérale et symétrique. Une asymétrie inférieure à 10 ou à 15 dBA peut toutefois être qualifiée d’acceptable. Au surplus, cette surdité se caractérise habituellement à l’audiogramme par une chute évidente du seuil d’audition dans les fréquences de 4 000 Hz avec une remontée caractéristique dans les fréquences de 6 000 à 8 000 Hz.

 

Rodrigue et Telus Communications inc., 2016 QCTAT 6627.

Comme l’établit la jurisprudence du Tribunal, une atteinte auditive causée par le bruit est de type neurosensoriel, bilatéral, symétrique et qui présente à l’audiogramme une courbe particulière, soit une chute évidente du seuil d’audition dans les fréquences de 4 000 Hz, avec une remontée caractéristique dans les fréquences de 6 000 et 8 000 Hz.

 

Voir également :

Tremblay et Carrière Richard Poudrette inc., C.L.P. 233972-62B-0404, 30 novembre 2006, M. D. Lampron.

Yockell et Commission de la santé et de la sécurité du travail – Soutien à l’imputation, C.L.P. 315073-01A-0704, 25 juillet 2008, N. Michaud. 

Salvatore et Piquage Canada CQ ltée (Fermé), 2011 QCCLP 6471.

Ville de Saint-Jérôme et Hamel, 2013 QCCLP 6855.

Incidence de l’absence d’une ou de plusieurs des caractéristiques

L’absence d’une ou de plusieurs des caractéristiques habituelles d’un audiogramme n’exclut pas le diagnostic de surdité professionnelle.

Orica Canada inc. et Plouffe, C.L.P. 388355-64-0909, 22 novembre 2010, M. Montplaisir.

Pour conclure qu'une atteinte auditive est causée par le bruit, celle-ci doit être neurosensorielle, bilatérale, symétrique et plus sévère dans les hautes fréquences. En l'espèce, on ne peut retenir l'avis de l'employeur selon lequel les courbes seraient atypiques. L'opinion qu'aurait émise son médecin n'est pas partagée par la seule spécialiste en oto-rhino-laryngologie qui se prononce au dossier et qui souligne que l'audiogramme démontre une perte neurosensorielle bilatérale dans les hautes fréquences avec remontée vers les aigus. De plus, même si l'argument de l'employeur était véridique, il n'est pas suffisant pour établir que l'atteinte auditive n'est pas causée par le bruit. En effet, la présence d'une encoche à la fréquence des 4 000 Hz ne saurait à elle seule constituer une caractéristique nécessaire ou indispensable à la reconnaissance d'une surdité professionnelle. Il en va de même de l'absence de remontée caractéristique dans les fréquences de 8000 Hz.

 

Poirier et Armstrong-Hunt inc., 2011 QCCLP 2197.

L’absence d’une ou de plusieurs des caractéristiques habituelles d’un audiogramme n’exclut pas le diagnostic de surdité professionnelle. La présence d’une encoche à la fréquence des 4 000 Hz ne saurait cependant à elle seule constituer une caractéristique nécessaire à l’émission d’un diagnostic de surdité professionnelle. Il y a lieu également de tenir compte de l’historique de la pathologie, de l’absence ou de l’existence d’autres maladies, de la durée de l’exposition au bruit et de la nature osseuse ou neurosensorielle de la surdité dont le travailleur est victime. De même, la seule asymétrie d’une courbe ou le fait que l’on ne retrouve pas la « remontée attendue » vers les 8 000 Hertz ne constitue pas un empêchement à la reconnaissance d’une surdité professionnelle.

 

Pratt & Whitney Canada et Émond,2011 QCCLP 4313.

L’atteinte attribuable au bruit est généralement bilatérale et symétrique. Le non-respect de ces deux conditions n’est pas fatal si on peut l’expliquer. Dans les cas où l’atteinte n’est pas bilatérale et symétrique, le travailleur doit offrir une explication pour pouvoir bénéficier tout de même de cette présomption.

 

Deschamps et Carrière Témis (Faillite),2012 QCCLP 4568.

Les caractéristiques qui ressortent de la jurisprudence sont des traits, des signes distinctifs, des particularités ou des indices de la présence d’une surdité causée par le bruit, et non pas des conditions qui doivent être satisfaites. Le tribunal doit donc évaluer l’ensemble desdites caractéristiques pour déterminer si la preuve prépondérante permet de conclure ou non que l’atteinte auditive que présente le travailleur est causée par le bruit.

 

Cutnam et Ministère des Transports du Québec, 2012 QCCLP 6375.

Le tribunal constate que l’audiogramme révèle une hypoacousie neurosensorielle bilatérale presque symétrique. Toutefois, la courbe audiologique qui chute à 3 000 Hz ne correspond pas entièrement aux caractéristiques reconnues, mais demeure compatible avec une surdité causée par le bruit. De plus, on la décrit comme étant neurosensorielle et bilatérale. Or, le fait qu’une courbe ne corresponde pas en tous points à ces critères ne peut faire échec à l’application de la présomption.

 

Les Silos Port-Cartier et Roy, 2013 QCCLP 5557.

Les surdités professionnelles se caractérisent habituellement par une surdité de nature neurosensorielle, bilatérale, symétrique et plus sévère dans les hautes fréquences. Ces caractéristiques sont des traits, des signes distinctifs, des particularités et des indices de la présence d’une surdité causée par le bruit, et non pas des conditions qui doivent être satisfaites.

 

Appréciation de l’asymétrie

La jurisprudence établit qu’une asymétrie inférieure à 10 ou 15 dB peut être qualifiée d’acceptable et n’empêche pas l’application de la présomption de l’article 29.

Tremblay et Carrière Richard Poudrette inc., C.L.P. 233972-62B-0404, 30 novembre 2006, M. D. Lampron.

Tant l’audiologiste que l’ORL relient la surdité du travailleur à l’exposition au bruit en milieu de travail malgré l’asymétrie de la courbe audiologique, expliquant cette asymétrie par le fait que l’oreille gauche a été plus exposée que la droite lorsque le travailleur conduisait des camions qui avaient un tuyau d’échappement situé à gauche. Aucune preuve médicale ne contredisant cette explication, qui apparaît plausible, l’asymétrie de la courbe n’est pas en l’espèce, un élément qui permet de ne pas d’appliquer la présomption ou d’écarter la relation.

 

Chalifoux et Bombardier Aéronautique inc., [2006] C.L.P. 743.

Sur la question de la symétrie, bien que l’audiologiste mentionne que la surdité est « relativement » symétrique, une différence maximale de 10 dB ne suffit pas pour conclure que les courbes sont asymétriques.

 

Kolostat inc. et Thérien, [2009] C.L.P. 537.

Les caractéristiques d’une surdité potentiellement causée par le bruit sont bien établies au sein du tribunal. Il s’agit d’une surdité de perception pure, c’est-à-dire neurosensorielle, entraînant une perte bilatérale et symétrique. Une asymétrie inférieure à 10 ou à 15 dB est toutefois acceptable.

 

Léonard et CSSS Antoine-Labelle, [2010] C.L.P. 894.

Une asymétrie inférieure à 10 ou 15 dB demeure acceptable et n’empêche pas l’application de la présomption de l’article 29, surtout lorsque le travail exercé par le travailleur l’expose plus au bruit, d’un côté que de l’autre.

 

Tremblay et Ciment St-Laurent (fermé),2011 QCCLP 4192.

Il est généralement admis que la marge d’erreur liée à un examen audiométrique est de plus ou moins 5 dB, faisant en sorte qu’un écart entre deux mesures doit être supérieur à 10 dB pour être considéré significatif.

 

Pratt & Whitney Canada et Émond,2011 QCCLP 4313.

Selon la littérature médicale, l’atteinte attribuable au bruit est généralement bilatérale et symétrique. Le non-respect de ces deux conditions n’est pas fatal si on peut l’expliquer. Dans les cas où l’atteinte n’est pas bilatérale et symétrique, le travailleur doit offrir une explication pour pouvoir bénéficier tout de même de cette présomption.

 

Gauthier et Aciers Trans Rol, 2011 QCCLP 5664.

Les caractéristiques d’une surdité potentiellement causée par le bruit sont bien établies au sein de la jurisprudence du tribunal. Il s’agit d’une surdité de perception pure, c’est-à-dire neurosensorielle entraînant une perte auditive bilatérale et symétrique. Une asymétrie inférieure à 10 ou 15 dB peut toutefois être qualifiée d’acceptable.

 

Roy et Q.I.T. Fer & Titane inc., 2012 QCCLP 278.

Pour conclure qu’une atteinte auditive est causée par le bruit, cette atteinte doit être neurosensorielle, bilatérale, symétrique et plus sévère dans les hautes fréquences. Toute perte franchement asymétrique, soit plus de 10 à 15 dB, doit être investiguée, particulièrement alors qu’une asymétrie inférieure à 10 ou 15 dB aux mêmes fréquences n’empêche pas l’application de la présomption. L’écart de 15 dB entre l’oreille gauche et l’oreille droite à la fréquence de 4 000 Hz, alors que la perte est symétrique aux autres fréquences, n’est pas suffisant à lui seul pour empêcher l’application de la présomption.

 

Renaud et Conrep, 2017 QCTAT 3255.

L’asymétrie n’est pas une fin de non-recevoir à la reconnaissance d’une atteinte auditive causée par le bruit. D’une part, le travailleur justifie par la position adoptée lors de la conduite de son camion et par les équipements (haut-parleurs, fenêtre ouverte à gauche et tuyau d’échappement) se trouvant à sa gauche, le préjudice accru à cette oreille. Dans le document émanant de l’INRS, les auteurs mentionnent que cette asymétrie est observée chez les chauffeurs de camion, principalement à cause de la radio et de l’ouverture de la fenêtre de ce côté. Cette asymétrie est donc plausible, vraisemblable, et même attendue dans un tel contexte.

 

Voir également :

Philips Électronique ltée et Baron Caoutchouc ltée, C.A.L.P. 66210-64-9502, 13 juin 1996, B. Lemay.

Girouard et General Motors du Canada ltée, C.L.P. 100426-64-9804, 14 décembre 2001, L. Turcotte.

Incidence de la présence ou de l’absence de l’encoche à 4 000 Hz, avec une remontée ou non à 8 000 Hz

Une atteinte auditive causée par le bruit se caractérise généralement à l’audiogramme par une chute évidente du seuil d’audition dans les fréquences de 4 000 Hz avec une remontée caractéristique dans les fréquences de 8 000 Hz. Ce phénomène est souvent appelé « l’encoche à 4 000 Hz ». La jurisprudence établit que la présence d’une telle encoche ne saurait à elle seule constituer une caractéristique indispensable à la reconnaissance d’un diagnostic de surdité professionnelle. Il en va de même de l’absence de remontée caractéristique dans les fréquences de 8 000 Hz.

Lepage et Alcoa ltée, C.L.P. 333846-09-0711, 10 novembre 2008, R. Napert.

La présence d’une encoche à la fréquence des 4 000 hertz ne saurait à elle seule constituer une caractéristique nécessaire et indispensable à l’émission d’un diagnostic de surdité professionnelle.

 

Orica Canada inc. et Plouffe, C.L.P. 388355-64-0909, 22 novembre 2010, M. Montplaisir.

Selon la jurisprudence, pour conclure qu'une atteinte auditive est causée par le bruit, celle-ci doit être neurosensorielle, bilatérale, symétrique et plus sévère dans les hautes fréquences. En l'espèce, on ne peut retenir l'avis de l'employeur selon lequel les courbes seraient atypiques. L'opinion qu'aurait émise son médecin n'est pas partagée par la seule spécialiste en oto-rhino-laryngologie qui se prononce au dossier et qui souligne que l'audiogramme démontre une perte neurosensorielle bilatérale dans les hautes fréquences avec remontée vers les aigus. De plus, même si l'argument de l'employeur était véridique, il n'est pas suffisant pour établir que l'atteinte auditive n'est pas causée par le bruit. En effet, la présence d'une encoche à la fréquence des 4 000 Hz ne saurait à elle seule constituer une caractéristique nécessaire ou indispensable à la reconnaissance d'une surdité professionnelle. Il en va de même de l'absence de remontée caractéristique dans les fréquences de 8 000 Hz.

 

Poirier et Armstrong-Hunt inc., 2011 QCCLP 2197.

