Interprétation

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. 65. Calcul de l'indemnité

Revenu brut annuel d'emploi non inférieur au salaire minimum

Pour interpréter l’article 65 quant à la limite inférieure, la jurisprudence se base sur l’article 6 où l’expression « salaire minimum » réfère à celui auquel un travailleur peut avoir droit pour une semaine normale de travail en vertu de la Loi sur les normes du travail et de ses règlements. L'article 6 fait aussi un renvoi aux articles 52 de la Loi sur les normes du travail,  et 3 du Règlement sur les normes du travail lorsqu'il s'agit d'un travailleur qui n'occupe aucun emploi rémunéré ou pour lequel aucun salaire minimum n'est fixé par règlement.

Selon la jurisprudence, en ce qui concerne la limite inférieure, le tribunal se prête à l’exercice suivant : il détermine le revenu annuel brut du travailleur en vertu de la disposition s'appliquant à son cas (en vertu des articles 68 à 74, 76 et 80 à 82). Ensuite, si le revenu annuel brut déterminé de cette manière s'avère inférieur au montant du salaire minimum annuel calculé selon la Loi sur les normes du travail, le tribunal ajuste le revenu brut du travailleur pour qu'il soit égal au salaire minimum annuel.

Commission scolaire des Affluents et Clément, [2005] C.L.P. 756.

Pour procéder au calcul de l'IRR, l'article 65 impose un seuil minimum de revenu brut annuel, de la même façon qu'elle impose un seuil maximum. Ce seuil minimum correspond au salaire minimum en tenant compte du taux horaire et de la durée de la semaine normale de travail prévue à la Loi sur les normes du travail ainsi qu'au Règlement sur les normes du travail, reporté sur une base annuelle.

 

Restaurant MacDonald's et Larin, [2005] C.L.P. 864.

Le revenu brut d'une travailleuse qui travaille de quinze à quarante heures par semaine dans le domaine de la restauration doit être calculé sur la base du salaire minimum en vigueur lorsque s'est manifestée sa lésion professionnelle, et ce, pour une semaine normale de travail de 40 heures reportée sur une base annuelle. L'expression « pour une semaine normale de travail » contenue à l'article 6 doit être interprétée comme référant à la semaine normale prévue à la Loi sur les normes du travail. qui était de 40 heures à l'époque pertinente, et non pas à la semaine réellement travaillée par la travailleuse.

 

Restaurant McDonald's et Liu, C.L.P. 258875-71-0504, 28 juillet 2006, M. Zigby.

À part quelques exceptions spécifiquement prévues à la loi, l'article 65 s'applique dans tous les cas et à toutes les catégories de travailleurs. Il vise à imposer un seuil minimum et un seuil maximum en ce qui concerne le revenu annuel d'emploi à partir duquel sera calculée l'IRR du travailleur qui a subi une lésion professionnelle. L'article 65 doit se lire avec l'article 6, lequel prévoit que le salaire minimum d'un travailleur est déterminé en fonction d'une semaine normale de travail en vertu de la Loi sur les normes du travail et de ses règlements.

 

Bien que certaines décisions rapportent encore l'existence de deux courants, la jurisprudence est maintenant unanime. Qu'il s'agisse d'un travailleur sur appel, d'un travailleur saisonnier ou d'un travailleur à temps partiel, le revenu brut annuel de ces travailleurs à partir duquel est calculée l'IRR ne doit pas être inférieur au salaire minimum annuel calculé selon la Loi sur les normes du travail.

Travailleur sur appel

Charest et CDC Export, 2012 QCCLP 804.

Au moment de la survenance de la lésion professionnelle, la travailleuse occupe un emploi d’escorte routière sur appel puisque la prestation de travail varie en fonction de besoins ponctuels chez l’employeur. Ce sont les dispositions prévues à l’article 68 qui s’appliquent. Dans ce contexte, la travailleuse n’a pas fourni de preuve quant au revenu d’un travailleur de même catégorie occupant un emploi semblable chez le même employeur ou dans la même région. Selon la preuve, le revenu brut gagné par la travailleuse dans les 12 mois précédant sa lésion est de 19 166 $. Pour le calcul de l’IRR, étant donné que le revenu brut gagné est en deçà de la base du salaire minimum pour l’année 2011, il faut retenir comme base du revenu brut annuel le montant de 20 126 $, et ce, conformément à l’article 65.

