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. 203. Rapport final

Utilisation du formulaire prescrit par la CNESST

Ouellet et Couvrex-Pert inc., C.L.P. 401224-01A-1002, 8 septembre 2010, R. Arseneau.

Même si la CSST n’a pas reçu les formulaires « rapport final » et « rapport d’évaluation médicale », le médecin qui a charge a discuté de l’ensemble des sujets énoncés à l’article 203 dans son information médicale complémentaire écrite transmise à la CSST conformément à l’article 202. Comme le prévoit l’article 353, le fonds doit l’emporter sur la forme. Ce document satisfait aux exigences énoncées à l’article 203 et constitue l’équivalent d’un rapport final au sens de cet article.

 

Maçonnerie André Desfossés inc. et Truchon, 2014 QCCLP 3295.

Il est très rare que le médecin indique le pourcentage de l’atteinte permanente et qu’il décrive les limitations fonctionnelles dans un rapport final. Ces informations se trouvent habituellement dans le rapport d’évaluation médicale que le médecin remplit, en même temps qu’un rapport final ou ultérieurement. En l’espèce, puisque le médecin qui a charge a décrit dans son rapport final les limitations fonctionnelles, ce rapport est complet en soi concernant l’existence et l’évaluation des limitations fonctionnelles.

 

Contradictions entre le rapport final et le rapport d'évaluation médicale

Blanchet et Aliments Trans Gras inc., C.L.P. 181797-04B-0204, 10 avril 2003, J.-F. Clément.

Lorsque le médecin traitant délègue à un autre médecin l'évaluation des séquelles permanentes ainsi que la production du rapport d'évaluation médicale, le diagnostic, la date de consolidation ainsi que la nécessité des soins ou traitements ne peuvent être remis en cause par le médecin évaluateur. Cependant, une telle délégation implique que le médecin traitant accepte que le médecin évaluateur formule ses propres conclusions à la suite de son examen. Ainsi, même s'il conclut à l'existence d'une atteinte permanente ou de limitations fonctionnelles, il s'expose à ce que cette conclusion soit modifiée par le médecin évaluateur. En effet, il irait contre l'autonomie professionnelle que le médecin à qui on délègue la préparation du rapport d'évaluation médicale soit lié par le conclusions retenues par le médecin traitant concernant les sujets médicaux délégués. Le rapport d'évaluation médicale a préséance sur le rapport final, lequel ne respecte pas les prescriptions de l'article 203 puisqu'il ne contient pas une description de l'atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.

 

Gauthier et Groupe Alcan Metal Primaire (énergie électrique), C.L.P. 300377-02-0610, 7 juin 2007, J. Grégoire.

Le médecin qui a charge remplit un rapport final dans lequel il indique que la lésion entraîne une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles. Il ne fait cependant pas l’évaluation des séquelles et ne réfère pas non plus la travailleuse à un autre médecin pour qu’elle soit réalisée. La travailleuse choisit un autre médecin pour procéder à l’évaluation de ses séquelles, lequel conclut à l’absence d’atteinte permanente et de limitations fonctionnelles. Ainsi, en ce qui concerne l’évaluation de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles, le médecin évaluateur est devenu le médecin qui a charge et la travailleuse ne peut contester ses conclusions, et ce, malgré qu’elles soient contraires à celle du premier médecin. La jurisprudence a déjà confirmé dans des cas similaires que le médecin évaluateur a toute liberté afin de procéder à son évaluation, y compris la possibilité de conclure à l’absence d’atteinte permanente ou de limitations fonctionnelles. 

 

Rangers et Asphalte ST, C.L.P. 364388-02-0811, 1er juin 2009, R. Bernard.

Le médecin qui a charge remplit un rapport final dans laquelle il retient que le travailleur conserve une atteinte permanente ainsi que des limitations fonctionnelles et précise qu’il ne produira pas le rapport d’évaluation médicale. Dans son rapport d’évaluation médicale, l’orthopédiste choisi par le travailleur conclut à un DAP de 0 % et à l’absence de limitations fonctionnelles. On ne saurait permettre au médecin qui a émis un rapport final incomplet ou au travailleur de magasiner un spécialiste jusqu’à ce qu’il obtienne l’évaluation voulue. En l’espèce, l’orthopédiste a respecté le cadre strict de son mandat d’évaluer l’atteinte permanente ainsi que les limitations fonctionnelles, et le tribunal ne voie pas de contradiction entre les conclusions de ces médecins. En effet, bien que l’orthopédiste soit d’avis que le travailleur ait pu conserver des séquelles, il conclut qu’elles ne sont pas suffisamment significatives afin d’émettre un pourcentage d’atteinte plus élevé et de formuler des limitations fonctionnelles. Ceci étant, même en cas de contradiction, l’orthopédiste a agi à l’intérieur de son mandat spécifique et son rapport d’évaluation parachève le rapport final incomplet et permet ainsi de rencontrer les exigences prévues à l’article 203.

 

Service d’entretien Distinction inc. et Charles, 2013 QCCLP 7161.

Dans son rapport final, le médecin qui a charge consolide la lésion avec atteinte permanente et limitations fonctionnelles. Il confirme qu’il ne procédera pas à l’évaluation des séquelles et réfère la travailleuse à un médecin évaluateur afin que le rapport d’évaluation médicale soit complété. Celui-ci acquiert la qualité de médecin qui a charge quant à ses sujets, mais il se doit de respecter la limite de son mandat. Ainsi, il ne peut, directement ou indirectement, substituer son opinion à celle du médecin qui a charge concernant le bien-fondé des autres conclusions médicales de ce dernier. En l’espèce, le médecin évaluateur conclut à une atteinte permanente de 0 % et n’accorde aucune limitation fonctionnelle. Une divergence d’opinion entre le médecin qui a émis le rapport final et celui qui produit le rapport d’évaluation médicale relativement à l’existence d’une atteinte permanente ou de limitations fonctionnelles n’a pas pour effet d’invalider les conclusions du médecin évaluateur. À l’égard de ses sujets médicaux, il conserve son statut de médecin qui a charge et ce sont ses conclusions qui prévalent

 

Voir également :

Gagné et Pyrotex ltée, [1996] C.A.L.P. 323.

