Interprétation restrictive
Le pouvoir de reconsidération prévu à l’article 365 LATMP est exceptionnel et doit être interprété de façon restrictive.
- Lemire et Magasins Lecompte inc.,C.L.P. 341156-04B-0802, 2 octobre 2008, A. Quigley.
Le pouvoir de reconsidération que possède la Commission constitue une atteinte au principe de la stabilité et de l’irrévocabilité des décisions et doit être interprété de façon restrictive.
- Commission scolaire de l’Énergie et Robitaille, 2013 QCCLP 819.
L’article 365 est interprété de façon restrictive puisqu’il fait exception à deux règles fondamentales, soit l’irrévocabilité des décisions et la règle du functus officio.
- Millares et Résidence Pierre-Joseph-Triest, 2019 QCTAT 318.
Le pouvoir de reconsidérer une décision porte atteinte aux principes de stabilité et d’irrévocabilité des décisions et au droit du justiciable à la sécurité juridique de celles-ci. Une interprétation trop libérale de ce pouvoir d’exception contrevient à ces principes. Il doit donc être interprété de façon restrictive.
- Quantum – Location d’entrepôt, atelier, usine et Lopez Gonzalez, 2021 QCTAT 273.
L’article 365 LATMP doit être interprété de façon restrictive puisqu’il porte atteinte au principe de la stabilité et de l’irrévocabilité des décisions.
Voir également :
Centre hospitalier de l’Université de Montréal et St-Hilaire, 2018 QCTAT 1939.
Reconsidération d'une décision reconsidérée
Il a déjà été décidé que la Commission pouvait reconsidérer une même décision à plus d'une reprise.
- Lavoie et Béton Barette inc., 2015 QCCLP 5217.
Rien dans la Loi n’empêche la Commission de reconsidérer plusieurs fois la même décision.
La position contraire, suivant laquelle une même décision ne peut faire l'objet de plusieurs reconsidérations, a aussi déjà été retenue.
- G.L. et Compagnie A, 2011 QCCLP 4951.
Le pouvoir de reconsidération prévu à l’article 365 LATMP est un pouvoir d’exception et la loi ne prévoit pas la possibilité d’utiliser cette reconsidération à l’égard d’une décision rendue en vertu de ce même article 365 LATMP. Il faudrait alors élargir la portée de l’article 365 LATMP, ce qui est impossible puisqu’il doit être interprété de façon restrictive.
Corriger toute erreur
Délai
Si la Commission désire reconsidérer une décision pour corriger toute erreur, elle doit le faire dans les 90 jours suivant la date où la décision est rendue.
- Vallée et Construction & rénovation M. Dubeau inc., 2016 QCTAT 4375.
Le premier alinéa de l’article 365 ne peut pas être appliqué puisque le délai de 90 jours pour reconsidérer la décision est expiré depuis quelques mois.
Suivi:
Révision rejetée, 2017 QCTAT 2907.
- Plourde et Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (Production semences et plants), 2021 QCTAT 2414.
La Commission ne pouvait reconsidérer la décision selon le premier alinéa de l’article 365 au mois de mars 2018, puisqu’il s’était écoulé plus de 90 jours suivant l’émission de la première décision, soit l’avis de paiement du 25 juillet 2017.
- N.H. et Restaurant A, 2022 QCTAT 1825.
La Commission peut reconsidérer de son propre chef une décision antérieure afin de corriger toute erreur, si elle le fait dans un délai de 90 jours à partir de la décision initiale. En l’espèce, la demande de reconsidération afin de corriger l’erreur d’écriture touchant la détermination du pourcentage de l’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique est manifestement hors délai, ayant été produite le 3 novembre 2020 alors que la décision initiale est datée du 17 décembre 2001.
La notion d'erreur
La Commission peut, de sa propre initiative, corriger toute erreur qu’elle a commise dans les 90 jours suivant sa décision, tant que celle-ci n’a pas fait l’objet d’une décision de la révision administrative selon l’article 358.3 LATMP.
- Inter-Cité Construction ltée et Dufour, C.L.P. 262729-09-0505, 28 septembre 2005, G. Tardif.
Puisque l’article 365 LATMP permet à la Commission de corriger l’erreur de fait et l’erreur de droit, il permet aussi de corriger les erreurs matérielles, les lapsus ainsi que les erreurs manifestes dans l’expression de son intention. Cela inclut l’erreur qui se trouve dans le dispositif de la décision.
