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. 326. Imputation des coûts - Accident attribuable à un tiers

Notion de tiers

La jurisprudence établit qu’un « tiers » est toute personne autre que le travailleur lésé, son employeur et les autres travailleurs exécutant un travail pour ce dernier. 

Ministère des Transports et CSST, [2007] C.L.P. 1804 (formation de trois juges administratifs).

Un « tiers » au sens de l’article 326 est toute personne autre que le travailleur lésé, son employeur et les autres travailleurs exécutant un travail pour ce dernier. Ainsi, un élève, un client ou un bénéficiaire est un tiers. Par conséquent, il n’est ni utile ni souhaitable de conserver dans le libellé de la définition de tiers une référence à un contrat régi par un autre domaine du droit. Il suffit de mentionner les personnes que le législateur a incluses dans le rapport juridique particulier qu’il a créé aux seules fins de la loi. Donc, un collègue de travail n’est pas un tiers, mais un élève est un tiers par rapport à un professeur tout comme un patient ou un bénéficiaire est un tiers par rapport à une infirmière ou à un préposé aux bénéficiaires de centre hospitalier ou d’accueil.

Animal

Un animal n’est pas un tiers.

Commission scolaire de la Capitale, C.L.P. 293396-31-0607, 12 mars 2007, H. Thériault.

Le tiers doit obligatoirement être une personne physique ou morale dont la responsabilité peut être engagée d’une manière quelconque. Ainsi, un accident du travail causé par un animal sauvage qui n’a aucun propriétaire légal n’est pas attribuable à un tiers.

SGT 2000 inc., 2012 QCCLP 507.

Un camionneur fait une manœuvre sur la route pour éviter de frapper un chevreuil alors qu’il se dirige vers les États-Unis et renverse son camion sur le côté. Il n'est pas possible de conclure à la présence d’un tiers puisqu’il ne s’agit pas d’une personne physique ni d’une personne morale. Un animal n’est pas un tiers.

Collègue de travail

Le collègue de travail n’est pas un tiers pour l’employeur au sens de la jurisprudence.

Ministère des Transports et CSST, [2007] C.L.P. 1804 (formation de trois juges administratifs).

Un « tiers » au sens de l’article 326 est toute personne autre que le travailleur lésé, son employeur et les autres travailleurs exécutant un travail pour ce dernier.

Société en commandite Transport de valeurs Garda, 2012 QCCLP 4528.

Le collègue de travail qui a agressé physiquement dans le vestiaire le travailleur, un agent de transport de valeurs, n’est pas un tiers pour l’employeur au sens de la jurisprudence.

Identité du tiers inconnue

Le fait de ne pas connaître l'identité du tiers n'est pas un obstacle à une demande de transfert de coûts.

Société des Alcools du Québec, C.L.P. 361082-71-0810, 29 juillet 2009, J.-F. Clément.

Le travailleur, un caissier-vendeur, voit un client qui vole des bouteilles de vin et s'enfuit. Il se blesse alors qu'il tente de le rattraper. Le voleur peut être qualifié de tiers. Il est une personne autre que le travailleur lésé, son employeur et les autres travailleurs exécutent un travail pour ce dernier. Le coût des prestations découlant de cet accident est transféré aux employeurs de toutes les unités.

146814 Canada ltée., C.L.P. 388673-01A-0909, 23 août 2010, M. Racine.

Le travailleur est victime d’un acte criminel, une roche lancée par un individu ayant fracassé le pare-brise de son camion lui causant des blessures. Cet accident est attribuable à un tiers, soit la personne qui a lancé une roche en direction du camion. Le fait que cette personne n’ait pu être identifiée et éventuellement déclarée coupable du crime qu’elle a commis ne fait certainement pas obstacle à l’application de la loi, l’article 326 ne contenant pas une telle exigence.

S.T.M. (Réseau des Autobus), 2012 QCCLP 7770.

L'automobiliste inconnu qui agresse verbalement un chauffeur d'autobus répond à la définition de « tiers ». L'employeur a droit à un transfert du coût des prestations découlant de l'accident du travail subi par le travailleur.

Relation tripartite

CHUM, pavillon Mailloux et Université de Montréal, 2012 QCCLP 808.

Le travailleur, un employé du CHUM, est l'objet de harcèlement par sa supérieure immédiate. Celle-ci est à l'emploi de l'Université de Montréal et elle exerce, par assimilation ou délégation, certains pouvoirs de l'employeur. Dans ce contexte, l’employeur ne peut être considéré comme un tiers. En déléguant ses pouvoirs, notamment d’embauche mais principalement ceux de supervision et de discipline, l’employeur a aussi délégué les risques inhérents à l’exercice de ses activités.

Notion de « attribuable à »

Majoritairement responsable

La jurisprudence établit que l’employeur n’a pas à démontrer une faute mais seulement que l’accident est majoritairement attribuable au tiers, ce qui implique alors un pourcentage de participation de plus de 50 %.

Provigo (Division Maxi Nouveau Concept), [2000] C.L.P. 321.

Le rôle de la CLP n'est pas d'établir la responsabilité civile de chacun des intervenants selon la jurisprudence élaborée par les tribunaux civils, ce qui irait à l'encontre de l'article 25 qui stipule que les droits conférés par la loi le sont sans égard à la responsabilité de quiconque. Son rôle est plutôt de déterminer si le tiers a une participation majoritaire dans la survenue de l'accident du travail dont l'employeur veut se voir décharger des coûts.

Société immobilière du Québec et Centre Jeunesse de Montréal, [2000] C.L.P. 582.

Un accident du travail est attribuable à un tiers lorsque la preuve révèle que le tiers est l'auteur ou la cause de cet accident. Le tiers doit être majoritairement responsable ou doit avoir majoritairement contribué aux événements qui ont entraîné l'accident pour permettre à l'employeur d'obtenir un transfert d'imputation des coûts. 

Ministère des Transports et CSST,[2007] C.L.P. 1804 (formation de trois juges administratifs).

Il faut la participation majoritaire du tiers à l’accident du travail. L’employeur n’a pas à démontrer une faute mais seulement que l’accident est majoritairement attribuable au tiers, ce qui implique alors un pourcentage de participation de plus de 50 %. 