Morneau et Maison du Soleil Levant, C.L.P. 140756-08-0006, 20 mars 2001, R. Savard.

David et Liard Construction inc., 2011 QCCLP 1527.

Nécessité ou non d’un examen médical contemporain avant la production du rapport final

Nécessité d’un examen médical

Larocque et Alliance H inc., C.L.P. 307493-64-0701, 28 août 2007, J.-F. Martel.

La CLP n’est pas liée par les conclusions du médecin qui a charge du travailleur, car ce dernier n’a pas été examiné lors de la rédaction du rapport d’évaluation médicale, en mars 2006. Le dernier examen médical auquel le travailleur a été soumis a eu lieu lors de la préparation du rapport final, en avril 2005.

 

Dorval et Carrière Union ltée., C.L.P. 357338-31-0809, 24 avril 2009, G. Tardif.

Il ressort de l’article 203 que l’évaluation des séquelles permanentes pouvant résulter d’une lésion professionnelle doit se faire lorsque la lésion est consolidée. Certaines exceptions à ce principe sont prévues au Règlement sur le barème des dommages corporels, en matière de préjudice esthétique, mais elles ne concernent nullement l’évaluation de lésions musculo-squelettiques, telle une entorse de la cheville. C’est donc erronément que le médecin a indiqué au travailleur que l’évaluation de ses séquelles ne pouvait se faire qu’un an après la survenance de la lésion professionnelle.

Le tribunal ne peut cautionner l’injustice qui résulte du fait que le médecin qui en avait charge a produit le 13 novembre 2006 un rapport final concluant à l’absence d’atteinte permanente ou de limitations fonctionnelles, sans examiner le travailleur à cette fin et sans que ses notes cliniques ne révèlent un tel examen, et ce, sur la base d’un principe juridiquement erroné concernant le moment où les séquelles doivent être évaluées. Un tel rapport ne peut lier la CSST, laquelle doit donner suite au rapport d’évaluation médicale du 17 septembre 2007 du médecin évaluateur ayant été référé en août 2007 par le médecin qui a charge, dans lequel une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles sont décrites.

 

Lemelin et Entreprises L.G., 2012 QCCLP 6182.

Un rapport final ne peut être valide en l'absence d'un examen médical contemporain qui permet de comprendre les conclusions du médecin. En l'espèce, le médecin qui a charge n'avait pas revu le travailleur depuis plus de cinq mois au moment de la production de son rapport. Rien ne permet de comprendre pourquoi la lésion serait consolidée le 30 août 2011 alors qu'elle ne l'était pas à l'occasion du dernier examen, soit le 29 mars précédent. Tout en reconnaissant que les dispositions de l'article 203 n'exigent pas expressément qu'un examen médical soit effectué avant la production du rapport final, le tribunal juge plus conforme à l'esprit de la loi d'exiger qu'un examen médical soit effectué avant la production d'un tel rapport. 

 

Voir également :

Dubé et Arneg Canada inc., C.L.P. 328195-62A-0709-2, 29 août 2008, C. Burdett.

Fraser et Huot, 2012 QCCLP 5364.

Aucune nécessité d’un examen médical

Poulin et Manac inc.,C.L.P. 125439-03B-9910, 9 juin 2000, R. Savard.

Le médecin de la travailleuse complète le 28 avril 1999 un rapport final dans lequel elle ne retient aucun pourcentage d'atteinte permanente ni de limitations fonctionnelles. En dépit de l'absence d'examen à cette date, ce rapport est valide en raison du fait que ce médecin fonde son opinion sur ses notes de consultation précédentes, notamment celles du 19 janvier 1999 qui font suite à l’avis du BEM du 5 janvier 1999, dont elle connaissait les conclusions quant à la date de consolidation et à l’absence de soins et de traitements additionnels.

 

Hamilton et Toyota Pie IX inc.,C.L.P. 312268-63-0703, le 4 mars 2010, P. Perron.

En lien avec l’entorse du genou droit reconnue à titre de lésion professionnelle, le médecin de la travailleuse demande une arthrographie et, au besoin, un examen par résonance magnétique, puisqu’il soupçonne une lésion à la corne postérieure.

Le 28 février 2006, il indique que selon la travailleuse les douleurs persistent, mais que l’examen par résonance magnétique est dans les limites de la normale. Il n’a aucun traitement à proposer et demande un examen par un médecin désigné par la CSST.

C’est plutôt le médecin désigné de l’employeur qui examine la travailleuse. Il retient un diagnostic d’entorse du genou droit et consolide la lésion à la date de son examen, sans nécessité de soins ou traitements additionnels et sans séquelles permanentes. Le médecin qui a charge complète un rapport complémentaire dans lequel il exprime son accord avec les conclusions du médecin désigné. Par la suite, il réitère les mêmes conclusions dans un rapport final.

Le tribunal est d’avis que le médecin de la travailleuse n’avait pas à l’examiner à nouveau. Il émane de sa note du 28 février 2006, qu’en présence d’un examen par résonance magnétique normal, il n’y a rien à objectiver. En effet, la simple anomalie retrouvée lors de son examen médical, soit un signe de Mac Murray positif, pouvant justifier un questionnement sur la possibilité d’une atteinte du ligament de la corne postérieure, s’est avérée négative. Il n’avait alors rien d’autre à chercher. Le médecin de la travailleuse possédait tous les éléments requis afin de compléter un rapport complémentaire et un rapport final.