La présence d’une encoche à la fréquence des 4 000 Hz ne saurait à elle seule constituer une caractéristique nécessaire à l’émission d’un diagnostic de surdité professionnelle. Il y a lieu également de tenir compte de l’historique de la pathologie, de l’absence ou de l’existence d’autres maladies, de la durée de l’exposition au bruit et de la nature osseuse ou neurosensorielle de la surdité dont le travailleur est victime. De même, la seule asymétrie d’une courbe ou le fait que l’on ne retrouve pas la « remontée attendue » vers les 8 000 Hz ne constitue pas un empêchement à la reconnaissance d’une surdité professionnelle.

 

Lamoureux et Adanac Démolition inc. (fermée), 2011 QCCLP 3365.

La simple absence d’une encoche à 4 000 Hz ne peut, à elle seule, permettre de conclure à une surdité d’origine personnelle. Il s’agit plutôt d’un paramètre qui doit être analysé et soupesé à la lumière de tous les faits démontrés dans la recherche de la preuve prépondérante à ce cas particulier.

 

Tremblay et Ciment St-Laurent (fermé), 2011 QCCLP 4192.

La présence d’une encoche à la fréquence de 4 000 Hz ne saurait, à elle seule, constituer une caractéristique nécessaire ou indispensable à l’identification d’un diagnostic de surdité professionnelle. L’encoche dite « typique » sur l’audiogramme d’un sujet atteint de surdité professionnelle apparaît généralement au début d’une atteinte auditive et tend généralement à diminuer ou à disparaître complètement, proportionnellement à l’importance de la perte auditive totale, ou risque d’être marquée par des signes de vieillissement.

 

Lamarche et Coffrages Dunasso 2001 inc., 2013 QCCLP 1761.

L’existence d’une remontée à 8 000 Hz ne fait pas partie des critères essentiels pour conclure qu'une atteinte auditive est causée par le bruit. Il ne s’agit pas d’un critère qui s’ajoute à ceux déjà mentionnés d’atteinte neurosensorielle, bilatérale, symétrique et plus sévère dans les hautes fréquences. L’absence de remontée à 8 000 Hz a d’ailleurs été considérée par la CLP comme un fait insuffisant pour conclure qu'une atteinte auditive n'est pas causée par le bruit.

 

Duval et Transformateur Pioneer ltée, 2013 QCCLP 2855.

La présence d’une encoche à la fréquence des 4 000 Hz ne saurait à elle seule constituer une caractéristique nécessaire à l’émission d’un diagnostic de surdité professionnelle. Il y a lieu également de tenir compte de l’historique de la pathologie, de l’absence ou de l’existence d’autres maladies, de la durée de l’exposition au bruit et de la nature osseuse ou neurosensorielle de la surdité dont le travailleur est victime. De même, la seule asymétrie d’une courbe ou le fait que l’on ne retrouve pas la « remontée attendue » vers les 8 000 Hertz ne constitue pas un empêchement à la reconnaissance d’une surdité professionnelle.

 

Murray et Pièces de carrosserie Murray, 2017 QCTAT 954.

Lorsque l’audiogramme ne démontre pas de chute d’audition dans les fréquences de 4 000 Hz avec une remontée caractéristique dans les fréquences de 6 000 et 8 000 Hz, conformément à ce que l’on s’attend habituellement d’un audiogramme qui représente une atteinte auditive causée par le bruit, il appartient alors à l’expert d’expliquer pourquoi il soutient malgré tout que la surdité est reliée à une exposition au bruit. À défaut d’une telle explication satisfaisante, le tribunal ne se considère pas lié par les conclusions de cet expert.

 

Voir également :

Gauthier et Entreprises Construction Refrabec inc., C.L.P. 371169-62B-0902, 12 avril 2010, M. Watkins.

Multitemp ltée et Taing, 2011 QCCLP 4531.

Salvatore et Piquage Canada CQ ltée (Fermé), 2011 QCCLP 6471.

Deschamps et Carrières Témis (Faillite), 2012 QCCLP 4568.

Cliche et Bestar inc., 2014 QCCLP 619.

Travail impliquant une exposition à un bruit excessif

Sens commun des termes

En l’absence d’une définition dans la loi de ce qu’est un bruit excessif, il faut s’en remettre au sens commun des termes.

Thuot et Multi-Marques Distribution inc., C.L.P. 144647-61-0008, 17 janvier 2001, B. Lemay.

Puisque le législateur ne précise pas la notion de « bruit excessif », il faut conséquemment s’en remettre, pour en saisir la signification et la portée, à son sens commun tel que défini par les dictionnaires de langue française : il doit s’agir d’un bruit « qui dépasse la mesure souhaitable ou permise; qui est trop grand, trop important », (Petit Robert), « qui excède la mesure, exagéré, exorbitant » (Petit Larousse).

 

Laurin et Purolator courrier ltée, C.L.P. 190107-07-0209, 1er mars 2004, A. Suicco.

La notion de « bruit excessif » n’est pas précisée à la loi. Il faut donc s’en remettre au sens commun du terme, tel que défini par les dictionnaires de la langue française : il s’agit d’un bruit « qui dépasse la mesure souhaitable ou permise; est trop grand, trop important » (Petit Robert), « qui excède la mesure, exagéré, exorbitant » (Petit Larousse).

 

Suivi :

Requête en révision judiciaire rejetée, C.S. Hull, 550-17-001705-043, 27 avril 2005, j. Bédard.

Lemieux et René G. Paré inc., [2007] C.L.P. 717.

Comme la loi ne définit pas la notion de bruit excessif, la CLP s'en remet à la définition du terme « excessif » que donne le dictionnaire. Le travailleur doit donc démontrer, non pas une exposition à un bruit important ou significatif, mais plutôt une exposition à un bruit « qui dépasse la mesure souhaitable ou permise, qui est trop grand, trop important ».

 

Voir également :

Léonard et CSSS Antoine-Labelle, [2010] C.L.P. 894.

Orica Canada inc. et Plouffe, C.L.P. 388355-64-0909, 22 novembre 2010, M. Montplaisir.

Poirier et Armstrong-Hunt inc., 2011 QCCLP 2197.

Tremblay et Ciment ST-Laurent (fermé), 2011 QCCLP 4192.

Racine et Aciers Inoxydables Gastier inc. (F), 2012 QCCLP 2636.

Cutnam et Ministère des Transports du Québec, 2012 QCCLP 6375.

Preuve requise

La jurisprudence reconnaît qu’il n’y a pas lieu d’exiger une étude de bruit spécifique à un emploi en particulier pour prouver que cet emploi est la cause de la surdité.

La jurisprudence établit plutôt qu’un travailleur doit faire une démonstration raisonnable par une preuve de reconnaissance générale du milieu de travail. Pour certains décideurs, le caractère excessif peut se déduire des faits ou reposer sur le témoignage du travailleur, selon les circonstances. Pour d’autres, cette preuve doit être appuyée sur des données indépendantes et non seulement sur de simples allégations ou déductions. 

Preuve pouvant se déduire des faits ou reposant sur le témoignage du travailleur
Isolation Trifluvienne inc. et Lebreton, C.L.P. 366038-04-0812, 1er octobre 2009, M. Carignan.

Le tribunal estime qu’à partir du moment où un employeur exige le port de protecteurs auditifs, on se retrouve dans un milieu de travail qui présente un niveau de bruit suffisamment important pour le qualifier d’excessif. Il n’est pas obligatoire que le travailleur fasse la preuve du nombre de décibels auxquels il a été exposé pour conclure qu’il est exposé à un bruit excessif. S’il fallait exiger qu’un travailleur fasse une telle preuve pour bénéficier de la présomption, le tribunal croit que, dans la majorité des cas, ce ne serait pas possible pour ce dernier. Les études faites par l’employeur ne sont pas à la disposition des travailleurs. Le caractère excessif du bruit peut se déduire des faits, ce qui est le cas en l’espèce.

 

John F. Wickenden & cie ltée et Dufour, C.L.P. 337180-04-0801, 24 mars 2010, J. A. Tremblay.

À partir du moment où un employeur exige le port de protecteurs auditifs, c’est qu’il s’agit d’un milieu de travail qui présente un niveau de bruit assez important pour le qualifier d’excessif. Le fait de porter des protecteurs auditifs n’empêche pas qu’un travailleur puisse présenter une atteinte auditive causée par le bruit. En l’espèce, le travailleur n’a commencé à porter des protecteurs auditifs qu’après les dix premières années, ce qui est suffisant, étant donné le travail exercé de manœuvre spécialisée pour que s’installe une surdité professionnelle.

 

Nicolas et Pêches et Océan Canada, C.L.P. 398799-01B-0912, 16 novembre 2010, G. Cavanagh.

Le tribunal est d’avis que lorsqu’un travailleur est placé dans un environnement où il doit s’approcher d’un autre travailleur à environ deux ou trois pieds et crier très fort pour pouvoir se faire comprendre, il travaille dans un milieu très bruyant, et ce bruit peut être qualifié d’excessif. Par son témoignage, le travailleur s’est donc déchargé de son fardeau de preuve en fournissant une preuve prépondérante établissant qu’il est exposé à un bruit excessif lorsqu’il effectue son travail chez l’employeur.

 

Lamoureux et Adanac Démolition inc., 2011 QCCLP 3365.

La preuve démontre que les outils nécessités par les ouvrages de démolition sont très bruyants, que le bruit ambiant est important et qu’il empêche toute conversation. Il est vrai que le travailleur ne dépose pas de documents ou d’études permettant de quantifier le niveau de bruit engendré par un marteau-piqueur, une scie à métal ou un chalumeau industriel. Cependant, la jurisprudence considère qu’une preuve précise n’est pas obligatoire pour quantifier le niveau de bruit et suivant certaines décisions du tribunal, « le caractère excessif du bruit peut se déduire des faits ». Il serait difficile de prétendre qu’un travail, qui ne permet aucune conversation et qui est exercé durant de nombreuses années sans protecteurs auditifs, n’est pas de nature à exposer le travailleur à des bruits excessifs.

 

Ville de Québec et Duhamel, 2011 QCCLP 5127.

Comme chaque cas doit être analysé à son mérite, le tribunal privilégie une solution mitoyenne. Il est vrai que le travailleur n’a pas produit une étude de bruit pour chacun des équipements auxquels il était exposé dans le cadre de son travail. Cependant, la preuve a démontré qu’il a œuvré principalement dans trois domaines différents alors que des équipements variés sont utilisés dans des conditions tout aussi variables. S’attendre à ce qu’il produise des mesures pour chacune des situations d’exposition au bruit serait démesuré.

 

Suivi :

Révision rejetée, 2011 QCCLP 8024.

St-Pierre, 2012 QCCLP 4819.

En l’absence d’étude de mesures sonométriques ou dosimétriques, le caractère excessif du bruit peut se déduire des faits. Une ou des études de bruit spécifiques aux emplois du travailleur ne sont donc pas nécessairement requises aux fins de l’application de la présomption. Suivant le témoignage crédible et non contredit de ce dernier, le tribunal retient que le travailleur est exposé depuis l’âge de 23 ans à des bruits d’impact important et qu’il ne porte aucun protecteur auditif avant les années 2000 et 2001, étant ainsi exposé à ces bruits pendant plus de 33 ans sans atténuation. Il ressort du témoignage du travailleur qui travaille dans un milieu où plusieurs corps de métiers de la construction utilisent de la machinerie lourde, ce qu’il utilise lui-même. De même, plusieurs des outils utilisés par le travailleur et utilisés par les autres travailleurs autour de lui génèrent des bruits continus et des bruits d’impact. Il est même exposé à des bruits de détonation sans port de protecteurs auditifs.

 

Cutnam et Ministère des Transports du Québec, 2012 QCCLP 6375.

Pour appliquer la présomption prévue à l’article 29, il n’y a pas lieu d’exiger une étude de bruit spécifique à un emploi en particulier pour prouver que cet emploi est la cause de la surdité. La jurisprudence demande plutôt qu’un travailleur fasse une démonstration raisonnable par une preuve de reconnaissance générale du milieu de travail.

 

SÉPAQ (Parc Aquarium du Québec) et Auberge Gray Rocks (fermé), 2013 QCCLP 2502.

Le travailleur a soumis une preuve prépondérante quant à l’exposition à des bruits excessifs pendant une longue période de travail. Il était exposé au bruit généré par l’équipement utilisé pour la fabrication de neige artificielle et à des bruits excessifs reliés à l’utilisation de l’équipement requis pour effectuer du débroussaillage en forêt. La jurisprudence a déjà reconnu que l’utilisation de scies mécaniques et d’outils pour effectuer du débroussaillage constituait un milieu de travail qui était excessivement bruyant.