 

Travailleur saisonnier

Després et Services Sani Pro, C.L.P. 230988-63-0402, 21 janvier 2005, F. Mercure.

Le travailleur occupe un poste de chauffeur-opérateur pour une entreprise de vidange de fosses septiques. Il est considéré comme un travailleur saisonnier et son revenu brut doit être déterminé selon l’article 68. Cette disposition prévoit deux méthodes de calcul du revenu brut à appliquer. La première méthode mentionne qu’il faut retenir le revenu brut d'un travailleur saisonnier de même catégorie occupant un emploi semblable dans la même région. En l'espèce, il n’y a eu aucune preuve à cette fin. La deuxième méthode consiste à retenir le revenu brut de tout emploi qu'un travailleur saisonnier a exercé au cours des 12 mois précédant le début de son incapacité. En l'espèce, pendant cette période, le travailleur a reçu 10 284,12 $. Ce revenu brut est inférieur au salaire minimum annuel en vigueur en 2003, soit un salaire de 15 225 $. En conséquence, conformément à l’article 65, l’IRR du travailleur sera calculée selon ce revenu, à savoir 15 225 $.

 

Travailleur à temps partiel

Commission scolaire de la Seigneurie-des-Mille-Îles et Desrochers, C.L.P. 273138-64-0509, 17 janvier 2007, M. Montplaisir.

Le revenu brut annuel d'emploi qui sert au calcul de l'IRR d'un travailleur à temps partiel ne peut être inférieur au revenu brut annuel déterminé sur la base du salaire minimum horaire reporté sur une base annuelle. De fait, le but de l'article 65 est de déterminer des seuils d'indemnisation minimum et maximum qui s'appliquent au revenu brut préalablement déterminé. Le législateur réfère à l'article 6 pour la détermination du salaire minimum et à l'article 66 pour celle du maximum assurable. Or, dans aucun de ces cas, il n'est question du revenu réellement gagné. Il serait donc injuste de calculer le salaire minimum sur la base du nombre d'heures réellement travaillées, car suivant ce raisonnement, un travailleur occupant un emploi rémunéré et gagnant moins que le salaire horaire minimum reporté sur une base annuelle recevrait une IRR moindre que celui qui n'occupe aucun emploi rémunéré ou pour qui aucun salaire minimum n'est fixé par règlement. Cette interprétation aurait pour effet de priver l'article 65 de son sens, qui est d'établir un seuil minimal d'indemnisation correspondant au salaire minimum pour une semaine normale de travail reportée sur une base annuelle. Ainsi, la CSST était fondée à déterminer le revenu annuel brut de la travailleuse sur la base du salaire minimum en vigueur lorsque s'est manifestée sa lésion professionnelle en multipliant le taux horaire en vigueur prévu à la Loi sur les normes du travail par le nombre d'heures correspondant à une semaine normale de travail pour cette catégorie d'emploi et en rapportant ce salaire hebdomadaire sur une base annuelle.

 

Voir également :

Communauté des Soeurs de l'Assomption de la Sainte-Vierge et Paradis, C.L.P. 285214-040603, 31 juillet 2006, J.-F. Clément.

Sodexho Québec ltée et Laberge, C.L.P. 329374-71-0710, 14 mai 2008, F. Juteau.

Logis-Aide des Basques et D'Amours, 2015 QCCLP 1579.

Revenu brut annuel d'emploi non supérieur au revenu maximum assurable

En ce qui concerne la limite supérieure, le revenu brut annuel servant de base au calcul de l'IRR ne peut être supérieur au revenu maximum annuel assurable alors en vigueur. L’article 66 prévoit un montant de revenu annuel assurable.

Voir :

Article 66.

Restaurant MacDonald's et Larin, [2005] C.L.P. 864.

L'article 65 vise à établir un seuil minimal et un seuil maximal d'indemnisation. Ces seuils renvoient à des données qui vont nécessairement varier dans le temps. Ainsi, l'article 6 prévoit de quelle façon le salaire minimum sera déterminé et l'article 66 prévoit de quelle façon le revenu maximum assurable sera établi. Quant à l’article 66, le revenu maximum assurable est le résultat d’une formule mathématique qui tient compte notamment des rémunérations hebdomadaires moyennes des travailleurs de l’ensemble des activités économiques du Québec.