Deux approches se dégagent de la jurisprudence pour la notion de « toute erreur ».
La premier courant commande une interprétation large de la notion de « toute erreur » et comprend l’erreur subjective ou le changement d’opinion. La Commission n’a alors pas besoin de faire la preuve d’une erreur objective de faits ou de droit.
- Aubé & Aubé inc. et Delaunois, C.L.P. 163926-32-0106, 30 janvier 2003, G. Tardif.
L’expression « toute erreur » commande une interprétation large et exhaustive qui permet la correction de tous les types d’erreurs, incluant l’erreur d’appréciation de faits, tant que la Commission exerce son pouvoir dans un délai de 90 jours suivant le jour où la décision initiale a été rendue. Elle peut donc réviser l’erreur commise lors de la décision initiale relative à l’appréciation du lien de causalité entre l’incident décrit par le travailleur et les pathologies.
- Desjardins et Revêtements MD inc., C.L.P. 213647-31-0308, 4 février 2004, J.-L. Rivard.
Les termes « toute erreur » comprennent tous les types d’erreur, incluant celle d’appréciation des faits ou une erreur subjective. En l’espèce, c’est en conformité avec l’article 365 de la Loi que la Commission a reconsidéré l’admissibilité de la RRA basée sur le diagnostic d’arthrose post-méniscectomie, puisqu’une déchirure méniscale a été exclue, par une décision du Tribunal, lors de l’événement initial.
- Bastien et Déménagement Bye Bye Moving, C.L.P. 265253-07-0506, 6 octobre 2006, M. Langlois.
L’erreur d’appréciation de faits comprend l’erreur subjective quant à l’appréciation du bien-fondé d’une réclamation par la Commission. Il est possible pour la Commission de reconsidérer une décision après un changement d’opinion basé sur une étude plus approfondie des faits de l’affaire.
- Holtby et Paris Coiffure elle & lui (Angrignon), 2012 QCCLP 6352.
La Commission dispose d'une grande marge de manœuvre lorsqu’elle doit reconsidérer une décision avec son pouvoir de « corriger toute erreur », qui inclut l’erreur subjective.
- Boudreau et Sani-Sable LB inc., 2015 QCCLP 2174.
La Commission peut reconsidérer sa décision si elle estime avoir commis une erreur d’appréciation relativement au lien de causalité entre une chirurgie et la lésion professionnelle.
Voir également :
Café Séléna inc. et Gagné, C.L.P. 150507-71-0011, 22 octobre 2001, D. Gruffy.
Vinconneau et General Motors du Canada ltée, C.L.P. 223487-64-0312, 30 mars 2005, R. Daniel.
Pereira et Carrefour Ste-Adèle inc., C.L.P. 251680-64-0412, 25 mai 2006, M. Montplaisir.
Davila et 9135-7103 Québec inc., C.L.P. 335150-61-0712, 27 avril 2009, D. Martin.
Stelpro Design inc. et Ouellet, 2014 QCCLP 3268.
Le deuxième courant commande une interprétation plus restrictive de la notion de « toute erreur » et exige la preuve objective d’une erreur afin de donner ouverture au pouvoir de reconsidération.
- Turcotte et Hôpital la Providence, C.L.P. 178211-05-0202, 30 juillet 2002, L. Boudreault.
Bien que les termes « toute erreur » soient très larges, la Commission est quand même tenue de démontrer la présence d’une erreur au moyen d’une preuve prépondérante. Le premier alinéa de l’article 365 ne permet pas à la Commission de reconsidérer sa décision seulement parce qu’un nouvel examen de la question l’amènerait à se prononcer différemment.
- Delude et Pavillon d’Youville, 2011 QCCLP 2059.
La notion de « toute erreur » n’inclut pas une interprétation différente des mêmes faits par une seconde agente de la Commission.
- Stacey et Commission de la santé et de la sécurité du travail, 2013 QCCLP 71.
Même si le premier alinéa de l’article 365 est rédigé de façon large, le principe de stabilité des décisions commande une interprétation restrictive. Seule une erreur de fait ou de droit peut mener à une reconsidération. Le législateur ne confère pas un pouvoir de révision de novo à la Commission. Ainsi, la Commission n’a pas prouvé l’existence d’une erreur de fait ou de droit dans sa décision initiale. La décision reconsidérée, qui découle d’un changement d’opinion de la Commission, doit être annulée.
