Interprétation

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. 189. L'assistance médicale consiste en ce qui suit

Distinction entre services du professionnel de la santé et les soins et traitements fournis par un établissement de santé

Decoste et Gestion Cristofaro ltée, 2017 QCTAT 2355.

Les services du professionnel de la santé et les soins et traitements fournis par un établissement constituent des éléments constitutifs distincts de l’assistance médicale tel qu'énoncé aux paragraphes 1 et 2 de l'article 189. Cette distinction se traduit également par les modalités prévues à la loi en ce qui concerne l’acquittement par la Commission des frais associés à ces éléments constitutifs de l’assistance médicale. En effet, l’article 195 traite des modalités d’acquittement des frais reliés aux soins et traitements fournis par les établissements visés au deuxième paragraphe de l’article 189 alors que l'article 196 vise les services rendus par les professionnels de la santé au premier paragraphe de l'article 189.  

Énumération exhaustive

La jurisprudence considère que l'énumération des mesures d'assistance médicale prévues à cet article ainsi qu'au Règlement sur l'assistance médicale est exhaustive.  

Presseault et Tembec inc.,C.L.P. 163781-08-0106, 30 décembre 2003, M. Beaudoin (décision accueillant la révision).

Depuis la modification en 1992  de l'article 189,  la jurisprudence considère qu’en précisant que l’assistance médicale « consiste en ce qui suit », le législateur a voulu limiter les prestations d’assistance médicale qui peuvent être accordées à un travailleur en raison de sa lésion professionnelle. Ainsi, en vertu des articles 188 et 189, deux conditions doivent être satisfaites afin qu'un travailleur ait droit à l’assistance médicale. La première étant qu’il ait été victime d’une lésion professionnelle et la seconde voulant qu'il ait droit à l’assistance médicale requise par son état dans la mesure prévue à l’article 189 et par les dispositions du règlement auxquelles le paragraphe 5 de l’article 189 renvoie.

Trudel  et C.S. de l'Estuaire,C.L.P. 224977-09-0401, 25 août 2004, J.-F. Clément.

Les soins de massothérapie ne sont pas prévus au Règlement sur l’assistance médicale, ce qui est fatal eu égard aux prétentions de la travailleuse. En effet, le législateur a choisi, en édictant les quatre premiers paragraphes de l’article 189, de déterminer certaines composantes de l’assistance médicale. Celles-ci n’incluent pas les frais encourus dans le cadre de traitements de massothérapie. Quant au cinquième paragraphe, le législateur prévoit spécifiquement qu’il revient à la CSST de déterminer par règlement les soins, traitements, aides techniques et frais additionnels qui peuvent être remboursés. Or, le règlement ne prévoit aucunement que les soins de massothérapie peuvent être remboursés à un travailleur. Ce règlement ne contredit pas la LATMP et son esprit en ne prévoyant pas le remboursement de tels frais. En effet, il applique plutôt les dispositions du cinquième paragraphe de l’article 189 qui prévoit qu’il revient à la CSST de déterminer par règlement quels soins ou traitements sont remboursables. La CSST a choisi de ne pas prévoir les frais de massothérapie au Règlement et c’était son droit légitime. Si le législateur n’est pas satisfait de ce choix, il doit intervenir lui-même, ce que le tribunal ne peut faire à sa place. 

S... C... et Compagnie A,C.L.P. 244581-63-0409, 7 juin 2006, J.-P. Arsenault.

L'article 189, contrairement aux articles 149 et 152, ne comprend pas l'expression « notamment » de sorte que l'énumération qu'il comporte, de même que celle comprise au Règlement sur l'assistance médicale, sont exhaustives, ce qui empêche de réclamer au-delà de ce que ces dispositions prévoient.

Abesque et Sport Sm inc.,C.L.P. 379184-31-0905, 30 novembre 2009, M. Beaudoin.

L’article 189 limite les prestations d’assistance médicale qui peuvent être accordées à un travailleur en raison de la lésion professionnelle. Ainsi, ce ne sont que celles prévues à cette disposition qui sont comprises dans l’assistance médicale.

Ferra et Tbc Constructions inc.,2011 QCCLP 1231.  