 

Suivi :

Révision rejetée, 2011 QCCLP 1532.

Ouellet et Couvrex-Pert inc., C.L.P. 401224-01A-1002, 8 septembre 2010, R. Arseneau.

Depuis sa RRA du 7 juin 2005, le travailleur consulte des médecins pour une arthrose post-traumatique à la cheville gauche. Il s’agit d’une pathologie de nature chronique pour laquelle le travailleur est indemnisé depuis plus de quatre ans lorsque la CSST fait parvenir à son médecin orthopédiste une demande d’information médicale complémentaire écrite. 

Losrqu'il rédige son rapport d'information médicale complémentaire, ce médecin n'avait pas revu le travailleur depuis environ trois mois. Cependant, il connaissait bien la condition médicale de celui-ci car il suivait sa condition arthrosique depuis plus d’un an et demi à cette époque et avait eu l’occasion de l’examiner à sept reprises dans l’intervalle. Il était donc en mesure de formuler une opinion éclairée.

Ainsi, tenant compte du contexte particulier du présent dossier, le tribunal estime que l’opinion du médecin du travailleur demeure valable, en dépit de l'absence d'un examen du travailleur de façon concomitante à la rédaction de son rapport d'information médicale complémentaire écrite, lequel en l’espèce est considéré l’équivalent du rapport final.

 

Obligation d'informer le travailleur du contenu du rapport prévu à l'article 203

L'obligation d'informer ne constitue qu'une formalité

Clouâtre et Coroplast-division des Entreprises Grand Pacifique inc., C.L.P. 288103-62B-2006, 16 octobre 2006, N. Blanchard.

 L’omission du chirurgien d’informer le travailleur du contenu de son rapport d’évaluation médicale directement et sans délai est insuffisante pour invalider ce rapport. Il s’agit là d’un aspect technique « dont le non-respect ne peut donner de droits exorbitants au travailleur ».

 

Desrosiers et Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue, C.L.P. 375761-08-0904,13 mai 2010, P. Champagne.

L’obligation d’informer le travailleur, prévue à l’article 203 vise à permettre au travailleur de discuter avec son médecin des conclusions que celui-ci retient et de savoir si le processus d’indemnisation par la CSST va se poursuivre ou s’il doit reprendre son travail habituel chez son employeur. Cette obligation d’information n’a pas pour but de permettre au travailleur de contester les conclusions de son médecin, ce que la loi ne permet pas, ni de changer de médecin s’il n’est pas d’accord.

 

Bouchard et Vitro Plus Ziebart, 2012 QCCLP 2817.

Le défaut du médecin d'informer le travailleur du contenu du rapport d’évaluation médicale ou le fait que la CSST ne lui ait pas transmis une copie de ce rapport ne constitue qu’un aspect technique et ne peut lui permettre de contester le rapport de son propre médecin. L’omission d’informer le travailleur du contenu du rapport d’évaluation médicale ne peut avoir pour effet d’altérer le caractère liant du rapport du médecin qui a charge ou de lui faire perdre sa qualité de médecin traitant. En outre, permette à un travailleur de changer de médecin en raison du fait il n’a pas été informé pourrait constituer un mode de contestation prévu à la loi et conduirait à une surenchère inacceptable.

 

Boivin et Centre communautaire juridique Estrie, 2015 QCCLP 1456.

Pour le tribunal, l’obligation d’information du médecin qui a charge n’a pas d’impact sur le contenu du rapport ni sur son caractère liant. En l’espèce, la travailleuse a obtenu le rapport d’évaluation médicale ultérieurement, ce qui lui a permis de contacter la CSST et de faire valoir que le niveau dorsal n’avait pas été évalué. Le tribunal rejette donc la prétention de la travailleuse voulant que puisqu’elle n’aurait pas été informée par le médecin qui a charge du rapport d’évaluation médicale, celui-ci devrait être annulé de même que la décision qui y fait suite. 

 

Voir également :

Gendron et Transport Week N inc. (F), C.L.P. 305153-04-0612, 9 décembre 2009, J. A. Tremblay.

Suivi :

Révision accueillie sur un autre point,19 juillet 2010, Monique Lamarre.

Bouchard et Marlin Chevrolet Oldsmobile, C.L.P. 387069-31-0908, 27 octobre 2010, Monique Lamarre.

Bernard et Constructions Scandinaves inc., 2012 QCCLP 2618.

Habitations JM Lambert et Alta ltée, 2014 QCCLP 6113.

Morneau et R.T.C. Garage, 2014 QCCLP 7018.

Suivi : 

Révision rejetée, 2016 QCTAT 3468.

Tafisa Canada inc. et Vallerand, 2015 QCCLP 253.

L'obligation d'informer constitue une exigence de fond

Brière et Vinyle Kaytec inc.,C.L.P. 215828-62A-0309, 18 juin 2004, J. Landry.

En vertu du dernier alinéa de l’article 203, le médecin qui a charge du travailleur a l’obligation d’informer ce dernier sans délai du contenu de son rapport. En l’espèce, considérant le défaut du médecin d’avoir respecté cette obligation et l’ignorance du travailleur quant au contenu de ce rapport, ce dernier ne peut être liant « car il y a violation de l’article 203 de la loi et de sa finalité sous-jacente, soit celle du droit du travailleur de choisir le médecin de son choix et d’être informé du contenu du rapport final de ce dernier. » En conséquence, la procédure d’évaluation médicale est irrégulière, et la décision de capacité qui en découle est prématurée et doit être annulée. 

 

Brochu et Groupe Optivert,C.L.P. 184035-05-0205, 7 février 2007, F. Ranger.

