Interprétation

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. 9 par. 1. Rejeter sommairement ou assujettir à certaines conditions

Rejet sommaire

Recours exceptionnel

Puisqu’une décision du Tribunal accueillant une requête en rejet sommaire prive une partie de son droit d’être entendu, le pouvoir du Tribunal ne doit être exercé que de façon exceptionnelle.

Leclerc et St-Constant (Ville de),C.L.P. 104889-62C-9808, 15 septembre 1999, M. Denis.

L'obligation légale d'un tribunal administratif est de respecter le droit des parties à une représentation pleine et entière et faire respecter les principes de justice naturelle dont la règle audi alteram partem. Les dispositions de l'article 429.27 LATMP constituent donc une mesure exceptionnelle et doivent être interprétées avec beaucoup de réserve.

 

Renzetti et Frigoviande,2011 QCCLP 5327.

Le recours abusif ou dilatoire est une mesure exceptionnelle au droit d'être entendu, lequel est conféré en vertu des principes de justice naturelle. Les critères devant être démontrés afin qu'une requête soit déclarée abusive ou dilatoire sont les suivants: la requête n'a aucune chance de succès à sa face même; le caractère futile ou dilatoire de la requête est évident; la requête est formulée sans droit et ne vise qu'à retarder le processus judiciaire ou administratif; et la requête n'est pas susceptible d'un débat raisonnable.

 

A.F. et Compagnie A,2020 QCTAT 462.

Le Tribunal ajoute que la prudence est de mise en matière de rejet sommaire. Cette mesure ne doit être accordée que dans des circonstances exceptionnelles et utilisée avec parcimonie, et ce, afin de ne pas contrevenir à la règle de justice naturelle de l’audi alteram partem, soit le droit d’être entendu.

 

Les critères

La jurisprudence a développé plusieurs critères afin de déterminer si un recours doit être rejeté sommairement : (1) à sa face même, le recours n’a aucune chance de succès; (2) le caractère futile ou dilatoire du recours saute aux yeux; (3) le recours n’est pas susceptible d’un débat raisonnable; (4) le recours est fait sans droit apparent et ne vise qu’à retarder le processus administratif ou judiciaire.

Clermont et Fromagerie de Corneville (Agropur),C.L.P. 209391-62B-0305, 19 mars 2004, A. Vaillancourt.

Une contestation pourra être rejetée au motif que le recours est abusif ou dilatoire si l'un des quatre critères suivants est démontré: à sa face même, l'appel n'a aucune chance de succès; son caractère futile et dilatoire saute aux yeux; il n'est pas susceptible d'un débat raisonnable; il est fait sans droit apparent et ne vise qu'à retarder le processus administratif ou judiciaire. La CLP doit privilégier une position qui favorise l'exercice de sa compétence plutôt que le contraire.

 

 Voir également :

Canadien Pacifique et Scalia, C.L.P. 327961-71-0709, 9 juillet 2008, J-D. Kushner.

Kolliniatis et Bistro-Bar Toulon (I), 2011 QCCLP 5224.

Lupu et Corps Canadien des Commissionnaires, 2012 QCCLP 3815.

Suivi :

Révision rejetée, 2013 QCCLP 5865.

Lachance et Garage Hermann Bolduc, 2012 QCCLP 4556.

Brunelle et Aréna de Repentigny, 2014 QCCLP 4318.

Suivi:

Révision rejetée sur dossier.

A.F. et Compagnie A, 2020 QCTAT 462.

Popescu et Emploi et Développement social Canada, 2020 QCTAT 2637.

L’examen des motifs allégués au soutien de la requête ne doit pas découler d’un examen de la preuve. Au contraire, un examen sommaire des motifs doit faire valoir la futilité du recours.

Veilleux et Industries Blais inc.,2012 QCCLP 3047.

Selon la jurisprudence, la contestation pourra être rejetée si l'un des quatre critères suivants est respecté: 1) à sa face même, le recours n'a aucune chance de succès; 2) son caractère futile et dilatoire saute aux yeux; 3) il n'est pas susceptible d'un débat raisonnable; et 4) il est fait sans droit apparent et ne vise qu'à retarder le processus administratif ou judiciaire. Au surplus, pour qu'une contestation soit abusive ou dilatoire, il faut qu'un examen sommaire de ses motifs en fasse voir la futilité.

 

Suivi: 

Révision rejetée, 2012 QCCLP 7395.

Lupu et Corps Canadien des Commissionnaires,2012 QCCLP 3815.