 

Duval et Transformateur Pioneer ltée, 2013 QCCLP 2855.

Le tribunal accorde une grande crédibilité aux propos du travailleur. Celui-ci a témoigné sobrement, sans exagération ni faux-fuyant. La description du travail fait chez l'employeur au fil des années et les explications offertes par ce dernier sont vraisemblables et corroborées, quant à l’essentiel de leur contenu, par la preuve documentaire. Rien ne permet de douter de la véracité de ses propos. Tel qu’il appert de son témoignage, il a été exposé durant toute cette période à des bruits de meule électrique (buffing), des bruits de soudure à air, des bruits de coupage au couteau électrique, mais surtout, à des bruits de répercussion dus aux coups de masse répétés qu’il devait asséner sur des supports en plastique apposés sur la bobine, à raison de 80 coups de masse par bobine et, en moyenne, pour la production de quatre bobines par jour. Il pouvait consacrer quotidiennement environ trois heures de travail à cette tâche requérant l’usage de la masse, tâche décrite par ce dernier comme étant très bruyante. La preuve offerte par le travailleur quant au niveau de bruit auquel il a pu être exposé constitue « une démonstration raisonnable » de l’intensité et de la durée de l’exposition au bruit auquel il a été soumis et, dans un tel contexte de travail, le tribunal est d’avis que le travailleur s’est trouvé exposé à du « bruit excessif » au sens donné à cette expression par la jurisprudence.

 

Leblanc, 2013 QCCLP 5060.

En l’absence d’étude, de mesures sonométriques ou dosimétriques, le caractère excessif du bruit peut se déduire des faits. Une ou des études de bruits spécifiques aux emplois du travailleur ne sont donc pas nécessairement requises aux fins de l’application de la présomption. Suivant le témoignage crédible et non contredit du travailleur, le tribunal retient que ce dernier est exposé depuis 1973 à des bruits de nature industrielle et à des bruits d’impacts importants. Il ressort du témoignage du travailleur qu’il travaille dans un milieu ou plusieurs métiers à tisser, soit des aiguilleteuses, cardeuses et autres machineries, génèrent des bruits continus et des bruits d’impact importants.

 

Voir également :

Chemin de Fer Nationaux du Canada et Simard, 2012 QCCLP 1855.

Lemay et A. & D. Prévost inc., 2012 QCCLP 2007.

Patry et Atl Réadaptation Travail Beauce inc., 2019 QCTAT 2353.

Preuve appuyée sur des données indépendantes et non seulement sur de simples allégations ou déductions
Bond et BG Checo inc., [1999] C.L.P. 270.

Le travailleur, pour faire la preuve qu'il a exercé un travail l'exposant à un bruit excessif, n'est pas obligé de produire une étude de bruit qui lui est spécifique. Il n'a qu'à faire une preuve raisonnable de reconnaissance générale du milieu de travail, autant que cette preuve soit appuyée sur des données indépendantes reconnues et non seulement sur de simples allégations.

 

Thuot et Multi-marques Distribution inc., C.L.P. 144647-61-0008, 17 janvier 2001, B. Lemay.

Dans le cadre de l’application de la présomption de maladie professionnelle prévue par l’article 29, on ne saurait exiger d’un travailleur qu’il produise en preuve une étude de bruit qui lui est spécifique afin de démontrer qu’il a exercé un travail l’exposant à un « bruit excessif ». Le travailleur doit plutôt faire une démonstration raisonnable par une preuve de reconnaissance générale du milieu de travail, pourvu que cette preuve soit appuyée sur des données indépendantes et non seulement sur de simples allégations.

 

Durocher et Transforce inc., [2004] C.L.P. 449.

Il n'y a pas lieu d'exiger la preuve d'une étude de bruit spécifique à un emploi en particulier pour démontrer que celui-ci est la cause de la surdité. Le travailleur doit cependant faire une démonstration raisonnable par une preuve de reconnaissance générale du milieu de travail, pourvu que cette preuve soit appuyée sur des données indépendantes et non seulement sur de simples allégations.

 

Rose et 1160-2760 Québec inc. (fermée), [2008] C.L.P. 917.

La démonstration d’une exposition à un bruit excessif peut correspondre à une exposition à un bruit inférieur à la norme prévue de façon réglementaire, mais potentiellement dommageable pour l’audition. Le travailleur devait faire la démonstration raisonnable, par une preuve de reconnaissance générale du milieu de travail, pour autant que cette preuve soit appuyée sur des données indépendantes et non simplement sur des allégations, ce qui est le cas en l’espèce.

 

Kolostat inc. et Thérien, [2009] C.L.P. 537.

Il est bien établi qu’un travailleur n’est pas obligé de produire une étude de bruit qui lui soit spécifique, mais il n’en demeure pas moins que la preuve offerte de sa part ne peut être constituée de simples allégations ou n’être basée que sur la commune renommée quant au bruit auquel il était exposé dans son travail. Il lui revient de démontrer qu'il a été exposé à un bruit pouvant être qualifié d'excessif et, pour ce faire, il doit offrir une preuve établissant les endroits où s’est exercé le travail, les sources de bruit environnantes, le temps d’exposition et surtout, le niveau de bruit auquel il a été soumis, et ce, à partir de données objectives et fiables. En l'espèce, en l'absence d'une telle preuve, le tribunal ne peut appliquer la présomption sans se livrer à des hypothèses et à des conjectures.

 

Richard et General Motors du Canada ltée, C.L.P. 392930-64-0910, 21 mai 2010, M. Lalonde.

Le tribunal ne peut, aux fins de l’application de la présomption prévue par la loi, présumer d’une exposition au bruit du seul fait que le travailleur a exercé un emploi dans un milieu « réputé » bruyant.

 

Patry et Alimentation C. & G. St-Jacques, 2013 QCCLP 6853.

Pour déterminer à quoi correspond un bruit excessif, il faut s’en remettre à des critères objectifs d’intensité et de durée, de sorte que le travailleur doit démontrer qu’il a été exposé à un bruit que l’on peut qualifier d’excessif, en faisant la preuve des endroits où il a travaillé, des sources de bruit environnantes, du temps d’exposition et surtout, du niveau de bruit auquel il a été soumis. Le travailleur n'a pas démontré que son travail de boucher et celui de conducteur d'autobus l'exposaient à un tel bruit. Le travailleur mentionne que son travail de boucher l'exposait à des bruits constants engendrés par les ventilateurs et les scies, mais il ne dépose aucune donnée objective. À compter de l'année 1978, le travailleur exerce son emploi de boucher dans un immeuble neuf, ce qui tend à démontrer que les équipements ne sont pas désuets ou défectueux. À cela s'ajoute le fait que le travailleur a exercé l'emploi de gérant pendant une dizaine d'années. Il est vrai qu'il a dit que l'environnement était semblable à celui de boucher. Cependant, il a aussi expliqué qu'il disposait d'un local spécifique pour remplir les tâches administratives. En ce qui concerne son travail de conducteur d'autobus scolaire, le travailleur n'allègue aucunement que ce travail l'expose à un « bruit excessif ». Il ne dépose aucune preuve documentaire quant à cet emploi. En l'espèce, le témoignage seul du travailleur est insuffisant pour conclure qu’il a été exposé à un bruit excessif.

 

Labrecque et 175094 Canada inc., 2016 QCTAT 661.

Il a maintes fois été reconnu qu'un travailleur n'est pas tenu de produire une étude de bruit qui lui est particulière pour faire la preuve qu'il a exercé un travail l'exposant à un bruit excessif. Il n'a qu'à faire une preuve raisonnable de reconnaissance générale du milieu de travail, pourvu que cette preuve soit appuyée sur des données indépendantes reconnues et non seulement sur de simples allégations.

 

Bell Canada et Laforest, 2017 QCTAT 826 (décision sur requête en révision).

Le travailleur peut faire une preuve de reconnaissance générale du milieu du travail, pourvu qu'elle soit appuyée sur des données indépendantes et non sur de simples allégations. Cette expression ne peut vouloir dire que le travailleur doit produire une preuve documentaire pour démontrer le niveau et la durée de l'exposition, car cela reviendrait à exiger la production d'une étude de bruit ou d'une expertise. Bien que de simples allégations soient insuffisantes pour faire la preuve d'une exposition à un bruit excessif, le témoignage jugé crédible n'est pas une allégation, mais constitue une preuve. Dans certaines circonstances, le seul témoignage du travailleur pourrait ne pas être suffisant et d'autres témoignages ou des documents seraient nécessaires pour le corroborer. Cela dépend toutefois des circonstances.

 

Murray et Pièces de carrosserie Murray, 2017 QCTAT 954.

Bien qu’il n’ait pas à soumettre une preuve scientifique ou des études de bruit détaillées qui lui sont spécifiques, le travailleur doit à tout le moins effectuer une démonstration raisonnable de l’intensité et de la durée de l’exposition au bruit auquel il a été soumis, laquelle ne doit pas reposer sur de simples allégations ou sur de vagues impressions subjectives.

 

Voir également :

Ferland et Brasserie O’Keefe, C.L.P. 369272-62B-0901, 20 octobre 2009, M. Watkins.

Tremblay et Ciment St-Laurent (fermé), 2011 QCCLP 4192.

Côté et Alcoa ltée, 2012 QCCLP 816.

Prévost et Bourboule Transport ltée, 2012 QCCLP 4891.

Incidence des normes réglementaires

Le Règlement sur la santé et la sécurité du travail  (l'article 131 de ce règlement a remplacé l'article 45 du Règlement sur la qualité du milieu de travail le 2 août 2001) prévoit aux articles 130 et suivants, des dispositions relatives aux niveaux de bruit auxquels un travailleur ne doit pas être exposé. La jurisprudence établit que le tribunal n’est pas lié par ces normes réglementaires.

Pour certains décideurs, cette approche est retenue de façon claire. Pour d’autres décideurs, les normes réglementaires peuvent être utiles, voire être un indicateur pour apprécier la notion de bruit excessif et servir de guide au décideur.

Normes réglementaires inapplicables
Bond et BG Checo inc., [1999] C.L.P. 270.

La loi ne définit pas ce qui est un bruit excessif. Elle ne réfère pas aux dispositions du Code de sécurité pour les travaux de construction ni au Règlement sur la qualité du milieu de travail . Le Code de sécurité pour les travaux de construction ne doit pas être appliqué à cet égard, car son objet est d'imposer aux employeurs une limite pénale et une amende, ce qui est différent de l'objet remédiateur de la loi. Dans les circonstances, il est inapproprié d'appliquer la norme réglementaire qui prévoit la limite de bruit continu maximale permise dans un établissement à la notion de bruit excessif prévue à la loi.

 

Brisson et Cité de Dorval, [2003] C.L.P. 417.

Aux fins d’application de la présomption de maladie professionnelle prévue à la loi, le tribunal ne peut importer une donnée inscrite à un règlement visant à établir des normes minimales de protection en regard de la santé et de la sécurité des travailleurs. Ces données ne peuvent servir à qualifier l’exposition au bruit subie par le travailleur d’excessive ou non. Rien dans ce règlement ne précise que le respect des seuils maximaux empêche l’atteinte à la santé d’un travailleur. Le tribunal estime que si le législateur avait voulu associer la notion de bruit excessif, contenue à l’annexe I de la loi, aux limites maximales de niveaux sonores contenues au règlement, il l’aurait clairement indiqué, ce qu’il n’a pas fait. En utilisant les termes « bruits excessifs », le législateur a justement laissé place à une certaine appréciation ou discrétion qui doit être exercée, tant par la CSST que par la CLP.

 

Savoie et Hydro-Québec, C.L.P. 283658-64-0602, 29 janvier 2008, R. Daniel.

Une exposition à des niveaux avoisinant 85 dBA peut constituer une exposition à un bruit excessif. Si le législateur avait voulu définir expressément la notion de bruit excessif et que celle-ci soit fixée à 90 dBA, il l'aurait fixée comme telle.

 

Léonard et CSSS Antoine-Labelle, [2010] C.L.P. 894

Il est inapproprié pour la CSST, de même que la CLP, d’appliquer ipso facto la norme réglementaire qui prévoit la limite de bruit continu maximale permise dans un établissement à la notion de bruit excessif.

 

Percy, 2011 QCCLP 328.