Le 6 décembre 2001, le médecin qui a charge complète un rapport d’évaluation médicale dans lequel il détermine une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles en tenant compte d’une arthrose fémoro-patellaire attribuable à une condition personnelle. Le 9 janvier 2002, la CSST demande une correction au médecin qui a charge, car le diagnostic retenu pour la lésion professionnelle est une déchirure méniscale interne du genou droit et statut post-méniscectomie. La CSST invite alors le médecin à préciser les limitations fonctionnelles du travailleur en regard des seuls diagnostics retenus en lien avec la lésion professionnelle. Le 21 janvier, sans revoir le travailleur ni même discuter avec lui, le médecin qui a charge fait suite à la demande de précision de la CSST et confirme que les limitations fonctionnelles sont principalement reliées à sa condition personnelle et aucunement en relation avec les diagnostics retenus. Le 30 janvier, le travailleur est informé par la CSST, d’une part, de l’évaluation effectuée par son médecin et, d’autre part, que la CSST le juge capable, à compter du 1er février, de réintégrer son emploi et qu’elle cessera de lui verser l'IRR. S’il est vrai que le travailleur était porteur d’une condition personnelle avant de subir son accident du travail, il appert également que cet événement a aggravé cette arthrose patello-rotulienne. Par sa démarche, la CSST a privé le travailleur de la possibilité de faire reconnaître une situation d’aggravation de sa condition personnelle dans l’appréciation des conséquences de la lésion professionnelle. Bien qu’en principe un travailleur ne puisse contester le rapport d’évaluation de son propre médecin, en agissant sans « souci de transparence », la CSST a fait en sorte que le travailleur n’a pas été informé rapidement des changements effectués par le médecin qui a charge par rapport à son évaluation antérieure. En conséquence, le rapport d’évaluation médicale corrigé ne peut avoir d’effet liant.

 

Bergeron et Fondations André Lemaire, C.L.P. 334647-71-0712, 9 avril 2009, J.-C. Danis.

Le rapport du médecin qui a charge n’a pas de caractère liant pour deux raisons. Premièrement, l’opinion de ce dernier n’est pas étayée de telle sorte que l’on ne peut, même sommairement, la comprendre. En second lieu, le médecin n’a pas satisfait à l’obligation qu’il a, en vertu de l’article 212.1, d’informer sans délai le travailleur du contenu de son rapport. Il s’agit d’une exigence de fond compte tenu de l’incidence de l’opinion du médecin qui a charge sur les droits du travailleur. « Cette étape est le seul moment où le travailleur a l’occasion de faire valoir son point de vue et d’exercer le droit qui lui est dévolu à l’article 192 de la LATMP d’avoir recours au médecin de son choix si jamais il est en désaccord avec le contenu de ce rapport ».

 

Deschamps et Barnabé Nissan Châteauguay inc., 2014 QCCLP 6195.

Pour le tribunal, le défaut d’informer le travailleur du contenu du rapport complémentaire, contrairement aux dispositions énoncées à l’article 212.1, enlève le caractère liant de ce rapport et empêche la CSST d’être liée par son contenu. En l’espèce, comme le médecin ayant complété le rapport complémentaire n’était plus le médecin qui a charge au moment de la demande et comme il n’a pas informé le travailleur du contenu de ce rapport, la CSST ne peut être liée par l’opinion de ce médecin.

 

Voir également :

Maheu et Armoires de Chez Nous 2000, C.L.P. 396931-64-0912, 12 mai 2010, M. Lalonde.

Nadeau et Rénovation Pro-Expert inc., 2012 QCCLP 4425.

Lemieux et Otis Canada inc., 2013 QCCLP 736.

Suivi :

Révision rejetée, 2014 QCCLP 1513.

Cantin et Preverco inc., 2013 QCCLP 752.

Modification du rapport final

Erreur matérielle

Modification du rapport final acceptée

Couture et Ferme Jacmi s.e.n.c., C.L.P. 162026-03B-0105, 16 novembre 2001, G. Marquis.

Le travailleur subit un accident du travail qui lui cause notamment une fracture du fémur droit. Dans son rapport d’évaluation médicale, le médecin qui a charge conclut à une DAP de 0 % ainsi qu’à un préjudice esthétique de 10 % en raison d’une cicatrice à la cuisse droite. L’instance de révision confirme l’évaluation du DAP, mais considère prématurée l’évaluation du préjudice esthétique puisque le temps minimum prévu au Règlement sur le barème des dommages corporels est de six mois. Subséquemment, le médecin qui a charge complète un second rapport d’évaluation médicale dans lequel il modifie son opinion quant au DAP, lequel est fixé à 8 %, et ajoute un préjudice esthétique de 5 %. Il explique la modification par une nouvelle interprétation des radiographies déjà analysées ainsi que par une mesure du membre inférieur droit non pas dans son ensemble, mais plutôt en fonction des fragments proximal et distal.

Même si le médecin qui a charge modifie son avis à partir d’une réévaluation des mêmes données médicales, le tribunal reconnaît qu'il pouvait modifier son rapport concernant le pourcentage de DAP relié à la fracture du fémur droit. Son explication constitue une admission implicite d’une erreur commise dans la lecture et l’interprétation des radiographies et le travailleur ne doit pas avoir à supporter une telle faute et les conséquences importantes en résultant.

 

Teinturerie Perfection Canada inc. et Mbokila, C.L.P. 167421-72-0108, 23 mai 2002, D. Lévesque.