Multi-E inc. et Placements Cambridge, C.L.P. 313773-63-0703, 31 mars 2009, M. Gauthier.

Il ne suffit pas qu’un tiers ait contribué à la survenance d’une lésion professionnelle pour automatiquement donner lieu à un transfert de l’imputation. L’expression « attribuable » a été interprétée comme indiquant qu’un tiers doit être majoritairement responsable de l’événement survenu, sinon le législateur aurait plutôt indiqué qu’un tiers doit être partie à la survenance de celui-ci.

Services Environnementaux Clean Harbors Mercier inc. et Pavages J M Beaulieu inc., C.L.P. 374060-62C-0904, 14 décembre 2009, D. Beauregard.

Cette notion se distingue de la notion de « responsabilité » que le législateur n’a pas retenue. C’est à la lumière du contexte factuel particulier de l’accident qu’il convient de déterminer à qui ou à quoi il est attribuable, à qui ou à quoi il est dû. Il arrive fréquemment qu’un accident ne relève pas d’une cause unique et il se peut même que l’employeur ait contribué à l’accident. Cependant, l’article 326 exige que l’accident soit attribuable à un tiers, d’où la règle voulant que l’accident soit attribuable à la personne dont les agissements ou les omissions s’avèrent être, parmi toutes les causes identifiables de l’accident, ceux qui ont contribué non seulement de façon significative, mais de façon « majoritaire » à sa survenue, c’est-à-dire dans une proportion supérieure à 50 %.

Centre du camion (Beauce) inc., C.L.P. 384591-03B-0907, 9 mars 2010, J.-F. Clément.

La troisième condition consiste à vérifier si l’accident est bel et bien « attribuable » à ce ou ces tiers. Un accident est attribuable à la personne dont les agissements ou les omissions s’avèrent être, parmi toutes les causes identifiables de l’accident, celles qui ont contribué non seulement de façon significative, mais plutôt de façon majoritaire à sa survenue, c’est-à-dire dans une proportion supérieure à 50 %. En somme, l’accident est attribuable à quiconque s’en trouve être le principal ou les principaux auteurs pour avoir joué un rôle déterminant dans les circonstances qui l’ont provoqué.

C.S.S.S. de l’Énergie et Paul A. Bisson inc., C.L.P. 406679-04-1003, 30 août 2010, J. A. Tremblay.

Rien ne s’objecte à ce qu’aux fins de l’application de la règle, les apports combinés de plusieurs personnes équivaillent à celui d’une seule, dans la mesure où, ensemble, ceux-ci ont fait en sorte que l’accident se produise. Rien non plus n’interdit de conclure que l’accident est attribuable à une ou plusieurs personnes dont l’identité n’a pu être établie, pour autant qu’il soit démontré qu’il s’agit bien d’un tiers.

La jurisprudence établit que lorsque la CSST ou le tribunal examine si l’accident est attribuable au tiers, il faut alors tenir compte de la contribution de l’employeur ou du travailleur à l’accident du travail.

Participation de l’employeur

Stone Électrique inc., [2001] C.L.P. 527.

Selon les dispositions de la LSST, l'employeur et le maître d'oeuvre doivent tous les deux prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et l'intégrité physique des travailleurs, mais selon l'article 2.4.2 a) du Code de sécurité pour les travaux de construction, et selon les dispositions du contrat entre l'employeur et l'entrepreneur, les mesures de sécurité relèvent, en premier lieu, de l'employeur et non du maître d'oeuvre. L'employeur ne peut bénéficier du transfert d'imputation car l'accident du travail n'est pas survenu seulement en raison de l'action du tiers, mais également en raison de l'omission de l'employeur de protéger son travailleur et de l'insouciance de ce dernier.

Érecteur International ltée et Igloo cellulose inc., C.L.P. 384060-61-0907, 9 mars 2010, J.-F. Clément.

L’effondrement de la structure est fort probablement attribuable à des manquements de différents tiers, mais l’accident du travail est attribuable à au moins 50 % à la propre négligence de l’employeur et de son travailleur. L’employeur a totalement abdiqué ses obligations en matière de santé et de sécurité en louant les services de certains de ses travailleurs à un sous-traitant, et ce, sans contremaître ou chef d’équipe. En s’en remettant entièrement au sous-traitant quant aux mesures de sécurité à appliquer, il a fait fi des devoirs qui lui sont imposés par la loi.

Commission scolaire A, 2013 QCCLP 2521.

Le travailleur est enseignant. Il apprend de la directrice de l'école qu'il fait l'objet d'une enquête, mais elle refuse de lui fournir d'autres informations. Deux mois plus tard, un diagnostic de dépression majeure avec trouble anxieux secondaire à de fausses allégations de harcèlement est posé par son médecin. Les premiers symptômes de la lésion professionnelle se sont manifestés avant même que le travailleur connaisse la nature des accusations qui étaient portées contre lui. C’est donc la conduite de l’employeur qui le tenait dans l’ignorance des faits tout en lui mentionnant qu’il faisait l’objet de dénonciation sérieuse qui a initié la symptomatologie du travailleur. Dans la décision reconnaissant la lésion, la CLP a également retenu que la conduite de l’employeur constituait un événement imprévu et soudain ayant eu un impact sur la lésion. En fonction de la preuve administrée, le tribunal ne peut donc conclure que la lésion professionnelle est majoritairement attribuable aux tiers.

Participation du travailleur

C.H. Régional Trois-Rivières et Belle-Neige 2000, C.L.P. 415865-04-1007, 27 septembre 2010, R. Napert.

L’employeur doit également écarter la responsabilité du travailleur impliqué dans l’accident du travail pour lequel il demande un transfert de coûts. La preuve est insuffisante pour conclure que l'accident du travail, soit la chute de la travailleuse dans le stationnement de l'employeur, est attribuable à un tiers, soit l'entreprise de déneigement. D'une part, étant donné les changements dans les conditions climatiques, il est difficile de conclure à la négligence dont aurait pu faire preuve le tiers au cours de cette journée en l'absence d'autres éléments impliquant sa responsabilité directe. D'autre part, rien ne démontre que la travailleuse n'a pas elle-même contribué à la survenance de l'accident, notamment par l'absence de preuve concernant le type de soulier qu'elle portait, la démarche empruntée, le fait qu'elle avait ou non des objets dans les mains qui auraient pu gêner ses mouvements.