La loi ne définit pas ce qui doit être considéré comme un bruit excessif. Elle ne réfère pas aux dispositions du règlement, lequel ne doit pas être appliqué à cet égard, car son objet est d’imposer aux employeurs des normes de conduite, ce qui est différent de l’objet réparateur de la loi. Le tribunal considère inapproprié d’appliquer la norme réglementaire qui prévoit la limite de bruit continu maximale permise dans un établissement à la notion de bruit excessif prévue par la loi.

 

Pratt & Whitney Canada et Émond, 2011 QCCLP 4313.

Quant à la question de savoir ce qui peut constituer un bruit excessif, le tribunal rappelle qu’en aucun cas, on ne doit établir ce niveau à partir de celui établi par le Règlement sur la santé et la sécurité du travail. Les buts visés par le règlement sont forts différents de ce qui est prévu à l’annexe I de la loi.

 

Salvatore et Piquage Canada CQ ltée (Fermé), 2011 QCCLP 6471.

Bien que le Règlement sur la santé et la sécurité du travail établisse une norme qui prévoit la limite de bruit continu maximale permise dans un établissement, il serait déraisonnable de l’utiliser pour l’associer à la notion de bruit excessif aux fins de l’application de la présomption de maladie professionnelle prévue à l’article 29.

 

Jalbert et Ville de Gaspé, 2013 QCCLP 1916.

Il est reconnu au sein de la jurisprudence que le règlement énonce des normes très conservatrices ne correspondant pas à la norme reconnue dans la majorité des autres provinces du pays et en Europe, où il est plutôt question, notamment, d’une durée maximale d’exposition de huit heures non à 90 dB, mais plutôt à 85 dB. Il est même mentionné que tout niveau excédant 80 dB doit être examiné de près et peut être reconnu comme étant excessif, selon la durée de l’exposition.

 

Denis et Mapei inc., 2015 QCCLP 1314.

La loi ne définit pas ce qui doit être considéré comme un « bruit excessif ». Elle ne fait pas référence aux dispositions du Règlement sur la santé et la sécurité du travail. Ce règlement ne doit pas être appliqué à cet égard, car son objet est d'imposer aux employeurs des normes de conduite, ce qui est différent de l'objet remédiateur de la loi. Il est donc inapproprié d'appliquer la norme réglementaire.

 

Rodrigue et Telus Communications inc., 2016 QCTAT 6627.

La loi ne définit pas ce qui doit être considéré comme un « bruit excessif » et ne réfère pas aux dispositions du Règlement sur la santé et la sécurité du travail. Comme il a été plusieurs fois indiqué en jurisprudence, le règlement ne doit pas être appliqué à cet égard, car son objet est d’imposer aux employeurs des normes de conduite, ce qui est différent de l’objet de la loi. De plus, une exposition en deçà de cette norme peut tout de même représenter une exposition à un bruit excessif.

 

Voir également :

Cutnam et Ministères des Transports du Québec, 2012 QCCLP 6375.

Stadacona S.E.C. et Jalbert, 2013 QCCLP 4371.

Normes réglementaires utilisées à titre de guide
Sweeney et Cartonniers Laval inc., C.L.P. 172387-61-0111, 19 avril 2002, G. Morin.

La CLP ne retient pas la prétention de l'employeur selon laquelle un bruit excessif en est un qui dépasse la norme réglementaire prévue au Règlement sur la qualité du milieu de travail et le Code de sécurité pour les travaux de construction. À maintes reprises, la CALP et la CLP ont décidé que la notion de « bruit excessif » prévue à l’article 29 n’est pas définie par la norme réglementaire parce qu’elle est édictée dans un cadre réglementaire ayant un tout autre objet que celui visé par la présente loi. L’objet de la loi étant la réparation des lésions et des conséquences qu’elle entraîne, la notion de « bruit excessif » réfère plutôt à un niveau de bruit qui peut causer une atteinte neurosensorielle de telle sorte qu’un niveau inférieur à la norme réglementaire peut, selon le cas, être jugé excessif.

 

Commission scolaire des Navigateurs et Thibault, [2003] C.L.P. 623.

La notion de « bruit excessif » réfère à un niveau d’exposition au bruit susceptible de causer une atteinte neurosensorielle. Ainsi, un niveau d’exposition inférieur à la norme réglementaire peut être considéré excessif. Il faut malgré tout s’en remettre à des critères objectifs d’intensité et de durée d’exposition. Il revient au travailleur de démontrer qu’il a été exposé à un bruit pouvant être qualifié d’excessif par une preuve établissant les endroits où s’est exercé le travail, les sources de bruit environnantes, le temps d’exposition et surtout le niveau de bruit auquel il a été soumis.

 

Vinconneau et General Motors du Canada ltée, C.L.P. 223487-64-0312, 30 mars 2005, R. Daniel.

En utilisant les termes « bruit excessif », le législateur a laissé place à une certaine appréciation et discrétion qui doivent être exercées tant par la CSST que par le tribunal. En limitant l’application de la présomption de maladie professionnelle aux seuls cas où les niveaux sonores dépasseraient la norme prévue au règlement, l’on restreint la portée de cette présomption d’une façon qui n’est pas prévue à la loi.

 

Lemieux et René G. Paré inc., [2007] C.L.P. 717.

Bien qu’il soit généralement reconnu au sein de la jurisprudence qu’un travailleur n’a pas nécessairement à démontrer que ses conditions de travail ne respectaient pas les normes prévues au Règlement sur la santé et la sécurité du travail pour bénéficier de la présomption de maladie professionnelle, il n’en demeure pas moins qu’il est reconnu constituer une référence très utile dans l’appréciation du caractère excessif de l’exposition au bruit du travailleur.

 

Audet et Hydro-Québec, C.L.P. 353021-03B-0806, 28 juillet 2010, A. Quigley.

La norme réglementaire québécoise édictée à des fins préventives ne doit pas constituer un absolu et être appliquée sans nuance dans un contexte de réparation et d’indemnisation, mais elle doit plutôt être considérée à titre indicatif, en juxtaposition avec d’autres facteurs pouvant influencer sur le niveau d’exposition au bruit. La notion de bruit excessif réfère à un niveau de bruit suffisant pour entraîner une atteinte auditive, ce qui rend nécessaire une appréciation rigoureuse des faits relatifs à l’exposition au bruit.

 

Gaulin et Bromont Terrasse inc., C.L.P. 400238-62B-1001, 10 septembre 2010, I. Therrien.

La notion de bruit excessif n’est pas définie dans la loi, et les normes réglementaires prévues au Règlement sur la qualité du milieu de travail ne doivent pas être appliquées avec rigueur. Il faut davantage s’y référer à titre indicatif et, également, considérer les conditions prévalant dans le milieu de travail pouvant influer sur le niveau d’exposition au bruit. Cette preuve doit être basée sur des données indépendantes et non seulement sur de simples allégations émanant du travailleur.

 

Multitemp ltée et Taing,2011 QCCLP 4531.

Le Règlement sur la santé et la sécurité du travail et le Code de sécurité pour les travaux de construction adoptés en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail peuvent servir de référence en matière d'évaluation de la notion de bruit excessif. La notion de bruit excessif réfère à un niveau de bruit susceptible d’entraîner une atteinte neurosensorielle, laquelle peut être causée par un niveau de bruit inférieur à la limite maximale permise par le règlement.

 

Bédard et Min. Sécurité Publique, 2012 QCCLP 85.

Il convient de se référer au Règlement sur la santé et la sécurité du travail qui contient des informations utiles à la compréhension et à l’analyse de ce qui peut constituer une exposition dommageable au bruit. Ces normes constituent une référence très utile dans l’appréciation du caractère excessif de l’exposition au bruit d’un travailleur, bien qu’elle doive être appliquée de façon souple.

 

Larivière et Hydro-Québec (Gestion Accident Travail), 2012 QCCLP 7065.

Selon l’approche préconisée dans plusieurs décisions, les normes prévues au Règlement sur la santé et la sécurité du travail peuvent servir d’indicateurs, mais elles ne lient pas le tribunal dans l’appréciation du caractère excessif du bruit. L’objectif préventif de ce règlement est différent du but réparateur dévolu à la loi et la jurisprudence a maintes fois rappelé qu’une valeur plus sécuritaire peut être retenue.

 

Jalbert et Ville de Gaspé, 2013 QCCLP 1916.

Un travailleur n’a pas à démontrer que ses conditions de travail ne respectaient pas les normes prévues à ce règlement pour bénéficier de la présomption de maladie professionnelle. Ce règlement constitue tout de même une référence utile dans l’appréciation du caractère excessif de l’exposition au bruit d’un travailleur. Le dépassement de ces normes témoigne de manière plus que probante de l’exposition à un bruit excessif. Si le législateur avait voulu associer la notion de « bruit excessif » évoquée à l’annexe I aux limites maximales de niveau sonore édictées dans le règlement, il l’aurait indiqué. En utilisant le terme « bruit excessif » plutôt que « tout bruit excédant la norme réglementaire », le législateur a manifestement voulu laisser place à une certaine appréciation par la CSST puis, le cas échéant, par le tribunal. Il est ainsi souvent mentionné qu’un bruit excessif est en fait un bruit susceptible de causer une atteinte neurosensorielle.

 

SÉPAQ (Parc Aquarium du Québec) et Auberge Gray Rocks (fermé), 2013 QCCLP 2502.

L’argument de l’employeur selon lequel le travailleur n’était pas exposé à des niveaux de bruit dépassant les normes prévues au Règlement sur la santé et la sécurité du travail est rejeté. La jurisprudence a maintes fois conclu que les normes réglementaires prévues à ce règlement ne correspondaient pas nécessairement à la notion de « bruit excessif ». Ces normes ne constituent qu’un des éléments à prendre en considération lors de l’analyse de la notion de « bruit excessif ». Cela n’implique pas nécessairement qu’un travailleur doit faire la preuve à l’aide d’une étude de bruit spécifique que son emploi comporte une exposition à des niveaux de bruit supérieurs à ceux prévus à ce règlement. Aucune étude de bruit n’a été déposée par les parties et le tribunal considère que le travailleur a soumis une preuve prépondérante quant à une exposition à des bruits excessifs pendant une longue période de travail.

 

Labrecque et 175094 Canada inc., 2016 QCTAT 661.

Le Règlement sur la santé et la sécurité du travail et le Code de sécurité pour les travaux de construction, adoptés en vertu de la LSST, peuvent servir de référence en matière d'évaluation de la notion de « bruit excessif » prévue à la section IV de l'annexe I de la LATMP. Toutefois, cette notion ne fait pas exclusivement référence aux normes dont il est question dans le règlement. En effet, on ne peut importer une donnée inscrite à un règlement visant à établir des normes minimales de protection en regard à la santé et de la sécurité des travailleurs aux fins de l'application de la présomption de maladie professionnelle prévue à la loi. La notion de bruit excessif réfère à un niveau de bruit susceptible d'entraîner une atteinte neurosensorielle, laquelle peut être causée par un niveau de bruit inférieur à la limite maximale permise par le règlement, par exemple, une exposition avoisinant 85 dB.

 

Voir également :

Asselin et Société de transport de l’Outaouais, 2012 QCCLP 8181.

Les Silos Port-Cartier et Roy, 2013 QCCLP 5557.

Valeur probante de la norme ISO

Il existe principalement deux méthodes d’évaluation de l’exposition au bruit. Ce sont les normes OSHA et ISO.

La méthode OSHA est celle prescrite à l’article 140 du Règlement sur la santé et la sécurité du travail, lequel énonce une méthode de mesure de bruit que l’on peut désigner sous la norme « ACNOR » (Association canadienne de normalisation; en anglais, CSA : Canadian Standards Association), laquelle découle de la norme américaine proposée par l’organisme « OSHA » (Occupational Safety and Health Administration (U.S.)). Selon le règlement, aucun travailleur ne peut être exposé à un niveau de bruit continu de 90 dBA pour une période plus longue que huit heures. Les mesures de bruit sont réalisées en tenant compte que l’appareil intègre les mesures à partir de 85 dBA et que l’intensité du bruit double aux 5 dBA (facteur de bissection q = 5).

La méthode ISO est celle utilisée dans le réseau public de santé québécois. Elle est recommandée par les Directeurs de santé publique depuis 1994. Cette méthode est aussi celle retenue par la publication intitulée La Norme nationale du Canada, méthode approuvée en 2006 par le Conseil canadien des normes, laquelle est désignée « Méthodes de mesure de l’exposition au bruit en milieu de travail », CSA Z107.56-06. Selon cette norme, aucun travailleur ne devrait être exposé à un niveau de bruit continu de 85 dBA pour plus de huit heures. Les mesures de bruit sont réalisées en tenant compte que l’appareil intègre les mesures à partir de 80 dBA et que l’intensité du bruit double aux 3 dBA (facteur de bissection q = 3).