- Paquette et Acier Leroux inc., 2016 QCTAT 2742.
Il est nécessaire pour la Commission de prouver une erreur objective de fait ou de droit afin de procéder à la reconsidération. En l’espèce, l’agente de la Commission reconsidère sa décision après avoir reçu une étude de bruit chez l’employeur, faite cinq ans avant la réclamation du travailleur. Il ne s’agissait pas d’une erreur de fait et la Commission ne pouvait pas reconsidérer sa décision.
- Joseph et Services de santé Alternacare inc., 2017 QCTAT 3894.
Il est nécessaire que la Commission prouve qu’elle a commis une véritable erreur afin de pouvoir exercer son pouvoir de reconsidération. En l’espèce, la première agente d’indemnisation a rendu sa décision sans consulter le médecin-conseil. Il ne s’agit pas d’une exigence légale, ce qui fait qu’il ne s’agit pas d’une erreur de droit permettant la reconsidération. Il s’agit plutôt d’une erreur dans l’appréciation des faits, le médecin ayant apprécié différemment le lien entre le mécanisme accidentel, le résultat de la résonance magnétique et le délai d’apparition du diagnostic.
- Gicleurs de la Mauricie inc. et Pontbriand, 2018 QCTAT 2006.
Le libellé du premier alinéa de l’article 365 LATMP précise qu’il faut que la Commission ait commis « toute erreur ». Cependant, un changement d’opinion ne peut pas être qualifié d’ « erreur » de la même façon qu’une erreur de droit ou de faits. Le pouvoir de revoir une décision après un changement d’opinion relève plutôt de l’instance de révision, laquelle peut apprécier à nouveau les faits et les interpréter différemment.
- Côté et Excellence Dodge Chrysler Vaudreuil, 2021 QCTAT 1768.
Le pouvoir de reconsidération doit être interprété de façon restrictive puisqu’il constitue un accroc au principe de la stabilité des décisions. Un simple changement d’opinion ou d’interprétation n’est pas suffisant s’il n’est pas basé sur une erreur de faits ou de droit.
Voir également :
Hyprescon inc. et El Atrash, C.L.P. 263504-61-0506, 12 novembre 2007, S. Di Pasquale.
Beaulieu et Produits forestiers Anticosti inc., 2011 QCCLP 17.
S.L. et Compagnie A, 2014 QCCLP 570.
Bardeaux Lajoie inc. et Dumont, 2018 QCTAT 4094.
Bradken – Mont-Joli et Habel, 2021 QCTAT 2684.
Lachance et CH Sacré-Cœur/C. Pédopsychiatrie, 2021 QCTAT 2994.
L'existence d'un fait essentiel
Délai
La Commission peut reconsidérer une décision dans les 90 jours suivant la connaissance d’un fait essentiel. Le point de départ du délai est le moment où sont connus tous les éléments du fait essentiel et non celui où la Commission ou la partie en comprend les conséquences.
- Commission de la santé et de la sécurité du travail et Prémoulé Inc., C.A.L.P. 64272-03-9411, 23 août 1996, J.-G. Roy.
L’employeur prétend que la computation du délai ne doit se faire qu’à partir du moment où il a réalisé et compris les implications du fait essentiel invoqué. Or, la connaissance est une question de fait qui doit uniquement s’apprécier en fonction du moment où la partie est informée du fait essentiel. En ajoutant cette exigence, l’employeur ajoute au texte de l’article 365 de la Loi. La demande en reconsidération de l’employeur est hors délai.
- Ouellet et Québec (Ville de), Service de police, 2012 QCCLP 6775.
Il est important de se rappeler que le recours à la reconsidération constitue une exception au principe de la stabilité des décisions et qu’il doit être interprété en conséquence. Si le Tribunal arrive à la conclusion que le point de départ du délai est le moment où la partie comprend les implications du fait essentiel, une partie pourrait prolonger indûment le délai pour demander la reconsidération, ce qui constitue une atteinte au principe de la stabilité des décisions.
Suivi:
Révision judiciaire rejetée, 2014 QCCS 389.