Société de transport de Montréal, 2012 QCCLP 1076.

Le travailleur, un chauffeur d’autobus, a participé d’une certaine façon à l’altercation verbale qui a eu lieu avec l’automobiliste et qui a généré sa lésion psychologique. En effet, le travailleur a invité le tiers à poursuivre l’altercation verbale, ce que ce dernier a fait. C’est alors que l’automobiliste est sorti de son véhicule et est venu s’en prendre physiquement à l’autobus que conduisait le travailleur. Si celui-ci ne l’avait pas invité à descendre de son véhicule, l’altercation aurait pu prendre fin sans plus de conséquences. Considérant ces éléments, la CLP ne peut conclure que la survenance de l’accident du travail est due majoritairement au tiers, soit à l’automobiliste.

Ventilex inc. et Neveu & Neveu ltée, 2013 QCCLP 5346.

Le travailleur, un ferblantier travaillant à rénover un immeuble, tombe d’un escabeau qui a versé sur le côté en raison de trous dans le plancher faits par un autre entrepreneur et qui étaient cachés par des débris. La survenance de l’accident découle tout autant des manquements et négligences du tiers que de ceux du travailleur. Le premier n’a pas sécurisé ses travaux en cours et le second n’a pas sécurisé son escabeau avant de grimper dessus, et ce, bien qu’il y ait de nombreux débris sur le sol, dont certains lui appartenant et que cela était susceptible de camoufler ou de rendre un trou indétectable. Bref, la preuve ne permet pas de conclure que l’accident du travailleur fut majoritairement causé par un tiers de sorte que ce dernier ne peut pas bénéficier d’un transfert d’imputation.

Consortium Mr Canada ltée et Groupe Mélimax, 2013 QCCLP 7288.

La responsabilité du tiers dans la survenance de l’accident est loin d’être évidente. Il y a eu un manque de communication entre le travailleur et le tiers, et la responsabilité de ce manque de communication ne peut être attribuée plus à un qu’à l’autre. Il est établi, de façon prépondérante, que le travailleur a pris l’initiative d’attacher l’anneau de remorquage au crochet du conteneur et que le tiers ne s’attendait pas à ce que le travailleur effectue cette manœuvre. C’est, essentiellement, la cause de l’accident puisque le travailleur ne s’attendait pas à ce que le tiers continue de reculer le camion, tandis que le tiers ne s’attendait pas à ce que le travailleur se retrouve derrière son camion. Un accident survenant dans un tel contexte ne peut être attribuable plus à l’un qu’à l’autre et n’est donc pas, majoritairement, attribuable à un tiers.

Notion d'injustice

La démonstration de l’injustice doit se faire en deux temps, soit d’abord par l’examen des risques inhérents à l’ensemble des activités de l’employeur et, ensuite, par l’analyse des circonstances propres à l’accident du travail.

Ministère des Transports et CSST, [2007] C.L.P. 1804 (formation de trois juges administratifs).

Plusieurs facteurs peuvent être considérés en vue de déterminer si l’imputation faite en vertu du deuxième alinéa de l'article 326 aurait pour effet de faire supporter injustement à un employeur le coût des prestations dues en raison d’un accident du travail attribuable à un tiers, soit : 1) les risques inhérents à l’ensemble des activités de l’employeur, les premiers s’appréciant en regard du risque assuré alors que les secondes doivent être considérées, entre autres, à la lumière de la description de l’unité de classification à laquelle il appartient; 2) les circonstances ayant joué un rôle déterminant dans la survenance du fait accidentel, en fonction de leur caractère extraordinaire, inusité, rare et/ou exceptionnel, comme les cas de guet-apens, de piège, d’acte criminel ou autre contravention à une règle législative, réglementaire ou de l’art; 3) les probabilités qu’un semblable accident survienne, compte tenu du contexte particulier circonscrit par les tâches du travailleur et les conditions d’exercice de l’emploi.

Risques inhérents à l’ensemble des activités de l’employeur

Ministère des Transports et CSST, [2007] C.L.P. 1804 (formation de trois juges administratifs).

La notion de risque inhérent doit être comprise selon sa définition courante, à savoir un risque lié d’une manière étroite et nécessaire aux activités de l’employeur et qui en est inséparable ou intrinsèque.

C.S.S.T. c. Commission des lésions professionnelles, 2009 QCCS 3330.

Dans l’analyse des circonstances de l’accident du travail permettant de déterminer la présence ou non d’une injustice, ce sont les activités normales de l’employeur qu’il faut examiner, et non les activités habituelles du travailleur ayant eu l’accident du travail.

Société de transport de Laval c. Commission des lésions professionnelles, C.S. Joliette, 705-17-003046-099, 3 mai 2010, j. Déziel.

Le critère des risques inhérents n'est pas étranger à l'article 326. En le retenant, la CLP ne contredit ni n'invalide la loi. Il n'est pas déraisonnable pour la CLP de conclure qu'un accident de la route constitue un risque inhérent à l'ensemble des activités d'une société de transport et qu'il n'est pas injuste d'imputer l'employeur lorsque cet accident est majoritairement attribuable à un tiers.

Coop. Ambulanciers Mauricie inc. et C.H. Cloutier inc., 2011 QCCLP 2668.

Dans l’analyse de l’injustice, ce n’est pas l’accident, comme tel, qui ne doit pas faire partie des risques inhérents aux activités de l’employeur mais plutôt l’activité exercée au moment de cet accident.

Compagnie rafraîchissements Coca-Cola Canada,2014 QCCLP 1375.

La notion de risque inhérent n’inclut pas tous les risques susceptibles de se produire au travail : elle doit être comprise dans son sens courant, à savoir un risque lié d’une manière étroite et nécessaire aux activités de l’employeur ou qui appartient essentiellement à pareilles activités.