Selon la jurisprudence récente, l’intégration des mesures de bruit selon la norme ISO serait plus appropriée, étant donné que les mesures de bruit effectuées conformément à la norme OSHA sous-évalueraient le niveau d’exposition au bruit quotidien moyen auquel est exposé un travailleur pendant un quart de travail.

Cournoyer et Q.I.T. Fer et Titane Inc., C.L.P. 210744-62B-0306, 26 février 2004, Alain Vaillancourt.

La preuve documentaire révèle que les mesures de bruit ont été faites selon la norme ISO qui prévoit un facteur de bissection de 3 dB. Le seuil d’intégration a été établi à 80 dBA. Selon la norme ISO, les travailleurs ne devraient pas être exposés à un niveau de pression acoustique continu équivalent pondéré de 85 dBA pendant une période de temps plus longue que huit heures. Le respect de la norme ISO constitue un élément des plus utiles pour décider si un travailleur a été exposé à un bruit excessif. Il est en preuve que l’intégration des mesures de bruit selon la norme ISO serait plus appropriée pour prévenir les risques d’atteintes auditives par le bruit, étant donné que les mesures de bruit effectuées conformément à la norme OSHA sous-évalueraient le niveau d’exposition au bruit quotidien moyen auquel est exposé un travailleur pendant un quart de travail. Le risque de développer une surdité professionnelle est accru pour les travailleurs exposés à un niveau de pression acoustique continu équivalent pondéré de 85 dBA et plus pour huit heures d’exposition, avec un facteur de bissection de 3dB et un seuil d’intégration de 80 dBA.

 

Hansen et Commission scolaire Riverside, [2010] C.L.P. 717.

Un audiologiste et un ingénieur ont procédé à des études de bruit à l'école où le travailleur enseignait. Le tribunal retient les résultats de l'étude effectuée par le premier. Tout d'abord, celui-ci est audiologiste et il a évalué le risque d'atteinte à l'audition attribuable à l'exposition au bruit en utilisant la méthode ISO de même que la conformité des doses de bruit avec la réglementation en vigueur au Québec en utilisant la méthode OSHA. L'ingénieur, quant à lui, a évalué les niveaux de bruit et les a comparés aux normes prescrites par le Règlement sur la santé et la sécurité du travail en se servant de la méthode OSHA uniquement. L'audiologiste a expliqué que la méthode OSHA utilise un facteur de bissection de 5 (q = 5) alors que la méthode ISO utilise un facteur de 3 (q = 3). Or, selon la documentation déposée, il serait préférable d'évaluer le niveau d'exposition au bruit selon un facteur de bissection q = 3. Il y est mentionné qu'il y a consensus scientifique, législatif et dans le réseau public de santé du Québec pour utiliser ce dernier facteur. La plupart des pays et quelques provinces canadiennes autres que le Québec l'utilisent, en plus d'avoir des limites d'exposition plus restrictives. La seconde raison pour retenir l'étude sonométrique de l'audiologiste est que la norme nationale du Canada CSA-Z107.56-06, approuvée en novembre 2006, indique de suivre la méthode ISO.

 

Pratt & Whitney Canada et Émond, 2011 QCCLP 4313.

Selon le témoignage d’une hygiéniste industrielle ayant produit une expertise pour la CSST, de 1989 à 1991, l’employeur utilisait la méthode OSHA et la méthode préconisée par le Règlement sur la qualité du milieu de travail  (règlement existant avant le Règlement sur la santé et la sécurité du travail), soit un seuil d’intégration de 85 dB(A) et un facteur de bissection de Q=5. Après 1991 ou 1992, il a utilisé la méthode ISO, soit un seuil d’intégration à 80 dB(A) avec un facteur de bissection de Q=3. En l’espèce, il faut retenir que le travailleur a été exposé à des bruits excessifs même après 1976. Il y a lieu d’écarter la prétention de l’employeur selon laquelle il importe peu d’établir une distinction entre les mesures de bruit selon qu’elles auraient été faites avec un facteur de bissection de Q=5 ou de Q=3, selon la norme OSHA ou selon la norme ISO. Il est possible d’inférer de certaines des études déposées que les dosimétries effectuées par l’employeur en Q=5 ne sont pas représentatives des niveaux sonores auxquels a été exposé le travailleur. Ces niveaux sonores sont, selon toute probabilité, inférieurs à ceux auxquels a pu être réellement exposé le travailleur. Le tribunal partage l’opinion exprimée dans l’affaire Hansen et Commission scolaire Riverside sur cette question de la différence entre les deux méthodes d’évaluation du bruit. Dans cette affaire, le tribunal concluait également que les mesures faites en Q=5 avaient pour effet de sous-estimer la dose de bruit à laquelle pouvait être exposé un travailleur.

 

Roy et Q.I.T. Fer & Titane inc., 2012 QCCLP 278.

Le tribunal entend prendre en considération les résultats des dosimétries effectuées par l’employeur. Ces dosimétries ont été effectuées « lors de journées de pleines activités sur des quarts de 12 heures ». Les résultats sont disponibles avec un seuil d’intégration de 80 dBA et un facteur de bissection de 3 (Q3) ainsi que pour un seuil d’intégration de 85 dBA et un facteur de bissection de 5 (Q5). Suivant un extrait d’un ouvrage de doctrine déposé par le représentant du travailleur, les auteurs confirment que deux facteurs de bissection sont couramment utilisés, l’un considérant une valeur de doublement de 5 dB utilisé notamment dans le Règlement sur la santé et la sécurité du travail et l’autre de 3dB, utilisé dans la norme ISO 1999. Le tribunal est d’avis que le respect de la norme ISO est plus approprié pour décider si un travailleur a été exposé à un bruit excessif.

 

Guibault et Xstrata Canada corp – Division CCR, 2012 QCCLP 4821.

Afin de déterminer quel est le seuil d’exposition au bruit à retenir pour qualifier le travail du travailleur, le tribunal doit rechercher la méthode de calcul à retenir. Il existe plusieurs de ces méthodes. Celle prescrite par le Règlement sur la santé et la sécurité du travail retient la méthode OSHA. Cette méthode utilise un facteur de bissection de 5 (q=5). La méthode faisant l’objet d’un consensus scientifique et utilisée dans le réseau public de santé québécois est celle dite ISO. Cette dernière utilise un facteur de bissection de 3 (q=3).

 

Larivière et Hydro-Québec (Gestion Accident Travail), 2012 QCCLP 7065.

La norme ISO 1999 sur l’exposition professionnelle au bruit continu utilise un facteur de bissection de 3 dB et un niveau de critère de 85 dBA pour huit heures d’exposition. Cette norme assure une meilleure protection en limitant de manière plus sévère la durée et le seuil d’exposition.

 

Gravel et Commission scolaire des Cascades L'Achigan (F), 2018 QCTAT 80.

Le Tribunal retient que c’est la norme ISO qui doit être appliquée lorsqu'il s'agit de déterminer si un travailleur a été soumis à un bruit excessif pouvant causer une atteinte auditive, et non la norme réglementaire, qui elle, a un autre but.

 

Voir également :

Roy et Brasserie Labatt du Canada, 2013 QCCLP 7402.

Augmentation du risque suivant le niveau de bruit et les années d’exposition

La jurisprudence établit qu’une atteinte auditive peut survenir à la suite d’une exposition à un bruit continu se situant entre 80 et 90 dBA et que le risque est de plus en plus élevé avec l’augmentation du niveau de bruit et les années d’exposition.

Certains décideurs, suivant la preuve déposée, évoquent le fait que le risque puisse apparaître à partir de 75 à 80 dBA.

Savoie et Hydro-Québec, C.L.P. 283658-64-0602, 29 janvier 2008, R. Daniel.

Une exposition à des niveaux avoisinant 85 dBA peut constituer une exposition à un bruit excessif. Si le législateur avait voulu définir expressément la notion de bruit excessif et que celle-ci soit fixée à 90 dBA, il l'aurait fixée comme telle.

 

Les Industries Méta-For inc. et Rotondo, C.L.P. 313132-61-0703, 20 novembre 2008, G. Morin.

Bien que la surdité du travailleur soit une atteinte auditive causée par le bruit, la preuve ne démontre pas que la deuxième condition permettant l'application de la présomption de maladie professionnelle est satisfaite. En effet, selon une étude de bruit effectuée chez l'employeur, le niveau de bruit auquel il a été exposé est inférieur à 85 dBA, ce qui constitue le seuil au-delà duquel il est généralement considéré qu'un bruit peut être qualifié d' « excessif ».

 

Orica Canada inc. et Leblanc, C.L.P. 393090-64-0911, 25 novembre 2010, M. Montplaisir.

L’Association québécoise pour l’hygiène, la santé et la sécurité du travail souligne que certaines études démontrent que des niveaux de bruit quotidiens de 70 dBA ou moins ne représentent pas de danger pour l’oreille humaine et qu’à partir de 85 dBA, pour une exposition de huit heures, un risque important existe pour la plupart des personnes exposées. Les auteurs concluent ensuite qu’il y a un certain consensus scientifique selon lequel le risque augmente avec la dose d’exposition et apparaît dès 75 dBA à 80 dBA. Le tribunal considère qu’il a été démontré que le travailleur a exercé un travail impliquant une exposition à un bruit excessif.

 

Diotte et Hydro-Québec, 2011 QCCLP 4724.

Il est plus généralement reconnu au sein de la jurisprudence du tribunal qu’une atteinte auditive peut survenir à la suite d’une exposition à un bruit continu se situant entre 80 et 90 dBA et que le risque est de plus en plus élevé avec l’augmentation du niveau de bruit et les années d’exposition.

 

Ouellet et Hydro-Québec (Gestion Acc. Trav.), 2011 QCCLP 4928.

Étant donné que la notion de « bruit excessif » réfère à un niveau de bruit qui peut causer une atteinte auditive plutôt qu’un niveau de bruit interdit dans le Règlement sur la santé et la sécurité du travail, il y a lieu de conclure qu’il y a des situations où une exposition se situant entre 80 et 90 dBA cause une telle atteinte.

 

Salvatore et Piquage Canada CQ ltée (Fermé), 2011 QCCLP 6471.

Il a été reconnu à de nombreuses reprises par le tribunal qu’une exposition à des niveaux avoisinant 85 dBA peut constituer une exposition à un bruit excessif puisque cette notion n’est pas définie à la loi et laisse donc place ainsi à une certaine appréciation.

 

Roy et Q.I.T. Fer & Titane inc., 2012 QCCLP 278.

Le tribunal n’est pas prêt à conclure qu’une exposition à 75 dBA constitue d’emblée une exposition à un bruit excessif. D’une part, les auteurs ne retiennent pas 75 dBA précisément, mais mentionnent que le risque apparaît entre 75 et 80 dBA, et d’autre part, ils ne mentionnent pas quelle est la probabilité de développer une surdité neurosensorielle rattachée à une exposition de 75 dBA, contrairement à ce qu’ils précisent à l’égard des expositions égales ou supérieures à 85 dBA. Le tribunal peut difficilement conclure qu’à 75 dBA un travailleur est exposé à un bruit excessif dans la mesure où la norme ISO est respectée et qu’il n’y a pas d’indication pour une intervention en hygiène industrielle.

 

Côté et Alcoa ltée, 2012 QCCLP 816.

Il est généralement reconnu au sein de la jurisprudence du tribunal qu’une atteinte auditive peut survenir à la suite d’une exposition suffisante à un bruit continu se situant entre 80 et 90 dBA et que le risque est de plus en plus élevé avec l’augmentation du niveau de bruit et les années d’exposition. Il s’agit évidemment d’une interprétation plus libérale que celle découlant strictement des chiffres tirés du Règlement sur la santé et la sécurité du travail, lequel ne prend en considération aucune exposition à un niveau de bruit inférieur à 85 dBA.

 

Marcouiller et Industries Maintenance Empire inc., 2012 QCCLP 3442.

Suivant la littérature déposée par le travailleur en cours d’audience, le risque de subir une atteinte auditive apparaît dès que les niveaux sonores atteignent de 75 dBA à 80 dBA alors que ce risque devient important à partir de 85 dBA.

 

Larivière et Hydro-Québec (Gestion Accident Travail), 2012 QCCLP 7065.