L'article 189 prévoit que l'assistance médicale « consiste » en ce qui est énuméré aux cinq paragraphes de cet article. Il s'agit donc d'une énumération limitative. Cet article a déjà débuté par la phrase « l'assistance médicale comprend », ce qui permettait de prétendre au caractère indicatif et incomplet de ses dispositions, ce qui n'est plus le cas. En effet, en modifiant l'article 189, le législateur a voulu limiter les prestations d'assistance médicale qui peuvent être accordées à un travailleur en raison de sa lésion professionnelle. Il a choisi de baliser les droits des travailleurs en matière d'assistance médicale, tout comme il a limité ou réduit d'autres indemnités prévues dans la loi. Ainsi, malgré le principe émis à l'article 1, celle-ci comporte une disposition claire et précise autorisant l'adoption d'un règlement qui limite les montants pouvant être remboursés à un travailleur. Il faut respecter cette intention du législateur. Il n'appartient pas à la CLP de réglementer ou de modifier un règlement, ce pouvoir appartenant à la CSST.

Grégoire et Bridgestone Firestone Canada inc., 2015 QCCLP 3097.

La facture de 5 125 $ pour un «  forfait santé » que la travailleuse a payé à une clinique privée ne peut lui être remboursée car les services regroupés dans ce forfait ne sont pas des services assurés en vertu des dispositions de la Loi sur l'assurance maladie  et ils ne constituent pas une prestation d'assistance médicale prévue par les dispositions de l'article 189 ou encore par celles du Règlement sur l'assistance médicale. 

Hébert et Commission scolaire des Hautes-Rivières, C.L.P. 250448-62A-0412, 7 avril 2005, J. Landry.

Ouellet et Société des alcools du Québec, C.L.P. 393691-01A-0911,15 septembre 2010, N. Michaud.

Ferron et S. P. B. Canada inc., 2013 QCCLP 1552.

 Voir cependant : 

Savoie et Produits forestiers Saucier,C.L.P. 374463-08-0904, 3 septembre 2009, F. Daigneault.

Les traitements de massothérapie prescrits par le médecin qui a charge sont directement reliés aux lésions que le travailleur a subies. En vertu de l'article 188, le travailleur a droit à cette assistance médicale et au remboursement des coûts déjà encourus pour recevoir les traitements. Ceux-ci lui procurent un soulagement de ses symptômes au point qu'ils ont permis la diminution de la consommation de médicaments. De plus, la CSST aurait pu, en vertu de l'article 184, par. 5, autoriser les traitements de massothérapie. 

Lepage et CSSS Rouyn-Noranda,2011 QCCLP 4090.

Les soins prescrits par le médecin qui a charge, soit des exercices de conditionnement dans un centre de thérapie sportive, sont en relation avec la lésion professionnelle du travailleur et ont pour but d'améliorer sa condition. Ils remplissent ainsi les exigences énoncées à l'article 188. De plus, ils n'ont pas fait l'objet de contestation en vertu du processus d'évaluation médicale, de sorte que l'opinion du médecin qui a charge lie la CSST et la CLP.  L'argument de l'employeur, selon lequel les traitements doivent être prévus au Règlement sur l'assistance médicale, n'est pas retenu. Le Règlement ne peut prévoir tous les types de soins et traitements possibles et ne peut atténuer la portée de l'article 188. Il ne fait qu'encadrer les modalités de paiement pour certaines catégories de soins et traitements. Le travailleur a donc droit au remboursement des frais engagés dans un centre de thérapie sportive. 

Suivi :

Révision rejetée, 2012 QCCLP 1132. 

Révision rejetée, 2012 QCCLP 6444.

Pour les soins, traitements et aides techniques qui ne sont pas prévus à l’article 189 ou au Règlement sur l’assistance médicale, la jurisprudence établit qu’il y a lieu de se référer aux dispositions concernant la réadaptation pour déterminer si la demande de remboursement de ces frais peut être accordée.  

Voir :

Article 148 et suivants -  sous le titre But de la réadaptation physique

Article 15 et suivants - sous le titre But de la réadaptation sociale.