Voir également :

Coopérative des ambulanciers Mauricie inc. et Fabrique de la Paroisse St-Boniface, 2011 QCCLP 2225.

Pepsico Canada ULC (Frito Lay), 2011 QCCLP 3848.

 

Accident à l’occasion du travail ou de trajet

Différentes approches se dégagent de la jurisprudence en matière d’accident à l’occasion du travail ou de trajet. Pour certains, ces accidents s’inscrivent et font partie des risques inhérents des activités de l’employeur alors que pour d’autres, ils ne s’inscrivent pas dans les risques inhérents des activités de l’employeur.

Selon une autre approche, il faut tenir compte du contexte particulier pour déterminer si cet accident est relié d'une manière étroite et nécessaire aux activités de l'employeur.

Accident fait partie des risques inhérents
Hôpital Maisonneuve-Rosemont, C.L.P. 362820-62-0811, 15 décembre 2009, J.-F. Clément.

La travailleuse venait de stationner son véhicule dans le stationnement mis à sa disposition par son employeur contre paiement de frais retenus à même sa rémunération. Le fait pour les travailleurs de l'employeur d’accéder à leur lieu de travail est lié d’une manière étroite et nécessaire à ses activités, en étant inséparable. Il fait donc partie des risques inhérents à l’ensemble des activités de l'employeur qu’un employé qui arrive au travail glisse ou chute. Il est évident qu’une infirmière doit se rendre à l’établissement de l'employeur après avoir stationné son véhicule. L’activité exercée au moment de l’accident s’inscrit de toute évidence dans les risques inhérents aux activités de l'employeur. Le fait que la travailleuse ait glissé dans le stationnement sur une plaque de glace à l'entrée de son lieu de travail en hiver au Québec n'a rien d'exceptionnel ou d'inusité.

Wal-Mart Canada (commerce détail), 2011 QCCLP 5171.

La travailleuse chute dans le stationnement de l’employeur. Le fait pour la travailleuse d’utiliser le stationnement pour ensuite avoir accès au lieu de travail fait partie des risques inhérents aux activités de l’employeur, un magasin de grande surface. L’entrée, ainsi que la sortie des lieux de travail, est associée de manière étroite aux risques professionnels que doit supporter l’employeur.

Accident ne fait pas partie des risques inhérents
CLSC de Sherbrooke et Édifice 1200, C.L.P. 372947-05-0903, 29 juin 2010, L. Boudreault.

La travailleuse, qui occupe un emploi d’ergothérapeute, subit un accident du travail en glissant dans le stationnement, sur de la glace recouverte d’un peu de neige. La chute subie par la travailleuse ne fait pas partie des risques inhérents reliés à la nature de l’ensemble des activités exercées par l’employeur. En effet, l’ensemble des activités économiques de l’employeur consistent à améliorer la santé et le bien-être de la population dont il a la responsabilité, notamment par des services médicaux. Une chute dans un stationnement ne fait pas partie des risques inhérents à l’ensemble de ses activités, particulièrement du fait qu’il n’est pas responsable de son entretien.

Pratt & Whitney Canada, 2011 QCCLP 6708.

Le travailleur se fait frapper sur la voie publique par une automobile qui ne fait pas son arrêt obligatoire alors qu’il se rendait à son stationnement à la fin de son quart de travail. Les activités exercées par l’employeur sont la fabrication de moteurs d’avions. Les accidents survenant sur la voie publique semblent donc fort éloignés des risques assumés par celui-ci. Il est vrai que le stationnement vers lequel se rend le travailleur est mis à sa disposition par l’employeur. Toutefois, bien que cette situation permette à ce dernier de bénéficier des prestations prévues à la loi, cela ne fait pas automatiquement basculer cet incident dans les risques inhérents aux activités exercées par l’employeur surtout lorsque, comme en l’espèce, l’accident arrive sur la voie publique, et non sur le terrain de l’employeur, et que les activités de ce dernier n’impliquent pas de déplacement en véhicule automobile de la part du travailleur. Une telle situation ne fait donc pas partie des risques inhérents aux activités exercées par l’employeur.

Hôpital Juif de Réadaptation, 2013 QCCLP 574.

Les accidents qui surviennent au moment d’accéder aux lieux du travail ainsi que d’en repartir constituent des accidents qui surviennent à l’occasion du travail. Bien que les accidents d’accès au lieu de travail puissent permettre aux travailleurs de bénéficier de prestations prévues à la loi, ils ne permettent pas pour autant de conclure qu’ils s’inscrivent à l’intérieur des risques inhérents aux activités exercées par l’employeur.

Contexte particulier est analysé pour déterminer si l'accident fait partie des risques inhérents
Expertech Bâtisseur Réseaux inc. et Resto Soleil en bouche,C.L.P. 299476-05-0609, 1 avril 2008 (formation de trois juges administratifs).

La CSST a décidé que la lésion du travailleur était survenue à l’occasion du travail. Les principes d’indemnisation ne sont cependant pas nécessairement identiques à ceux qui doivent régir l’imputation des coûts. Ainsi, le fait pour un travailleur de se rendre au restaurant pour prendre un petit déjeuner ne constitue pas un risque inhérent à l’ensemble des activités de l’employeur, lesquelles visent la construction de lignes de transport d’énergie et l’installation d’équipement électronique. Pareil risque n’est sûrement pas envisagé dans l’établissement de la cotisation de l’employeur. Le fait pour un travailleur de se rendre au restaurant pour déjeuner n’est pas lié de manière intime et nécessaire aux activités de l’employeur telles que décrites dans ses unités de classification. Il ne s’agit pas d’un risque inséparable, essentiel ou intrinsèque à ce genre d’activité.

Camionnage de Candiac inc., C.L.P. 300687-62-0610, 23 octobre 2008, L. Couture.

