Interprétation

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. 160. Montant déterminé pour l'aide personnelle à domicile

L’évaluation doit tenir compte des besoins réels du travailleur

En matière d’évaluation des besoins d’aide personnelle à domicile, il faut tenir compte des besoins réels du travailleur. À cet effet, l’état général du travailleur tant sa condition physique que psychologique doit servir à cette évaluation.

Dongala-Tusamba et Fibrofil inc., C.L.P. 199956-72-0302,15 août 2003, Y. Lemire.

Le Tribunal n’est pas lié ni limité par laGrille d'évaluation des besoins d'aide personnelle à domicileutilisée par la CSST et le critère le plus déterminant est celui des besoins réels en tenant compte de la solution la plus appropriée. Il faut tenir compte de l’état complet du travailleur et la grille n’évalue que les besoins physiques et le besoin de surveillance en fonction d’une atteinte à la mémoire, à l’orientation dans le temps et l’espace, à la communication, le contrôle de soi et le contact avec la réalité. Or, la condition psychologique du travailleur le rendait incapable d’effectuer certaines tâches domestiques et de prendre soin de lui-même sans aide parce qu’il ne s’adaptait pas à sa nouvelle situation.

 

Charlebois et G-Net Universel ltée, [2005] C.L.P. 266.

Au-delà de l’application restreinte de la grille d’analyse, le tribunal doit tenir compte de l’état général de la travailleuse pour identifier ses véritables besoins. En l’occurrence, cela impose notamment la prise en considération de la condition psychologique de la travailleuse, laquelle joue pour beaucoup dans l’incapacité de la travailleuse et ne peut être évaluée à l’aide de la grille d’analyse traditionnelle.

 

Medeiros Melo et Aluminium Varina inc., 2011 QCCLP 3356.

Bien que le travailleur soit très autonome grâce à l'adaptation de son domicile, de son auto et les aides techniques fournis et qu'il ait des activités sportives, il n’y a pas nécessairement adéquation entre ces éléments et la capacité du travailleur à prendre soin de lui-même ou encore de s’acquitter de ses tâches domestiques.

 

Deveault et Sécurité Kolossal inc., 2012 QCCLP 3377.

En raison du caractère particulier de la maladie dont souffre la travailleuse, son état physique fluctue au cours d'une même journée et au cours d'une même semaine. Or, le Règlement sur les normes et barèmes de l'aide personnelle à domicile ne précise pas que le besoin d'assistance doit être constant et pareil chaque jour. Ainsi, le fait que la travailleuse puisse avoir besoin lorsqu'elle traverse des crises aiguës de SDRC peut correspondre à la notion de besoin d'assistance partielle. Elle ne peut prendre soin d'elle-même en tout temps et elle a besoin d'aide pour prendre soin d'elle-même durant ses crises.

 

Voir également :

Leclerc et Enairtech enr. (Div. Isotemp ltée), 2011 QCCLP 6988.

La qualification de la « préparation des repas » dans l’évaluation des besoins d’assistance

Pour avoir droit à l'aide personnelle à domicile, un travailleur doit être incapable de prendre soin de lui-même et d'effectuer sans aide les tâches domestiques qu'il effectuerait normalement. Or, la Grille d'évaluation des besoins d'aide personnelle à domicilene qualifie pas les différentes activités qui y sont énumérées comme étant des tâches domestiques ou associées aux soins du travailleur.

Deux approches de dégagent de la jurisprudence quant à la qualification de la préparation des repas (déjeuner, dîner et souper) dans l'évaluation des besoins d'assistance.

Selon la première approche, la préparation des repas est une activité associée aux tâches domestiques, soit une activité de la vie quotidienne.

Quant à la seconde approche, cette activité est associée aux soins du travailleur, car ce dernier doit s'alimenter pour prendre soin de lui-même. 

Selon l'interprétation retenue, un travailleur pourra avoir droit ou non à l'aide personnelle à domicile selon qu'il s'agit d'une tâche domestique ou d'une activité associée aux soins du travailleur. En effet, l'évaluation doit démontrer des besoins dans les deux catégories d'activités pour donner ouverture à l'aide personnelle à domicile.

Une activité associée aux tâches domestiques

Miserere et Défense Nationale adm. personnel civil, C.L.P. 175388-62-0112, 23 août 2002, S. Mathieu.