Voir également :
Cameron et C.J. Picard inc., C.L.P. 190885-03B-0209, 28 janvier 2003, M. Cusson.
Villeneuve et J.B. Cadrin inc., C.L.P. 334089-02-0711, 14 juillet 2008, R. Bernard.
Aliments Martel inc. et Isabelle, C.L.P. 341537-04B-0802, 18 mars 2010, J.-F. Clément.
Après avoir été valablement saisie dans les 90 jours de la connaissance d’un fait essentiel par l’une des parties, la Commission n’est pas liée par ce même délai pour rendre la décision. Ce n’est que lorsqu’elle reconsidère la décision de sa propre initiative qu’elle est tenue de respecter le délai de 90 jours
- Cleyn & Tinker 1989 inc. (usine 2) et Laramée, C.L.P. 137706-62C-0005, 29 mars 2001, V. Bergeron.
Lorsqu’elle agit de sa propre initiative, la Commission a 90 jours pour reconsidérer sa décision. La partie qui demande la reconsidération doit également respecter ce délai quant à sa demande. Toutefois, dans ce deuxième cas, la Commission, suite à la demande d’une des parties faite valablement dans le délai de 90 jours, n’est pas lié par le délai de 90 jours pour rendre sa décision par la suite.
- Noël et Papiers NSC inc., C.L.P. 358601-04-0809-R, 30 octobre 2009, S. Sénéchal.
Lorsque la Commission exerce le pouvoir de reconsidération à la demande d’une partie, le délai de 90 jours vise le délai entre la connaissance du fait essentiel par cette partie et le moment de la demande de cette dernière. Le fait que la Commission rende la décision après ce délai de 90 jours ne rend pas celle-ci illégale.
Voir également :
Audet et Structures Derek International, s.a., 2015 QCCLP 4276.
La notion de fait essentiel
Le fait essentiel doit être inconnu au moment de la décision initiale et doit être constitué d’éléments graves, précis et concordants qui auraient donné lieu à une décision différente.
- Commission scolaire de l’Or-et-des-Bois et Higgins, C.L.P. 316121-08-0704, 27 mars 2008, P. Prégent.
Le fait essentiel doit être compris d’éléments graves, précis et concordants qui auraient pu influencer le décideur et sa décision s’ils avaient été connus au moment de la décision initiale.
- Lemire et Magasins Lecompte inc., C.L.P. 341156-04B-0802, 2 octobre 2008, A. Quigley.
Il est important que le fait essentiel soit démontré, avéré, scruté afin d’en assurer le sérieux et d’éviter de porter atteinte au principe de la stabilité et de l’irrévocabilité des décisions sans justification.
- Dupuis et Électro Dynamique 2011 inc., 2012 QCCLP 4083.
Le fait essentiel prévu au deuxième alinéa de l’article 365 de la Loi doit être inconnu de la Commission au moment où elle rend sa décision. Ceci ne comprend pas la production tardive d’élément de preuve par une partie par le fait de son inaction.
- Centre hospitalier de l’Université de Montréal et St-Hilaire, 2018 QCTAT 1939.
Le fait essentiel doit amener le décideur à reprendre la question initiale et d’arriver à une conclusion différente. Il doit donc avoir un impact réel sur la décision rendue initialement.
- Boisclair et Scellants Elastek, 2020 QCTAT 3396.
Le « fait essentiel » est caractérisé comme étant par essence, absolu, caractéristique, principal, fondamental, primordial et important. Il doit être constitué d’éléments graves, précis et concordants qui auraient donné lieu à une première décision différente.
Voir également :
Langlais et Les Carrières Ducharme inc., C.L.P. 253836-62C-0501, 17 novembre 2005, H. Rivard.
Beaudoin et Transelec/Common inc., C.L.P. 313734-04B-0702, 23 octobre 2007, L. Collin.
Dionne et Montréal (Ville de), C.L.P. 308473-63-0701, 14 décembre 2009, I. Piché.
Gallant et Meunerie RC inc., 2011 QCCLP 3336.
Guénette et Bracciale, 2015 QCCLP 2693.
Congrégation des Sœurs Notre-Dame-du-St-Rosaire et Charest, 2017 QCTAT 50.
Chassay et Centre de santé et de services sociaux de la Montagne, 2019 QCTAT 3305.