Ce n’est pas parce que l’accident est survenu à l’occasion du travail qu’il est injuste pour l’employeur d’en assumer les coûts. C’est plutôt parce que cet accident ne peut être assimilé ou relié aux risques inhérents des activités de l’employeur. Lors de l’accident, le travailleur réintégrait sa sphère professionnelle après avoir déjeuné au restaurant. On peut donc parler, comme le prétend le procureur de l’employeur, qu’il s’agit d’un accident « à l’occasion du travail ». Le législateur n’a pas voulu faire une distinction au second alinéa de l’article 326 entre les accidents survenant « par le fait du travail » de ceux survenant « à l’occasion du travail ». Si tel avait été le cas, il l’aurait précisé. On ne peut donc faire de cette catégorie d’accident du travail un nouveau critère permettant un transfert d’imputation pour ce seul motif, lorsqu’il est attribuable à un tiers. Il peut arriver que même si l’accident dont est victime un travailleur survient « à l’occasion du travail », qu’il ne soit pas injuste pour l’employeur d’en supporter les coûts parce que les circonstances de l’accident sont suffisamment en lien avec les risques associés aux activités de l’employeur. Les principes d’indemnisation ne sont pas nécessairement les mêmes que les principes d’imputation. Il faut cependant examiner les circonstances entourant l’événement par rapport aux risques associés aux activités de l’employeur.

Acte de civisme

La jurisprudence établit qu’un accident du travail survenant à l’occasion d’un geste de civisme ne fait pas partie des risques inhérents aux activités de l'employeur.

François Brossard et Gina St-Jacques, Pharmaciens, C.L.P. 308924-07-0701, 29 octobre 2008, M. Langlois.

L’intervention de la travailleuse, une caissière dans une pharmacie, relève davantage d’un acte de civisme que d’une action reliée aux risques que doit supporter l’employeur. En effet, si la travailleuse s’est blessée à l'épaule, c’est qu’elle a tenté de porter secours à un client handicapé qui venait de trébucher et s’apprêtait à tomber. Cela n’a rien à voir avec son travail de caissière.

CSSS Régional du Suroît et CSST, C.L.P. 304834-62C-0612, 26 mars 2009, M. Zigby .

La travailleuse, une infirmière, accompagnait une bénéficiaire dans un autre centre hospitalier pour qu'elle y subisse un examen. Elle se blesse en aidant une patiente âgée de l'autre centre hospitalier. Au moment de l'accident, elle n’effectuait donc pas son travail d’infirmière chez son employeur. Elle n’avait aucune responsabilité à l’égard de la patiente âgée à qui elle a porté assistance. Elle a agi par civisme envers une personne présentant un malaise comme elle aurait pu décider de le faire dans tout autre lieu public, à tout moment.

Foresterie Sénaka inc., C.L.P. 379621-08-0906, 20 juillet 2010, P. Champagne.

L’événement accidentel ne fait pas partie des risques inhérents à l’ensemble des activités de l’employeur, une entreprise forestière. Le prêt du travailleur à une société de protection des forêts, la SOPFEU, pour combattre un feu, est une situation exceptionnelle qui s’apparente à un acte de civisme tant de la part de l’employeur que du travailleur afin de protéger les ressources forestières, mais aussi pour assurer la sécurité des populations locales.

S.T.M. (Réseau des autobus), C.L.P. 413194-63-1006, 8 décembre 2010, J.-F. Clément.

L'accident du travail dont la travailleuse a été victime et qui lui a causé un choc nerveux est attribuable à un tiers et ne fait pas partie des risques inhérents aux activités de l'employeur. En effet, en allant porter secours à une personne blessée dans un accident de la route dont elle venait d'être témoin, durant ses heures de travail comme chauffeuse d'autobus, elle a posé un geste de civisme et il serait injuste que l'employeur en supporte les coûts.

Activités accessoires

Les activités accessoires ou moins fréquentes font partie des risques inhérents aux activités exercées par l’employeur au même titre que les activités régulières.

Restauration après sinistre Deux Rives, C.L.P. 346260-62A-0804, 29 janvier 2009, P. Simard.

Le travailleur est chef d’équipe d'une entreprise de nettoyage après sinistre. Les déplacements sur la voie publique que doivent effectuer les travailleurs de l’employeur pour rencontrer les clients et faire les travaux requis constituent un risque accessoire à l’exécution de son activité principale. En effet, ces travailleurs doivent nécessairement se déplacer vers le domicile ou résidence de ces clients pour effectuer les travaux requis. Sans ces déplacements, l’employeur ne pourrait exécuter les contrats qu’il a avec ses clients. Il s’agit donc d’un risque qui est inhérent aux activités économiques de l’employeur.

Féd. UPA St-Hyacinthe (Érablières), C.L.P. 387546-62B-0908, 21 octobre 2010, M. Watkins.

La faible fréquence des activités de la travailleuse à l’extérieur de ses tâches de secrétariat, soit une participation à une assemblée générale annuelle, ne fait pas en sorte que l’on devrait conclure qu’il ne s’agisse pas d’un risque inhérent relié à l’activité de l’employeur. Le fait que la proportion du temps de travail que la travailleuse puisse consacrer à la tenue d’assemblées annuelles soit très faible en proportion du temps consacré à son travail de secrétariat ne change pas le fait que sa participation à la tenue d’assemblées annuelles des membres fasse partie des risques inhérents reliés à l’activité économique de l’employeur.

Groupe de Sécurité Garda inc., 2011 QCCLP 6933.

L’analyse du caractère inhérent de l’activité implique non seulement les activités principales de l’employeur, mais aussi l’ensemble des activités, ce qui inclut alors les activités de déplacement.

Voir cependant :

Bonduelle Canada inc., C.L.P. 337547- 62C-0801, 12 mai 2009, Y. Lemire.

Entreprise de location de personnel

La jurisprudence établit que les risques d’une entreprise de location de personnel s’évaluent en fonction des risques de l’entreprise locataire.

Services de Gestion Quantum ltée et Groupe Sani-Gestion inc. (division enfouissement sanitaire), C.L.P. 333645-31-0711, 6 octobre 2008, P. Simard.