Le médecin qui a charge du travailleur produit un premier rapport final dans lequel il consolide la fracture du 5e orteil gauche sans atteinte permanente ni limitations fonctionnelles. Environ une semaine plus tard, il produit un second rapport final dans lequel il réfère à un diagnostic de fracture non jointe et précise que le travailleur conserve une atteinte permanente ainsi que des limitations fonctionnelles. Lors de la formulation du premier rapport final, le médecin qui a charge n’avait pas considéré la teneur du protocole radiologique disponible puisqu’il l’avait égaré. Suivant la réalisation d’une nouvelle radiographie, il a alors produit un second rapport final dans lequel il tient compte des trouvailles radiologiques. Le tribunal considère être en présence d’une situation imprévisible, inattendue, exceptionnelle et note le court délai écoulé entre les deux rapports.

 

Leguë et Serge Côté Fondation enr., C.L.P. 223740-04-0401, 15 juin 2004, J.-F. Clément.

Un médecin ne peut généralement modifier un rapport produit afin d'avantager le travailleur. Cependant, il est évident, en l'espèce, que le premier rapport complémentaire émis par le médecin du travailleur l'a été à la suite d'une erreur. En effet, en se disant d'accord sur tous les points retenus par le médecin de la CSST, il se trouvait à contredire drastiquement son opinion, notamment quant à la nécessité d'une chirurgie et quant aux limitations fonctionnelles, et ce, alors qu'il n'avait pas revu le travailleur. D'ailleurs, dans son deuxième rapport complémentaire, le médecin utilise l'expression « erratum ». Il précise également que les nouvelles conclusions du deuxième rapport sont faites « après vérification du dossier ». Le tribunal estime que, lors du premier rapport, le médecin s'est possiblement mépris sur le travailleur concerné ou alors il ne se souvenait plus du contenu du dossier et ne l'a pas consulté. Cette erreur du médecin ne doit pas pénaliser le travailleur et, en conséquence, le premier rapport complémentaire doit être écarté et le second doit être retenu.

 

Vandette et Habitation Terrasse St-Michel ltée, C.L.P. 284515-71-0603, 18 avril 2007, F. Juteau.

Le travailleur subit une lésion professionnelle qui lui cause un trouble de stress post- traumatique ainsi qu’une dépression. Dans son rapport final du 8 septembre 2005, la médecin qui a charge consolide la lésion à cette date sans atteinte permanente ni limitation fonctionnelle. Par la suite, la CSST rend une décision par laquelle elle détermine que le travailleur a la capacité d’exercer son emploi prélésionnel de gestionnaires d’immeubles. Le travailleur conteste cette décision et produit une lettre du 26 février 2007 de sa médecin qui corrige son rapport final initial. Elle identifie dorénavant une limitation fonctionnelle, soit l’impossibilité d’exercer un emploi dans ce milieu de travail compte tenu des exigences requises et de la fragilisation émotionnelle résultant du stress post-traumatique.

Dans sa lettre, la médecin qui a charge précise avoir complété son rapport final à la suite d’une consultation avec le médecin de la CSST et avoir compris que les limitations fonctionnelles devaient être établies en relation avec le travail en général. C’est dans ce contexte qu’elle avait indiqué que le travailleur ne conservait pas de limitations fonctionnelles, mais elle avait clairement spécifié que le travailleur ne pouvait continuer de travailler dans son milieu compte tenu des exigences de l’emploi et de la fragilisation émotionnelle résultant de la lésion professionnelle.

La possibilité pour le médecin qui a charge de modifier son rapport final doit être examinée avec beaucoup de sérieux étant donné l’effet liant de cette opinion. Elle ne doit pas permettre au travailleur de faire de façon détournée ce que la loi ne lui permet pas de faire, soit de contester l’opinion de son médecin. Seules des circonstances exceptionnelles peuvent permettre un amendement au rapport final du médecin qui a charge, notamment lorsqu’il admet avoir commis une erreur. En l’espèce, la médecin du travailleur admet dans sa lettre avoir commis une erreur lors de la rédaction de son premier rapport médical final en raison d’une mauvaise compréhension de la notion de limitations fonctionnelles et la teneur de sa lettre est corroborée par le témoignage crédible du travailleur. L’ensemble de la preuve permet de conclure que le travailleur ne cherche pas à contester indirectement l’opinion de son médecin, mais plutôt à faire valoir la nature réelle de son opinion. Le rapport final est modifié afin de retenir que le travailleur conserve une limitation fonctionnelle de nature psychologique le rendant incapable d’exercer son emploi prélésionnel.

 

Voir également :

Gauthier et Bar Bellevue 1998, 2013 QCCLP 7427.

Modification du rapport final refusée

Paul et Épicerie Guilbert et Lacasse (fermé), C.L.P. 114450-07-9904, 31 mars 2003, M. Langlois.

Dans son rapport complémentaire du 21 septembre 2001, le médecin qui a charge du travailleur s’est dit d’accord avec les conclusions du médecin désigné de la CSST quant à l’absence d’atteinte permanente et de limitations fonctionnelles. Ce rapport complémentaire constituait des lors le rapport final du médecin qui a charge. Le 6 mai 2002, ce dernier rédige un nouveau rapport final dans laquelle il énonce que le travailleur conserve une atteinte permanente ainsi que des limitations fonctionnelles. À l’audience, il soumet que c’est par manque d’expérience qu’il a souscrit à ces conclusions.

En l’espèce, le médecin traitant ne pouvait, après avoir complété son rapport complémentaire, le contredire et lier la CSST par ses nouvelles conclusions. La jurisprudence a énoncé à plusieurs reprises qu’un rapport final ne pouvait être modifié que dans les cas d’une erreur d’écriture ou lorsqu’il y a un changement d’opinion médicale fondée sur une évolution inattendue de l’état du travailleur. Par conséquent, la CSST était liée par le rapport complémentaire du 21 septembre 2001.