Article 184, par. 5 - sous le titre Pouvoirs de la Commission.

Article 188, rubrique Interprétation - sous le titre Droit à l'assistance médicale

Remboursement du coût de production d'un certificat médical

Grenier et Manac inc.,[2004] C.L.P. 1092.

Le travailleur a droit au remboursement des frais de 10 $ exigés par le médecin qui a charge pour remplir le certificat attestant qu'il avait besoin d'un accompagnateur, et ce, en vertu des articles 188, 189 et 194. Comme la CSST exige un tel certificat médical, le travailleur n'avait d'autre choix que de retenir les services d'un professionnel de la santé, ce qui constitue de l'assistance médicale dont les frais doivent être assumés par la CSST.

Remboursement des frais d'hospitalisation

Hervé Doyle (succession) et Atlas Asbestos Co. Ltée,C.L.P. 213785-63-0308, 18 juillet 2005, J.-P. Arsenault.

La succession du travailleur ne peut réclamer à la CSST le coût du tarif quotidien de l’hospitalisation du travailleur, lequel a été hospitalisé à plusieurs reprises pour de multiples problèmes de santé, y compris des problèmes pulmonaires reliés à sa lésion professionnelle. Ce coût est couvert soit par le régime québécois d’assurance-hospitalisation, en vertu de la Loi sur l’assurance-hospitalisation, soit par la LATMP, lorsque la personne hospitalisée est une personne victime d'une lésion professionnelle. Par ailleurs, le supplément quotidien chargé pour une chambre semi-privée ne peut être remboursé à la succession, puisque l'hospitalisation du travailleur en chambre semi-privée n’a été ni prescrite par son médecin ni ordonnée par la CSST, comme sa politique lui permettait de le faire.

Remboursement des coûts liés à la marihuana

Corbeil et Wilfrid Nadeau inc., [2002] C.L.P. 789.

Pour décider si le travailleur a droit au remboursement des coûts relatifs à l'acquisition du matériel pour la production de plants de marihuana, la CLP doit nécessairement tenir compte du fait qu’il est impossible dans le contexte légal actuel, autrement que par la culture, de se procurer cette substance. Du moins, il n'existe pas de centre de distribution accessible pour un individu demeurant en région. Il faut donc ne pas s’en tenir à une interprétation restrictive de l’article 189 et permettre d’inclure, aux fins de la reconnaissance de l’assistance médicale et de son accès, le remboursement des coûts relatifs à la culture de marihuana comme s’il s’agissait du coût d’achat du produit fini directement à un centre reconnu. Agir autrement rendrait inapplicable la décision de la CLP à l'effet de reconnaître que le travailleur a droit au remboursement des coûts pour l'achat de marihuana à titre de médicament compris dans l’assistance médicale, et ce, afin de soulager les douleurs chroniques reliées à sa lésion professionnelle. Cela rendrait aussi légalement inapplicable le droit consenti par Santé Canada à la consommation de la marihuana à des fins médicales pour un travailleur accidenté du travail, alors que l'assistance médicale est à la charge de la CSST.

Suivi : 

Révision rejetée, C.L.P. 183805-03B-0205, 20 février 2004. C. Bérubé. 

Requête en révision judiciaire rejetée, [2004] C.L.P. 1251 (C.S.).

Requête pour permission d'appeler rejetée, C.A. Québec, 200-09-005022-048, 21 décembre 2004, j. Rousseau-Houle. 

Dépendance aux narcotiques

Degaris et Bétonnière Modernes, [2006] C.L.P. 1468.

Le traitement en vue d’un sevrage est en relation directe avec la lésion professionnelle du travailleur, et à ce titre, il a droit aux soins que requiert son état en application des articles 188 et 189. Le travailleur, en développant une telle dépendance aux narcotiques, lesquels furent prescrits au cours de sa lésion professionnelle, n’a pas à subir les conséquences de cette situation du seul fait que la lésion professionnelle est consolidée juridiquement à une certaine date, alors que ses médecins poursuivent l'administration de ce type de composés, qu’il consomme en vue du soulagement des douleurs découlant de sa lésion professionnelle, même si un plateau thérapeutique était atteint.