Dans le contexte de la location de personnel, il convient d’assimiler les risques inhérents à l’activité économique de l’employeur qui loue les services de l'employé. En d’autres mots, lorsque le travailleur est allé travailler chez Sani-Gestion, à titre de journalier dans le domaine du tri de récupération sur un site d’enfouissement, il devient exposé à tous les risques inhérents à cette activité qui, par assimilation, deviennent ceux de Quantum, l'entreprise de location de personnel. L’on ne peut prétendre que les seuls risques afférents à l’activité de Quantum pourraient s'appliquer à leurs travailleurs.

Thomson Tremblay inc. et Unical inc., C.L.P. 369430-62-0902, 27 novembre 2009, J.-F. Clément.

Lorsqu’on loue du personnel devant se rendre travailler en usine, les risques existants chez le locataire deviennent inhérents à l’ensemble des activités du locateur. Toute autre interprétation ferait en sorte que les entreprises de location de personnel pourraient être désimputées des coûts de toutes les lésions survenant chez leurs clients. Comme les activités de l’employeur sont notamment la location de service de personnel d’usine, il est évident que le risque que des lésions surviennent en manipulant de la machinerie est inhérent aux activités de l’employeur.

Service d’Impartition Industrielle inc. et Arcelor Mittal Pipes & Tubes, 2011 QCCLP 6644.

Les risques existants chez le locataire de services ou le client deviennent des risques inhérents à l’ensemble des activités du locateur de services. Ainsi, les risques d’une entreprise de location de personnel s’évaluent en fonction des risques de l’entreprise locataire.

Non-pertinence de la notion de contrôle de l’employeur

Ministère des Transports et CSST, [2007] C.L.P. 1804 (formation de trois juges administratifs).

Le contrôle n’est pas, en soi, un critère pertinent à l’analyse de l’injustice puisqu’il est presque de l’essence même d’un accident attribuable à un tiers d’échapper au contrôle de l’employeur malgré la mise en place d’un bon programme de prévention. Le recours au concept de risque inhérent aux activités de l’employeur pour apprécier l’effet juste ou injuste d’une imputation faite en vertu de la règle générale n’est pas seulement tout à fait approprié, mais il s’impose. Le coût des prestations dues en raison d’un accident du travail, dont les causes ne relèvent pas des risques particuliers inhérents ou reliés à l'ensemble des activités de l'employeur de l’accidenté, devrait être imputé à d’autres, car l’application de la règle générale en de telles circonstances produirait un effet injuste. La notion de risque inhérent doit cependant être comprise selon sa définition courante, à savoir un risque lié d’une manière étroite et nécessaire aux activités de l’employeur ou qui appartient essentiellement à pareilles activités, en étant inséparable (essentiel, intrinsèque…). On ne doit donc pas comprendre cette notion comme englobant tous les risques susceptibles de se matérialiser au travail, ce qui reviendrait en pratique à stériliser le deuxième alinéa de l’article 326.

Wal-Mart Canada (commerce détail), 2011 QCCLP 5171.

On ne peut retenir l’argument voulant que, comme l’employeur n’avait pas de contrôle sur les circonstances de l’accident, cela devient injuste pour lui d’en supporter les coûts. Il est de l’essence même d’un accident attribuable à un tiers d’échapper au contrôle de l’employeur. Il devient donc impossible d’apprécier la notion d’injustice uniquement à partir de cet argument.

Voir également :

Société de transport de Montréal, 2012 QCCLP 4486.

Non-pertinence du régime de financement

Routiers experts 2000 inc., 2011 QCCLP 5584.

L’employeur soumet que le tribunal ne peut analyser sa demande de transfert d’imputation en fonction des risques inhérents puisqu’étant assujetti au régime de financement rétrospectif, il est cotisé en fonction de son expérience, et non en fonction des risques. Cet argument ne tient manifestement pas la route puisque le critère des risques inhérents en matière de transfert d’imputation vise à apprécier si les circonstances de l’accident font partie des risques de l’activité économique exercée par l’employeur. Le régime de cotisation qui s’applique à un employeur n’a aucune pertinence dans le cadre de l’analyse d’une demande de partage d’imputation.

Circonstances extraordinaires, inusitées, rares ou exceptionnelles

Analyse de toutes les circonstances

La jurisprudence considère qu’il faut examiner toutes les circonstances ayant joué un rôle déterminant dans la survenance du fait accidentel, en fonction de leur caractère extraordinaire, inusité, rare et/ou exceptionnel, tels que sont, par exemple, les cas de guet-apens, de piège, d’acte criminel ou autre contravention à une règle législative, réglementaire ou de l’art.

Ville de Montréal, 2012 QCCLP 2220 (décision accueillant la requête en révision).

Il faut analyser non seulement les risques inhérents et les probabilités, mais aussi les circonstances précises de l'accident. Un risque lié d'une manière étroite et nécessaire aux activités de l'employeur ne doit pas comprendre tous les risques susceptibles de se matérialiser au travail sans quoi le deuxième alinéa de l'article 326 ne trouverait plus application.

Acte criminel
Commission scolaire A, C.L.P. 361581-62B-0810, 5 août 2010, M. Watkins.

Le travailleur a subi une lésion psychologique découlant des accusations criminelles portées contre le collègue avec qui il a participé à un voyage parascolaire à l'étranger. La lésion professionnelle résulte des conséquences attribuables au stress engendré par la divulgation à son retour, du fait que ce collègue aurait posé lors de ce voyage, des gestes de nature sexuelle à l'encontre d'un des étudiants; et par l'enquête policière qui s'en est suivie. L'employeur n'a pas à supporter le coût des prestations, car cette situation ne participe d'aucune façon à la nature de l'activité économique de l'employeur et peut aisément être assimilée à une situation « d'acte criminel » auquel aurait été exposé le travailleur lui-même.

Blague
Costco-Brossard Div. Entrepôt, C.L.P. 377801-62-0905, 17 novembre 2009, M. Watkins.

La mauvaise blague d'un client, qui est la seule cause de l'accident, constitue une situation « extraordinaire, inusitée, rare ou exceptionnelle ». De plus, la CLP ne peut convenir que le fait qu’un client décide de faire une blague à une employée, fut-ce t’elle faite alors que celle-ci exécute une tâche, elle-même usuelle, dans le cadre des activités de l’employeur, ait pour conséquence de faire entrer dans la sphère des risques inhérents aux activités de l’employeur tout accident qui surviendrait dans ce contexte.