Le soin englobe toute activité de la vie quotidienne qui renvoie à la personne même du travailleur, alors que la tâche domestique est celle qui permet le fonctionnement normal dans un milieu de vie, en l’occurrence, au domicile du travailleur. La préparation des repas est donc assimilée aux tâches domestiques.

 

Suivi :

Révision rejetée, 11 juillet 2003, G. Robichaud.

Espinosa et Air Nova inc., C.L.P. 192230-31-0210, 20 décembre 2002, H. Thériault

Le Règlement sur les normes et barèmes de l'aide personnelle à domicile ne fait pas de distinction entre ce qui correspond à la notion de soins et celle de tâches domestiques. Toutefois, il apparaît que le soin réfère à toute activité de la vie quotidienne reliée à la personne même, alors qu’une tâche domestique est celle qui permet le fonctionnement normal dans son milieu de vie, en l’occurrence, au domicile du travailleur. Ainsi, les activités énumérées à la grille d’évaluation faisant partie de la notion de soins sont: le lever, le coucher, l'hygiène corporelle, l’habillage et le déshabillage, les soins vésicaux et intestinaux, l’alimentation et l'utilisation des commodités du domicile. Les autres activités correspondant aux tâches domestiques sont la préparation des repas, le ménage, le lavage et l’approvisionnement.

 

Charron et Marché André Martel inc., [2010] C.L.P. 219.

À la lumière des définitions des termes « soin » et « tâche domestique » et de celle que donne le Règlement sur les normes et barèmes de l'aide personnelle à domicile relativement à la préparation des repas soit, la capacité de préparer un repas, y compris les activités reliées au lavage de la vaisselle, il y a lieu de conclure que la préparation des repas constitue une tâche domestique. De fait, la mention du lavage de la vaisselle ne concerne pas la conservation de la santé. S'alimenter permet le maintien du corps, mais non la capacité de cuisiner ou celle de se procurer des aliments. 

 

Suivi :

Révision rejetée, 2011 QCCLP 5854.

Requête en révision judiciaire rejetée, 2012 QCCS 6958.

Medeiros Melo et Aluminium Varina inc., 2011 QCCLP 3356.

La préparation des repas relève des activités domestiques étant donné que, selon le Règlement sur les normes et barèmes de l'aide personnelle à domicile cette activité s'assimile au lavage de la vaisselle, alors que l'alimentation relève de la capacité fonctionnelle d'ingérer la nourriture en portant celle-ci de l'assiette à la bouche et correspond, par conséquent, à la capacité de prendre soin de soi.

 

Tardif et Jacques Tardif entrepreneur peintre, 2013 QCCLP 761.

Le tribunal est d'avis que les termes et expressions «lever, coucher, hygiène corporelle, habillage, déshabillage, soins vésicaux, soins intestinaux, alimentation et utilisation des commodités du domicile» font référence à la capacité pour une personne d'accomplir les activités vitales nécessaires à son bien-être, c'est-à-dire des activités « qui lui appartiennent en propre », tandis que les termes et expressions « préparation des repas, ménage léger, ménage lourd, lavage du linge et approvisionnement » renvoient plutôt à la capacité d'une personne d'exécuter une tâche domestique, c'est-à-dire un « travail » déterminé qui concerne la vie à la maison.

 

Suivi :

Révision accueillie en partie sur un autre point, 2013 QCCLP 7416.

Grignano et Récital Jeans inc., 2014 QCCLP 1342.

L'annexe du règlement définit l'alimentation comme étant la capacité de porter de façon autonome la nourriture de son assiette à sa bouche avec, s'il y a lieu, les aides techniques nécessaires à cette fin. Il y a donc lieu de conclure que la préparation des repas et l'alimentation constituent deux activités distinctes. La préparation des repas fait référence à l'exécution d'une tâche domestique permettant au travailleur de fonctionner normalement dans son domicile alors que la capacité de s'alimenter est plutôt une activité reliée à la personne même du travailleur, et donc à la notion de « soin ».

 

Voir également :

Nicolas et C.H.S.L.D. de Cap-Chat, C.L.P. 157485-01C-0103, 10 janvier 2003, R. Arseneau.

