Pouvoir discrétionnaire de la CNESST
La jurisprudence établit que la CNESST détient un pouvoir discrétionnaire pour octroyer une subvention au travailleur, mais elle ne doit pas exercer ce pouvoir de façon discriminatoire, arbitraire ou frivole.
- Lefebvre et Société de tuyauterie inc., C.A.L.P. 22711-63-9009, 11 janvier 1994, A. Leydet.
Dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré par l'article 178, la CSST n'est aucunement tributaire d'une obligation de résultat. Tout au plus assume-t-elle une obligation de moyens et doit-elle faire preuve d'une attitude qui ne soit pas discriminatoire, arbitraire ou frivole dans l'octroi d'une telle subvention.
- Racine et Armoires et meubles Charlevoix, C.A.L.P. 90601-03A-9708, 21 septembre 1998, P. Brazeau.
Selon l’article 178, le pouvoir attribué à la CSST est discrétionnaire. Cela exclut la possibilité pour la CLP de substituer sa discrétion à celle de la CSST, à moins qu’il soit démontré que le refus de la CSST d’accorder une subvention était illégitime, abusif ou autrement reprochable.
- Cabana et Les Constructions Vican inc., C.P.L.100617-31-9804, 20 octobre 1999, M. Beaudoin.
Concernant la demande de subvention du travailleur, il importe de retenir qu'en vertu de l'article 178, la CSST avait discrétion pour l'accorder ou non au travailleur. Le tribunal a le devoir de s'assurer que la CSST a exercé ce pouvoir discrétionnaire de manière raisonnable, légitime et non arbitrairement.
Suivi :
Requête en révision rejetée, 19 février 2001, G. Tardif.
- Lauzon et Plomberie Gaétan Gagné ltée, C.L.P. 329078-61-0710, 31 juillet 2008, L. Nadeau.
L'article 178 permet l'octroi d'une subvention à un travailleur pour un projet d'entreprise. Dans Cabana et Constructions Vican inc., le tribunal indique qu'il s'agit d'un pouvoir discrétionnaire de la CSST, précise son rôle lors d'une contestation et rappelle les deux critères d'octroi d'une subvention, soit la faisabilité et la rentabilité du projet d'entreprise à moyen terme.
Moment où la subvention doit être réclamée par le travailleur
Puisque l'octroi d'une subvention visant à permettre la création et la gérance d'une entreprise constitue pour le travailleur un emploi convenable, la jurisprudence établit que la demande de cette subvention doit se faire lors de l'identification de cet emploi.
- Dupuis et Le Groupe Purdel inc., C.A.L.P. 27521-01-9103, 24 février 1994, J.-G. Béliveau.
La demande de subvention doit être faite au moment de procéder à l'identification de l'emploi convenable.
- Mailloux et Production Mailloux inc., C.A.L.P. 76893-01-9602, 15 novembre 1996, J.-G. Roy.
L'article 178 ne laisse guère de place pour l'interprétation et lorsqu'un projet visant à créer une entreprise est accepté par la CSST, cette entreprise constitue l'emploi convenable. Conséquemment, si un autre emploi convenable a déjà été identifié et que le travailleur ne l'a pas contesté, il n'est plus admis à présenter un projet d'entreprise en l'absence de quelque circonstance nouvelle justifiant la réouverture de son plan.
- Morrisson et Encre et couleur JF cie ltée, C.L.P. 107033-64-9811, 12 avril 1998, D. Martin.
En vertu de l'article 178, la CSST peut octroyer une subvention à un travailleur afin qu'il crée et gère une entreprise qui constitue alors son emploi convenable. Cette demande doit être soumise lors de la détermination de l'emploi convenable.
- Valenti et Flint Ink Corporation of Canada, C.L.P. 219065-71-0310, J.-C. Danis, 29 juin 2004.
La CSST est bien fondée de ne pas accéder à la demande de subvention pour démarrer une entreprise présentée par le travailleur. L’article 178 ne peut s’appliquer puisque l’emploi convenable a déjà été identifié et la demande de subvention devait être faite au moment de procéder à l’identification de l’emploi convenable.
Obligation de vérification de la CNESST
La jurisprudence établit que la CNESST doit vérifier la faisabilité de l'entreprise projetée et sa rentabilité à moyen terme.