Distraction, manquement ou contravention à un règlement ou à une règle de sécurité
Corporation de gestion des rivières Matapédia et Patapédia, C.L.P. 379332-01A-0905, 8 avril 2010, L. Desbois.

Il faut beaucoup plus que la preuve d’une distraction, d’un manquement, ou d’une violation règlementaire de la part du tiers pour conclure à la présence de circonstances extraordinaires, inusitées, rares ou exceptionnelles. La plupart des accidents de la route découlent de tels manquements, distractions ou violations règlementaires, ce qui rend difficile, voire impossible, de conclure, sur cette seule base, à la présence de circonstances exceptionnelles.

R.T.C. Chauffeurs, 2011 QCCLP 84.

L’analyse de l’ensemble des décisions rendues sur le sujet commande de retenir que de simples manquements, distractions ou violations règlementaires ne représentent pas des circonstances exceptionnelles. Ainsi, la seule référence à des infractions au Code de la sécurité routière ne peut suffire, à elle seule. Certes, le fait pour la passagère de sortir à l’avant de l’autobus pour se précipiter aussitôt devant et traverser la voie, tout en ayant des écouteurs sur les oreilles, ne traduit pas un comportement prudent. La même observation vaut pour le conducteur du véhicule fautif qui a décidé de doubler l’autobus, par la gauche, en utilisant la voie réservée à la circulation en sens inverse, et ce, à l’approche d’une intersection. En effet, il ne s’agit pas d’une attitude empreinte de prudence, voire de diligence. Il n’en demeure pas moins que de multiples accidents de la circulation sont attribuables à de tels comportements imprudents ou qui violent tout simplement les règles du Code de la sécurité routière. Aussi, est-ce fréquemment dans un tel contexte que les piétons sont renversés et la CLP ne voit pas en quoi les circonstances de l’accident en cause présentent un caractère extraordinaire, inusité, rare ou exceptionnel. En effet, il s’agit plutôt d’un accident comme il en survient, malheureusement, régulièrement.

Routiers experts 2000 inc., 2011 QCCLP 5584.

Dans le cas d’un accident du travail attribuable au comportement d’un tiers sur le réseau routier, ce n’est pas parce que ce dernier contrevient à une règle de sécurité routière que l’employeur subit nécessairement une situation d’injustice. Certes, un tel comportement doit être pris en compte dans l’analyse du tribunal, mais il ne peut constituer le seul critère d’appréciation de l’injustice de l’imputation.

Ferrailleurs du Québec inc., 2011 QCCLP 5862.

La contravention à un règlement ou à une règle de sécurité dans le domaine de la construction ne constitue pas un fait rare, exceptionnel ou inusité.

Fardeau de preuve appartient à l’employeur

La jurisprudence établit qu’il revient à l’employeur de faire la preuve que l’accident du travail est attribuable à un tiers et qu’il est injuste qu’il soit imputé du coût de cet accident.

Agence de personnel L. Paquin inc. et Santragest inc.,C.L.P. 126248-62A-9911, 1er mai 2000, N. Lacroix.

C'est à l'employeur qu'appartient le fardeau de la preuve. Il doit établir qu'il n'est pas majoritairement responsable de l'accident.

Autocar Connaisseur inc.,C.L.P. 124993-72-9910, 3 octobre 2000, Marie Lamarre.

Lorsqu'il y a lieu de déterminer si un accident du travail est attribuable à un tiers, il convient d'appliquer un test de prépondérance de preuve en regard de l'implication d'un tiers dans la survenance d'un accident du travail sans qu'une preuve de négligence, faute lourde, faute délictuelle ou quasi délictuelle soit nécessairement apportée.

Aliments Lesters ltée et Tremblay,C.L.P. 157950-61-0103, 15 mars 2002, G. Morin.

Le rôle de la CLP n'est évidemment pas de se prononcer sur la responsabilité civile des intervenants concernés. Le tribunal doit cependant déterminer si la tierce partie, par son action ou son omission d'agir, a majoritairement contribué aux événements qui sont à l'origine de l'accident du travail dans le seul but de dégager l'employeur de l'imputation à son dossier financier du coût des prestations reliées à la lésion professionnelle. En statuant sur l'admissibilité de la réclamation et en reconnaissant que la chute du travailleur a été causée par une plaque de glace, la CSST ne statue aucunement sur la responsabilité d'une tierce partie dans la survenance de l'événement accidentel. L'employeur doit établir, au moyen d'une preuve prépondérante, que l'état dans lequel se trouvait la voie publique résulte d'un défaut d'entretien ou d'un entretien inadéquat de la part de la tierce partie. Les conditions météorologiques doivent être prises en considération aux fins d'apprécier le degré de contribution d'une tierce partie à la survenance d'un accident du travail à l'occasion d'une chute causée par une surface extérieure mouillée ou glacée.

Ministère des Transports et CSST,[2007] C.L.P. 1804 (formation de trois juges administratifs).

Puisqu’il s’agit en l’occurrence d’une exception à la règle générale d’imputation énoncée au premier alinéa de l’article 326, il appartient à celui qui en réclame le bénéfice de faire la preuve des faits lui donnant ouverture.

Commission scolaire de la Pointe-de-l’Île,C.L.P. 380211-71-0906, 14 mai 2010, F. Juteau.

Dans Ministère des Transports et CSST, la CLP rappelle que le recours aux dispositions du deuxième alinéa de l’article 326 constitue une exception à la règle générale d’imputation. Il appartient donc à celui qui en réclame le bénéfice de faire la preuve des faits lui donnant ouverture. En l’espèce, l’analyse des éléments soumis par l’employeur amène la CLP à conclure que celui-ci n’a pas fait cette démonstration puisqu’il n’a pas démontré un des éléments donnant ouverture à l’application de l’article 326.

C.H. Régional Trois-Rivières et Belle-Neige 2000,C.L.P. 415865-04-1007, 27 septembre 2010, R. Napert.