Ouazzani-Chahdi et Aliments Da Vinci ltée (F), 2020 QCTAT 1748.
Pour certains décideurs, le fait essentiel, en plus d’avoir été inconnu, devait exister au moment de la décision initiale.
- Dionne et Montréal (Ville de), C.L.P. 308473-63-0701, 14 décembre 2009, I. Piché.
La décision initiale doit être atteinte d’un vice par l’absence de prise en considération d’un fait qui n’avait pas été soumis à temps au tribunal. Or, si un fait commence à exister après la décision initiale, la Commission n’a pas commis de faute.
- CSSS Québec-Nord et Lavoie, 2011 QCCLP 3490.
Le but de l’article 365 LATMP est de remédier à une erreur qui s’est produite lors de la décision initiale. Il vise ainsi à remplacer la décision rendue par une autre qui aurait pu être rendue à la même époque que la décision initiale. Il est donc impératif que le fait ait existé au moment de la décision initiale.
- Transelec/Common inc. et Bédard, 2014 QCCLP 1037.
Le fait essentiel doit exister au moment où la Commission rend sa décision initiale. La reconsidération est une exception au principe de la stabilité et de l’irrévocabilité des décisions et se doit d’être interprété restrictivement. C’est pourquoi le législateur utilise le terme « connaissance » plutôt qu’un autre terme comme « survenance ».
Voir également :
Excellence Composites inc. et Blanchet, C.L.P. 405759-04B-1003, 27 juillet 2010, J. Degré.
Houle et Transport Dynapro inc., 2013 QCCLP 4543.
A.B. et Compagnie A, 2021 QCTAT 1024.
Pour d’autres, il n’est pas nécessaire que le fait essentiel ait existé au moment de la décision initiale, puisque cela ajouterait une condition au texte de l’article 365 LATMP.
- Lizotte et FDL Cie ltée, C.L.P. 237355-63-0406, 14 juin 2005, R. Brassard.
L’article 41 de la Loi d’interprétation indique qu’une loi qui reconnait des droits doit recevoir une interprétation large et libérale qui assure l’accomplissement de son objet. Ainsi, il est contraire à l’objet de la LATMP de rendre le recours prévu à l’article 365 plus restreint en y ajoutant une condition supplémentaire par rapport à l’existence du fait essentiel.
- Gallant et Meunerie RC inc., 2011 QCCLP 3336.
L’hypothèse selon laquelle le fait doit exister au moment de la décision initiale ajoute une condition qui n’est pas prévue à l’article 365 LATMP.
- Hartl et Via Rail Canada inc., 2011 QCCLP 3528.
L’article 365 LATMP ne prévoit pas une condition indiquant que le fait essentiel doit exister au moment de la décision initiale. Ajouter cette condition constituerait une modification au texte de loi.
- Chassay et Centre de santé et de services sociaux de la Montagne, 2019 QCTAT 3305.
La seule exigence concernant le fait essentiel prévu à l’article 365 LATMP est qu’il soit inconnu au moment où la décision initiale a été rendue et ce, peu importe qu’il ait existé à ce moment ou non.
Voir également :
Commission scolaire de l’Or-et-des-Bois et Higgins, C.L.P. 316121-08-0704, 27 mars 2008, P. Prégent.
Marcoux et Systèmes de sécurité Paradox ltée, C.L.P. 330437-64-0710, 4 septembre 2008, M. Montplaisir.
Plastiques Balcan ltée et Tang, C.L.P. 401762-71-1002, 30 juillet 2010, R. M. Goyette.
Materne et Commission scolaire de Sorel-Tracy, 2012 QCCLP 2315.
Lupu et Corps canadien des commissionnaires, 2012 QCCLP 3815.
Suivi :
Révision rejetée, 2013 QCCLP 5865.
Guénette et Bracciale, 2015 QCCLP 2693.
Leblanc et Garda (division Sherbrooke), 2016 QCTAT 2179.
Mercier et Société de l’assurance automobile du Québec, 2020 QCTAT 3715.
Air Canada et Petris, 2021 QCTAT 3262.
Réconsidération possible malgré une décision rendue à la suite d'une révision administrative
Contrairement au premier alinéa de l’article 365 de la Loi, une reconsidération est possible en vertu du deuxième alinéa même si une décision a déjà été rendue à la suite d'une révision administrative.
