Interprétation

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. 22. Preuve

Confidentialité

L’objectif de l’article 22 de la LITAT est d’assurer la pérennité et l’efficacité du régime de conciliation. En effet, si les parties craignent que leurs confidences soient divulguées ou servent en preuve contre elles sur le fond du litige, la conciliation sera vouée à l’échec.

Blanchette et Entreprises Becker inc. (faillite), C.L.P. 157818-62-0103, 12 décembre 2001, R. L. Beaudoin.

Dans un premier temps, il convient de disposer de l’objection de la Commission à l’introduction en preuve de conversations tenues dans le cadre d’une tentative de règlement ainsi que d’un projet d’entente préparé par une conciliatrice. La Loi, dont les dispositions sont d’ordre public, interdit formellement cette façon de faire à moins que les parties n’y consentent. Il n’est pas nécessaire de disserter longuement pour démontrer la nécessité d’une telle discrétion. Lorsque des parties tiennent des discussions, l’objectif en est un de règlement. Une partie peut être encline à faire des concessions pour des motifs qui lui sont propres. Ces concessions ne peuvent être considérées comme des admissions. Il en va de la négociation de bonne foi entre les parties dans un processus de règlement, processus qui mérite considération et protection. Ne pas offrir cette protection mettrait un terme à la conciliation. Ce n’est certainement pas un résultat souhaitable. La CLP exclut du dossier le projet d’entente entre les parties et ne tiendra compte d’aucune façon des arguments tirés par le représentant du travailleur d’informations acquises dans un processus de négociation.

 

Suivi :
Révision rejetée, 13 mars 2002.

Requête en révision judiciaire rejetée, C.S. Montréal, 500-05-072797-028, 02-09-16, j. Downs.

Appel rejeté, 2005 QCCA 202.

Montreuil et Réseau de transport de la Capitale, C.L.P. 311670-03B-0703, 21 avril 2008, J.-F. Clément.

Lorsque des parties tiennent des discussions, l’objectif est de parvenir à un règlement. Une partie peut être encline à faire des concessions pour des motifs qui lui sont propres. Ces concessions ne peuvent être considérées comme des admissions ni être divulguées ultérieurement. Il en va de la sauvegarde de la possibilité pour les parties de procéder à des négociations de bonne foi dans le cadre d’un processus de règlement qui mérite considération et protection.

 

Meilleur et Genest, 2013 QCCLP 4856.

Cet article sert à encadrer la confidentialité du processus de façon à ce que les parties ne puissent se voir opposer, en cas d’échec des pourparlers, ce qui a été dit ou écrit lors des échanges visant à régler un dossier, échanges qui n’avaient que pour objectif de régler le dossier à l’amiable. Les parties n’ont donc pas à craindre que cette preuve se retourne contre elles.

 

Suivi :
Révision rejetée, 2014 QCCLP 4359.

Produits intégrés Avior inc. et Girard, 2017 QCTAT 5430.

L’objectif de l’article 22 de la LITAT est d’assurer la pérennité et l’efficacité du régime de conciliation. Si les parties craignent que leurs confidences soient divulguées ou servent en preuve contre elles sur le fond du litige, la conciliation sera vouée à l’échec.

 

Consentement

Le principe de confidentialité ne couvre pas la preuve de l’existence d’une entente, de son contenu ou de la qualité du consentement donné par les parties.

Entretien Paramex inc. et Girard, [1999] C.L.P. 463.

La Loi est silencieuse quant à la question de savoir si le principe de confidentialité s'étend à la preuve de l'existence même d'une entente, de son contenu ou de la qualité du consentement donné par les parties à l'entente. Il paraît a priori contraire à la justice élémentaire de refuser d’admettre la preuve d’un vice de consentement portant atteinte à la validité même d’un accord pour le seul motif que le processus de conciliation ayant précédé la conclusion de cet accord est confidentiel. Rien ne permet de conclure que le législateur a voulu pareil résultat. 

 

Suivi:

Révision irrecevable.  

Sévigny et Centre de santé et de services sociaux de Laval, [2006] C.L.P. 54.

