Interprétation

Retour à l'article
 
. 155. Adaptation du véhicule

Notion de véhicule

Le terme « véhicule » englobe tout véhicule routier, dont les automobiles et les motocyclettes, dans la mesure où il s’agit du véhicule principal du travailleur.

Bouchard et Garage Morin St-Jean, C.L.P. 395435-62A-0911, 22 juin 2010, C. Burdett.

La motocyclette du travailleur est son véhicule principal. Le véhicule principal peut être une motocyclette, pour autant que ce ne soit pas un véhicule récréatif.

 

Notion d'atteinte permanente grave

Afin de bénéficier du droit à la réadaptation, l'article 145 prévoit que le travailleur doit avoir subi une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique à la suite d'une lésion professionnelle. 

Or, le travailleur peut se voir rembourser des frais d'adaptation de son véhicule dans la mesure où il a subi une atteinte permanente grave. 

L’analyse du caractère « grave » d’une atteinte permanente à l’intégrité physique ne fait pas appel au pourcentage de cette atteinte permanente, mais plutôt à la perte d’autonomie résultant de la lésion professionnelle, et ce, étant donné ses limitations fonctionnelles.

Bélisle et Ent. Trans. Jacques Lapointe inc., C.L.P. 143967-08-0008, 20 mars 2001, P. Prégent.

Le travailleur conserve de sa lésion professionnelle une atteinte permanente grave, c'est-à-dire une atteinte permanente telle qu'il ne peut plus conduire un véhicule à transmission manuelle.

 

Suivi :

Révision accueillie sur un autre point, 27 août 2002, P. Simard.

Sirois et Entreprises de lavage Ritcher inc., [2004] C.L.P. 694.

Le Tribunal est d’avis que l'atteinte permanente du travailleur peut être qualifiée de grave. En effet, le pourcentage d’atteinte permanente de 17,30 % n’est pas négligeable et touche au surplus les deux épaules. Il en est de même des limitations fonctionnelles reconnues. Aussi, les séquelles de la lésion empêchent le travailleur de reprendre son emploi et ont mené à l’application de restrictions à sa conduite automobile.

 

Julien et Construction Nationar inc. (Faillite), C.L.P. 287920-31-0604, 8 juin 2007, M. Beaudoin.

La nature des adaptations qui peuvent être mises en œuvre dans le cadre du programme de réadaptation sociale s’évalue en fonction des conséquences de la lésion professionnelle et de la perte de capacité qu’elle a entraînée.

 

Suivi :

Révision rejetée, 12 octobre 2007, A. Suicco.

Duhaime et Lavalum S.E.C. (Faillite), C.L.P. 348771-04-0805, 25 septembre 2008, M. Watkins.

Le travailleur conserve de sa lésion une « atteinte permanente grave » de sorte qu’il pouvait bénéficier des dispositions de l’article 152, par. 2 visant à lui permettre de se procurer un domicile et un véhicule adaptés à sa capacité résiduelle.

 

Avoir accès au véhicule

La loi prévoit l’adaptation du véhicule principal du travailleur afin qu'il y ait notamment accès, sans pour autant exiger qu’il en soit le conducteur.

Gagnon et Blouin Métal inc. (Fermé), C.L.P. 191842-63-0210, 9 juin 2003, J.-P. Arsenault.

La loi permet d’atténuer les conséquences de la lésion professionnelle en adaptant le véhicule principal d'un travailleur lourdement handicapé en raison de cette lésion pour lui permettre de le conduire ou d'y avoir accès plus facilement, que ce soit en tant que conducteur ou passager.

 

Lahaie Lebrun et CHSLD Chevalier de Lévis, C.L.P. 197412-62-0301, 10 juillet 2003, S. Mathieu.

L'article 155 réfère à « l'adaptation du véhicule principal du travailleur », ce qui vise le véhicule habituellement et de manière principale utilisé par le travailleur, peu importe qu'il en soit ou non le conducteur. Il s'agit, en quelque sorte, de l'utilisateur régulier, notion qui peut ou non englober celle de conducteur. Cette interprétation s’impose à la lecture de cet article précisant que l’adaptation du véhicule est nécessaire pour permettre au travailleur d’y avoir accès. Cette situation peut facilement inclure des cas comme celui de la travailleuse qui s’est toujours fait véhiculer par son mari, dans le véhicule conduit par ce dernier.

 

Bergeron, 2013 QCCLP 1980.

La notion « d’avoir accès » doit être interprétée de manière libérale de façon à ce que l’esprit de la loi, tel que libellé à l’article premier, soit respecté, soit la réparation des lésions professionnelles et des conséquences que celles-ci génèrent.

 

D... H... et Compagnie A, 2014 QCCLP 6203.

Le mot « accès » doit être compris en prenant en considération sa finalité dans le contexte à savoir, l’utilisation, sinon il est dénué de tout sens. On peut se demander à quoi servirait l’adaptation d’un véhicule permettant d’y avoir accès si le travailleur ne peut pas ensuite l’utiliser.