Suivi :

Révision rejetée, 14 août 2003, M. Carignan.

Jean-Baptiste et Lion Rubber & Plastic Ltée, C.L.P. 172411-71-0111, 19 mars 2003, T. Giroux.

Janvier et Reliure de la Capitale inc., C.L.P. 237742-31-0406, 9 septembre 2004, P. Simard.

Gagné et Manoir Heather Lodge, C.L.P. 410505-63-1005, 9 décembre 2010, P. Bouvier.

Joseph-Therrien et Royaume des animaux La Sarre inc., 2011 QCCLP 3739.

Transelec/Common inc. et Desjardins, 2011 QCCLP 6705.

Latulippe et CSST, 2012 QCCLP 6100.

Savard et A. Lacroix & Fils Granit ltée, 2014 QCCLP 1927.

Une activité associée aux soins du travailleur

CSST et Fleurent, [1998] C.L.P. 360.

Le Règlement sur les normes et les barèmes de l'aide personnelle à domicile ne précise pas ce qui relève de la notion de soin et de la notion de tâche domestique. Cette dernière notion n'englobe que quatre des points prévus au tableau d'évaluation des besoins d'assistance, soit le ménage léger, le ménage lourd, le lavage du linge et l'approvisionnement.

 

Côté et DL Sanitation enr., [2007] C.L.P. 1457.

À la lumière des définitions que l’on retrouve dans les dictionnaires d’usage courant et compte tenu de la preuve présentée, le tribunal ne croit pas que la préparation des repas puisse être assimilable à la notion « d’effectuer les tâches domestiques » au sens de la loi. Il y a donc lieu d’inclure la préparation des repas dans la notion « de prendre soin de lui-même ». De plus, il n’est pas possible de dissocier la préparation des repas d’avec le soin d’alimentation que la travailleuse doit s’assurer pour prendre soin d’elle-même.

 

Bérubé et Toitures Hogues inc., [2007] C.L.P. 1596.

Estimant que le travailleur était capable de prendre seul soin de lui-même, la CSST a refusé sa demande d'allocation, en dépit du fait qu'elle reconnaissait son inaptitude à effectuer sans aide les tâches domestiques. Le tribunal partage l'interprétation retenue dans Côté et DL Sanitation enr., voulant que l'expression « prendre soin de lui-même » fasse référence à différentes activités de la vie quotidienne et inclut la préparation des repas. Lui prêter un sens différent mène à l'absurde puisqu'une personne vivant seule et qui est incapable de préparer ses repas pour se nourrir serait néanmoins considérée capable de prendre soin d'elle-même.

 

René et Mittal Canada, 2012 QCCLP 6192.

La préparation des repas constitue un soin personnel, car elle est intrinsèquement liée à l'alimentation.

 

N... P... et Centre hospitalier A, 2014 QCCLP 4700.

Le Tribunal adhère à la jurisprudence récente qui indique que l'expression « prendre soin de lui-même » fait référence à différentes activités de la vie quotidienne de base, soit le lever, le coucher, l'hygiène corporelle, l'habillage et le déshabillage, les soins intestinaux et vésicaux et l'alimentation. Quant à la préparation des repas, elle n'est pas assimilable à la notion « d'effectuer des tâches domestiques » au sens de la loi puisqu'une personne doit aussi pouvoir préparer ses repas. Il y a donc lieu d'inclure la préparation des repas dans la notion de « prendre soin de lui-même ».

 

 

Voir également :

René et Boulangerie St-Méthode, C.L.P. 333681-64-0711, 18 septembre 2008, J.-F. Martel.

Chapados et Camp Louis-Georges Lamontagne, C.L.P. 349183-01A-0805, 19 mars 2009, M. Racine.

Dion et Hydrotope ltée (Fermée), C.L.P. 363464-05-0811, 29 juin 2009, F. Ranger.

P... L... et Compagnie A (Fermé), C.L.P. 358678-62C-0809, 16 octobre 2009, R. Hudon.

Carpentier et Ganotec inc, [2010] C.L.P. 123.

Houle et Gestion Solumax inc. (Fermé), C.L.P. 377962-05-0905, 21 juillet 2010, M. Allard.

Côté et Pneus Southward ltée, 2011 QCCLP 318.

Suivi :

Révision rejetée, 2011 QCCLP 4534.