Même en deçà des seuils établis par le règlement ou suivant la norme ISO 1999, la jurisprudence reconnaît qu’une atteinte auditive peut survenir à la suite d’une exposition à un bruit continu entre 80 et 90 dB et que le risque est évidemment plus élevé avec l’augmentation du niveau de bruit et les années d’exposition.

 

Jalbert et Ville de Gaspé, 2013 QCCLP 1916.

Il est reconnu au sein de la jurisprudence que le Règlement sur la santé et la sécurité du travail énonce des normes très conservatrices ne correspondant pas à la norme reconnue dans la majorité des autres provinces du pays et en Europe, où il est plutôt question, notamment, d’une durée maximale d’exposition de huit heures non à 90 dB, mais plutôt à 85 dB. Il est même mentionné que tout niveau excédant 80 dB doit être examiné de près et peut être reconnu comme étant excessif, selon la durée de l’exposition.

 

Olymel Vallée-Jonction et Vachon, 2013 QCCLP 3390.

L’étude environnementale révèle que le bruit de fond de l’usine se situe à 85 dB dans plusieurs départements. L’employeur ne semble pas remettre en cause les résultats de cette étude environnementale, mais argue plutôt qu’en raison des protecteurs auditifs dont bénéficie le travailleur, soit des bouchons pour musiciens de modèle ER-25, il n’était pas exposé au même seuil de bruit que ses collègues. Bien que le tribunal considère que le port de protecteurs auditifs puisse réduire le niveau de bruit auquel sont exposés les travailleurs, il faut considérer les différents paramètres permettant d’en évaluer l’efficacité. En l’espèce, en l’absence de preuve du port adéquat des bouchons pour musiciens de modèle ER-25 utilisés par le travailleur entre 2005 et 2010, le tribunal ne peut donner foi à l’affirmation du médecin de l’employeur selon laquelle le travailleur n’était exposé qu’à un seuil de 60 à 70 dB au bruit. Le travailleur a donc subi en décembre 2010 une RRA de sa surdité professionnelle.

 

Denis et Mapei inc., 2015 QCCLP 1314.

Le Tribunal rappelle qu’une atteinte auditive peut survenir à la suite d'une exposition se situant entre 80 et 90 dB et le risque augmente dans une proportion de plus en plus forte avec l'augmentation du niveau de bruit et des années d'exposition.

 

Voir également :

Savoie et Hydro-Québec, C.L.P. 283658-64-0602, 29 janvier 2008, R. Daniel.

Léonard et CSSS Antoine-Labelle, [2010] C.L.P. 894.

Percy, 2011 QCCLP 328.

Poirier et Armstrong-Hunt inc., 2011 QCCLP 2197.

Pratt & Whitney Canada et Émond, 2011 QCCLP 4313.

Incidence des bruits intermittents et de courte durée, incluant les bruits d’impact

Parmi les facteurs susceptibles d’influencer les effets de l’exposition au bruit, il faut prendre en compte les événements bruyants importants. Ces bruits intermittents et de courte durée, tout comme les bruits d’impact, peuvent être aussi nocifs qu’un bruit continu.

Ville de Laval et Pilon, [2005] C.L.P. 830.

Bien que l’exposition spécifique du travailleur soit virtuellement impossible à quantifier précisément, la preuve démontre qu’il est exposé à des bruits intenses, mais que ce n’est que sporadiquement et pour de courtes durées. Or, même s’il n’est pas du tout certain que, pondérée sur huit heures, l’exposition du travailleur soit supérieure à 85 dBA, seuil au-delà duquel un bruit peut être considéré comme excessif selon la jurisprudence, ces niveaux de bruits sont d’une intensité telle que le tribunal ne peut conclure autrement qu’à une exposition à un bruit excessif.

 

Gadoury et Ville de Québec, C.L.P. 316913-31-0705, 9 juillet 2008, P. Simard.

Dans le cadre de son travail de policier, eu égard aux pratiques de tirs, il est établi que le travailleur a subi une exposition à des bruits d’impact qui sont non négligeables. Cette exposition dépassait les normes établies conformément au Règlement sur la santé et la sécurité du travail. Ce dépassement doit prendre en considération que le travailleur ne tirait pas seul et qu’en conséquence, les bruits d’impact étaient multipliés par le nombre de tireurs. À l’article 134 du règlement, il est indiqué qu’il ne doit pas y avoir exposition à des bruits d’impact de plus de 140 dB.

 

Diotte et Hydro-Québec, 2011 QCCLP 4724.

Le tribunal constate que la valeur de crête du niveau de bruit mesurée excède la norme réglementaire de 140 dB pour le bruit d’impact, un travailleur ne devant jamais être exposé à un tel niveau selon le Règlement sur la santé et la sécurité du travail. Le niveau de bruit émis par l’explosion d’un isolateur, ce à quoi le travailleur a fait référence comme étant le plus bruyant dans son travail, n’a pas été évalué, quoique l’on puisse dans les circonstances présumer qu’il était encore plus élevé. Les moyens de protection de la nature des coquilles, outre le fait qu’ils n’étaient pas toujours portés, notamment lors d’événements imprévus, ne font que diminuer le niveau de bruit perçu par l’oreille. Le témoignage du travailleur, quoique peu sommaire et éparpillé, est crédible et n’est pas contredit. Il est démontré de façon prépondérante que le travailleur a exercé un emploi impliquant une exposition à un bruit excessif. Le caractère professionnel de sa surdité est reconnu.

 

Marquis et Ville de Rimouski, 2012 QCCLP 2962.

La preuve révèle que l’exposition au bruit excessif est sporadique et n’est pas continue sur un quart de travail, mais il n’en demeure pas moins que certains bruits mesurés auxquels le travailleur a été exposé sont même supérieurs à 115 dB, exposition qui est d’ailleurs prohibée par la réglementation. Ainsi, bien que les bruits soient intermittents et de courte durée, la CLP considère que le travailleur a été exposé à un bruit excessif.

 

Cutnam et Ministère des Transports du Québec, 2012 QCCLP 6375.

Même si l’exposition pouvait être sporadique et pour de courtes périodes, les bruits étaient très intenses pendant ces courtes périodes d’exposition, empêchant même le travailleur d’entendre les alarmes qui pouvaient se déclencher par moment à l’usine.

 

Lamarche et Coffrages Dunasso 2001 inc., 2013 QCCLP 1761.

Le fait que l’exposition au bruit ait été variable et intermittente n’est pas déterminant dans la mesure où l’exposition du travailleur au bruit sur une base quotidienne était vraisemblablement trop importante, même si le tribunal ne bénéficie pas d’études de dosimétries propres au travailleur.

 

Ville de Saint-Jérôme et Hamel, 2013 QCCLP 6855.

Selon une étude déposée au dossier de la CSST, en général, les bruits générés par le tir des armes à feu sont très élevés et ils dépassent les 130 dB pour la grande majorité des armes utilisées par le travailleur tout au long de sa carrière de policier. Le tribunal ne voit aucune raison de douter des valeurs indiquées dans cette étude. Le travailleur a été soumis à la répétition de détonations, parfois simultanées, de carabines et de « revolvers » et de mitraillettes, créant des bruits d’impact. Il a été exposé à plusieurs reprises à un bruit d’impact de plus de 140 dB, sans porter de protecteurs auditifs. Il s’agit de bruits qui sont nocifs pour l’audition, qui sont susceptibles d’entraîner une atteinte neurosensorielle et qui étaient excessifs.

 

Denis et Mapei inc., 2015 QCCLP 1314.

Le Tribunal retient l'étude déposée à l’effet que les bruits impulsionnels se superposent souvent à du bruit continu et note un effet synergique probable. La présence concomitante de bruit impulsionnel et de bruit continu accroît le risque d’atteinte auditive. C’est ainsi qu’une exposition à un bruit continu de 82 dB(A) jumelée à des cofacteurs tels que les bruits impulsionnels, les heures supplémentaires sur une base régulière et les agents chimiques nécessitent la mise en place de mesures préventives.

 

Réclamation pour une RRA

La jurisprudence établit que le travailleur doit démontrer qu’il a continué à être exposé à des bruits excessifs, car il est reconnu que la surdité neurosensorielle ne progresse pas lorsque cesse l’exposition.

Pour certains décideurs, la preuve nécessaire à la reconnaissance d’une aggravation d’une surdité professionnelle est similaire à celle qui doit être présentée en vue de faire reconnaître initialement la surdité à titre de maladie professionnelle.

Pour d’autres décideurs, cette preuve est analysée selon les critères qui définissent l’existence d’une RRA, tout en reconnaissant la nécessité de démontrer que le travailleur a continué d’être exposé à des bruits excessifs.

Lavoie et Produits forestiers Alliance (Domtar), [1998] C.L.P. 972.

Il est reconnu qu’une surdité professionnelle ne peut progresser d’elle-même, spontanément, sans une exposition à une pression acoustique dommageable. Il en résulte que la détérioration de l’audition du travailleur n’est pas reliée à la notion de RRA telle que définie dans le cadre habituel de la notion de lésion professionnelle.

 

Paquette et FRE Composites inc., [2005] C.L.P. 1510.

La preuve nécessaire à la reconnaissance d’une aggravation d’une surdité professionnelle n’est pas différente de celle requise pour l’acceptation de la reconnaissance initiale. Le travailleur doit démontrer qu’il a continué à être exposé à des niveaux de bruits excessifs, car il est médicalement reconnu que la surdité neurosensorielle ne progresse pas lorsque cesse l’exposition.

 

Lepage et Alcoa ltée, C.L.P. 333846-09-0711, 10 novembre 2008, R. Napert.

Dans l’affaire Boisvert et Halco inc., la CLP a identifié plusieurs paramètres qui permettent de déterminer l’existence d’une relation entre une RRA alléguée et une lésion initiale. Aucun de ces éléments ou critères déterminés par la jurisprudence ne revêt à lui seul un caractère décisif. Dans le cas d’une réclamation visant la reconnaissance d’une aggravation d’une surdité professionnelle, le travailleur doit démontrer qu’il a continué à être exposé à des bruits excessifs, car il est médicalement admis que la surdité neurosensorielle ne progresse pas lorsque cesse l’exposition. La preuve nécessaire à la reconnaissance d’une aggravation d’une surdité professionnelle est similaire à celle qui doit être présentée en vue de faire reconnaître initialement la surdité à titre de lésion professionnelle.

 

Morest et Chemins de Fer Nationaux du Canada, C.L.P. 366051-64-0812, 8 mars 2010, D. Therrien.

La notion de RRA constitue un type de lésion professionnelle selon l’article 2. En se référant au sens commun, la jurisprudence nous enseigne qu’il s’agit d’une reprise évolutive, une réapparition ou une recrudescence d’une lésion professionnelle. Elle s’établit par une preuve médicale prépondérante qui démontre une modification de l’état de santé du travailleur par rapport à celui qui existait antérieurement. En matière de surdité professionnelle, le tribunal rappelle que le travailleur doit démontrer une aggravation de sa surdité alors qu’il a continué à être exposé à des niveaux de bruits excessifs au travail.

 

Mercier et Fibres Lyster, 2011 QCCLP 1380.

Pour déterminer si le travailleur a subi une RRA de la lésion initiale, il apparaît utile de s’en remettre aux paramètres élaborés par la jurisprudence, soit une réapparition, une recrudescence ou une aggravation de la lésion survenue lors de l’événement initial. De plus, dans l’affaire Boisvert et Halco inc., la CALP détermine certains paramètres permettant de conclure à la survenance d’une RRA. Appliquant ces paramètres, le tribunal rappelle que le travailleur a subi une maladie professionnelle le 18 novembre 2006, soit une surdité d’origine professionnelle. Entre le 18 novembre 2006 et le 12 avril 2010, le travailleur continue d’occuper le même emploi que celui occupé lors de la reconnaissance de sa surdité professionnelle. Le tribunal retient de la preuve offerte que les conditions de travail ainsi que l’environnement de travail sont demeurés les mêmes que ceux existant lors de la réclamation initiale. Il appert de la preuve médicale produite que la surdité dont il souffre s'est détériorée entre 2006 et 2010. Le travailleur a satisfait au fardeau de la preuve qui lui incombait en ce que, d’une part, il a démontré qu’il était exposé à un niveau de bruit significatif et, d’autre part, qu’il y a eu détérioration objective de sa condition auditive entre 2006 et 2010.

 

Ouellet et Hydro-Québec (Gestion Acc. Trav.), 2011 QCCLP 4928.