Le Tribunal a refusé de recevoir en preuve le projet d’entente discuté entre les parties. Le représentant de la travailleuse prétend qu’il n’y a pas eu comme telle de séance de conciliation. Peu importe si les discussions ont eu lieu dans le cadre d’une rencontre ou par téléphone, elles demeurent protégées. D’ailleurs, l’article 429.45 de la Loi codifie une règle de preuve déjà existante selon laquelle les communications faites dans le but de régler un litige sont privilégiées et ne peuvent être invoquées contre les parties. Le fondement de cette règle est fort simple. Peu de personnes seraient tentées d'entreprendre des démarches en conciliation si tout ce qui peut être associé à ces démarches pouvait être invoqué contre elles ultérieurement. Il est d'intérêt général que les gens tentent de régler à l'amiable leurs différends et les différentes pratiques de conciliation connaissent un essor considérable devant différents tribunaux.

 

Services ménagers Roy ltée et Miville, 2013 QCCLP 4144.

Au soutien de sa requête en révision ou révocation, le travailleur soumet que le premier juge administratif n’aurait pas dû entendre le témoignage de son ancien représentant, puisque les discussions intervenues en conciliation sont confidentielles. Cet argument n’est pas retenu. D’abord, aucune des parties ne s’est objectée à ce témoignage, laissant ainsi présumer qu’elles y ont consenti. Par ailleurs, son témoignage a été requis pour démontrer l’existence d’une entente réglant le litige entre les parties. Or, le principe de confidentialité ne couvre pas la preuve de l’existence d’une entente réglant un litige existant entre les parties.

 

Technologies D-Box inc. et Desjardins, 2014 QCCLP 4197.

Bien que les discussions et les écrits échangés dans le cadre d’une séance de conciliation soient irrecevables en preuve, la CLP reconnaît que la preuve des circonstances entourant l’expression du consentement d’une partie à un accord est admissible en preuve.

 

Côté et AbitibiBowater Scierie La Tuque, 2015 QCCLP 3933.

La preuve testimoniale soumise par le travailleur à l’audience initiale visait à mettre en preuve l’existence d’un accord. Or, le principe de confidentialité ne couvre pas la preuve de l’existence d’une entente réglant un litige entre les parties.

 

GSF Canada inc. et Salsavilca, 2017 QCTAT 3178.

Cette obligation de confidentialité n’est pas absolue et le Tribunal peut permettre la divulgation de l’information lorsque celle-ci est nécessaire et pertinente.

 

Confidentialité des échanges

La confidentialité des échanges en conciliation prévaut, sauf si les parties y consentent ou y renoncent. 

St-Martin et Sivaco Québec, C.L.P. 366422-62A-0901, 4 mars 2010, E. Malo.

Le Tribunal retient que la confidentialité des échanges tenus lors d’une séance de conciliation est une question d’ordre public devant primer sur l’intérêt privé. L’article 429.45 de la Loi empêche donc la CLP de recevoir en preuve ce qui a été dit ou écrit au cours d’une séance de conciliation, à moins que les parties n’y consentent. Or en l’espèce, toutes les parties n’ont pas offert un tel consentement. 

 

Boivin et CPE Goélette enchantée, 2016 QCTAT 1537.

La Commission invoque la confidentialité des échanges intervenus lors de la conciliation pour s’opposer au témoignage des deux procureurs qui y ont participé.  La travailleuse précise que l’objectif du témoignage des deux avocates est de confirmer l’intention des parties et d’expliquer le rôle joué par le conciliateur. À l’audience, les deux parties ont expressément renoncé à la confidentialité des échanges intervenus dans le cadre de la conciliation. Le Tribunal rejette donc l’objection formulée par la Commission à l’encontre de l’admissibilité de ces témoignages puisque la confidentialité des échanges survenus en conciliation prévaut, à moins de renonciation à celle ci, comme le prévoit l’article 22 de la LITAT.

 

Voir également :

Ninoles et Delom Services inc., 2020 QCTAT 3531.