 

Gérald Paquette Entrepreneur Électricien & Associés inc. et Gauthier, C.L.P. 237681-64-0406, 11 mai 2006, J.-F. Martel.

Le chirurgien du travailleur, reconnu comme étant le médecin qui a charge de ce dernier, produit un rapport final dans laquelle il retient des limitations fonctionnelles temporaires. Il réitère que les limitations sont temporaires à l’occasion d’un bilan téléphonique intervenu avec le médecin régional de la CSST. À la suite d’une décision déterminant que le travailleur a la capacité d'exercer son emploi, celui-ci demande à son médecin de famille de contacter le chirurgien traitant afin qu'il révise les limitations fonctionnelles. Un rapport d’évolution est alors produit par le chirurgien traitant dans lequel il énonce que le travailleur ne peut plus monter dans les échelles ni marcher sur des terrains inégaux. Le tribunal constate que le rapport d’évolution ne rapporte aucun examen objectif, ne propose aucun nouveau traitement, ne décrit aucune limitation fonctionnelle et ne contient aucune explication concernant le changement d’opinion. Il se limite à rapporter les dires du travailleur. La preuve ne démontre pas qu'un nouvel examen a eu lieu ou non, mais révèle que le rapport d’évolution a été rédigé à l’insistance du travailleur et de son médecin de famille afin de permettre de faire annuler le rapport final. Il ne s’agit pas d’un cas où le médecin qui a charge prétend avoir commis une erreur et l’absence de preuve médicale subséquente à son rapport final ne permet pas de justifier son changement d’opinion. On ne peut permettre au travailleur de contester indirectement l'opinion de son médecin. Le rapport d’évolution ne peut donc lier le tribunal, pas plus qu’il ne liait la CSST.

 

Fournier et Habitations HPR inc., 2011 QCCLP 4933.

La CSST détermine que le travailleur a la capacité d’exercer son emploi prélésionnel malgré les limitations fonctionnelles retenues par son médecin qui a charge. À la suite d’une visite médicale requise par le travailleur, le médecin qui a charge émet de nouvelles limitations fonctionnelles. Or, à aucun moment il n’indique ou n’explique avoir commis une erreur dans l’appréciation de l’état du travailleur ou quant à la détermination des limitations fonctionnelles lors de la rédaction de son rapport d’évaluation médicale. L’ajout de limitations fonctionnelles basées sur les mêmes constatations médicales ne peut justifier un amendement au rapport final. Le médecin qui a charge ne peut justifier l’ajout de limitations fonctionnelles par le fait qu’il n’a appris que postérieurement à l'émission du rapport d’évaluation médicale les exigences physiques de l’emploi du travailleur. En conséquence, le motif invoqué par le médecin qui a charge ne peut constituer une circonstance particulière et exceptionnelle et les limitations fonctionnelles liantes aux fins de déterminer la capacité du travailleur d’exercer son emploi prélésionnel sont celles émises dans le rapport d’évaluation médicale initial.

 

Évolution inattendue de la condition

Modification du rapport final acceptée

Lévesque et C.H. Robert Giffard, C.L.P. 250754-32-0412, 13 octobre 2005, L. Langlois.

Dans son rapport d’évaluation médicale du 22 septembre 1997, le médecin qui a charge considère que la lésion professionnelle, soit une tendinite sévère pour laquelle une acromioplastie a été pratiquée, entraîne une atteinte permanente ainsi que des limitations fonctionnelles. Le 17 février 1998, la CSST détermine un emploi convenable chez l’employeur. Ne pouvant croire qu’il demeurerait toujours avec de telles restrictions, vers la fin d’octobre 1997, le travailleur débute un programme d’entraînement avec l’aide d’un éducateur physique, et ce, à raison d’une heure et demie par jour. Il suit ce programme assidûment à l’exception d’une année pendant laquelle il était en dépression. À compter du printemps 2003, le travailleur considère qu’il a complètement récupéré et recommence la pratique des sports qu’il exerçait avant son accident du travail. Le 4 mai 2004, le travailleur est informé par son employeur que l’emploi convenable qu’il occupe sera aboli et qu’il devra occuper un autre emploi qui respecte ses limitations fonctionnelles ou être mis à pied. Le 7 juin, le médecin qui a charge du travailleur pose un diagnostic de tendinite de l’épaule améliorée et prévoit effectuer une nouvelle évaluation. Dans son rapport d’évaluation médicale du 16 juillet, il est noté que la symptomatologie est disparue, que l’examen clinique est tout à fait normal, que les amplitudes articulaires mesurées sont complètes et que les limitations fonctionnelles devraient être retirées. En outre, le travailleur n’a fait l’objet d’aucun suivi médical depuis le premier rapport d’évaluation médicale.

Il faut procéder à l’analyse des faits et circonstances ayant mené à la modification de l’opinion du médecin afin de bien apprécier la validité de la seconde opinion. Les circonstances doivent être suffisamment sérieuses pour que l’on retienne la seconde opinion. En l'espèce, la preuve, tant factuelle que médicale, démontre que l’état de santé du travailleur a connu une évolution exceptionnelle et inattendue sept ans suivant la reconnaissance de limitations fonctionnelles, et ce, à force d’efforts soutenus et d’une discipline à toute épreuve. De plus, par la nature de son examen, le médecin qui a charge n’a pas rempli de rapports de complaisance. Le tribunal conclut que la lésion professionnelle n’entraîne plus de limitations fonctionnelles à compter du 16 juillet 2004.

 

Théroux et Fer & Métaux Américains S.E.C., C.L.P. 376049-31-0904, 30 septembre 2009, J.-L. Rivard.