Un examen sommaire du recours visé doit suffire à en faire ressortir, de manière manifeste, ses caractéristiques futiles ou dilatoires. La démonstration de celles-ci ne doit pas nécessiter un examen de la preuve.

 

Suivi: 

Révision rejetée, 2013 QCCLP 5865.

Assujettir à certaines conditions toute affaire qu’il juge abusive ou dilatoire

La jurisprudence est partagée quant à la possibilité pour le Tribunal d’émettre une ordonnance pour encadrer les recours futurs d’une partie.

Demandes accordées

Nolan et Services de Gestion Menrose inc.,C.L.P. 260521-71-0504, 29 novembre 2007, G. Robichaud.

Considérant les contestations répétées de la travailleuse concernant les suites de l’accident du travail du 4 mai 1998; Considérant le rejet unanime de la CSST et du Tribunal concernant ces contestations; Considérant que les différentes contestations de la travailleuse, toujours vouées à l’échec, occupent la place d’autres contestations de travailleurs qui doivent inutilement sauter leur tour en attendant; Considérant que les multiples contestations de la travailleuse sur des litiges déjà réglés, constituent un gaspillage de temps, d’énergie et d’argent, autant pour le Tribunal que la partie qui doit faire valoir son opposition et présenter une « défense »; Considérant que les agissements de la travailleuse sont assimilables à de l’abus de procédure; Considérant, cependant, le souci du Tribunal de ne pas empêcher tout recours qui pourrait, à sa face même, apparaître fondé; Ordonne à Madame Nolan de ne pas introduire de nouveaux recours concernant les suites de l’accident du travail du 4 mai 1998, à moins d’avoir obtenu au préalable, l’autorisation écrite du président (présidente) de la CLP ou d’un commissaire désigné par lui (elle).

 

Bell Solutions techniques inc. et Jean Charles,2016 QCTAT 5587.

Le Tribunal conclut qu’il possède les pouvoirs nécessaires pour encadrer les droits du travailleur, notamment en ce qui a trait à la gestion d’éventuels actes introductifs ou de tout autre recours qui pourrait être déposé par ce dernier au greffe du Tribunal. Encore une fois, il ne s’agit pas d’empêcher le travailleur de contester une décision émanant de la Commission. Il s’agit d’un encadrement visant à s’assurer que les éventuelles contestations reposeront sur un minimum de preuve et non simplement d’allégations ou que ces contestations ne seront pas, non plus, futiles ou dilatoires. Ainsi, dorénavant, le travailleur devra obtenir l'autorisation écrite du président du Tribunal ou d'un juge administratif désigné par lui, et ce, avant de déposer au greffe un nouvel acte introductif à l’égard de toute décision de la Commission ou tout autre acte de procédure.

 

 Demandes refusées

Kolliniatis et Bistro-Bar Toulon (I),2011 QCCLP 5224.

La CSST dépose à l’appui de sa demande d’ordonnance une décision dans laquelle l’employeur demande l’émission d’une ordonnance interdisant à la travailleuse d’introduire de nouveaux recours à la CSST et à la CLP, eu égard à un accident du travail du 4 mai 1988. Dans le cadre du présent dossier, la CSST demande l’émission du même type d’ordonnance. Le Tribunal estime que malgré les nombreux recours exercés par le travailleur, sans succès, en contestation du même sujet, et malgré la qualification du présent recours comme étant abusif et dilatoire, les circonstances du présent dossier, pour lequel aucune déclaration de quérulence n’a été émise par la Cour supérieure, ne permettent pas à la CLP d’émettre l’ordonnance demandée par la CSST.

 

Péloquin et Peloverre inc. (F),2019 QCTAT 5304.

Quand il s’agit de déclarer un justiciable quérulent et/ou de restreindre son droit à exercer dans le futur un nouveau recours, par l’imposition de mesures telles que l’obtention préalable d’une autorisation émanant de la présidente du Tribunal – comme le réclame la Commission dans le présent cas – la situation est toute autre. En effet, contrairement à la Cour supérieure, le Tribunal ne possède aucun pouvoir inhérent de contrôle et de surveillance. Le Tribunal est dit « statutaire » et ne dispose que des seuls pouvoirs que sa loi constitutive lui octroie aux fins d’exercer sa compétence exclusive. Si la Commission estime vraiment que le travailleur fait preuve de quérulence et qu’il importe, pour assurer une saine administration de la justice et pour préserver les ressources disponibles, de limiter ou encadrer l’exercice futur de ses droits, alors il y a lieu pour elle d’adresser sa demande au bon forum – en l’occurrence la Cour supérieure. Car, le Tribunal n’a pas le pouvoir d’accéder à pareille demande.