Interprétation

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. 204. Désignation du professionnel de la santé par la Commission

Possibilité de faire examiner le travailleur en tout temps

La jurisprudence établit qu’aux termes de l’article 204, la CSST peut exiger à tout moment que le travailleur se soumette à l’examen du professionnel de la santé qu’elle désigne. Cette possibilité existe même si le médecin qui a charge n’a pas fourni à la CSST un rapport médical.

Patel et All Type Forwarders, C.L.P. 129145-71-9912,14 novembre 2001, J.P. Arsenault.

Alors qu’antérieurement le médecin qui a charge avait fourni à la CSST les informations médicales demandées, à la suite d’une nouvelle demande, il ne transmet aucun rapport médical. La loi prévoit que la CSST peut exiger ces informations afin de poursuivre le traitement d’une réclamation. Lorsque le médecin qui a charge d’un travailleur néglige ou refuse de fournir l’information médicale qu’il doit fournir conformément à la loi, la CSST peut se prévaloir de l’article 204 afin de requérir du travailleur qu’il se soumettre à l’examen du professionnel de la santé qu’elle désigne.

Riendeau et Ministère des Transports, C.L.P. 214611-62B-0308, M.D. Lampron, 28 janvier 2004.

À la suite d’une décision reconnaissant une relation entre le nouveau diagnostic de hernie discale et l’événement, la CSST demande que le travailleur soit évalué par son médecin désigné. C’est en vertu de l’article 204 qu’un tel examen est exigé et afin de le justifier, il n’était pas nécessaire que le contexte médical ou factuel change. L’article 204 autorise la CSST à demander un rapport écrit sur toute question relative à la lésion et la loi ne fixe aucune limite de temps. Il n’y avait donc rien d’illégal dans la demande formulée par la CSST relativement aux cinq sujets médicaux énoncés à l’article 212.

Suivi :

Requête en révision judiciaire rejetée, C.S. Saint-Hyacinthe, 750-17-000542-0407, 7 décembre 2004, J. Dufresne.

Larue et C-Mac Network System (fermé), [2004] C.L.P. 1634.

L’article 204 n’impose aucun délai à la CSST afin qu’elle puisse exiger d’un travailleur qu’il se soumette à l’examen du professionnel de la santé qu’elle désigne. Antérieurement à la modification législative de 1992, la CSST devait obtenir de son professionnel de la santé un rapport infirmant les conclusions du médecin qui a charge, et ce, dans un délai de 30 jours de la date du rapport qu’elle désirait contester. L’intention du législateur lors de cette modification législative était de permettre à la CSST de contester les conclusions du médecin qui a charge à tout moment dans le cours d’une réclamation.

Hamza et MRC Gros fruits Canadawide inc., C.L.P. 409115-71-1004, 22 décembre 2010, J.-F. Martel.

En vertu de l’article 204, la CSST peut exiger à tout moment qu’un travailleur se soumette à un examen par un médecin qu’elle désigne. L’exercice de ce droit de la CSST n’est soumis à aucun délai et celle-ci peut attendre le moment qui lui paraît opportun pour ce faire. Elle doit toutefois faire preuve de diligence raisonnable. Ainsi, elle n’est pas tenue de requérir un tel examen dès qu’un nouveau diagnostic est posé et peut décider du moment propice pour ce faire.

S… R… et Compagnie A, 2011 QCCLP 2363.

L’employeur peut exiger que le travailleur se soumette à un examen uniquement lorsque le médecin qui a charge fournit un rapport à la CSST sur un ou plusieurs des sujets énoncés à l’article 212. L’article 204 n’impose pas une telle contrainte à la CSST.

Granit Design inc. et Raycraft, 2012 QCCLP 3679.

La loi ne prévoit pas de délai quant à la possibilité pour la CSST de requérir un rapport écrit d’un médecin qu’elle désigne et il n’appartient pas au tribunal de modifier les dispositions applicables. Contrairement à l’employeur qui doit agir dans les 30 jours suivant la réception de l’attestation ou du rapport qu’il désire contester, la CSST n’est pas contrainte à agir dans un délai déterminé. 

Rapport sur toute question relative à la lésion

L'article 204 autorise la Commission à obtenir un rapport sur toute question relative à la lésion.  

Agromex inc. (division viandes abattage), C.L.P. 401212-62B-1002, 30 mars 2010, M. Watkins.

La travailleuse subit un accident du travail qui lui cause une lacération à deux doigts de la main gauche. Un nouveau diagnostic de dépression secondaire est par la suite émis par le médecin qui a charge. Le médecin désigné de l’employeur est d’avis que la lésion physique est consolidée avec atteinte permanente et que la dépression est attribuable à une condition personnelle, laquelle constitue une maladie intercurrente. Alors que la CSST n’a pas encore rendu de décision sur la relation entre le nouveau diagnostic de dépression et l’événement, elle requiert de son médecin désigné, psychiatre, un avis sur les cinq sujets médicaux énoncés à l’article 212 ainsi que sur l’existence d’une relation entre le diagnostic de dépression et le fait accidentel.

Subséquemment à l’avis du BEM concernant la lésion physique, le médecin désigné par la CSST émet l’opinion voulant que le diagnostic à retenir est un trouble de l'adaptation, qu’aucune psychopathologie n’est active et qu’il y a absence de lien causal entre la lésion physique et la dépression. En conséquence, la CSST rend une décision concluant à l’absence de relation entre le diagnostic de dépression et l’événement.

La CSST pouvait rendre une décision reconnaissant ou refusant le nouveau diagnostic de dépression sans recourir à l’opinion d’un médecin désigné au sens de l’article 204. Cependant, rien ne lui interdisait de procéder comme elle l’a fait et l’article 204 lui permet d’obtenir une opinion concernant l’existence d’une relation entre la dépression et le fait accidentel. Il s’agit certainement d’un moyen pour la CSST d’obtenir un rapport sur « toute question relative à la lésion » tel que mentionné à cet article, et ce, alors qu’elle s’interroge sur la possibilité qu’une composante psychologique puisse s’être ajoutée à la lésion professionnelle reconnue.