La réclamation du travailleur ne peut être traitée comme une RRA bien qu’elle ait été présentée comme telle, puisqu’il est reconnu qu’une surdité d’origine professionnelle est une maladie évolutive et que la détérioration de l’audition du travailleur peut être expliquée par le fait qu’il est demeuré dans son milieu de travail, ce qui a fait en sorte qu’il a été exposé de nouveau au bruit. Le tribunal est d’avis qu’il y a lieu d’analyser la lésion du travailleur comme une nouvelle lésion, le tout en fonction de la notion de maladie professionnelle édictée à l’article 2.

 

Roy et Q.I.T. Fer & Titane inc., 2012 QCCLP 278.

Le travailleur doit établir qu’il a continué à être exposé à des bruits excessifs, car il est médicalement admis que la surdité neurosensorielle ne progresse pas lorsque cesse l’exposition. La preuve nécessaire à la reconnaissance d’une aggravation d’une surdité professionnelle est similaire à celle qui doit être présentée en vue de faire reconnaître initialement la surdité à titre de lésion professionnelle. Le travailleur doit démontrer que sa lésion découle d’une maladie professionnelle. Il pourra bénéficier de la présomption de maladie professionnelle prévue à l’article 29, s’il respecte les critères énoncés à l’annexe I.

 

Prévost et Bourboule Transport ltée, 2012 QCCLP 4891.

La preuve qui est requise demeure essentiellement une preuve de relation entre la lésion initiale et la RRA. Pour y arriver, l’affaire Boisvert et Halco inc. identifie certains paramètres qui permettent de déterminer l’existence d’une telle relation. Aucun de ces paramètres n’est à lui seul décisif, mais pris ensemble, ils peuvent permettre de décider du bien-fondé de la réclamation. Dans le présent dossier, le « profil audiométrique » démontre que le travailleur a été exposé à des bruits nocifs pour son audition durant une période de neuf années additionnelles suivant l’acceptation de sa réclamation pour surdité professionnelle, exposition qui a aggravé sa surdité de façon légère. Le tribunal conclut que le travailleur a démontré, selon les critères reconnus par la jurisprudence, une aggravation de sa surdité découlant d’une exposition au bruit toujours présent dans son milieu de travail, malgré que le travailleur ait été exposé de façon partielle à ces mêmes bruits.

 

Larouche et Chantiers Chibougamau limitée, 2013 QCCLP 2490.

Dans le cas spécifique d’une réclamation visant la reconnaissance d’une aggravation d’une surdité professionnelle, la jurisprudence du tribunal a déjà indiqué qu’il n’était pas approprié de référer aux critères habituellement pris en compte lors d’une RRA. Dans une telle situation, la preuve doit plutôt établir qu’à la suite de la reconnaissance de sa surdité professionnelle, le travailleur a continué d’être exposé à des bruits excessifs. Ce raisonnement repose sur le principe voulant que la surdité neurosensorielle ne progresse pas lorsque l’exposition aux bruits excessifs cesse.

 

Olymel Vallée-Jonction et Vachon, 2013 QCCLP 3390.

Dans le cas spécifique d’une réclamation pour une RRA d’une surdité professionnelle, le travailleur doit établir qu’il a continué d’être exposé à des bruits excessifs, car, suivant la jurisprudence, il est médicalement admis que la surdité neurosensorielle ne progresse pas lorsque cesse l’exposition au bruit. La preuve nécessaire à la reconnaissance d’une aggravation d’une surdité professionnelle est similaire à celle qui doit être présentée en vue de faire reconnaître initialement la surdité. Le travailleur doit démontrer que sa lésion découle d’une maladie professionnelle. Il pourra bénéficier de la présomption de maladie professionnelle prévue à l’article 29, s’il respecte les critères énoncés à l’annexe I.

 

Thériault, 2013 QCCLP 3616.

Aux fins d’apprécier l’existence d’une relation entre la RRA alléguée et l’événement initial, la jurisprudence a développé certains critères ou paramètres, lesquels ont été bien résumés dans l’affaireBoisvert et Halco inc.. Par ailleurs, il est reconnu au sein de la communauté médicale et bien établi au sein de la jurisprudence qu’une surdité causée par une exposition à un bruit excessif présente des caractéristiques particulières, notamment qu’une atteinte auditive causée par le bruit excessif cesse d’évoluer lorsque cesse l’exposition. Dans ce contexte, une aggravation de la surdité d’un travailleur après son retrait de son milieu de travail bruyant, et donc après la fin de son exposition au bruit excessif reconnu responsable de la surdité, n’est généralement pas reconnue.

 

Voir également :

Lévesque et F.F. Soucy inc., 2011 QCCLP 6843.

Absence d’incidence du refus d’une réclamation

L’existence d’une décision finale refusant une réclamation pour une RRA ou une maladie professionnelle ne fait pas obstacle à la production d’une autre réclamation pour surdité professionnelle pour une période postérieure à celle déjà refusée.

Forest et Emballages Pentaflex ltée,C.L.P. 317756-63-0705, 4 juin 2008, L. Morissette.

Le travailleur n’a pas contesté la décision rejetant sa réclamation de 1998 pour une surdité professionnelle. Il ne peut la remettre en cause. En ce qui a trait à la réclamation du 19 décembre 2006, une RRA ne peut être reconnue. Même si la CSST a interprété la réclamation du 19 décembre 2006 comme en étant une pour une RRA, le travailleur n’a pas libellé sa réclamation dans ce sens. La réclamation a été faite à l’intérieur du délai de six mois prévu à l’article 272. Il n’y a pas lieu de retenir la prétention de l’employeur selon laquelle le travailleur savait en 1998 qu’il était atteint d’une surdité professionnelle. À cette époque, il a réclamé pour faire reconnaître une surdité professionnelle et sa réclamation a été refusée. Cela ne signifie pas que la connaissance acquise en 1998 le prive de tout droit de produire une nouvelle réclamation pour faire déclarer qu’il est atteint d’une surdité professionnelle au mois de décembre 2006. Par ailleurs, il a produit une réclamation le 19 décembre 2006, soit le jour même où il a appris par son médecin que sa surdité s'était aggravée. Sa réclamation est recevable.

 

Savastano et Imprimerie Interweb inc., [2008] C.L.P. 1513.

L’existence d’une décision devenue finale refusant une réclamation pour une RRA ou une maladie professionnelle ne fait pas obstacle à la production d’une autre réclamation. Le tribunal doit exercer pleinement sa compétence et apprécier chaque réclamation à son mérite selon la preuve offerte, mais en tenant compte du caractère final et irrévocable de cette décision antérieure dans le but de préserver la stabilité des décisions et d'éviter des décisions contradictoires sur une même question. Il importe de cerner la portée d’une première décision devenue finale aux fins de déterminer si elle a disposé de la même question que celle faisant l’objet de la nouvelle analyse. Cette seconde réclamation doit se fonder sur des faits nouveaux postérieurs à ceux visés par la première réclamation et dont cette décision finale a déjà disposé, particulièrement sur une période d’exposition postérieure à celle ayant été traitée par cette décision antérieure. La seconde réclamation que le travailleur présente en 2007 ne se fonde sur aucun élément nouveau postérieur à sa première réclamation présentée en mars 1997.

 

Labelle et Électricité d’Auto B. Labelle inc., C.L.P. 405744-62-1003, 29 septembre 2010, L. Couture.

Bien qu’une réclamation ait été refusée en 1996 pour une surdité professionnelle, cela n’empêche pas le tribunal de se prononcer à savoir, si l’aggravation de la surdité subie par le travailleur depuis 1996 peut être imputable ou avoir été causée par son travail et ainsi constituer une nouvelle lésion professionnelle.

 

Robert et Dufault Robert Électrique inc.,2011 QCCLP 4739.

En l’absence d’une lésion professionnelle initiale reconnue par la CSST, une RRA ne peut être invoquée avec succès par le travailleur. La décision de la CSST est donc bien fondée en ce qui a trait à la survenance d’une telle lésion. Toutefois, la CSST doit aussi statuer sur la survenance d’une maladie professionnelle le 9 février 2009. Son refus initial n’empêche pas le travailleur de prétendre de nouveau à une surdité d’origine professionnelle à cette date. Par sa première réclamation, le travailleur voulait faire reconnaître une surdité contractée durant les années ayant précédé le 19 septembre 2005, alors que, par sa seconde réclamation, il vise plutôt le travail accompli et la progression de la surdité constatée depuis l’audiogramme effectué en 2005.

 

Raymond et Groupe Bell Nordiq inc., 2012 QCCLP 6793.

Il est manifeste que le travailleur ne peut pas avoir subi une RRA. Il avait soumis une réclamation à la CSST le 22 mars 1999 dans laquelle il invoquait être atteint d’une surdité professionnelle. La CSST rendait une décision par laquelle elle refusait sa réclamation. Cette décision n’a pas fait l’objet d’une demande de révision et est donc finale. On ne peut donc parler de RRA au sens de la loi puisque la lésion initiale n’a pas été reconnue par la CSST. Le tribunal doit limiter son analyse à l’aggravation survenue depuis 1999 et se demander si la détérioration de la surdité du travailleur est causée par le travail qu’il a exercé depuis ce temps.

 

Perras et André Brossard Trans-Québec (F), 2013 QCCLP 3677.

Le tribunal estime qu’il ne peut permettre la reconnaissance d’une nouvelle lésion en se saisissant des faits et de la surdité à l’origine de la réclamation du travailleur du 4 septembre 2007, laquelle a été refusée. Le refus de la lésion initiale de surdité fait suite à une décision finale et irrévocable et doit produire des effets et, conséquemment, lier le tribunal. Il est donc impossible de conclure que la surdité diagnostiquée en 2009 constitue une RRA d’une lésion initiale refusée. La nouvelle réclamation du 23 juillet 2009 ne peut faire revivre les droits du travailleur quant à son exposition au bruit durant la période visée à la réclamation de 2007. Les faits à l’origine de cette réclamation relatifs à l’exposition au bruit ne peuvent, par conséquent, être considérés. La réclamation du travailleur du 23 juillet 2009 doit donc être examinée à titre de nouvelle lésion. Le travailleur a le fardeau de démontrer qu’il a développé une surdité causée par une exposition à des bruits excessifs de 2007 à 2009.

 

Voir également :

Paré et Forestiers Paré Boily inc., 2013 QCCLP 1899.

Renversement de la présomption

La présomption peut être renversée par une preuve qui démontre que le travail ne peut avoir été la cause de la maladie ou par une preuve démontrant que le niveau d’exposition n’a pas été suffisant pour engendrer la maladie.

Cette démonstration peut être faite par une preuve probante démontrant l’existence d’une condition personnelle ou la pratique de certaines activités personnelles. Par ailleurs, il ne suffit pas à un employeur, pour renverser la présomption de l’article 29, de soumettre une preuve que l’exposition au bruit ne dépasse pas la norme québécoise ou canadienne.

Brisson et Cité de Dorval, [2003] C.L.P. 417.

L’opinion de l’hygiéniste selon laquelle le niveau sonore n’a pas été suffisant pour expliquer la surdité du travailleur ne constitue pas une preuve suffisante pour renverser la présomption. Cette opinion est basée sur le fait que le niveau d’exposition ne dépasse pas la norme prévue au Règlement sur la santé et la sécurité du travail, et elle est d’ailleurs contredite par les médecins qui estiment que la surdité du travailleur est attribuable au bruit présent dans le milieu de travail, étant donné qu’aucune autre cause ne peut l’expliquer.

 

Commission scolaire des Navigateurs et Thibault, [2003] C.L.P. 623.

L’employeur soutient que la présomption a été renversée par l’analyse et la conclusion de son expert mentionnant que le niveau ainsi que la durée d’exposition au bruit ne peuvent avoir causé la surdité du travailleur. Le tribunal ne peut toutefois retenir cette opinion, laquelle se fonde sur des normes réglementaires qui doivent être nuancées ou pondérées en fonction du but visé au litige qui est d’évaluer, non pas les normes de protection applicable, mais l’existence d’une lésion professionnelle dans le cas particulier du travailleur. L'utilisation d'une scie mécanique une semaine à l'automne durant 15 ans, d'une tondeuse ou de divers outils de bricolage n'est pas déterminante en l'espèce.

 

Genier et Sears Canada inc., C.L.P. 191644-62-0210, 31 mars 2003, S. Mathieu.

Il ne suffit pas à un employeur de soumettre une preuve que l’exposition au bruit ne dépasse pas la norme québécoise ou canadienne, pour renverser la présomption de l’article 29. En l’espèce, les études industrielles sur lesquelles la décision initiale d’admissibilité avait été rendue étaient nettement plus réalistes que celle faite par l’employeur, laquelle ne tient pas compte de la réalité professionnelle passée du travailleur ni de la durée de son exposition quotidienne au bruit.