- Centre local de services communautaires LaSalle et Félix, C.L.P. 148793-72-0010, 1er novembre 2002, F. Juteau.
On ne peut prétendre qu’une condition s’applique si elle n’est pas expressément mentionnée dans le texte. Or, la condition d’exclusion basée sur la présence d’une décision rendue en vertu de l’article 358.3 LATMP est présente seulement dans le texte du premier alinéa. Ainsi, la CSST peut analyser une demande de reconsidération selon le deuxième alinéa de l’article 365 même si une décision en révision a été rendue.
- Récupération Cascades inc. et Gignac, C.L.P. 191801-71-0209, 30 avril 2003, C. Racine.
Le service de révision peut reconsidérer une décision si celle-ci est rendue avant que ne soit connu un fait essentiel. En effet, l’exigence portant sur l’absence d’une décision en révision selon 358.3 n’est pas présente dans le libellé du deuxième alinéa de l’article 365 LATMP. La réviseure pouvait donc reconsidérer la décision qu’elle a rendue initialement après avoir obtenu la version du travailleur concernant l’événement.
- Charron et Outillage King Canada inc., C.L.P. 258107-71-0503, 29 juillet 2005, L. Couture.
Rien à la lecture du deuxième alinéa de l’article 365 n’empêche un agent de la CSST de reconsidérer la décision malgré la présence d’une décision en révision. Chaque alinéa de l’article 365 présente des conditions d’applications distinctes permettant l’exercice du pouvoir en reconsidération si elles sont remplies. En l’espèce, le deuxième alinéa de l’article 365 ne prévoit pas la même condition d’application que le premier concernant la présence d’une décision en révision selon 358.3 LATMP. La CSST était donc en droit de reconsidérer la décision.
- Gagné et Forage 3D inc., 2019 QCTAT 489.
La jurisprudence du Tribunal prévoit que la décision peut être reconsidérée malgré la présence d’une décision rendue à la suite d’une révision administrative. En l’espèce, aucun fait essentiel inconnu n’est toutefois démontré et la reconsidération ne peut pallier au défaut du travailleur de contester la décision quant à la base salariale retenue dans les délais impartis.
Voir également :
Paquet et Coffrage Magma inc., 2011 QCCLP 1423.
Fix Auto Brossard et Groulx, 2012 QCCLP 4836.
Devoir de la Commission d'informer les parties
La Commission doit informer les personnes à qui elle a notifié une décision avant de la reconsidérer. Deux approches se dégagent de la jurisprudence quant aux conséquences du non-respect de cette obligation.
La jurisprudence majoritaire établit que le défaut d’informer les parties de la reconsidération à venir rend la décision irrégulière.
- Prévost Car inc. (division Fabtech Novabus) et Gamelin, C.L.P. 176328-62B-0201, 9 décembre 2002, Y. Ostiguy.
Le défaut de la CSST d’aviser les parties avant de corriger une erreur relative à une omission rend la décision de reconsidération irrégulière.
- Vinconneau et General Motors du Canada ltée, C.L.P. 223487-64-0312, 30 mars 2005, R. Daniel.
Le fait de ne pas aviser les parties avant de procéder à une reconsidération constitue une violation à la règle audi alterem partem, ce qui rend la décision de reconsidération irrégulière.
- Davila et 9135-7103 Québec inc., C.L.P. 335150-61-0712, 27 avril 2009, D. Martin.
Le défaut de la CSST d’informer l’employeur de son intention de reconsidérer la décision est fatal. Le législateur n’aurait pas ajouté l’obligation d’informer les parties à l’alinéa 3 de l’article 365 si celle-ci n’était pas nécessaire à l’exercice du pouvoir de reconsidération.
- G.L. et Compagnie A, 2011 QCCLP 4951.
L’omission d’informer les parties est un motif suffisant pour rendre la décision de reconsidération irrégulière.
- Millares et Résidence Pierre-Joseph-Triest, 2019 QCTAT 318.
Il est crucial d’informer les parties avant de rendre une décision en reconsidération afin que ceux-ci puissent présenter leurs observations et compléter leur dossier avant que celle-ci soit rendue. Puisque les décisions rendues par la Commission ont un impact important sur les droits des justiciables, il faut s’assurer que ces derniers puissent se faire entendre, comme le commande l’article 351 LATMP et les articles 4, 6 et 7 de la LJA. L’omission de le faire constitue une atteinte aux règles d’équité procédurale et rend la décision en reconsidération illégale.