- Beaudoin et Maurecon inc., [1991] C.A.L.P. 910.
La CSST doit s'assurer que l'entreprise que le travailleur désire mettre sur pied et pour laquelle une subvention est demandée présente des possibilités convenables de rentabilité. Elle doit aussi demeurer vigilante dans sa prise en compte des analyses de faisabilité qui lui sont présentées. De plus, elle ne doit pas imposer au travailleur un cadre financier qui soit trop restrictif et qui fasse en sorte que son entreprise ne soit pas viable.
- Leboeuf et C.S.S.T. - Laval, C.L.P. 94910-61-9802, 26 août 1999, B. Roy.
L'article 178 édicte la nécessité d'évaluer la rentabilité et la faisabilité d'un projet d'entreprise. Cependant, il n'y a pas de formalités plus précises à respecter. Il incombait à la CSST de vérifier la viabilité de l'entreprise que voulait démarrer le travailleur, ce qu'elle a fait d'ailleurs. Il aurait été souhaitable qu'il y ait une approche plus structurée et la soumission d'un plan plus élaboré, mais rigoureusement, la loi n'exige pas l'accomplissement de telles formalités. La CSST a accepté les données fournies par le travailleur et lui a accordé une subvention qu'elle a par la suite bonifiée. Il n'y a pas lieu de modifier le plan individualisé de réadaptation du travailleur afin de lui accorder une somme supplémentaire.
- Cabana et Les Constructions Vican inc., C.L.P. 107088-31-9811, 20 octobre 1999, M. Beaudoin.
La CSST était fondée de ne pas accorder au travailleur la subvention prévue à l'article 178 pour démarrer une entreprise de lavage de camions. Cette décision n'est pas arbitraire et découle d'une analyse sérieuse et motivée des critères de faisabilité et de rentabilité. Selon l'évaluation des experts comptables, le projet n'est pas jugé rentable, principalement parce que les retombées économiques avaient été essentiellement basées sur de simples hypothèses et que le chiffre d'affaires prévu manquait de réalisme. Quant à la faisabilité, le travailleur n'a pu recueillir le financement minimal pour son projet.
Suivi :
Révision rejetée, 19 février 2001, G. Tardif.
Voir également :
Jean-Charles Larose et 26291724 Québec inc., C.L.P. 212382-71-0307, M. Cuddihy, 3 février 2004.
Les aléas du marché à la charge du travailleur
Selon la jurisprudence, les aléas du marché qui peuvent affecter l'exploitation de l'entreprise du travailleur sont à sa charge. Bien que la CNESST verse une subvention au travailleur pour qu'il puisse démarrer une entreprise, le versement de cette subvention n'entraîne aucune obligation de résultat pour la CNESST.
- Lefebvre et Société de tuyauterie inc., C.A.L.P. 22711-63-9009, 11 janvier 1994, A. Leydet.
Les aléas que le travailleur peut rencontrer dans le cours de l'exploitation de son entreprise ne constituent pas des circonstances nouvelles pouvant justifier une modification de son plan de réadaptation. De tels problèmes reflètent plutôt les risques inhérents à la réalisation d'un projet d'entreprise. Si la subvention versée s'avère insuffisante, la CSST n'en est pas responsable. Dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré par l'article 178, elle n'est aucunement tributaire d'une obligation de résultat. Tout au plus assume-t-elle une obligation de moyens et doit-elle faire preuve d'une attitude qui ne soit pas discriminatoire, arbitraire ou frivole dans l'octroi d'une telle subvention.
- Kirouac et Aviation Roger Forgues, C.A.L.P. 88516-03-9705, 6 janvier 1998, M. Beaudoin.
L'entreprise de déchiquetage de documents confidentiels qu'a mise sur pied le travailleur, avec l'aide financière de la CSST, avait toutes les chances de réussir d'après les études de faisabilité effectuées. Les aléas qu'a rencontrés le travailleur en cours d'opération sont inhérents au monde des affaires et ne peuvent remettre en cause le caractère convenable de l'emploi déterminé. Le critère de la «possibilité raisonnable d'embauche» qu'invoque le travailleur, ce dernier ayant eu de la difficulté à recruter des clients et se disant peu compétitif à cause de ses douleurs au dos, n'est pas pertinent dans le cadre d'un projet de création et de gestion de sa propre entreprise.