Deveault et Sécurité Kolossal inc., 2012 QCCLP 3377.

Tremblay, 2012 QCCLP 6191.

Dubé et Hydro-Québec (Salc Montmorency), 2012 QCCLP 7146.

G... C... et Compagnie A, 2012 QCCLP 8201.

Lemmo, 2013 QCCLP 1715. 

Létourneau et Ateliers Léopold Desrosiers inc., 2016 QCTAT 7066.

Autre approche

Langevin et Fauteux, 2012 QCCLP 4350.

En l'espèce, si l'on associe la préparation des repas à des soins personnels, le travailleur pourra bénéficier d'un montant d'aide personnelle à domicile, alors que, si on l'associe à une tâche domestique, il n'y aura pas droit. Or, le tribunal ne peut souscrire à l'une ou à l'autre des solutions retenues dans la jurisprudence et estime plus sage d'adopter une position pragmatique pour tenir compte de l'objectif poursuivi par le législateur. Ainsi, le seul besoin d'une aide partielle à la préparation du souper ne fait pas en sorte que le travailleur est incapable de prendre soin de lui-même et d'effectuer sans aide les tâches domestiques qu'il effectuerait normalement, n’eût été sa lésion professionnelle. Étant donné son environnement physique et social ainsi que de ses capacités résiduelles, il n'a pas besoin d'une aide personnelle à domicile.

 

Les définitions des besoins énumérées au Règlement

La jurisprudence établit que la définition des éléments à évaluer lors de la détermination du droit à l'aide personnelle à domicile et prévue auRèglement sur les normes et barèmes de l'aide personnelle à domicile n'est pas exhaustive et limitative.

Charlebois et G-Net Universel ltée, [2005] C.L.P. 266.

L'énumération contenue dans la définition de "ménage léger" n'est pas exhaustive et indique plutôt le genre d'activités qui sont visées par le Règlement sur les normes et barèmes de l'aide personnelle à domicile.

 

Defaysse et Association québécoise des troubles d'apprentissage, 2015 QCCLP 5600.

L'expression « ménage lourd » utilisée aux fins de l'application de la grille d'évaluation prévue à l'annexe I du Règlement sur les normes et barèmes de l'aide personnelle à domicile ne constitue pas une définition exhaustive et limitative. Cette expression doit recevoir une interprétation large, ce qui peut comprendre pour le lavage des fenêtres celui des vitres et inclure dans le lavage de planchers tout types de revêtements.

 

G... S... et Compagnie A, 2016 QCTAT 3695.

Quant aux besoins pour les soins vésicaux et intestinaux, le Tribunal ne peut retenir l'interprétation de la CSST voulant que ces besoins s'adressent aux personnes ayant besoin d'aide pour installer un équipement spécial, par exemple, une sonde. L'article 2.4 de l'annexe I du Règlement sur les normes et barèmes de l'aide personnelle à domicile définit les soins vésicaux et intestinaux comme "la capacité d'exécuter les activités nécessaires à l'élimination vésicale (ou intestinale), avec l'utilisation autonome, s'il y a lieu, d'équipements particuliers à ces soins". Le terme "s'il y a lieu" signifie que l'utilisation d'équipements n'est pas toujours nécessaire. La chaise d'aisance ou un urinoir peuvent probablement être considérés comme des équipements servant à de tels soins.

L'expression "soins vésicaux et intestinaux" correspond à "l'ensemble des soins qui entourent toute l'activité d'éliminer, qu'il s'agisse de soins visant à préserver l'hygiène, le confort, etc., lors de cet acte physiologique, et ce, non seulement chez une personne souffrant d'une atteinte vésico-sphinctérienne, mais aussi chez une personne alitée à cause d'un autre type de limitation fonctionnelle". Cette définition est également conforme à la définition de l'expression "soins et surveillance de l'élimination urinaire/intestinale" selon le Dictionnaire encyclopédique des soins infirmiers. Par conséquent, se rendre à la toilette, baisser et remettre son pantalon, s'asseoir et se relever de la toilette, s'essuyer, etc. sont inclus dans la définition de tels soins. 

 

L’aide personnelle à domicile versus les travaux d’entretien courant du domicile

Voir :

Article 165, rubrique Interprétation.