L’employeur doit faire la démonstration du contexte dans lequel est survenu l’accident afin que le tribunal puisse conclure que le défaut d’entretien par le tiers est la cause majoritaire de l’accident. L’employeur ne doit pas se contenter de déposer le contrat le liant à l’entreprise de déneigement et souligner les obligations qui lui incombent. Il doit dans les faits démontrer les manquements concrets de son cocontractant. L’employeur n’a pas administré de preuve sur le type de soulier que la travailleuse portait au moment de l’événement, la démarche qu’elle empruntait pour se rendre à son poste de travail, l’absence dans ses mains d’objets qui auraient pu gêner ses mouvements. L’employeur n’a pas démontré non plus l’absence de fausse manœuvre de la part de la travailleuse et n’a pas prouvé qu’elle avait agi de façon prudente eu égard aux conditions météorologiques prévalant au moment de l’accident.

Transfert des coûts dans une ou plusieurs unités 

La jurisprudence établit que le transfert ou la répartition des coûts ne se fait pas dans le dossier de l’employeur-tiers mais plutôt dans une unité, dans plusieurs unités ou dans toutes les unités selon que le tiers est un employeur ou non, ou selon que nous sommes en présence d’un ou plusieurs employeurs tiers.

Sûreté du Québec et CSST, C.L.P. 297435-71-0608, 1er avril 2008 (formation de trois juges administratifs).

Lorsque les critères de l’article 326 sont remplis, il y a possibilité d’un transfert total du coût des prestations de l’accident du travail aux employeurs d’une unité, de plusieurs unités ou encore de toutes les unités. On ne peut transférer le coût des prestations à l’employeur à qui est attribuable l’accident du travail, mais seulement à l’unité à laquelle il appartient ou encore à plusieurs ou toutes les unités.

Pas dans le dossier de l’employeur tiers

La jurisprudence établit que la loi ne permet pas d’imputer les coûts directement au dossier de l’employeur tiers.

Ville de Montréal et Services de personnel infirmier Progressif, C.L.P. 191939-71-0210, 21 mars 2003, C. Racine.

La CSST ne peut imputer directement les coûts générés par un accident du travail au tiers identifié. En effet, l’article 326 précise que la CSST peut imputer les coûts aux employeurs « d'une, de plusieurs ou de toutes les unités», et non à l'employeur-tiers personnellement. Une telle conclusion serait erronée et non conforme au libellé de l'article 326.

Sûreté du Québec et CSST, C.L.P. 297435-71-0608, 1er avril 2008 (formation de trois juges administratifs).

Comme la loi ne permet pas d’imputer ces coûts au dossier d’un employeur en particulier, il y a lieu de les imputer plutôt à l’unité de classification à laquelle appartient le tiers employeur. C’est ce niveau qui permet l’imputation la plus juste à défaut de pouvoir imputer directement et uniquement le dossier de l’employeur à qui l’accident est attribuable.

Comm. Scolaire de la Capitale, 2012 QCCLP 5357.

L’employeur demande au tribunal d’imputer les coûts aux employeurs responsables de l’accident de travail du 3 février 2011. La loi ne le permet pas. Les coûts générés par l'accident du travail doivent être supportés par les unités dont font partie les deux employeurs responsables de l'accident du travail.

Voir également :

Castel Tina (1987) enr. (Le) et Lotfi Tebessi, C.L.P. 123916-71-9909, 18 décembre 2000, D. Gruffy.

Tiers est un employeur

Sûreté du Québec et CSST, C.L.P. 297435-71-0608, 1er avril 2008 (formation de trois juges administratifs).

Lorsqu’un seul tiers employeur est à la source d’un accident, il est alors équitable d’imputer les coûts aux employeurs de l’unité dont fait partie cet employeur. Il serait injuste de faire supporter aux employeurs d’autres unités les coûts découlant directement de l’action ou de l’omission d’un employeur en particulier.

Laval Construction inc. et Ville de Québec, C.L.P. 370364-31-0902, 30 septembre 2009, G. Tardif.

La cause majoritaire de la survenance de l’accident du travail est l’exigence imposée par le tiers, la ville de Québec, et, sans cette exigence, contraire aux règles de l'art et à la LSST, il n’aurait jamais été nécessaire de recourir à une méthode de travail non sécuritaire. Puisqu’un seul tiers est à la source de l’accident du travail, il est équitable d’imputer les coûts de l’accident aux employeurs de l’unité dont il fait partie.

Demathieu & Bard-Nordex S.E.N.C., 2013 QCCLP 6730.

Lorsque le tiers employeur responsable d’un accident du travail est bien identifié, il serait inéquitable d’en faire supporter les coûts à l’ensemble des employeurs, puisque ceux-ci découlent de l’action d’un employeur en particulier.

Tiers n’est pas un employeur

Sûreté du Québec et CSST, C.L.P. 297435-71-0608, 1er avril 2008 (formation de trois juges administratifs).

Lorsque le tiers impliqué est une personne non assujettie au régime prévu à la loi, par exemple un individu, il est préférable d’imputer les coûts à l’ensemble des employeurs afin de faire supporter par le plus grand nombre possible de personnes les frais découlant d’un accident auquel aucun d’entre eux n’a contribué.

Béton provincial ltée, 2013 QCCLP 1168.

Le travailleur, un opérateur de bétonnière, a subi un choc nerveux après avoir heurté à mort un cycliste. Le cycliste est un tiers dans ce cas et il a contribué majoritairement à la survenance de l'accident. Par ailleurs, puisque le « tiers » n'est pas un employeur, il y a lieu d'imputer le coût des prestations de la lésion professionnelle à l'ensemble des employeurs.

Plusieurs tiers employeurs impliqués

Sûreté du Québec et CSST, C.L.P. 297435-71-0608, 1er avril 2008 (formation de trois juges administratifs).

Lorsque plusieurs tiers employeurs ont contribué à la survenance d’un accident, on doit alors imputer le coût des prestations aux employeurs de plusieurs unités, soit celles où évoluent les tiers employeurs concernés, et ce, en parts égales. Il devient, en pareilles circonstances, équitable et logique de transférer les coûts de façon égalitaire entre chacune des unités dont ils font partie.