Voir également :
Skelling et Québécor World (St-Jean), C.L.P. 362218-62A-0811, 8 septembre 2009, D. Rivard.
Arbour et Navada-Airmec ltée, 2014 QCCLP 2920.
Dufresne et Société des alcools du Québec, 2016 QCTAT 1463.
Bolduc et DRB Distribution alimentaire inc., 2020 QCTAT 1669.
Lagacé et Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, 2021 QCTAT 395.
A.B. et Compagnie A, 2021 QCTAT 1024.
Morcos et Garderie éducative Ste-Dorothée, 2021 QCTAT 4467.
Selon le courant minoritaire, il s’agit uniquement d’une formalité qui ne rend pas la décision irrégulière.
- Bergeron et Gamma Industries inc., C.L.P. 207745-31-0305, 26 février 2004, J.-L. Rivard.
La mesure prévue au troisième alinéa de l’article 365 LATMP vise à informer une partie d’un changement dans son dossier. Elle n’est pas une mesure fondamentale qui affecte la validité de la procédure suivie par la Commission. Les seules conditions obligatoires sont celles fixées au premier et deuxième alinéas.
- Intersan inc. et Lafond, C.L.P. 255337-03B-0502, 5 mai 2006, G. Marquis.
La Commission a avisé les parties de sa décision en reconsidération trois jours après avoir rendu celle-ci. Le but de l’article 365 est d’informer les parties du contenu de la décision et non de leur demander la permission de rendre cette même décision. Le fait que la Commission ait prévenu les parties postérieurement n’affecte pas la validité de la décision.
- Canadien Tire (Magasin) et GDI Services (Québec), 2017 QCTAT 3913.
L’objectif du troisième alinéa est d’aviser les parties du contenu de la décision reconsidérée, sans toutefois constituer une obligation supplémentaire à la régularité du recours.
- Raynox 2000 inc. et Guilbault-Faucher, 2020 QCTAT 1702.
Le fait de ne pas informer une partie de la reconsidération n’est pas fatal, d’autant plus que les parties peuvent demander la révision de la décision reconsidérée et ainsi faire valoir ses arguments.
Exclusion des décisions rendues en matière de financement
Le pouvoir de reconsidération de la Commission ne peut être exercé à l’égard des décisions qui sont rendues en vertu du chapitre IX de la LATMP, qui vise le financement.
Pour ces décisions, il faut se référer au Règlement sur le financement.
- Icanda Corporation (1989) inc., C.L.P. 262308-62-0505, 19 septembre 2005, R. L. Beaudoin.
Les décisions en imputation se trouvent au chapitre IX de la LATMP et ne peuvent donc faire l’objet d’une reconsidération au sens de l’article 365 LATMP.
- Schokbeton Québec inc., 2015 QCCLP 6536.
L’alinéa 4 de l’article 365 LATMP ne nécessite aucune interprétation et exclut toutes les décisions en matière de financement. Celles-ci sont plutôt régies par les articles 224 et 225 du Règlement sur le financement.
Voir également :
Roland Boulanger & Cie et Commission de la santé et de la sécurité du travail, C.L.P. 262113-05-0505-2, 8 février 2007, P. Perron, L. Boucher et S. Sénéchal.
C.H. Université de Montréal et CSST – Montérégie, 2011 QCCLP 2660.
Ambulances Saint-Hyacinthe, 2021 QCTAT 993.
Effet de la décision en reconsidération
Lorsque le Tribunal considère que la reconsidération n'était pas justifiée, la décision rendue en reconsidération est annulée et la décision initiale est rétablie.
- Gicleurs de la Mauricie inc. et Pontbriand, 2018 QCTAT 2006.
La décision en reconsidération doit être annulée compte tenu qu’elle ne respecte pas les exigences de l’article 365 LATMP. La décision initiale est alors rétablie.
- Mongeau et Atelier spécialisé Les Moulins, 2019 QCTAT 1306.
Le Tribunal doit toujours vérifier la validité d’une reconsidération. Si celle-ci est jugée illégale, notamment si elle ne respecte pas les obligations de l’article 365 LATMP, le Tribunal doit rétablir la décision initiale qui est désormais celle qui sera considérée comme étant valide.
