Notion de raison valable en assignation temporaire
La jurisprudence retient que les motifs suivants constituent une raison valable justifiant que le travailleur n'effectue pas l'assignation temporaire :
- une mise à pied ou un congédiement
- une grève ou un lock-out
- une contestation de l'assignation temporaire selon l'article 37 LSST
Voir :
Article 179, rubrique Interprétation - sous le titre Droit à l'IRR.
Démission/retraite
Bien que la démission et la retraite d'un travailleur mettent fin au lien d'emploi avec son employeur, la jurisprudence retient qu'il ne s'agit pas d'un motif de suspension du droit à l'IRR.
Cependant, quelques décideurs considèrent que la démission d'un travailleur permet la suspension de l'IRR, si la preuve démontre que ce dernier, sans raison valable, a omis ou refusé de faire le travail que l'employeur lui avait assigné temporairement.
- Laplante et Lauzon Planchers de bois exclusifs, C.L.P. 327977-07-0709, 18 février 2009, P. Sincennes.
Le Tribunal retient qu'autant la démission que la retraite sont des mesures extrêmes et, en principe, définitives que prend le travailleur. Il ne s'agit pas là de situations assimilables à celles édictées par le législateur à l'article 142 et on n'a pas à se demander si, par sa démission, le travailleur omet ou refuse d'accomplir un travail chez l'employeur. La démission entraîne une fin d'entente contractuelle, soit la rupture d'un lien d'emploi. Le droit à une IRR est relié à la survenance d'une lésion professionnelle et la démission d'un travailleur ne constitue pas l'une des raisons d'extinction de ce droit spécifiquement prévues à l'article 57. Les dispositions de l'article 142 doivent être interprétées restrictivement, car il s'agit de mesures de nature punitive et d'exception eu égard à l'esprit général de la loi.
- Bar-Salon Venus et Ross, C.L.P. 407674-04-1004, 22 décembre 2010, J. A. Tremblay.
Dans l'affaire Laplante et Lauzon Planchers de bois exclusifs, la CLP a conclu que le fait de démissionner ne met fin qu'au lien d'emploi, qu'il n'a pas d'incidence sur le droit à l'IRR et que la CSST ne pouvait donc pas appliquer l'article 142 pour suspendre l'IRR. Le présent tribunal est d'accord avec ce raisonnement. En outre, l'interprétation contraire notamment énoncée dans Provigo Distribution inc. et Elpenord, est beaucoup trop restrictive et confère à l'article 142 un effet définitif. Le tribunal ne retient pas non plus la prétention selon laquelle la démission n'est pas un geste irréversible. Au contraire, la démission est, de par sa nature, une situation permanente et non temporaire.
- Chalifoux et C.D.C.U., 2012 QCCLP 902.
La jurisprudence est divisée sur la question de savoir si un travailleur a droit au versement de l'IRR lorsque, en raison de sa démission, il ne peut plus effectuer le travail que l'employeur lui avait assigné temporairement. Le tribunal souscrit à l'interprétation retenue dans l'affaire Laplante et Lauzon Planchers de bois exclusifs qui précise que le fait de démissionner met fin au lien d'emploi avec l'employeur, mais n'a pas d'incidence sur le droit pour le travailleur de continuer à recevoir l'IRR. La CSST ne peut donc pas, dès lors, appliquer l'article 142 en réponse à une telle situation reliée à l'assignation à un travail temporaire.
Voir également :
Acier AGF inc. et Major, 2013 QCCLP 2406.
Pronovost et Tim Hortons (9276-4588 Québec inc.), 2016 QCTAT 3826.
Villa Bel Époque et Grenier, 2016 QCTAT 5732.
Voir cependant :
- Provigo Distribution inc. et Elpenord, C.L.P. 289299-71-0605, 31 mai 2007, M. Zigby.
Le Tribunal conclut qu'en remettant volontairement sa démission, le travailleur rompt son lien d'emploi avec l'employeur et l'assignation temporaire ne peut avoir lieu. Cela équivaut donc à un refus du travailleur d'exécuter le travail auquel il avait été assigné temporairement et justifie la suspension de l'IRR.
Signalisation Routière Québec inc. et Poulin, 2011 QCCLP 2820.