 

Remboursement du coût d'adaptation et non d'acquisition

La jurisprudence établit qu'un travailleur a seulement droit au remboursement du coût d'adaptation de son véhicule. Il n'a donc pas droit au remboursement du coût d'achat d'un nouveau véhicule.

Charrette et Centco, [1994] C.A.L.P. 282.

Si les coûts d'adaptation sont prévus dans le cadre du programme de réadaptation sociale, la loi n'autorise pas le remboursement des coûts d'achat ou de remplacement d'un véhicule. Cette conclusion s'infère du texte clair des dispositions. De plus, l'article 157 prévoit spécifiquement que la CSST défraiera un coût supérieur au coût d'adaptation uniquement lorsque des frais d'assurance ou d'entretien supplémentaires sont entraînés par l'adaptation du véhicule. Il s'agit d'une disposition limitative qui montre bien qu'elle ne défraie pas d'autres coûts que ceux d'adaptation du véhicule ou ceux décrits et spécifiquement reliés à l'adaptation du véhicule.

 

Sirois et Entreprises de lavage Ritcher inc., [2004] C.L.P. 694.

La loi ne prévoit pas le remboursement de l'achat d'un véhicule, mais seulement le remboursement du coût de l'adaptation du véhicule.

 

Duhaime et Lavalum S.E.C. (Faillite), C.L.P. 348771-04-0805, 25 septembre 2008, M. Watkins.

L’article 155 parle de l’adaptation du véhicule. Les articles 156 et 157 spécifient les conditions d’autorisation et de la prise en charge par la CSST du coût « des travaux d’adaptation du domicile ou du véhicule ». Pour qu’il y ait adaptation du véhicule au sens de ces articles, il doit y avoir des travaux de cette nature sur les composantes initiales d’un véhicule, pour en changer les attributs, et faire en sorte de respecter la capacité fonctionnelle du travailleur.

 

Bérubé et Centre Hospitalier Régional de Baie-Comeau, 2014 QCCLP 1790. 

La loi ne prévoit pas l'achat d'un véhicule ni aucune des modalités proposées par le travailleur qui concernent l'achat de son véhicule, mais seulement son adaptation. Le régime prévu par la loi, dans ce type de situation, ne permet pas au tribunal de créer une nouvelle catégorie de frais couverts au titre de la réadaptation sociale. Par conséquent, le travailleur n'a pas droit au remboursement du coût d'achat de son nouveau véhicule. 

 

Voir également :

Bibeau et Atco Ltd (Atco Métal), C.L.P. 105613-62-9810, 11 août 1999, S. Mathieu.

Wener et École à Pas de Géant, 2011 QCCLP 3933.

Suivi :

Révision rejetée, 2012 QCCLP 3885.

Chamula et Commission scolaire Pierre-Neveu, 2015 QCCLP 470.

Cependant , la jurisprudence précise qu'un travailleur peut avoir droit au remboursement des composantes du nouveau véhicule qui lui permettent de le conduire ou d'y avoir accès.

Ainsi, un travailleur pourra avoir droit au remboursement de la différence du coût entre une transmission manuelle, attribut de l'ancien véhicule, et une transmission automatique faisant partie des composantes du nouveau véhicule. Toutefois, si le coût d'achat d'un nouveau véhicule est moindre que la différence du coût entre ces deux types de transmission, il n'aura droit qu'au remboursement du plus bas montant.

Julien et Construction Nationar inc. (Faillite), C.L.P. 287920-31-0604, 8 juin 2007, M. Beaudoin.

L'objectif du programme de réadaptation sociale qui vise à redonner à un travailleur une autonomie dans les activités habituelles justifie l'interprétation que le tribunal donne aux termes "adaptation du véhicule". Le travailleur a estimé que ces adaptations pour le transport d'un quadriporteur représentent un coût additionnel important par rapport au coût moyen d'un autre véhicule. Il a droit au remboursement d'une somme qui correspond à la différence entre le coût d'achat d'un véhicule du type fourgonnette et le coût moyen d'un véhicule standard.

 

Suivi :

Révision rejetée, 12 octobre 2007, A. Suicco.

Picard et Abitibi Consolidated (Scierie des Outardes), 2012 QCCLP 801.

Comme le travailleur possède un camion à transmission manuelle, l'option de faire modifier cette dernière pour une automatique est abordée. Cependant, le garagiste considère que cette procédure ne serait pas un bon investissement dû à l'âge du véhicule et son kilométrage élevé. Le travailleur achète donc un nouveau véhicule, mais le coût de l'option pour transmission automatique n'apparaît pas sur la facture, puisque ce modèle n'existe pas avec une transmission manuelle. La CSST fait donc des démarches auprès de différents concessionnaires afin d'établir l'écart de coût entre un véhicule à transmission manuelle et un à transmission automatique et arrive à un montant de 1646 $. Ce montant est représentatif et juste.

 

 Voir également :

Bélisle et Ent. Trans. Jacques Lapointe inc., C.L.P. 143967-08-0008, 20 mars 2001, P. Prégent.