Voir également :
Bardeaux Lajoie inc. et Dumont, 2018 QCTAT 4094.
Lorsque la reconsidération est justifiée, la décision rendue en conséquences a une portée rétroactive et remplace la décision initiale.
- Dion et Emballages Stone Canada inc., C.L.P. 119716-32-9907, 2 février 2000, G. Tardif.
La reconsidération faite par la CSST est légale. Il y a donc lieu de remplacer la décision initiale par la décision en reconsidération. Les droits reconnus dans la décision initiale sont alors modifiés selon cette dernière.
- Carpentier et M. Cossette Excavation, 2012 QCCLP 273.
Puisqu’elle remplace la décision initiale, la décision en reconsidération intègre tous les éléments faisant partie de celle-ci, même ceux n’étant pas visés par la demande en reconsidération. Il est alors possible pour le travailleur de contester la nouvelle décision sur un point qui n’était pas visé par la demande en reconsidération.
- Viandes Surfine inc. et Lamothe, 2013 QCCLP 3295.
Puisque la décision en reconsidération remplace la décision initiale et que les droits reconnus dans cette dernière sont modifiés, il est essentiel que celle-ci ait une portée rétroactive afin de refléter les conséquences du fait essentiel.
- Lavoie et Béton Barrette inc., 2015 QCCLP 5217.
La décision initiale, puisqu’elle est remplacée, cesse d’avoir effet. La décision en reconsidération devient alors celle applicable dans le dossier.
- Mehrandish et Alison Pharma Manufacturing Inc., 2018 QCTAT 5841.
Puisque les droits reconnus dans la décision d’admissibilité initiale sont annulés par la reconsidération, toutes les décisions qui ont été rendues subséquemment par la Commission deviennent sans effet.
Suivi:
Révision rejetée, 2020 QCTAT 3366.
- Dumont et Institut universitaire en santé mentale de Québec, 2019 QCTAT 3939.
Les articles 361, 363 et 364 LATMP s’appliquent à la décision en reconsidération puisque celle-ci a une portée rétroactive. En l’espèce, la décision en reconsidération remet en cause les éléments qui constituent la lésion professionnelle. Ainsi, toutes les décisions rendues par la suite qui avait un lien avec cette lésion sont sans effet.
Voir également :
Roland Couture & Fils inc. et Mathieu, 2011 QCCLP 603.
Commission scolaire Marie-Victorin et Zambrano Cuenca, 2016 QCTAT 1790.
Paré et Construction Unibec inc., 2020 QCTAT 2048.
Dans certaines affaires, le Tribunal a considéré que la décision rendue à la suite d’une reconsidération ne remplaçait pas la décision initiale, puisque la correction, souvent une erreur matérielle, n’affectait pas le dispositif.
- Vincent et Bombardier inc. centre de finition, 2017 QCTAT 1412.
L’employeur soutient que l’admissibilité de la lésion professionnelle n’était pas visée par la décision en reconsidération du 27 octobre 2014, qui visait uniquement à corriger une erreur sur la date de l’événement, et que la décision du 3 octobre 2014 est toujours valide concernant ce sujet. Le travailleur ne peut donc pas contester l’admissibilité de la lésion, la décision du 3 octobre 2014 étant devenue finale après un désistement. Le Tribunal confirme cette position. En effet, la Commission n’a fait que corriger une erreur matérielle dans la décision initiale, ce qui n’a pas pour effet de faire revivre les droits du travailleur. La décision initiale est seulement remplacée partiellement sur l’aspect de la date de l’événement, ce qui fait que la contestation du travailleur sur l’admissibilité de la lésion est sans objet.
- Irakoze et Corporation des franchises Redberry, 2018 QCTAT 5971.
La « décision » en reconsidération qui visait à corriger une erreur d’écriture concernant un examen médical qui n’avait pas eu lieu n’est pas une nouvelle décision, mais plutôt la décision initiale à laquelle un motif a été corrigé. Puisque le dispositif de la décision n’a pas été modifié, la « décision » en reconsidération ne constitue pas une nouvelle décision.
Voir également :
Leclerc et Sylvain Nadeau Toiture inc., 2021 QCTAT 4994.