 

Tremblay et Boucherie chez Marcel ltée, C.L.P. 256962-09-0502, 19 mai 2006, Y. Vigneault.

Le nombre de jours d’exposition à un bruit excessif n’a pas d’importance pour l’application de la présomption. Il ne suffit pas de dire que le travailleur n’a pas été exposé assez longtemps pour renverser la présomption. Il faut convaincre le tribunal du bien-fondé de l’argument. Il est certain que d’autres pathologies dont le travailleur est porteur ont possiblement un impact sur sa surdité (arthrite psoriasique, hypercholestérolémie et diabète); cependant, la démonstration doit en être faite à la satisfaction du tribunal, celui-ci ne pouvant se contenter d’hypothèses.

 

Tremblay et Carrière Richard Poudrette inc., C.L.P. 233972-62B-0404, 30 novembre 2006, M. D. Lampron.

Même si certaines activités de nature personnelle, notamment la chasse, pourraient expliquer l’asymétrie de la courbe audiologique du travailleur, en l’absence de preuve médicale probante, ces éléments ne suffisent pas à renverser la présomption. Il en est de même en ce qui a trait à l'utilisation d'un véhicule tout-terrain pour se rendre à la chasse. Bien que plusieurs employeurs aient mentionné le peu de temps travaillé dans leur entreprise, pareils propos, sans plus ample preuve médicale probante, ne permettent pas de renverser la présomption de maladie professionnelle. Il leur appartiendra de faire valoir leurs arguments lors d’une demande de partage de coûts le cas échéant.

 

Bell Canada et Labrosse, C.L.P. 293761-62-0607, 27 février 2007, L. Couture.

Comme toute présomption n’est qu’un moyen de preuve, elle peut être renversée par une preuve qui démontre que le travail ne peut avoir été la cause de la maladie ou par une preuve démontrant que le niveau d’exposition n’a pas été suffisant pour engendrer la maladie. En l’espèce, le travailleur n’était exposé que durant deux heures par jour, deux jours par semaine et cela, durant une quinzaine de semaines par année. Cette exposition n’était pas suffisante pour avoir causé la surdité du travailleur. Comme il était déjà porteur de surdité lors de son embauche et que cette surdité a évolué dans les premières années de travail, alors qu’il n’était même pas exposé au bruit, on peut penser que la progression de cette surdité, sur plus de 30 ans, n’est pas en lien avec le travail, mais bien plus avec l’évolution normale d’une telle surdité. Cet élément permet également de renverser la présomption de maladie professionnelle.

 

Savoie et Hydro-Québec, C.L.P. 283658-64-0602, 29 janvier 2008, R. Daniel.

La présomption s’appliquant, il ne suffit pas pour l’employeur de prétendre que le travailleur n’a pas été exposé à un niveau sonore suffisant pour la renverser. Le fait d’alléguer que la période d’exposition demeure insuffisante ou que l’exposition au bruit ne dépasse pas la norme québécoise ne permet pas non plus le renversement de la présomption puisque son application découle directement de l’analyse de ces facteurs. Quant à la démonstration que d’autres activités sont plus susceptibles d’engendrer la surdité que l’exposition au bruit à son travail, la CLP ne peut retenir que les activités exercées par le travailleur, soit la chasse une à deux fois par année ou l’écoute de la musique, sont la cause la plus probable à l'origine de sa surdité. De plus, il existe une corrélation plus que probable entre l’évolution des audiogrammes et l’exposition du travailleur aux bruits ambiants présents au travail, ce qui confirme une étiologie professionnelle à la surdité du travailleur. L’employeur n’a pas renversé la présomption dont bénéficie le travailleur.

 

Lepage et Alcoa ltée, C.L.P. 333846-09-0711, 10 novembre 2008, R. Napert.

Vu l'acceptation de la réclamation le 30 mars 1999 à titre de maladie professionnelle et les conditions de travail similaires existantes en regard de l'aggravation du 10 juillet 2007, l'absence d'antécédents familiaux et personnels à l'égard de la surdité professionnelle, de même que l'âge du travailleur, le tribunal est d'avis que ce dernier lui a démontré tous les éléments constitutifs de la présomption prévue à l'article 29 de la loi. La présomption n’a pas été renversée par l’employeur, celui-ci n’offrant aucune preuve contraire probante et ne fournissant aucune explication alternative plausible à la perte auditive additionnelle du travailleur. Conséquemment, il a subi une aggravation de sa surdité professionnelle.

 

John F. Wickenden & cie ltée et Dufour, C.L.P. 337180-04-0801, 24 mars 2010, J. A. Tremblay.

Le travailleur a occupé l'emploi de manœuvre spécialisé chez l'employeur de 1973 à 2005, soit pendant 32 ans, dans un lieu de travail bruyant où le port de protecteurs auditifs était obligatoire à compter de 1985. Le tribunal estime qu'à partir du moment où un employeur exige le port de protecteurs auditifs, c'est qu'on se retrouve dans un milieu de travail qui présente un niveau de bruit suffisamment important pour le qualifier d'excessif. Aussi, le fait de porter des protecteurs auditifs n'empêche pas qu'un travailleur puisse présenter une atteinte auditive causée par le bruit. L'employeur a déposé la fiche technique des protecteurs auditifs portés par le travailleur, mais il n'a fait aucune preuve additionnelle sur l'efficacité réelle de ces protecteurs chez le travailleur. De toute manière, le travailleur ne les a pas portés pendant les dix premières années (de 1974 à 1985) alors qu'il exerçait ses fonctions pour l'employeur, ce qui est suffisant pour développer une surdité professionnelle. La présomption de l'article 29 s'applique et le travailleur est présumé être atteint d'une surdité de nature professionnelle. Cette présomption n’a pas été renversée par l’employeur qui n’a soumis aucune preuve médicale. Le seul fait d’alléguer que le travailleur portait des protecteurs auditifs n’empêche pas qu'il puisse présenter une surdité causée par le bruit.

 

Weller et Corporation Urgences-Santé, C.L.P. 383524-71-0907, 19 août 2010, M. Zigby.

Pour renverser la présomption prévue à l’article 29, l’employeur invoque les antécédents du travailleur, un technicien ambulancier pendant 34 ans, à savoir : stapédectomies, otite et labyrinthite. Il n’a cependant pas été démontré que ces conditions avaient joué un rôle quelconque dans l’avènement ou l’évolution de la perte auditive du travailleur.

 

Pratt & Whitney Canada et Émond,2011 QCCLP 4313.

La présomption de maladie professionnelle peut être renversée par une preuve que la surdité n’est pas d’origine professionnelle.

 

Lévesque et F.F. Soucy inc., 2011 QCCLP 6843.

La présomption peut être renversée par toute preuve de nature à démontrer qu’il n’existe pas de relation entre les bruits au travail et la surdité du travailleur. L’employeur n’a pas soumis de preuve démontrant que l’aggravation de la surdité du travailleur résulte d’une cause étrangère à son travail. Il ne démontre pas une explication alternative plausible à la perte auditive additionnelle du travailleur.

 

Alex Coulombe ltée et Lajeunesse, 2015 QCCLP 5230.

L'employeur peut repousser la présomption de surdité professionnelle en démontrant l'absence de relation probable entre la maladie et le travail, sans par ailleurs être tenu de prouver la cause probable de cette maladie. Il peut aussi être question du fait que le nombre d'années d'exposition ou le degré d'exposition au bruit est insuffisant pour causer l'atteinte auditive observée.

 

Voir également :

Lemay et A. & D. Prévost inc., 2012 QCCLP 2007.

St-Pierre, 2012 QCCLP 4819.

Maladies causées par les vibrations

Application de la présomption

Pour appliquer la présomption, la preuve de la durée ou du niveau d’exposition à des vibrations n’est pas nécessaire. La seule exigence est de démontrer l’exercice d’un travail impliquant des vibrations et une maladie causée par les vibrations.

Lévesque et Bertrand Boulanger Construction inc.,[2005] C.L.P. 417.

Le travailleur a exercé un travail impliquant des vibrations, car il maniait régulièrement une scie à chaîne dans l’exercice habituel de ses tâches de charpentier-menuisier. Bien qu'il ne s’agisse pas d’un travail sur des périodes prolongées et sans interruption, la sous-section 6 de la section IV de l'annexe I ne comporte aucune indication quant à la durée minimale de l’exposition aux vibrations requises pour en permettre l’application.

 

Bergeron et Lamothe, Division de Sintra inc., C.L.P. 378837-02-0905, 2 février 2010, M. Sansfaçon.

L'application de la présomption dans le cas d'une maladie causée par les vibrations n'est pas assujettie à une durée ou à un niveau d'exposition quelconque et le seul fait d'exercer un travail impliquant des vibrations suffit à entraîner son application. Enfin, le travailleur n'a aucune condition sous-jacente qui pourrait expliquer sa maladie.

 

Savard et Abitibi Consolidated Scierie Girard, 2011 QCCLP 5121.

L'article 29 détermine les paramètres de la présomption de maladie professionnelle et prévoit deux conditions à son application. D'abord, la maladie doit faire partie de l'énumération qui se trouve à la section IV de l'annexe I. Ensuite, elle doit correspondre au genre de travail spécifié. Il ressort de la documentation médicale déposée par le travailleur que le syndrome de Raynaud est une maladie qui peut être causée par des vibrations, et il a été exposé à des vibrations dans le cadre de son travail de forestier. Le libellé de l'annexe I n'apporte aucune précision quant au délai d'apparition de la maladie ou quant à la nature des vibrations ou à la durée d'exposition. 

 

Lamontagne et Autobus Messier Chibougamau inc.,2015 QCCLP 4889.

Un phénomène de Raynaud est une maladie causée par les vibrations pouvant donner ouverture à l'application de la présomption de maladie professionnelle. La jurisprudence établit qu’une maladie causée par des vibrations n'est pas assujettie à une durée minimale d'exposition à des vibrations et que le seul fait d'exercer ou d'avoir occupé un travail comportant des vibrations est suffisant pour entraîner l'application de la présomption.

 

Mignault et Brazeau Transport, 2019 QCTAT 878.

L’application de la présomption dans le cas d’une maladie causée par les vibrations n’est pas assujettie à une durée ou à un niveau d’exposition quelconque. Ainsi, le seul fait d’exercer un travail impliquant des vibrations est suffisant pour entraîner son application. La preuve d’une utilisation prolongée d'outils vibratoires n’est pas requise pour bénéficier de l’application de la présomption.

 

Renversement de la présomption

Pour renverser la présomption, l'employeur peut démontrer que le temps d'exposition, la fréquence d'utilisation des outils vibrants ou le degré de vibration permettent de conclure à l'absence de relation entre le travail et le phénomène de Raynaud.

Grenon et Chantiers Chibougamau ltée., 2012 QCCLP 2096.

L'application de la présomption dans le cas d'une maladie causée par les vibrations n'est pas assujettie à une durée ou à un niveau d'exposition quelconque. Ainsi, le seul fait d'exercer un travail impliquant des vibrations est suffisant pour entraîner son application. Pour renverser la présomption prévue à l'article 29, il faut démontrer que le temps d'exposition, la fréquence d'utilisation des outils vibrants ou encore le degré de vibration permettaient de conclure à l'absence de relation entre le travail exercé et le phénomène de Raynaud. De plus, rien ne prouve, contrairement à ce qui se rapporte aux lésions musculo-squelettiques, que les micropauses ont un effet bénéfique et doivent être considérées dans le cas où le travailleur est de toute façon exposé pendant de nombreuses heures aux outils vibrants.

 

Aumond et Glencore Canada Corp - Fonderie Horne, 2017 QCTAT 1397.

Pour la mise en œuvre de la présomption, l'annexe I n'exige aucun seuil minimal d'exposition aux vibrations ni d'utilisation d’outils vibratoires. L'insuffisance de la durée d'exposition ou de l'intensité des vibrations pourra toutefois être invoquée à titre de moyen pour repousser la présomption tout comme l'existence d'une condition personnelle comme cause de la maladie. L'employeur peut administrer toute preuve tendant à démontrer que la maladie n'a pas été contractée par le fait ou à l'occasion du travail.

 

Suivi :

Révision rejetée, 2018 QCTAT 4482.
Pourvoi en contrôle judiciaire accueilli, 2 mai 2019.