Le 21 avril 1994, le travailleur subit une lésion professionnelle, soit une brûlure à l'avant-bras gauche. Le 11 mai, son médecin produit un rapport final dans lequel il conclut à l'absence d'atteinte permanente. Dans le cadre de l'évaluation d'une autre lésion professionnelle effectuée en juin 2008, un nouveau médecin constate que le travailleur présente une cicatrice visible à l'avant-bras gauche, pour laquelle il accorde une atteinte permanente de 3 % pour cicatrices vicieuses. La CSST refuse de donner suite à cette évaluation. Le médecin qui avait procédé à la rédaction du rapport final en 1994 modifie ce rapport final le 26 août 2009, reconnaît son erreur et accorde une atteinte permanente au travailleur. La CSST déclare être liée par le rapport final initial et ajoute que la demande de révision du travailleur quant à l'évaluation médicale faite par son propre médecin est irrecevable.

Exceptionnellement, il est possible de corriger les conclusions médicales du médecin qui a charge. Une telle circonstance exceptionnelle a été démontrée puisque, d’une part, le travailleur a présenté une évolution au niveau de sa cicatrice qui peut être qualifiée d’inattendue et que, d’autre part, le médecin qui a charge a procédé à la rédaction du rapport final moins de trois semaines après la survenance de la brûlure alors que le minimum requis en respect du Règlement sur le barème des dommages corporels est de six mois. Au surplus, le médecin qui a charge a reconnu son erreur. En conséquence, le travailleur conserve une atteinte permanente de 3 % en raison d’une cicatrice visible.

 

Hartl et Via Rail Canada inc., 2011 QCCLP 3528.

En 2004, le travailleur subit une lésion professionnelle qui lui cause une lésion au poignet droit à la suite de laquelle il conserve des séquelles permanentes. Le 9 juin 2006, un nouvel orthopédiste devient le médecin qui a charge du travailleur en lien avec une nouvelle lésion à l’épaule droite. Le 31 mai 2008, ce médecin produit une expertise concluant à l’absence de séquelles objectivables et recommande l’abolition des limitations fonctionnelles émises à la suite de la lésion professionnelle survenue en 2004. Le travailleur demande à la CSST l’annulation des limitations fonctionnelles et sa demande est jugée irrecevable.

L’expertise de 2008 résulte d’un examen du travailleur sensiblement différent de celui dont il était question dans le rapport d’évaluation médicale produit à la suite de la lésion professionnelle de 2004. En effet, il est noté l’absence de symptomatologie au poignet ainsi qu’une force de préhension symétrique, laquelle a été mesurée à l’aide d’un dynamomètre. En conséquence, le médecin énonce clairement qu’il retire les limitations fonctionnelles antérieurement reconnues et motive son avis à ce sujet. Cet examen normal démontrant une évolution inattendue de la condition du travailleur constitue un fait essentiel nouveau. Il ne s’agit pas d’un rapport de complaisance. Conséquemment, il y a lieu de reconsidérer la décision de la CSST et de déclarer que le travailleur ne conserve plus de limitations fonctionnelles des suites de sa lésion professionnelle de 2004, et ce, à compter du 31 mai 2008.

 

Modification du rapport final refusée

Rivard et Hydro-Québec, C.L.P.212822-61-0307, 22 mars 2004, G. Morin.

Dans son rapport final du 14 septembre 2000, le médecin qui a charge détermine que le travailleur conserve une atteinte permanente de 42,90 % ainsi que des limitations fonctionnelles. Suivant ce rapport, la CSST conclut que le travailleur n’a pas la capacité d’exercer son emploi prélésionnel et détermine un emploi convenable. Le travailleur exerce l’emploi convenable pratiquement une année et, alléguant une amélioration de son état de santé, requiert la CSST de modifier la décision ayant statué sur son incapacité à exercer son emploi prélésionnel et de déclarer qu’il a la capacité de l’exercer. En plus de son témoignage voulant que la condition de ses épaules se soit améliorée, il produit des lettres de son médecin qui a charge. Dans la lettre du 8 janvier 2003, il confirme une amélioration au niveau de la force et de la mobilité d’une épaule, mais les degrés d’amplitude ainsi que le poids pouvant être manipulé ne sont aucunement précisés. De plus, le médecin est d'accord avec un essai pour exercer l’emploi prélésionnel. Quant à la lettre du 17 décembre 2003 énonçant que le travailleur peut retourner à son emploi prélésionnel, la preuve révèle qu’elle a été formulée à la demande expresse du travailleur, puisque que l’employeur était d’avis que les limitations fonctionnelles n’avaient pas été retirées.

Le médecin qui a charge peut produire un nouveau rapport final uniquement pour corriger une erreur matérielle manifeste ou pour émettre une nouvelle conclusion médicale suivant le constat d'une évolution exceptionnelle et inattendue de l’état du travailleur, tel le retrait des limitations fonctionnelles. Cette évolution doit être sans aucune équivoque et le médecin doit énoncer clairement qu’il retire, en tout ou en partie, les limitations fonctionnelles antérieurement reconnues et non pas formuler une opinion concernant la capacité du travailleur à exercer son emploi. Avant de modifier son rapport final, le médecin doit s’assurer d’avoir toutes les données pertinentes et nécessaires et sa nouvelle conclusion doit être supportée par un examen physique et non pas reposer sur une simple impression énoncée en des termes peu convaincants. En l’espèce, l’opinion formulée par le médecin qui a charge dans ses deux lettres ne respecte pas ces exigences et ne peut être considérée comme étant un nouveau rapport final concluant à l’absence de limitations fonctionnelles. De plus, « cette opinion n’est pas motivée par des considérations de nature médicale objectives ».

 

Lachance et Gestion Loram inc., [2004] C.L.P. 1015.

En respect du rapport d’évaluation médicale produit par le médecin ayant charge concernant, un accident du travail subi par le travailleur en 1989, la CSST détermine qu’il conserve un préjudice esthétique de 3 % pour une cicatrice cornéenne, mais qu’il ne présente aucune limitation fonctionnelle. En 2002, le travailleur présente une réclamation pour une RRA. Suivant la décision de la révision administrative confirmant le refus de cette réclamation, l’ophtalmologiste amende en 2004 son rapport d’évaluation initial en y ajoutant une limitation fonctionnelle reliée à la photophobie, laquelle est incompatible avec le travail de soudure. Considérant cette nouvelle limitation fonctionnelle, le travailleur est d’avis qu’il n’a pas la capacité d’exercer son emploi prélésionnel. La jurisprudence a « reconnu qu’un rapport émis par erreur ne devrait pas être retenu dans la mesure où l’erreur est dûment prouvée et qu’il ne s’agit pas d’une façon indirecte pour un travailleur de contester un rapport de son médecin ». Dans toutes ces décisions, le tribunal exige cependant des circonstances particulières et une preuve particulièrement étoffée et appuyée sur le plan médical, soit la probabilité d’une erreur, la tenue d’un nouvel examen médical, une amélioration tout à fait exceptionnelle ainsi que des éléments sérieux et démontrés au dossier.

En l’espèce, il ne s’agit pas d’une évolution inattendue de la pathologie car le constat d’éblouissement figure au rapport d’évaluation médicale initial. Quant à la possibilité d’une erreur, un simple changement d’opinion, sans nouvel examen, basé sur les mêmes constats médicaux ne constitue pas une correction d’une erreur matérielle comme le définit la jurisprudence. De plus, l’ophtalmologiste n’explique aucunement les motifs justifiant la correction apportée au premier rapport d’évaluation médicale, si ce n’est pour accommoder le travailleur dans sa réclamation. Le tribunal ne peut donc conclure à une erreur matérielle justifiant le médecin qui a charge de corriger son rapport d’évaluation médicale 14 ans plus tard. La requête du travailleur voulant qu’il soit incapable d’effectuer son emploi étant donné la limitation fonctionnelle additionnelle décrite dans le rapport d’évaluation médicale amendé est rejetée.

 

Beaulieu et Marché Sabrevois inc.,C.L.P. 272835-62-0510, 24 octobre 2006, L. Couture.

En mars 2005, période pendant laquelle le travailleur subit des traitements de chimiothérapie pour un cancer, le médecin qui a charge du travailleur produit un rapport d’évaluation médicale dans lequel il énonce que l’entorse dorsale aiguë n’entraîne aucune limitation fonctionnelle. Le 7 septembre 2005, il produit un rapport d’évaluation médicale corrigé dans lequel il mentionne qu’en raison de la condition médicale du travailleur, il est actuellement impossible de déterminer les limitations reliées à la lésion professionnelle. Le 11 août 2006, le médecin qui a charge produit un rapport d’évaluation médicale intitulé « Amendement final » dans lequel il indique que, contre toute attente, le travailleur est en rémission de son cancer et conclut qu’il conserve des limitations fonctionnelles qu’il décrit. Ces circonstances particulières ne correspondent pas à une évolution exceptionnelle et inattendue de l’état de santé du travailleur. La modification contenue au rapport d'évaluation médicale de septembre 2005 n'est aucunement expliquée, d'autant plus que le tribunal constate l’absence d’une visite médicale à cette époque. Quant à l’amendement final d’août 2006, il est fait à la demande du travailleur, mais le médecin n’explique nullement les raisons pour lesquelles il trouve pertinent de modifier de nouveau ce rapport. Le médecin qui a charge n’a jamais réservé son opinion, eu égard à l’évolution du cancer du travailleur, et si son opinion concernant les limitations fonctionnelles avaient changé en raison de la réponse du travailleur au traitement de chimiothérapie, il aurait dû le mentionner. En l’absence d’explication convaincante expliquant le changement d’opinion, le tribunal est lié par le premier rapport médical final qui conclut à l’absence de limitations fonctionnelles.

 

Centre Petite Enfance la Salopette et Binet, 2011 QCCLP 1080.

Le 10 novembre 2009, le médecin qui a charge de la travailleuse complète un rapport final confirmant qu’elle conserve une atteinte permanente, mais aucune limitation fonctionnelle. Le 6 janvier 2010, la travailleuse chute et s’inflige une nouvelle torsion du genou. Le 12 janvier 2010, sans faire référence à cette chute, le médecin produit un second rapport final réitérant l’existence d’une atteinte permanente et l’inexistence de limitations fonctionnelles. Le 25 janvier 2010, il complète un rapport d’évaluation médicale dans lequel il détermine l’atteinte permanente et reconnaît l’existence de limitations fonctionnelles.

Il faut procéder à une analyse des faits et des circonstances qui ont conduit le médecin à modifier son rapport final pour bien apprécier la validité de sa nouvelle opinion, laquelle doit être fondée sur une preuve convaincante et non pas sur une quelconque complaisance à l’égard du travailleur qui réclame une nouvelle opinion. La production d’un nouveau rapport final ne doit pas constituer un moyen utilisé par le travailleur pour faire indirectement ce que la loi ne lui permet pas de faire, soit contester l’opinion de son médecin. Lors de la modification de son rapport, le médecin qui a charge n’a pas indiqué qu’il s’agissait de corriger une erreur manifeste commise lors de ses premières évaluations et rien n’indique qu’il a tenu compte d’une évolution exceptionnelle et inattendue de la condition de la travailleuse. Le médecin ne motive aucunement son changement radical d’opinion et le tribunal s’interroge sur sa nouvelle conclusion puisqu’il fait abstraction de la chute survenue en janvier 2010 et de l’impact en résultant. La CSST n’était donc pas lié par ce dernier rapport.